La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2024 | FRANCE | N°21/02529

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 5/section 1, 15 mai 2024, 21/02529


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY


JUGEMENT CONTENTIEUX DU 15 MAI 2024


Chambre 5/Section 1
AFFAIRE: N° RG 21/02529 - N° Portalis DB3S-W-B7F-VAJX
N° de MINUTE : 24/00751

DEMANDEUR

S.A. LE [Adresse 4]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Aurélie CATTAN-ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1750

C/

DEFENDEUR

S.A.R.L. [V] [Y]
[Adresse 1]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Maître Séverine VALADE de la SELARL BARBIER ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C0987

<

br>
COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Charlotte THINAT, Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 8...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 15 MAI 2024

Chambre 5/Section 1
AFFAIRE: N° RG 21/02529 - N° Portalis DB3S-W-B7F-VAJX
N° de MINUTE : 24/00751

DEMANDEUR

S.A. LE [Adresse 4]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Aurélie CATTAN-ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1750

C/

DEFENDEUR

S.A.R.L. [V] [Y]
[Adresse 1]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Maître Séverine VALADE de la SELARL BARBIER ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C0987

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Charlotte THINAT, Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assistée aux débats de Madame Zahra AIT, greffier.

DÉBATS

Audience publique du 21 Février 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Madame Charlotte THINAT, Présidente, assistée de Madame Zahra AIT, greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous-seing-privé en date du 27 juillet 1993, Monsieur [P] [S], aux droits duquel viennent Madame [N] [S], Monsieur [L] [S] et Madame [J] [S] en qualité d’ayant droits, Madame [R] [Z] aux droits de laquelle vient d’une part, Madame [U] [Z], et, d’autre part, Monsieur [A] [B], aux droits duquel vient à présent la société REGNER INVEST, ont donné à bail à la société LE [Adresse 4] des locaux sis [Adresse 1] et [Adresse 5] à [Localité 6] (93) et ce, pour une durée de 12 années à compter du 1er juillet 1993, prorogé pour une durée de 3 ans jusqu'au 30 juin 2008 ; contrat qui s’est ensuite poursuivi par tacite reconduction.

Le contrat de bail commercial précité a prévu expressément en son article 7 des conditions générales sur l’autorisation de la sous-location partielle des lieux loués.

Par acte sous-seing-privé du 28 novembre 1993, la société LE [Adresse 4] a consenti à Monsieur [M] [C] une sous-location d’une partie de ces locaux, à savoir une parcelle de terrain et le local qui s’y trouve édifié sous le vocable STAND portant le numéro d’identification 38, [Adresse 3] situé au [Adresse 4], [Adresse 1] à [Localité 6] (93) et ce, pour une durée de 12 années à effet rétroactif du 1er juillet 1993 pour y exercer une activité de brocante, moyennant un loyer annuel de 31.020 francs HT et HC.

Par acte sous-seing-privé en date du 30 avril 2003, Monsieur [M] [C] a cédé son sous-bail du stand n°38 à la société [V] [Y], venue aux droits de Madame [V] [Y].

Par acte extrajudiciaire du 06 novembre 2008, la société LE [Adresse 4] a notifié à ses bailleurs une demande de renouvellement du bail principal à effet du 1er janvier 2009.

Par acte extrajudiciaire du 03 février 2009, les bailleurs ont fait signifier à la société LE [Adresse 4] une réponse à la demande de renouvellement comportant dénégation du droit au statut des baux commerciaux.

Par jugement en date du 02 mai 2012, le tribunal judiciaire de Bobigny a constaté que le bail principal avait pris fin le 1er janvier 2009. La société LE [Adresse 4] ayant droit au paiement d’une indemnité d’éviction, le tribunal a désigné un expert judiciaire avec pour mission de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction ainsi que celui de l’indemnité d’occupation due par la société LE [Adresse 4] à compter du 1er janvier 2009 et jusqu’à libération effective des locaux. Dans l’attente de la fixation et du paiement de l’indemnité d’éviction, la société LE [Adresse 4] a exercé son droit au maintien dans les lieux.

Par exploit d’huissier en date du 04 avril 2014, la société LE [Adresse 4] a signifié à la société [V] [Y] un congé alternatif aux termes duquel elle offrait :
- un congé avec un droit au maintien dans les lieux aux charges, clauses et conditions du sous-bail expiré, incluant un droit d’occupation temporaire, jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction,
- une offre de renouvellement en cas d’exercice du droit de repentir des propriétaires.

Par acte des 25, 29 et 30 mars 2016, la société [V] [Y] a signifié aux propriétaires une demande de renouvellement direct du bail à effet du 1er avril 2016. Les propriétaires n’ont pas répondu à cette demande.

Par acte sous-seing-privé du 25 septembre 2017, la société LE [Adresse 4] et son bailleur ont régularisé un nouveau bail à effet du 1er octobre 2017 comportant droit de repentir au profit de la société LE [Adresse 4].

Par acte extrajudiciaire du 17 juin 2019, la société LE [Adresse 4] a signifié à la société [V] [Y] le renouvellement de son sous-bail pour le stand n°38 à compter du 1er octobre 2017 et ce, pour un loyer annuel HT/HC de 30.750€.

La société LE [Adresse 4] a notifié à la société [V] [Y] un mémoire préalable daté du 30 septembre 2019 et a demandé la fixation du loyer du sous-bail à la somme de 30.750€ annuel à compter du 1er octobre 2017.

