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02/05/2024 | FRANCE | N°23/03714

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 27 / proxi fond, 02 mai 2024, 23/03714


TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DU RAINCY
[Adresse 5]
[Localité 8]

Téléphone : [XXXXXXXX01]

@ : [Courriel 9]





REFERENCES : N° RG 23/03714 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YSZH

Minute : 24/416







CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10]
Représentant : Me Sylvie LANGLAIS, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 7



C/


Monsieur [K] [U]










Exécutoire délivrée le :
à :


Copie certifiée conforme délivrée le :
à :

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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT






Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité du Raincy en date du 02 Mai 2024 par Madame Céline MARION, en qualité de juge des contentieux...

TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DU RAINCY
[Adresse 5]
[Localité 8]

Téléphone : [XXXXXXXX01]

@ : [Courriel 9]

REFERENCES : N° RG 23/03714 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YSZH

Minute : 24/416

CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10]
Représentant : Me Sylvie LANGLAIS, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 7

C/

Monsieur [K] [U]

Exécutoire délivrée le :
à :

Copie certifiée conforme délivrée le :
à :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT

Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité du Raincy en date du 02 Mai 2024 par Madame Céline MARION, en qualité de juge des contentieux de la protection assistée de Madame Sandra GAGNOUX, greffier ;

Après débats à l'audience publique du 07 Mars 2024 tenue sous la présidence de Madame Céline MARION, juge des contentieux de la protection, assistée de Madame Sandra GAGNOUX, greffier audiencier ;

ENTRE DEMANDEUR :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10], demeurant [Adresse 6]
[Localité 7]

Représentée par Me Sylvie LANGLAIS, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 7

D'UNE PART

ET DÉFENDEUR :

Monsieur [K] [U],
demeurant [Adresse 4]
[Localité 8]

non comparant, ni représenté

D'AUTRE PART

EXPOSE DU LITIGE

Selon convention de compte en date du 13 mai 2016, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a consenti à Monsieur [K] [U] l’ouverture en ses livres d'un compte de dépôt n°[XXXXXXXXXX03].

Selon offre préalable acceptée du 31 août 2020, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a consenti à Monsieur [K] [U] une autorisation de découvert d'un montant maximum de 3500 euros, sur le compte courant avec intérêts au taux débiteur de 9,82%, pour une durée illimitée.

Selon offre préalable acceptée le 14 octobre 2016, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a consenti à Monsieur [K] [U] un crédit renouvelable « passeport crédit » d’une durée d’un an renouvelable d'un montant maximum en capital de 30000 euros, avec intérêts au taux débiteur variable, calculé selon les sommes réellement utilisées.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a prononcé la résiliation de la convention de compte par lettre recommandée en date du 26 avril 2023.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a adressé à Monsieur [K] [U] une mise en demeure d'avoir à régulariser les échéances impayées des deux prêts à hauteur de 1200,47 euros et 304,19 euros par lettre recommandée en date du 27 juin 2023.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a prononcé la résiliation « des prêts » par lettre recommandée en date du 29 août 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 8 décembre 2023, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a fait assigner Monsieur [K] [U] devant le juge des contentieux de la protection afin de :
La déclarer recevable et bien fondée en ses demandes,condamner Monsieur [K] [U] au paiement de la somme de 21042,50 euros, au titre du solde du compte courant [Numéro identifiant 2] avec intérêts au taux légal à compter du 30 août 2023 jusqu'au jour du parfait paiement,le condamner au titre des utilisations du Passeport Crédit , selon décompte du 5 octobre 2023, au paiement des sommes suivantes, avec intérêts au différents taux à compter du 6 octobre 2023 jusqu’à complet paiement :au titre de l’utilisation UTIL PROJET N°8, 17880,20 euros, avec intérêts au taux de 3,60% l'an,au titre de l’utilisation UTIL PROJET N°11, 5265,87 euros, avec intérêts au taux de 4,75% l'an,dire n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,le condamner au paiement de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance
A l'audience la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10], représentée, maintient ses demandes.

