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10/06/2024 | FRANCE | N°23/01240

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 6/section 4, 10 juin 2024, 23/01240


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY



JUGEMENT CONTENTIEUX DU 10 JUIN 2024


Chambre 6/Section 4
AFFAIRE: N° RG 23/01240 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XJSG
N° de MINUTE : 24/00328


S.A.S. MED METAL IDF
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me [C], avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0161

DEMANDEUR

C/

S.C.I. [Adresse 6]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Laurent HEYTE de la SELEURL HEYTE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0348

DEFENDEUR


COMPOSITION DU T

RIBUNAL

Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 ...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 10 JUIN 2024

Chambre 6/Section 4
AFFAIRE: N° RG 23/01240 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XJSG
N° de MINUTE : 24/00328

S.A.S. MED METAL IDF
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me [C], avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0161

DEMANDEUR

C/

S.C.I. [Adresse 6]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Laurent HEYTE de la SELEURL HEYTE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0348

DEFENDEUR

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Maud THOBOR, greffier.

DÉBATS

Audience publique du 4 Avril 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 10 Juin 2024..

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN,Vice-Président, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.
EXPOSE DU LITIGE

Suivant marché du 8 juillet 2016, la SCI [Adresse 6] a confié à la SAS Med Métal IDF le lot de travaux « Serrurerie » pour les besoins de la construction d’un ensemble immobilier de 205 logements répartis sur 8 bâtiments sis [Adresse 7] à [Localité 5], moyennant le prix global et forfaitaire de 565.000 euros HT.

Le 30 juin 2018, la SAS Med Métal IDF a adressé au maître d’ouvrage une situation de travaux numéro 9, pour paiement de la somme de 60.217,56 euros TTC, ramené, le 1er août 2018, en accord avec la SCI [Adresse 6], à 58.591,69 euros.

C’est dans ce contexte que, par acte d’huissier signifié le 8 juin 2021, la SAS Med Métal IDF a fait assigner la SCI [Adresse 6] devant le tribunal de commerce de Lille, lequel s’est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Bobigny par jugement du 5 avril 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 octobre 2023, la SAS Med Métal IDF sollicite, outre le rejet des prétentions adverses, la condamnation, avec exécution provisoire, de la SCI [Adresse 6] :
à lui payer la somme de 58.591,69 euros en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2021 ; à lui payer la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ; aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, elle soutient que le solde à valoir sur les travaux réalisés doit lui être réglé, conformément à la situation de travaux numéro 9 ayant reçu un « bon pour accord » de la défenderesse, à l’instar de l’ensemble des situations, qui ont toutes été acceptées, sans réserve ; que les pénalités provisoires appliquées sur la situation numéro 5 ont été restituées sur la situation numéro 7, ce qui démontre que le retard un temps allégué n’était pas justifié et que les travaux réalisés étaient satisfaisants ; que les demandes reconventionnelles ne sont qu’un contre-feu et doivent être rejetées ; que la résistance de la défenderesse est abusive.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 29 novembre 2023, la SCI [Localité 5] Les Réservoirs Boulevard de la Boissière demande au tribunal de rejeter les prétentions adverses, d’écarter l’exécution provisoire, et de dire que les éventuelles condamnations prononcées à son encontre feront l’objet d’une consignation auprès de la CARPA de Paris en cas d’appel ; reconventionnellement, de condamner la SAS Med Métal IDF à lui payer la somme de 395.140,13 euros avec intérêts à compter de la signification des présentes conclusions et capitalisation de ces intérêts ; accessoirement, de condamner la SAS Med Métal IDF aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du même code.

A l'appui de ses prétentions, elle soutient que la demanderesse a commis divers manquements à ses obligations contractuelles, ayant occasionné des préjudices, dont la réparation excède le solde dû sur le marché de travaux litigieux ; que de nombreuses mises en demeure ont été adressées à la demanderesse pour des retards et malfaçons ; que l’article 25.4 du CCG prévoit une pénalité de retard de 200 euros HT par jour calendaire, soit 208.000 euros en l’espèce ; que l’article 25.1 du CCG prévoit également une pénalité de 300 euros HT par absence aux réunions de chantier, soit 9.300 euros en l’espèce ; que les constats d’huissier et comptes-rendus de chantier communiqués justifient l’avenant de moins-value 5 bis adressé à la demanderesse ; que le compte présenté par la demanderesse ne repose sur aucun DGD intégrant l’ensemble des éléments à prendre en considération (totalité des avenants, pénalités, factures des entreprises intervenues en ses lieu et place, factures d’huissier) ; qu’il est indifférent qu’elle ait, pour les besoins du chantier, payé les premières situations émises par la demanderesse ; qu’en réalité, après imputation des pénalités, frais d’huissier et factures des entreprises de substitution, c’est la demanderesse qui est débitrice d’une somme de 395.140,13 euros.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties, il sera renvoyé à la lecture des conclusions précitées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la mise en état a été fixée au 20 décembre 2023 par ordonnance du même jour.