Par acte d’huissier en date du 07 septembre 2020, la société LE [Adresse 4] a assigné devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Bobigny la société [V] [Y] aux fins de :

A titre principal,
- Fixer le montant du loyer du contrat de sous-location commercial intitulé Sous-Bail des locaux situés à [Localité 6], [Adresse 2] renouvelé à compter du 1er octobre 2017 à la somme annuelle en principal hors charges et hors taxes de 30.750€ (trente mille sept cent cinquante euros) ;
- Juger que les compléments de loyers arriérés produiront intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2017, conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1344-1 nouveaux du Code civil ;

A titre subsidiaire : dans l’hypothèse où la juridiction s’estimerait insuffisamment éclairée,
- Désigner tel expert qui lui plaira avec la mission de donner son avis sur la valeur locative des lieux loués à la date du renouvellement, soit au 1er octobre 2017 ;
- Fixer le loyer provisionnel à 30.750€ (trente mille sept cent cinquante euros) par an en principal hors charges hors taxes pendant la durée de l’instance ;
- Réserver les dépens ;

En tout état de cause,
- Condamner la société [V] [Y] au paiement d’une somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement en date du 07 avril 2021, le juge des loyers commerciaux s’est déclaré incompétent, compte tenu de l'existence d'une contestation sur la date du renouvellement du sous-bail, et a renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 23 juin 2021 de la 5ème chambre civile du tribunal judiciaire de Bobigny.
*

Par exploit d’huissier en date du 11 octobre 2021, la société MARCHE DE BIRON a fait signifier à la société [V] [Y] un commandement de payer la somme de 29.825,41€ au titre de la dette locative et visant la clause résolutoire.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 04 octobre 2023, la société MARCHE DE BIRON a sollicité du tribunal judiciaire de Bobigny de :

Sur le commandement de payer :
- Constater l’acquisition de la clause résolutoire prévue au sous-bail de la société [V] [Y] ;
- Dire que le sous-bail est résilié depuis le 11 novembre 2021 ;
- Ordonner en conséquence l’expulsion de la société [V] [Y] ainsi que de tous occupants de son chef, en la forme accoutumée et au besoin avec le concours de la force publique ;
- Condamner la société [V] [Y] au paiement de la somme de 26.366,11€, sauf à parfaire ou compléter ;
- Ordonner la séquestration des biens de la société [V] [Y] garnissant les lieux dans tel garde-meubles qu’il plaira au propriétaire, aux frais risques et périls du locataire en garantie des indemnités locatives restant dues ;
- Fixer l’indemnité d’occupation mensuelle au double du montant du loyer, majoré des charges et taxes, compte tenu de son caractère indemnitaire et compensatoire ;
- Condamner la société [V] [Y] à payer cette indemnité d’occupation, d’avance le 1er jour de chaque mois, à compter du 11 novembre 2021 jusqu’à libération effective des lieux, qui s’entend de la remise des clés et des locaux libres de tous occupants, marchandises et mobilier, et dans un état conforme aux stipulations du bail, après exécution des réparations locatives et remises en l’état leur incombant ;
- Dire que si l’occupation devait se prolonger plus d’un an après soit la date de l’acquisition de la clause résolutoire soit le prononcé de la résiliation judiciaire, l’indemnité d’occupation ainsi fixée serait indexée sur l’indice INSEE des Loyers Commerciaux, l’indice de base étant le dernier indice paru à la date de la résiliation ;

Sur les charges et les loyers
- Débouter la société [V] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Sur la demande en fixation du loyer
- Dire que le contrat de sous-location commercial intitulé Sous-bail des locaux situés à [Localité 6], [Adresse 2] est renouvelé à compter du 1er octobre 2017 et fixer la date d’effet du renouvellement du bail au 1er octobre 2017 ;

En conséquence,

- Fixer le montant du loyer du contrat de sous-location commercial intitulé Sous-bail des locaux situés à [Localité 6], [Adresse 2] renouvelé à compter du 1er octobre 2017 à la somme annuelle en principal hors charges et hors taxes de 30.750€ (trente mille sept cent cinquante euros) ;
- Juger que les compléments de loyers arriérés produiront intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2017, conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1344-1 nouveaux du Code civil ;

A titre plus subsidiaire sur la fixation du loyer du bail renouvelé : dans l’hypothèse où la juridiction s’estimerait insuffisamment éclairée :
- Désigner tel expert qui lui plaira avec la mission de donner son avis sur la valeur locative des lieux loués à la date du renouvellement, soit au 1er octobre 2017 ;
- Fixer le loyer provisionnel à 30.750€ (trente mille sept cent cinquante euros) par an en principal hors charges hors taxes pendant la durée de l’instance ;
- Réserver les dépens.

En tout état de cause :
- Débouter la société [V] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions.
- Condamner la société [V] [Y] au paiement d’une somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- L’exécution provisoire de la décision à intervenir est de droit.

Au soutien de ses prétentions, la société LE [Adresse 4] fait valoir l'existence de négociations, entre elle et ses actionnaires, dont fait partie la société [V] [Y], en vue de l’acquisition des actions composant le capital social de sa société au cours de la procédure, entre le 2ème trimestre 2015 et le 2ème trimestre 2017. Était proposé en contrepartie la signature d’un bail prenant effet au 1er octobre 2017. La longueur de ces pourparlers démontre selon elle l’absence de chantage, le renouvellement des sous-baux n’étant pas conditionné à la cession des actions.