Elle indique qu’il s’agit du recouvrement du solde d’un compte courant avec autorisation de découvert et d’un crédit renouvelable, un crédit passeport, ayant donné lieu à deux utilisations.
Elle précise que la forclusion biennale n'est pas encourue, le dernier solde créditeur du compte bancaire se situant au 9 mars 2023, et le premier impayé non régularisé pour le contrat de crédits étant survenu le 15 avril 2023.
Elle estime être bien fondée à obtenir la condamnation de l'emprunteur au paiement du solde des sommes dues augmentées des intérêts au taux contractuel, au visa des articles L311-1 et suivants du code de la consommation.
Elle indique que les mensualités de l'emprunt n'ont pas été régulièrement payées, ce qui l'a contraint à prononcer la déchéance du terme, rendant la totalité de la dette exigible. Elle a également pu émettre ses observations sur le respect des règles d'ordre public fixées par le code de la consommation et notamment précise que les contrats sont conformes au code de la consommation et disposer notamment de la fiche d’information préalable, de la notice de l'assurance, de la fiche de dialogue, et de la justification de consultation du FICP et de vérification de la solvabilité.

Monsieur [K] [U], régulièrement assigné à l'étude ne comparait pas et n'est pas représenté.

L’affaire a été mise en délibéré au 2 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Conformément à l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait alors droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande principale :

Sur l'office du juge

En application de l'article R632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

L'article L314-26 du code de la consommation précise que les dispositions des chapitres II et III et des sections II à VII du chapitre IV du code de la consommation sont d'ordre public.

En l'espèce, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] a évoqué la régularité de l'offre de prêt et a pu formuler ses observations quant au respect des dispositions d'ordre public des articles L312-1 et suivants du code de la consommation.

Sur la demande au titre du compte bancaire [Numéro identifiant 2]

Sur la recevabilité de la demande

En application de l'article R312-35 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat de prêt du 13 mai 2016, les actions en paiement engagées devant le tribunal judiciaire à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Cet événement est caractérisé par le dépassement, au sens du 13° de l'article L311-1, non régularisé à l'issue du délai prévu à l'article L 312-93.

En l'espèce, il ressort de l'historique de compte que le dépassement non régularisé du solde du compte est intervenu au 9 mars 2023 et que l'assignation a été signifiée le 8 décembre 2023. Dès lors, la demande en paiement est recevable.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

En application des articles L312-92 et L312-93 du code de la consommation, lorsqu'un dépassement au sens de l'article L311-1 13°, soit un découvert tacitement accepté en vertu duquel un prêteur autorise un emprunteur à disposer de fonds qui dépassent le solde de son compte de dépôt ou de l'autorisation de découvert convenue, se prolonge au-delà d'un mois, le prêteur informe l'emprunteur sans délai du montant du dépassement, du taux débiteur et de tous frais et intérêts sur arriérés qui sont applicables. Lorsque le dépassement se prolonge plus de trois mois, le prêteur propose sans délai un autre type d'opération de crédit au sens de l'article L311-1 du code de la consommation.

Aux termes de l’article L341-9 du même code, le prêteur qui n'a pas respecté les formalités prescrites au dernier alinéa de l'article L312-92 et à l'article L312-93 ne peut réclamer à l'emprunteur les sommes correspondant aux intérêts et frais de toute nature applicables au titre du dépassement mentionné à ces articles.

En l'espèce, il ressort de l'examen des pièces versées aux débats que le compte bancaire numéro [Numéro identifiant 2] comporte une autorisation expresse de découvert de 3500 euros. L'examen de l'historique de compte laisse apparaître un dépassement de ce montant à partir du 9 mars 2023, qui s'est prolongé pendant une durée supérieure à trois mois.

Or, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] ne justifie ni de l'envoi d'une lettre d'information après le délai d'un mois, ni de la présentation d'une offre de crédit distincte respectant les conditions du code de la consommation après le délai de trois mois.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts.

Sur les sommes dues :

En application de l'article L341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, et les sommes perçues au titre des intérêts sont restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.

En outre, la déchéance du droit aux intérêts exclut la possibilité pour le prêteur d'obtenir le paiement de l’indemnité prévue par les articles L312-39 et D312-16 du code de la consommation.

Conformément à l'article L 341-8 précité, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital et la déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par la demanderesse, notamment de la convention de compte et de l'historique de compte que la créance de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] est établie.

Elle s'élève au montant du solde débiteur du compte courant, d'un montant de 20804,60 euros, sous déduction de l'ensemble des intérêts et frais perçus au titre du découvert par l'établissement, à hauteur de 368,28 euros, soit la somme totale de 20436,32 euros.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [K] [U] au paiement de cette somme.

Sur les intérêts :

En application de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Selon l’article L313-3 du code monétaire et financier, en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire. Le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

Par ailleurs, le Juge doit assurer l’effectivité de la sanction prévue par le droit communautaire (Cour de Justice de l'Union Européenne, 27 mars 2014, C-565/12).