A l'audience du 4 avril 2024, l'affaire a été mise en délibéré au 10 juin 2024, date du présent jugement.

MOTIFS

Sur les demandes principales

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

A défaut d’exécution du contrat, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut notamment, selon l'article 1217 du même code, agir en exécution forcée et/ou réclamer des dommages et intérêts.

Toutefois, l'article 1231-6 du même code précise que les dommages et intérêts dus en raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent ne consistent que dans l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure, et l'éventuel préjudice indépendant de ce retard, qui ne serait pas réparé par les seuls intérêts moratoires, ne peut être indemnisé qu'en cas de mauvaise foi du débiteur.

En l’espèce, la SCI [Adresse 6] ne conteste pas devoir la somme de 58.591,69 euros TTC sur les travaux réalisés par la SAS Med Métal IDF eu égard à leur avancement, conformément à la mention « bon pour accord » qu’elle a apposée sur le document « Avancement de travaux au 01/08/2018 » produit en demande.

Elle se prévaut en revanche de diverses créances contre la société Med Métal IDF, qui viendraient en déduction de ce solde à valoir sur l’avancement des travaux, qu’il convient ainsi d’examiner successivement.

Sur les pénalités de retard sur l’exécution des travaux, l’article 25.4 du CCG – CCG auquel renvoie le CCP et dont l’application au marché litigieux n’est pas discutée ni du reste discutable dès lors qu’est produit un exemplaire visé par la société Med Métal IDF – prévoit des « pénalités pour retard enregistré dans l’exécution de chacune des tâches ou du planning détaillé », qui « sanctionnent tout retard dans la réalisation d’une tâche fixée au planning détaillé, ainsi que l’inobservation ou l’inexécution dans le délai fixé par le Maître d’œuvre des instructions données au rendez-vous de chantier » (article 25.4 du CCG).

Cependant, le planning détaillé, qui, selon le CCP et l’article 10 du CCG, correspond, non au délai global d’exécution des travaux, mais au calendrier détaillé d’exécution établi par le maître d’œuvre, avec accord du maître d’ouvrage, puis notifié à l’entreprise, n’est pas communiqué en l’espèce, de sorte que l’existence d’un retard par rapport à ce planning détaillé n’est pas démontré.

Par ailleurs, alors que les retards allégués portent sur la période novembre 2017-septembre 2018, aucun compte-rendu de rendez-vous de chantier, qui fixeraient des instructions à l’attention de la société Med Métal IDF, n’est communiqué sur la période en cause, le compte-rendu du 25 octobre 2018 étant à ce titre inopérant car postérieur ; et si des courriers du maître d’œuvre d’exécution adressés sur cette période à la société Med Métal IDF sont produits, faisant état d’un certain nombre de tâches à accomplir et de retards accumulés, force est de relever que la demanderesse justifie avoir répondu à ces courriers pour contester les retards qui lui étaient imputés de manière circonstanciée, et que ces réponses ont donné lieu à une suppression des pénalités de retard un temps envisagées (voir les situations 5 et 7), de sorte que le bien-fondé des pénalités à nouveau invoquées, qui ne repose en l’état que sur les affirmations du maître d’œuvre, contestées en demande, est insuffisamment justifié, dans son principe et, en tout cas, dans son quantum.

Ces pénalités seront ainsi écartées.

Sur les pénalités pour absence aux réunions de chantier, l’article 25.1 du CCG prévoit que « L’Entreprise doit assister ou être valablement représentée aux réunions de chantier ordonnées par le Maître d’œuvre. Toute absence sera inscrite dans le compte-rendu de chantier hebdomadaire et pénalisée sous forme d’indemnité fixée forfaitairement à 300 euros HT ».

Cependant, dans la mesure où aucun compte-rendu de chantier n’est communiqué, si ce n’est le numéro 105 du 25 octobre 2018, auquel la société Med Métal IDF n’était toutefois pas convoquée (voir la case D, pour « Diffusion », cochée, et celle C, pour « Convoqué », non cochée), aucune pénalité ne saurait être retenue de ce chef, peu important que le maître d’œuvre d’exécution mentionne des absences de la demanderesse aux réunions de chantier dans ses courriers.