Par ailleurs, si la société [V] [Y] a dû cesser de recevoir du public dans les locaux au cours de la crise sanitaire, les loyers et charges restaient dus pendant les périodes visées. Toutefois, un règlement amiable du différend avait été proposé à la défenderesse en plusieurs occasions, en vain puisque la société [V] [Y] estimait que la crise sanitaire avait entraîné une exonération totale des loyers. C’est en ce sens que cette dernière a été mise en demeure de régler sa dette locative le 15 juin 2021 puis que le commandement de payer du 11 octobre 2021 lui a été signifié.

Sur la validité dudit commandement, la société LE [Adresse 4] énonce que le décompte mentionne chaque poste par intitulé clair et détaillé. Il serait donc suffisamment précis pour permettre l’acquisition de la clause résolutoire. Cette acquisition s’imposerait alors du fait du non-paiement des sommes dues dans le délai. Dans ce cadre, la bailleresse sollicite le rejet de la demande de délais de paiement formulée par la société [V] [Y], faute de remplir les conditions requises. Subsidiairement, la bailleresse estime que ces délais ne pourraient excéder 3 mois.

Sur le montant des loyers dus, la société LE [Adresse 4] affirme que la société [V] [Y] n’a pas été exonérée à hauteur de 50 % des loyers des 2ème et 3ème trimestre 2020 en raison de son absence de réponse quant à la résolution amiable du différend. Elle fait valoir que le rapport de gestion de 2020 ne contient aucun engagement dont les sous-locataires pourraient se prévaloir. Aussi, seuls certains locataires ont bénéficié de cette mesure en raison de leur situation particulière et sous réserve de l’absence d’arriérés au 14 mars 2020. Également, ces franchises ont pu être accordées en cas de pérennisation de la situation par la signature d’un renouvellement amiable des sous-baux, ce qui ne correspond pas à la situation de la société [V] [Y]. La société LE [Adresse 4] se considère dès lors fondée à réclamer l’entièreté des loyers dus.

Au surplus, et comme cela déjà été dit, la bailleresse estime que le raisonnement de la société [V] [Y] tendant à écarter des loyers du fait de la crise sanitaire est erroné, notamment au regard des arrêts de la 3ème chambre civile de la cour de cassation du 30 juin 2022.

Sur les charges, elle soutient que la novation de la répartition résulte de la loi Pinel du 18 juin 2014, qui impose une répartition fondée sur la surface exploitée et s’applique aux baux conclus depuis le 05 novembre 2014. Le calcul repose sur un relevé de surfaces effectué par un géomètre expert ayant été communiqué à la défenderesse. Selon la société LE [Adresse 4], cette répartition des charges est valide et devrait conduire à la condamnation de la société [V] [Y] à les régler. Elle rappelle que rien n’impose au bailleur de joindre au commandement les pièces justificatives. De plus, la société [V] [Y] ne démontre pas avoir réclamé de précisions sur lesdites charges et ce, alors qu'elle a assisté aux assemblées générales de la société LE [Adresse 4] et pouvait poser des questions avant approbation des comptes. En outre, les pièces justificatives étaient consultables dans les locaux de la bailleresse avant toute assemblée générale. Enfin, la société LE [Adresse 4] soutient avoir communiqué les pièces justificatives au cours de la présente procédure. L’ensemble des charges seraient donc bien dues et justifiées.

En conséquence, la société [V] [Y] devrait être condamnée selon elle au paiement de l’arriéré qui s’élèverait à 26.366,11€ d’après le dernier décompte, arrêté au 20 février 2023. La société LE [Adresse 4] relève dans ce cadre des erreurs dans le décompte présenté par la défenderesse.

Elle fait également valoir que le bail principal n’ayant été renouvelé qu’au 1er octobre 2017, le renouvellement du sous-bail n’a pas pu prendre effet à une date antérieure. L’exercice du droit de repentir n’entraîne pas de plein droit le renouvellement des sous-baux dès lors que sous-bail est un contrat distinct du bail principal. En l’espèce, le congé alternatif offrait le renouvellement au 1er jour du trimestre suivant la signification du droit de repentir. Le sous-bail s’est donc renouvelé au 1er octobre 2017 et l’action en fixation du loyer de renouvellement n’est pas prescrite.

Enfin, sur la fixation du loyer de renouvellement, la société LE [Adresse 4] énonce qu’elle doit renvoyer à la valeur locative. Ainsi, compte tenu des caractéristiques des locaux et des éléments de comparaison dans le secteur, le m² pondéré a une valeur de 750€. Cela correspondrait à un loyer de 30.750€ par an. Elle sollicite à titre subsidiaire la désignation d’un expert et la fixation d’un loyer provisionnel à 30.750€ hors taxes et hors charges pendant la durée de l’instance.

Il est expressément renvoyé à ces conclusions pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

*

La SARL [V] [Y] a constitué avocat.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par RPVA le 05 juillet 2023, la société [V] [Y] sollicite de la juridiction de céans :

Sur le commandement de payer :
- Annuler le commandement de payer délivré par la société LE [Adresse 4] le 11 octobre 2021 ;
- Débouter la société LE [Adresse 4] de sa demande tendant à constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail ;

Sur les charges :
- Condamner la société LE [Adresse 4] à payer à la société [V] [Y] la somme de 26.304,23€ correspondant aux provisions sur charges payées sur les 5 dernières années, actualisés au mois de juin 2023, sauf à parfaire ou compléter ;
- Subsidiairement, condamner la société LE [Adresse 4] à rembourser à la société [V] [Y] les charges indûment facturées à hauteur de la somme totale de 2.311,95€ de 2017 à 2021, à parfaire ou à compléter ;