Sur ce point, la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) statuant sur une demande de décision préjudicielle du tribunal d’instance d’Orléans relève qu'il appartient à la juridiction nationale de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté ses obligations avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de ces mêmes obligations , et que dès lors que les montants dont il est déchu sont inférieurs à ceux résultant de l’application des intérêts au taux légal majoré ou si les montants susceptibles d’être perçus par lui ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations, le régime de sanctions en cause au principal n’assure pas un effet réellement dissuasif à la sanction encourue .

La CJUE rappelle qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci.

Elle estime que l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application d’un régime national de sanctions en vertu duquel, en cas de violation par le prêteur de ses obligations , le prêteur est déchu de son droit aux intérêts conventionnels, mais bénéficie de plein droit des intérêts au taux légal, exigibles à compter du prononcé d’une décision de justice condamnant l' emprunteur , lesquels sont en outre majorés de cinq points si, à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit ce prononcé, celui-ci ne s’est pas acquitté de sa dette .

En l'espèce, compte tenu du taux contractuel de 9,82%, il apparaît que les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal, de 2,06% pour le premier semestre 2023, et 4,22% pour le deuxième semestre 2023, pour les créanciers professionnels, majoré de plein droit de cinq points deux mois après la signification du jugement, en application de l’article L313-3 du code monétaire et financier, ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont il aurait pu bénéficier s'il avait respecté ses obligations.

Si le débiteur peut solliciter, après condamnation, l'exonération de la majoration, une telle mesure ne reste que facultative, subordonnée à la mise en œuvre d'un recours au stade de l'exécution. Or le prononcé d'une condamnation impliquant la majoration automatique du taux d'intérêt contrevient aux objectifs du droit communautaire, puisque la possible exonération par le juge de l'exécution demeure aléatoire, ce qui laisse subsister dans l'ordonnancement juridique des décisions portant une sanction non effective.

Il convient dès lors également d’écarter la majoration des intérêts afin d'assurer le caractère effectif et dissuasif de la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [K] [U] à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] la somme de 20436,32 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 26 avril 2023, date de la mise en demeure.

Sur la demande au titre du crédit du 14 octobre 2016 « passeport crédit »

Sur la recevabilité de la demande

En application de l'article R312-35 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat de prêt du 14 octobre 2016, les actions en paiement engagées devant le tribunal judiciaire à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme, le premier incident de paiement non régularisé ou encore, dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable, le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti.

En l'espèce, il ressort de l'historique de compte que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu au 15 avril 2023 et que l'assignation a été signifiée le 8 décembre 2023. Dès lors, la demande en paiement est recevable.

Sur l’exigibilité de la créance :

Aux termes de l’article L312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

En application des articles 1224 et 1225 du code civil, la résolution peut résulter de l'application d'une clause résolutoire, qui précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat. En ce cas, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution, qui ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

Ainsi, si le contrat de prêt peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque être déclarée acquise au créancier sans délivrance d’une mise en demeure restée sans effet précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le prêt stipule qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

Il ressort des pièces communiquées que Monsieur [K] [U] a cessé de régler les échéances du prêt. La CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10], qui a fait parvenir à Monsieur [K] [U] une demande de règlement des échéances impayées le 27 juin 2023, restée sans réponse, était dès lors bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme et de la résiliation de plein droit du contrat et à demander le remboursement immédiat des sommes exigibles selon les termes du contrat.

Sur la déchéance du droit aux intérêts :

Sur les caractéristiques du contrat et le contenu de l’offre de prêt :

L'article L312-28 du code de la consommation, qui précise les conditions de forme du contrat de crédit, dispose notamment que le contrat est établi par écrit ou sur un autre support durable et qu'un un encadré, inséré au début du contrat, informe l'emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.

Selon l'article 312-57 du code de la consommation, constitue un crédit renouvelable, une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti.

Il résulte de ce texte que l'emprunteur a la possibilité de bénéficier d'un crédit, d'un montant déterminé dès l'origine dont l'utilisation s'effectuera de façon fractionnée, aux dates choisies par celui-ci.

En revanche, ne peut être qualifié de crédit renouvelable, un contrat qui, s'il définit un montant maximal d'emprunts accordés a un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, chacun étant remboursable indépendamment des autres a un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant aux clauses essentielles de durée de remboursement et du taux d'intérêt conventionnel fixe spécifique, chaque utilisation s'analysant alors en un prêt personnel ou affecté distinct.

Aux termes de l’article L341-4 du même code, le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées notamment par l'article L312-28 est déchu du droit aux intérêts.