Sur la substitution de la société Med Métal IDF par des tierces entreprises, l’article 29 du CCG permet au maître d’ouvrage, après une vaine mise en demeure de satisfaire à ses obligations dans un délai déterminé, entre trois et dix jours, adressée à l’entreprise par LRAR ou télécopie, de faire exécuter les travaux en cause par tous moyens aux risques et périls de l’entreprise, à laquelle seront imputées les dépenses ainsi engagées.

Au cas particulier, la SCI [Adresse 6] justifie avoir adressé à la société Med Métal IDF deux mises en demeure, les 14 et 17 septembre 2018, d’accomplir un certain nombre de travaux à finir ou reprendre, pour le 19 septembre 2018, sous peine de lui substituer une tierce entreprise pour la réalisation des travaux en cause, à ses frais, suivant devis de l’entreprise MISS pour un montant global de 175.740 euros HT.

La demanderesse, à qui incombe sur ce point la charge de la preuve, ne démontre pas avoir satisfait à cette mise en demeure, ni que celle-ci ne serait pas justifiée, d’autant que la nécessité desdits travaux est corroborée par le constat d’huissier du 20 septembre 2018 produit en défense (opération à laquelle la demanderesse a été convoquée par les mises en demeure en cause), ainsi que par le fait que la situation de travaux la plus récente produite en demande fait état d’un chantier inachevé (avancement à 89,45%).

C’est donc à bon droit que la SCI [Adresse 6] fait valoir, contre la société Med Métal IDF, une créance au titre des travaux confiés à la société MISS en application de la faculté de substitution prévue par le CCG, pour un montant effectif de 130.894 euros HT (soit 157.072,80 euros TTC) suivant factures versées au débat ; les factures des sociétés Koné et DSA seront en revanche écartées, à défaut de lien démontré avec la substitution en cause.

Sur les frais d’huissier, aucun fondement, ni légal ni contractuel, n’est invoqué en défense pour les imputer à la société Med Métal IDF.

La demande sera ainsi écartée.

Au total, il convient de condamner :
la SCI [Adresse 6] à payer à la société Med Métal IDF la somme de 58.591,69 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2021, date de l’assignation, conformément à l’article 1231-6 du code civil ; la société Med Métal IDF à payer à la SCI [Adresse 6] la somme de 157.072,80 TTC avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2023, date de la première demande par conclusions, et capitalisation de ces intérêts au sens de l’article 1343-2 du code civil.
Eu égard à la solution adoptée, la résistance abusive imputée à la SCI [Localité 5] Les Réservoirs Boulevard de la Boissière par la demanderesse n’est pas démontrée ; la demande présentée de ce chef sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En application de l'article 700 du même code, le tribunal condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par principe, le tribunal alloue à ce titre une somme correspondant aux frais réellement engagés, à partir des justificatifs produits par les parties, ou, en l’absence de justificatif, à partir des données objectives du litige (nombre de parties, durée de la procédure, nombre d’écritures échangées, complexité de l’affaire, incidents de mise en état, mesure d’instruction, etc.). Par exception et de manière discrétionnaire, le tribunal peut, considération prise de l’équité ou de la situation économique des parties, allouer une somme moindre, voire dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En l’espèce, eu égard à la solution adoptée, les dépens seront partagés entre les parties et les demandes présentées au titre des frais irrépétibles, rejetées.

Enfin, aucun élément ne justifie d'écarter l'exécution provisoire de droit laquelle est compatible avec la nature de l'affaire au sens de l'article 514-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige, ni d’assortir cette exécution provisoire de droit de garanties.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et rendu en premier ressort,

Condamne la SCI [Adresse 6] à payer à la SAS Med Métal IDF la somme de 58.591,69 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2021 ;

Condamne la SAS Med Métal IDF à payer à la SCI [Adresse 6] la somme de 157.072,80 TTC avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2023 et capitalisation de ces intérêts au sens de l’article 1343-2 du code civil ;

Déboute la SAS Med Métal IDF de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Déboute la SCI [Adresse 6] du surplus de ses demandes ;

Dit que les dépens seront partagés par moitié par les parties, avec bénéfice du droit prévu par les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leur demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit du présent jugement, ni d’assortir cette exécution provisoire de droit de garanties ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La minute est signée par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.

Le greffier,Le president,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 6/section 4
Numéro d'arrêt : 23/01240
Date de la décision : 10/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-10;23.01240 ?
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