Sur les loyers :
- Condamner la société LE [Adresse 4] à payer à la société [V] [Y] la somme de 2.375,49€ correspondant aux loyers trop versés ;
- Subsidiairement, déduire de la créance des loyers de la société LE [Adresse 4] le montant de franchises accordées aux sous-locataires selon le rapport de gestion présenté à l’Assemblée Générale Ordinaire du 28 septembre 2020 à hauteur de 50 % des loyers du 2ème et 3ème trimestre 2020, dont la société [V] [Y] n’a pas bénéficié ;

Sur la demande de fixation du loyer :
- Dire que le sous-bail de la société [V] [Y] sur le stand 38 se trouve définitivement renouvelé à effet du 25 septembre 2017, pour une durée de 9 années, aux clauses et conditions du bail expiré, y compris le montant du loyer qui reste fixé à la somme de 14.200,92€ l’an en principal ;
- En conséquence, déclarer la société LE [Adresse 4] irrecevable en sa demande de fixation du loyer du bail renouvelé portant sur le stand 38, situé [Adresse 1] ;

Subsidiairement,
- Ordonner la compensation avec les autres sommes éventuellement dues par la société [V] [Y] ;
- Accorder à la société [V] [Y] 24 mois de délais à compter de la signification du jugement pour s’acquitter des sommes éventuellement dues ;
- Ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire ;

En tout état de cause,
- Débouter la société LE [Adresse 4] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la société LE [Adresse 4] au paiement d’une somme de 5.000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner la société LE [Adresse 4] aux entiers dépens ;
- Rappeler que l’exécution provisoire est de droit.

À l’appui de ses prétentions, la société [V] [Y] soutient d’abord que la société LE [Adresse 4] lui aurait adressé, après renouvellement du bail principal le 25 septembre 2017, un projet de sous-bail prévoyant une augmentation des charges et loyers. De même, la bailleresse aurait indiqué aux sous-locataires actionnaires qu’il n’y aurait renouvellement des sous-baux qu’en cas de revente de leurs actions.

La société sous-locataire ajoute qu’au vu des mesures réglementaires prises lors de la crise sanitaire, elle a suspendu sur les périodes concernées le paiement des loyers et des charges. En outre, la société LE [Adresse 4] aurait renoncé à la perception des loyers à hauteur de 50 % pour les 2ème et 3ème trimestres de 2020, sans que la défenderesse ne puisse pour autant en bénéficier.

Sur la validité du commandement du 11 octobre 2021, la société [V] [Y] estime qu’il serait inintelligible et inexact, le rendant donc nul et de nul effet. La société LE [Adresse 4] devrait alors rembourser les sommes appelées en violation du bail et les trop-perçus de loyers. Dans l’hypothèse où serait admise la validité du commandement, la société [V] [Y] sollicite l’octroi d’un délai de paiement de 24 mois en raison des difficultés financières rencontrées ainsi qu’au vu de sa bonne foi.

Sur les montants dus, la société [V] [Y] estime que les périodes de fermeture ayant eu cours lors de la crise sanitaire impliquent la suppression des loyers et des charges. Cette suppression découle de différents fondements juridiques que sont la force majeure, l’exception d’inexécution ou encore la perte de la chose louée. En ce sens, la société [V] [Y] considère que la société LE [Adresse 4] devrait verser 2.375,49€ de trop-perçu de loyers. À titre subsidiaire, la société [V] [Y] devrait bénéficier des franchises de loyers accordées aux sous-locataires, soit 50 % des loyers au titre des 2ème et 3ème trimestre 2020, ce qui équivaut à une somme de 4.260,28€ à décompter. De même, devraient être remboursées par la société LE [Adresse 4] les provisions sur charges perçues non-justifiées et dont le calcul n’était aucunement fondé sur le contrat de bail ou sur un avenant à celui-ci et ce, à hauteur de 26.304,23€ aux termes de son dispositif. Du reste, s’il devait être jugé que la répartition des charges est valide tout comme leur justification, la société sous-locataire conteste plusieurs postes de charges représentant un montant de 2.311,95€.

Sur la date du renouvellement du sous-bail, la société [V] [Y] affirme qu’elle doit être fixée au 25 septembre 2017, en vertu de la notification par la société LE [Adresse 4] dans le congé du 04 avril 2014 de son intention de renouveler le sous-bail dans cette hypothèse. Elle considère en effet que si les parties au bail principal peuvent valablement convenir d’une date de renouvellement différente de la date du repentir, comme en l’espèce au 1er octobre 2017, ce choix ne serait pas opposable au sous-locataire en vertu du principe de l’effet relatif des conventions. La société [V] [Y] déduit de ces éléments la prescription de l’action en fixation du loyer introduite le 30 septembre 2019.

Subsidiairement, sur le montant réclamé par la bailleresse au titre de la fixation du loyer de renouvellement, les juges ne pourraient se fonder exclusivement sur une expertise non-contradictoire. De même, le fait que l’expert sollicité par la société LE [Adresse 4] ne retienne que les loyers décapitalisés pour conclure à un montant de 30.750€ l’an en principal est critiquable.

Enfin, la société [V] [Y] sollicite l’application du jeu de la compensation ainsi que la condamnation de la société LE [Adresse 4] aux dépens et aux frais de la procédure visés par l’article 700 du code de procédure civile.