En l'espèce, le contrat 14 octobre 2016 permet à l'emprunteur de souscrire plusieurs emprunts distincts, avec faculté de reconstitution du crédit permanent à hauteur du montant souscrit, mais avec des modalités de remboursement par échéances predeterminees suivant un tableau d'amortissement établi lors de chaque utilisation d'une fraction de capital disponible, comportant un taux fixe spécifique selon l'affectation des fonds prêtés. Ce contrat ne prévoit qu'une acceptation donnée par l'emprunteur lors de la conclusion du contrat de crédit réserve.

L’examen des documents démontre l'existence de deux utilisations distinctes les 19 octobre 2020 à hauteur de 30000 euros et 1er mars 2022 à hauteur de 6000 euros, constituant autant d'opérations distinctes remboursables selon des conditions particulières selon formule « crédit classique », ainsi que mentionné dans les documents versés par la banque et ayant donné lieu à deux tableaux d’amortissement, indiquant « prêt personnel ». Leur remboursement est indépendant les uns des autres et deux historiques de compte distincts sont établis.

Il s'ensuit que chacune des utilisations constitue en réalité un emprunt distinct, impliquant des conditions de remboursement différentes, selon les cas, et s'analyse ainsi en une nouvelle offre de contrat, de prêt personnel ou de crédit affecté, dont les conditions de validité sont prévues par le code de la consommation.

Dès lors, en ne délivrant pas une offre conforme au code de la consommation à l'occasion des utilisations successives, la demanderesse n'a pas respecté les exigences légales et réglementaires permettant de fournir à l'emprunteur les informations indispensables et d'exercer sa faculté de rétractation.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur la consultation du FICP

Selon l'article L312-16 du code de la consommation, avant de conclure un contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations ; notamment le prêteur doit consulter le fichier national des incidents de paiement caractérisé (FICP), dans les conditions prescrites par l'arrêté du 26 octobre 2010, qui prévoit une consultation obligatoire par l'organisme de crédit avant toute décision effective d'octroyer un crédit à la consommation.

Le prêteur doit pouvoir justifier de la consultation du fichier, selon les modalités de l'article 13 du même arrêté.

Aux termes de l’article L 312-75 du code de la consommation, avant de proposer à l'emprunteur de reconduire le contrat, le prêteur consulte tous les ans le fichier prévu à l'article L 751-1, tous les trois ans, il vérifie la solvabilité de l'emprunteur dans les conditions fixées à l'article L 312-16 précité.

Aux termes de l’article L341-5 du même code, le prêteur qui accorde un crédit renouvelable sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux obligations des articles L312-64 à L312-66 est déchu du droit aux intérêts. Il résulte de ce texte que les manquements aux obligations relatives à la reconduction annuelle sont sanctionnés par la déchéance du droit aux intérêts sur les sommes prêtées en exécution du contrat reconduit.

En l’espèce, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PARIS CHAUSSEE D'ANTIN ne justifie pas
En l’espèce, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] ne justifie pas de la consultation du FICP de la consultation du FICP préalablement au renouvellement du crédit du 14 octobre 2016, et ne démontre pas avoir respecté son obligation de vérification préalable.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur la vérification de la solvabilité de l'emprunteur :

Selon l’article L312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur.

Selon l'article L341-2 du code de la consommation, le prêteur qui n'a pas respecté les obligations fixées à l’article L312-16 est déchu du droit aux intérêts.

Aux termes de l’article L 312-75 du code de la consommation, avant de proposer à l'emprunteur de reconduire le contrat, le prêteur consulte tous les ans le fichier prévu à l'article L 751-1, tous les trois ans, il vérifie la solvabilité de l'emprunteur dans les conditions fixées à l'article L 312-16 précité.

En l’espèce, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] fournit la fiche de dialogue « ressources/charges » remplie par l’emprunteur mais ne justifie pas avoir vérifié la solvabilité de l’emprunteur au moyen d’un nombre suffisant d’informations, à l’occasion du renouvellement du contrat, tous les trois ans.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur les sommes dues :

En application de l'article L341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, et les sommes perçues au titre des intérêts sont restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.

En outre, la déchéance du droit aux intérêts exclut la possibilité pour le prêteur d'obtenir le paiement de l’indemnité prévue par les articles L312-39 et D312-16 du code de la consommation.

Conformément à l'article L 341-8 précité, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital et la déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par la demanderesse, notamment le contrat de prêt, le tableau d’amortissement du prêt, l’historique du compte et le décompte de la créance que la créance de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] est établie.