Il est expressément renvoyé à ces conclusions pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

*

L’affaire a été clôturée par ordonnance du 07 décembre 2023 et fixée à l’audience de plaidoiries (juge unique) du 21 février 2024. Elle a été mise en délibéré au 15 mai 2024.

*

Il convient de relever que la société LE [Adresse 4] n’a pas déposé de dossier de plaidoiries et ce, malgré le bulletin de clôture mentionnant expressément la nécessité de déposer ledit dossier huit jours avant l'audience, la demande de dépôt formulée au conseil de la bailleresse à l'audience et la relance qui lui a été faite par bulletin RPVA postérieurement à l'audience de plaidoiries.

MOTIVATION

1/ Sur le commandement de payer du 11 octobre 2021 visant la clause résolutoire

Selon les dispositions de l’article L.145-41 du code de commerce toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité mentionner ce délai.

La loi prévoyant donc une possibilité de régularisation par le preneur des causes du commandement faisant échec au jeu de la clause résolutoire, ce commandement doit nécessairement informer clairement le locataire du montant qui lui est réclamé et être suffisamment précis pour lui permettre d'identifier les causes des sommes réclamées et de vérifier la prise en compte des paiements effectués.

En l’espèce, le contrat de bail principal conclu le 27 juillet 1993 entre les propriétaires des locaux et la société LE [Adresse 4] contient en page 11 une clause résolutoire, selon laquelle « A défaut de paiement à son échéance d'un seul terme de loyer ci-dessus fixé et un mois après un simple commandement de payer demeuré infructueux, le présent bail sera résilié de plein droit si bon semble aux bailleurs sans qu'ils aient à remplir aucune formalité judiciaire et ce sans que l'offre de paiement faite après le délai qui vient d'être indiqué puisse arrêter l'effet de la présente clause.
Si la société preneuse se refusait à quitter les lieux, elle pourrait y être contrainte par une simple ordonnance de référé prise par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY en présence de la société preneuse où elle dûment appelée et rendue exécutoire par provision nonobstant opposition ou appel. »

Le contrat de sous-bail conclu le 28 novembre 1993 entre Monsieur [M] [C] et le locataire principal contient une clause résolutoire selon laquelle : « A défaut de paiement à son échéance d'un seul terme du sous-loyer, de ses accessoires, ou de tout complément d'arriérés de loyer résultant d'une révision ou d'un renouvellement, comme en cas d'inexécution de l'une quelconque des charges, clauses et conditions du bail principal ou du sous-bail et un mois après signification d'un commandement de payer ou une sommation d'exécuter resté infructueux, le sous-bail sera résilié de plein droit, si bon semble au locataire principal, sans qu'il ait à remplir aucune formalité judiciaire et sans que l'offre de paiement ou d'exécuter faite après le délai, puisse arrêter l'effet de la présente clause.
Si le sous-locataire se refusait à quitter les lieux, il pourrait y être contraint par Ordonnance de Référé, prise par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de Bobigny, l'ensemble des charges et frais relatifs à la mise en œuvre d'une telle procédure devant être acquitté par le sous-locataire. »

De surcroît, l’acte de cession du droit de sous-bail conclu entre Monsieur [C] et Madame [V] [Y], aux droits de laquelle est venue la société [V] [Y], du 30 avril 2003 rappelle l'existence de la clause résolutoire liant les bailleurs à la société LE [Adresse 4] et précise en son article 4 intitulé « CONDITIONS COMPLEMENTAIRES » que « Le sous-locataire s'oblige, ainsi qu'il l'a été rappelé, à l'exécution de l'ensemble des charges, clauses et conditions du bail principal et notamment à toutes les conditions visées à l'article 2.1, outre toutes celles qui en sont la suite et la conséquence ».

En l’occurrence, le commandement de payer délivré le 11 octobre 2021 par la société LE [Adresse 4] à destination de la société [V] [Y] reprend expressément la clause résolutoire insérée au contrat de sous-bail mentionnant le délai d’un mois laissé aux fins de régler en principal la somme de 29.825,41 euros au titre des arriérés de loyers et charges, et taxes selon le détail du compte locataire annexé. Il n’existe donc pas d’irrégularité formelle pouvant conduire à la non-reconnaissance de l’acquisition de la clause résolutoire à ce stade.

Toutefois, la société [V] [Y] argue que le décompte joint au commandement de payer est imprécis en raison de libellés incomplets et de sommes réclamées alors qu’indues, notamment en raison d’une exonération prétendue de loyers au cours de la crise sanitaire et d’une répartition des charges qui serait inapplicable car en violation du sous-bail. En outre, les charges ne seraient finalement pas justifiées. Or, l’absence d’intelligibilité d’un commandement de payer ou le commandement de payer faisant état d’un calcul manifestement faux empêchent la mise en œuvre de la clause résolutoire.

En l’espèce, au commandement de payer du 11 octobre 2021 est joint un décompte de plusieurs pages faisant état de la dette locative de la société [V] [Y] du 1er janvier 2020 au 1er octobre 2021. Le décompte distingue les sommes appelées au titre des provisions sur charges de celles appelées au titre du loyer, intitulé « indemnité d’occupation » au sein du document, mais aussi de celles réclamées au titre de la TVA ainsi que les sommes versées par la société sous-locataire et le solde qui en découle.

Cependant, les mentions d'identification de plusieurs de ces appels sont incomplètes, ne permettant dès lors pas de déterminer à quel exercice comptable elles se rapportent. Au regard des conséquences découlant de la mise en œuvre d'un commandement de payer, il ne peut être considéré que la possibilité de rattacher par déduction ces lignes à un exercice comptable permette de compenser ces omissions et ce, d'autant que des appels au titre de l'année 2017 s'intercalent dans ceux relatifs à l'année 2018 et qu'il en est de même des appels portant sur les exercices 2018 et 2019. De surcroît, ne peut s'expliquer la présence sur un décompte débutant au 1er janvier 2020 de sommes correspondant à des exercices antérieurs et « rappelées à nouveau ».

La société LE [Adresse 4] ne justifie donc pas avoir mis la société [V] [Y] en mesure de pouvoir identifier la nature des sommes réclamées au titre de l'arriéré locatif ainsi que l’évolution de sa dette. Dès lors, il ne peut être vérifié la véracité du commandement de payer et ce dernier doit être considéré comme nul et non avenu.

En conséquence, la société LE [Adresse 4] sera déboutée de sa demande de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire du sous-bail la liant à la société [V] [Y] et portant sur la parcelle de terrain et le local qui s’y trouve édifié sous le vocable STAND portant le numéro d’identification 38, [Adresse 3] situé au [Adresse 4], [Adresse 1] à [Localité 6] (93) et visée au commandement de payer du 11 octobre 2021.

2/ Sur les sommes dues au titre des loyers et charges

La société LE [Adresse 4] sollicite la condamnation de la société [V] [Y] à lui verser la somme de 26.366,11€ au titre des loyers et charges impayés. La société [V] [Y] quant à elle réfute ce montant et considère être créancière de la société LE [Adresse 4] en raison de trop-perçus et ce, pour les provisions sur charges, à hauteur de 26.304,23€ au titre des provisions sur charges payées les 5 dernières années (ou subsidiairement pour 2.311,96€ de 2017 à 2021). Au surplus, au sujet les loyers, la société [V] [Y] estime que LE [Adresse 4] lui devrait 2.375,49€ ou que subsidiairement la créance de la bailleresse devrait être diminuée de 50 % pour les loyers dus pour les 2ème et 3ème trimestre 2020.

Sur les charges

La société [V] [Y] verse au dossier des avis d’échéance dont ceux des mois de janvier 2020 à mai 2020, du mois d'octobre 2020, des mois de janvier 2021 à septembre 2021 détaillant les appels de provisions sur charges sur cette période (546,66€ par mois). De même, sont fournis les reçus des paiements effectués par la société [V] [Y] au titre des mois de janvier 2020 à mars 2020, des mois de juillet 2020 à août 2022 ainsi que des mois d'octobre 2022 à juin 2023. Pour synthétiser cet ensemble, la défenderesse a établi un décompte des sommes versées à la bailleresse de janvier 2019 au mois de décembre 2020 mais également un second décompte actualisé au mois de juin 2023. La société sous-locataire présente également les avis d’échéance des 1er et 2ème trimestre 2023 faisant état de 1.639,97€ appelés chaque trimestre au titre des provisions sur charges.

En l’absence de transmission de tous éléments de preuve, la société LE [Adresse 4] ne justifie pas du montant des charges pouvant être imputé à la société [V] [Y].

En conséquence, au vu de ces éléments, il convient d’accéder à la demande de la défenderesse et de condamner la société bailleresse au remboursement du trop perçu au titre des charges.

La société [V] [Y] sollicite le remboursement de ces sommes au titre des cinq dernières années, soit en l'espèce pour la période du 1er juillet 2018 au 1er juillet 2023, ce qui correspondrait selon elle à la somme de 26.304,23 euros ; somme dont elle ne précise toutefois pas le mode de calcul.

La régularisation des charges au titre de l'année 2018 a porté sur la somme de 3.082,04 euros HT, soit un trop perçu de 1.541,02 euros HT pour la période du 1er juillet 2018 au 31 décembre 2018. Au titre de l'année 2019, la régularisation a porté sur la somme de 636,73 euros HT. Il convient d'y ajouter les sommes correspond aux quantum trop-perçus entre juillet 2018 et juin 2023, étant rappelé que le montant mensuel des charges non contesté par la société [V] [Y] est de 258,50 euros, soit :
au titre des mois de juillet 2018 à décembre 2018 inclus : 1524 euros HT (254x6=1524),au titre des mois de janvier 2019 à septembre 2019 inclus : 2286 euros HT (254 euros de différence entre le montant non contesté de 258,50 euros et le montant de 512,50 euros effectivement appelé x9=2286),au titre des mois d'octobre 2019 à décembre 2019 : 864,48 euros HT (288,16 euros de différence entre le montant non contesté de 258,50 euros et le montant de 546,66 euros effectivement appelé, soit 288,16x3 = 864,48),au titre de l'année 2020 : 3457,92 euros HT (288,16x12=3457,92),au titre de l'année 2021 : 3457,92 euros HT,au titre de l'année 2022 : 3457,92 euros HT,au titre des mois de janvier à juin 2023 inclus : 1728,96 euros HT (288,16x6=1728,96).
Dès lors, la société LE [Adresse 4] est redevable de la somme de 18.954,95 euros HT, soit 22.745,94 euros TTC, au titre du trop-perçu des charges entre le 1er juillet 2018 et le 1er juillet 2023.

Sur les loyers

La société [V] [Y] ne rapporte en effet pas la preuve qu'elle s'est vue octroyer un abandon à hauteur de 50% du montant des loyers des deuxième et troisième trimestres 2020. De fait, le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du 30 juin 2021 des actionnaires de la société LE [Adresse 4] mentionne que les franchises de loyer en raison de la pandémie n'ont pas été accordées à l'ensemble des locataires.