Elle s'élève au montant du capital emprunté depuis l'origine sous déduction de l'ensemble des versements de l’emprunteur.

Le capital emprunté correspond à l’ensemble des financements accordés, soit de la totalité des deux utilisations, à hauteur de 30000 euros et 6000 euros, soit un total de 36000 euros.

Les versements de l’emprunteur s’élèvent à :
- 28 échéance de 553,85 euros et une échéance de 548,13 euros, soit 16055,93 euros,
- 12 échéances de 113,92 euros et une échéance de 98,89 euros, soit, 1465,93 euros,
- Soit un total de 17521,86 euros.

Les sommes restant dues s’élèvent à 18478,14 euros, selon le décompte arrêté au 29 août 2023.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [K] [U] au paiement de cette somme.

Sur les intérêts :

En application de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Selon l’article L313-3 du code monétaire et financier, en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire. Le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

Par ailleurs, le Juge doit assurer l’effectivité de la sanction prévue par le droit communautaire (Cour de Justice de l'Union Européenne, 27 mars 2014, C-565/12).

Sur ce point, la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) statuant sur une demande de décision préjudicielle du tribunal d’instance d’Orléans relève qu'il appartient à la juridiction nationale de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté ses obligations avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de ces mêmes obligations , et que dès lors que les montants dont il est déchu sont inférieurs à ceux résultant de l’application des intérêts au taux légal majoré ou si les montants susceptibles d’être perçus par lui ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations, le régime de sanctions en cause au principal n’assure pas un effet réellement dissuasif à la sanction encourue .

La CJUE rappelle qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci.

Elle estime que l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application d’un régime national de sanctions en vertu duquel, en cas de violation par le prêteur de ses obligations , le prêteur est déchu de son droit aux intérêts conventionnels, mais bénéficie de plein droit des intérêts au taux légal, exigibles à compter du prononcé d’une décision de justice condamnant l' emprunteur , lesquels sont en outre majorés de cinq points si, à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit ce prononcé, celui-ci ne s’est pas acquitté de sa dette .

En l'espèce, compte tenu du taux contractuel de %, il apparaît que les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal, de 2,06% pour le premier semestre 2023, et 4,22% pour le deuxième semestre 2023, pour les créanciers professionnels, majoré de plein droit de cinq points deux mois après la signification du jugement, en application de l’article L313-3 du code monétaire et financier, ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont il aurait pu bénéficier s'il avait respecté ses obligations.

Si le débiteur peut solliciter, après condamnation, l'exonération de la majoration, une telle mesure ne reste que facultative, subordonnée à la mise en œuvre d'un recours au stade de l'exécution. Or le prononcé d'une condamnation impliquant la majoration automatique du taux d'intérêt contrevient aux objectifs du droit communautaire, puisque la possible exonération par le juge de l'exécution demeure aléatoire, ce qui laisse subsister dans l'ordonnancement juridique des décisions portant une sanction non effective.

Il convient dès lors également d’écarter la majoration des intérêts afin d'assurer le caractère effectif et dissuasif de la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [K] [U] à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] la somme de 18478,14 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 29 août 2023.

Sur les demandes accessoires :

En application des dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile, il convient de condamner Monsieur [K] [U] aux dépens de l'instance.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés dans le cadre de la présente instance. Il convient de condamner Monsieur [K] [U] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l'article 514 du code de procédure civile, le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire, de droit.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant en audience publique, par jugement réputé contradictoire en premier ressort, rendu par mise à disposition au greffe le jour de son délibéré,

DECLARE recevable la demande en paiement au titre du compte bancaire,

CONDAMNE Monsieur [K] [U] à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] la somme de 20436,32 euros arrêtée au 29 août 2023 avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 26 avril 2023, au titre du compte bancaire,

DECLARE recevable la demande en paiement au titre du prêt « passeport crédit » du 14 octobre 2016,

CONDAMNE Monsieur [K] [U] à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] la somme de 18478,14 euros arrêtée au 29 août 2023 avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 29 août 2023, au titre du prêt « passeport crédit » du 14 octobre 2016,

CONDAMNE Monsieur [K] [U] à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [K] [U] aux dépens,

DEBOUTE la CAISSE DE CREDIT MUTUEL PAVILLONS-[Localité 10] de ses autres demandes et prétentions,

RAPPELLE que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire de droit.

LE GREFFIER LE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 27 / proxi fond
Numéro d'arrêt : 23/03714
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;23.03714 ?
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