De surcroît, les périodes de fermeture des commerces imposées par les pouvoirs publics du fait de la crise sanitaire ont été décidées aux seules fins de garantir la santé publique. L'effet de cette mesure, sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être assimilé à la perte de la chose au sens de l'article 1722 du code civil, et n'est pas non plus constitutive d'une inexécution de l'obligation de délivrance imputable au bailleur, d'une exception d'inexécution ou d'un cas de force majeure. Le preneur ne peut donc s'exonérer du paiement de ses loyers et charges sur ces fondements (Civ 3ème, 30 juin 2022 n°21-20.190, 21-20.127 et 21-19.889).

Dès lors, les loyers correspondant aux périodes au cours desquelles se sont appliquées les mesures administratives ayant conduit à l’interdiction d’accès des locaux loués au public, soit les périodes du 15 mars au 11 mai 2020, du 29 octobre au 27 novembre 2020, et du 20 mars 2021 au 18 mai 2021, restent dus.

En conséquence, il convient de rejeter la demande de la société [V] [Y] tendant à la condamnation de la société LE [Adresse 4] au paiement de la somme de 2.375,49€ au titre d’un trop-perçu de loyers au cours de la crise sanitaire.

En l’absence de versement de toutes pièces par la société LE [Adresse 4], le seul décompte pouvant être considéré dans la détermination des loyers restant dus par la société sous-locataire est celui ayant été joint au commandement de payer du 11 octobre 2021.

La société LE [Adresse 4] dans ses écritures considère que les sommes réglées au titre de janvier 2020 étaient insuffisantes et renvoie pour le démontrer à sa comptabilité ainsi qu’aux reçus versés par la défenderesse. La bailleresse ajoute que les loyers des mois d’avril et mai 2021 n’auraient pas non plus été réglés. Néanmoins, en l'absence de versement par la société LE [Adresse 4] des justificatifs de ces affirmations, elles ne peuvent être vérifiées.

Le décompte joint au commandement de payer fait état du non-paiement du loyer par la société [V] [Y] aux mois d’avril, mai et juin 2020 tout comme aux mois de novembre 2020, décembre 2020, janvier 2021 et février 2021. De même, il conduit à considérer que les sommes dues au titre des loyers du 4ème trimestre 2021 n'auraient pas été réglées.

Toutefois, la société [V] [Y] verse en procédure les reçus de paiement permettant d'établir que les loyers au titre des mois d'avril, mai et juin 2020 ont été réglés par le biais de deux versements effectués en juillet et août 2020. De même, il y a lieu de considérer que le loyer dû au titre du mois de novembre 2020 a été payé par le versement du 9 mars 2021. Dès lors, seuls les loyers des mois de décembre 2020, janvier 2021 et février 2021 resteraient impayés au titre du décompte, ce qui correspond à une somme de 3.550,23 euros HT, soit 4.260,27€ TTC.

En conséquence, la société [V] [Y] sera condamnée au paiement de 4.260,27€ au titre des loyers restant dus à la société LE [Adresse 4] arrêtés au 1er octobre 2021, 4ème trimestre inclus.

La société [V] [Y], échouant à rapporter la preuve du bénéfice d'une franchise à hauteur de 50% à l'égard des loyers des 2ème et 3ème trimestre 2020, comme cela a été ci-avant développé, elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la compensation

L’article 1347 du code civil dispose que la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes. Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.

En l’espèce, la société LE [Adresse 4] est débitrice de la société [V] [Y] à hauteur de 22.745,94 euros. Réciproquement, la société [V] [Y] est obligée au profit de la société LE [Adresse 4] à hauteur de 4.260,27 euros.
En conséquence, il convient de mettre en œuvre le mécanisme de la compensation ici et de condamner finalement la société LE [Adresse 4] à payer à la société [V] [Y] la somme de 18.485,67 euros TTC (22.745,94 – 4.260,27).

3/ Sur le renouvellement du bail

Les parties s'opposent sur la date de renouvellement du bail, la société LE [Adresse 4] considérant que ce dernier s'est renouvelé au 1er octobre 2017, en application des dispositions du congé alternatif signifié par huissier de justice le 04 avril 2014 à la société [V] [Y] tandis que la sous-locataire considère que ce sous-bail a été renouvelé au plus tard le 25 septembre 2017, date de l'exercice par les propriétaires des locaux de leur droit de repentir. La société [V] [Y] fait valoir que la décision de fixer le renouvellement du bail au 1er octobre 2017 ne lui est pas opposable et que la société LE [Adresse 4] ne pouvait décaler unilatéralement la date de prise effet du renouvellement du sous-bail, les dispositions de l'article L145-15 du code de commerce précisant que toute clause contraire de nature à faire échec au droit de renouvellement instauré par les articles L.145-8 à L.145-13 du code de commerce devait être réputée non écrite.

L’article L.145-12 du code de commerce dispose en son alinéa 3 que le nouveau bail prend effet à compter de l'expiration du bail précédent, ou, le cas échéant, de sa reconduction, cette dernière date étant soit celle pour laquelle le congé a été donné, soit, si une demande de renouvellement a été faite, le terme d'usage qui suit cette demande. L’alinéa 4 du même texte précise que toutefois, lorsque le bailleur a notifié, soit par un congé, soit par un refus de renouvellement, son intention de ne pas renouveler le bail, et si, par la suite, il décide de le renouveler, le nouveau bail prend effet à partir du jour où cette acceptation a été notifiée au locataire par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

En l'espèce, par un acte en date du 04 avril 2014, la société LE [Adresse 4] a fait signifier à la société [V] [Y] un congé par lequel elle précisait que ce dernier valait offre de renouvellement du sous-bail en cas d'exercice par les propriétaires de leur droit de repentir et que, dans ce cas, ladite offre de renouvellement prendrait effet « le premier jour du trimestre civil (1er janvier, 1er avril, 1er juillet, 1er octobre) qui suivra la signification du repentir ». Cependant, en application des dispositions d'ordre public de l'alinéa 4 de l'article L.145-12 du code de commerce susvisées, cette clause doit être réputée non écrite. La volonté commune du bailleur et du locataire de différer le renouvellement du bail les liant au 1er octobre 2017 s'avère de fait contraire à ces dispositions, ledit bail s'étant renouvelé le 25 septembre 2017 ; elle ne peut dès lors être opposée valablement à la société [V] [Y], qui n'est de surcroît pas partie à ce bail.

Il y a donc lieu de constater que le bail liant les sociétés LE [Adresse 4] et [V] [Y] s'est renouvelé au 25 septembre 2017 pour une durée de neuf année.

4/ Sur la demande en fixation du loyer

La société LE [Adresse 4] sollicite la fixation du loyer annuel à la somme de 30.750€ tandis que la société [V] [Y] soulève la prescription de l'action en fixation du montant du loyer et ce, au visa des dispositions de l'article L145-60 du code de commerce, compte tenu du renouvellement du bail au 25 septembre 2017.

L'article 789 du code de procédure civile dispose que « lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : 6° Statuer sur les fins de non-recevoir ; »

L’article 122 du même code dispose quant à lui que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

En l'espèce, la société [V] [Y] n'est pas recevable à soulever devant le tribunal une fin de non recevoir qui relevait de la seule compétence du juge de la mise en état. Il ne peut dès lors être pris en considération le moyen reposant sur la prescription de l'action en fixation du loyer formée par la bailleresse.

Pour autant, la société LE [Adresse 4] n'ayant pas versé une quelconque pièce à l'appui de ses prétentions, de nature à justifier de sa demande de fixation du loyer annuel à la somme de 30.750 €, elle sera déboutée de sa demande. En outre, la désignation d'un expert n'ayant pas vocation à palier la carence de la bailleresse dans la justification de ses demandes, sa demande d'expertise sera rejetée.

Dès lors, il y a lieu de constater que le bail a été renouvelé le 25 septembre 2017 aux clauses et conditions du bail antérieur.

5/ Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

La société LE [Adresse 4], succombant à l’instance, sera condamnée au paiement des entiers dépens.

- Sur les frais irrépétibles

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l'espèce, il convient de condamner la société LE [Adresse 4] au paiement de la somme de 2.500,00 euros au titre des frais irrépétibles exposés par la société [V] [Y].

- Sur l’exécution provisoire

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Aux termes de l'article 514-1 du code de procédure civile, le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou en partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.

En l'espèce, il n'y pas lieu d’écarter l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire de Bobigny, statuant publiquement par jugement contradictoire par mise à disposition au greffe,

DIT que le commandement de payer signifié le 11 octobre 2021 à la S.A.R.L. [V] [Y] est nul et non avenu ;

DEBOUTE la S.A. LE [Adresse 4] de sa demande de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire fixée au bail la liant à la S.A.R.L. [V] [Y] et visée au commandement de payer du 11 octobre 2021, sur la parcelle de terrain et le local qui s’y trouve édifié sous le vocable STAND portant le numéro d’identification 38, [Adresse 3] situé au [Adresse 4], [Adresse 1] à [Localité 6] (93) ;

CONSTATE que la S.A.R.L. [V] [Y] est débitrice de la somme de 4.260,27 euros TTC au titre des loyers impayés arrêtés au 1er octobre 2021, 4ème trimestre 2021 inclus, au profit de la S.A. LE [Adresse 4] ;

DEBOUTE la S.A.R.L. [V] [Y] de sa demande tendant au bénéfice d'une franchise de 50% à l'égard des loyers des 2ème et 3ème trimestres 2020 ;

CONSTATE que la S.A. LE [Adresse 4] est débitrice au bénéfice de la S.A.R.L. [V] [Y] de la somme de 22.745,94 euros TTC au titre des provisions sur charges indûment perçues arrêtées au 30 juin 2023 ;

JUGE que par l’effet de la compensation, la S.A. LE [Adresse 4] est condamnée à payer à la S.A.R.L. [V] [Y] la somme de 18.485,67 euros TTC ;

DIT que le sous-bail liant la S.A. LE [Adresse 4] à la S.A.R.L. [V] [Y] s'est renouvelé au 25 septembre 2017 pour une durée de neuf années aux clauses et conditions du bail expiré ;

DEBOUTE la S.A. LE [Adresse 4] de sa demande d'expertise ;

CONDAMNE la S.A. LE [Adresse 4] à payer à la S.A.R.L. [V] [Y] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la S.A. LE [Adresse 4] aux entiers dépens ;

REJETTE les demandes plus amples ou contraires ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la décision.

Fait au Palais de Justice, le 15 mai 2024

La minute de la présente décision a été signée par Madame Charlotte THINAT, Présidente, assistée de Madame Zahra AIT, greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

Madame AIT Madame THINAT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 5/section 1
Numéro d'arrêt : 21/02529
Date de la décision : 15/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-15;21.02529 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award