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25/03/2024 | FRANCE | N°21/12128

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 6/section 3, 25 mars 2024, 21/12128


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TRIBUNAL
JUDICIAIRE
de BOBIGNY


JUGEMENT CONTENTIEUX DU 25 MARS 2024



AFFAIRE N° RG 21/12128 - N° Portalis DB3S-W-B7F-VQ5D
N° de MINUTE : 24/00173
Chambre 6/Section 3



Monsieur [Z] [K]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Laurent FOURNIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 1924

DEMANDEUR

C/

La S.E.L.A.R.L. OFFICE NOTARIAL DE [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée par Me Thomas RONZEAU, la SCP INTERBARREAUX RONZEAUX & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiair

e : P 0499

Maître [U] [H], Notaire
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Thomas RONZEAU, la SCP INTERBARREAUX RONZEAUX & Associés, avoca...

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TRIBUNAL
JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 25 MARS 2024

AFFAIRE N° RG 21/12128 - N° Portalis DB3S-W-B7F-VQ5D
N° de MINUTE : 24/00173
Chambre 6/Section 3

Monsieur [Z] [K]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Laurent FOURNIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 1924

DEMANDEUR

C/

La S.E.L.A.R.L. OFFICE NOTARIAL DE [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée par Me Thomas RONZEAU, la SCP INTERBARREAUX RONZEAUX & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0499

Maître [U] [H], Notaire
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Thomas RONZEAU, la SCP INTERBARREAUX RONZEAUX & Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0499

DEFENDEURS

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré

Président :Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice Président, Magistrat ayant fait rapport à l’audience

Assesseurs :Monsieur David BRACQ-ARBUS, Juge
Monsieur François DEROUAULT, Juge

Assisté aux débats : Madame Reine TCHICAYA, Greffier

DÉBATS

Audience publique du 22 Janvier 2024, à cette date, l’affaire été mise en délibéré au 25 Mars 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort, signé par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, assisté de Madame Reine TCHICAYA, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte notarié reçu le 27 octobre 2016 par maître [U] [H], de la SELARL Office Notarial de [Localité 6], madame [R] [P], monsieur [O] [P] et monsieur [T] [P] ont vendu à monsieur [Z] [K] une maison d’habitation sise [Adresse 2] (au sein de l’ancien lotissement dénommé « [7] à [Localité 8] »), moyennant le prix de 905.000 euros, dont ils avaient héritée, de [L] [Y], leur grand-mère, décédée le [Date décès 4] 2014.

Courant octobre 2017, monsieur [Z] [K] a fait réaliser des travaux d’aménagement de ce bien, incluant une surélévation d’un étage au niveau des combles du bâtiment principal.

Sur assignation délivrée le 25 janvier 2018, madame [V] [D], madame [I] [E], madame [W] [A] et madame [C] [F] ont toutefois obtenu la condamnation de monsieur [Z] [K] à démolir la surélévation ainsi réalisée en violation d’une servitude non altius tollendi instituée en 1924, par jugement du tribunal judiciaire de Paris du 20 mai 2021, confirmé en appel le 11 février 2022 ; le pourvoi interjeté par monsieur [Z] [K] a été rejeté le 23 novembre 2022.

C’est dans ce contexte que, par actes d’huissier enrôlés le 12 décembre 2021, monsieur [Z] [K] a fait assigner maître [U] [H] et la SELARL Office Notarial de [Localité 6] devant le tribunal judiciaire de Bobigny.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2023, monsieur [Z] [K] sollicite la condamnation de maître [U] [H] et de la SELARL Office Notarial de [Localité 6] :
à lui payer les sommes suivantes : 63.728 euros au titre du préjudice matériel ; 100.000 euros au titre du préjudice moral ; 4.200 euros au titre du préjudice traumatique et des frais de santé ; 99.000 euros au titre de la perte de jouissance ; 86.704 euros au titre des coûts exposés au pure perte en travaux de surélévation ; 77.539 euros au titre des coûts exposés en travaux de démolition ; 19.800 euros au titre de la perte d’exploitation le temps des travaux ; 198.000 euros au titre de la dévalorisation du bien ; 4.519 euros au titre de la perte de chance de réaliser un meilleur investissement ;aux dépens, ainsi qu’à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, il soutient que maître [H] expose, avec sa structure d’exercice, sa responsabilité délictuelle pour manquement à son devoir d’assurer la validité et l’efficacité de l’acte de vente litigieux, en omettant de l’informer sur l’existence de la servitude en cause, pourtant mentionnée dans le précédent titre de propriété, et alors que le notaire avait connaissance de son projet de surélévation ; que les recherches accomplies par le notaire sur la seule période de trente ans précédant la vente étaient insuffisantes, dans un cas où la précédente mutation était particulièrement ancienne, outre que cela ne permet pas d’identifier les éventuelles servitudes, qui sont perpétuelles ; qu’indépendamment des déclarations des vendeurs (deux mineurs et une majeure sans emploi, héritiers non occupants), le notaire aurait ainsi dû se procurer le précédent titre de propriété ; que la responsabilité du notaire n’étant pas subsidiaire, il n’a pas à rechercher préalablement ou parallèlement la responsabilité de ses vendeurs ou de son architecte. Il en déduit être fondé à solliciter réparation de son préjudice, faisant valoir les frais de procédure exposés (63.728 euros), le trouble moral subi (campagne de dénigrement à son encontre, tracas liés aux différentes procédures, impossibilité de se projeter, obligation de réaliser les travaux de démolition dans l’urgence en plein hiver), les frais de thérapie exposés (4.200 euros), la privation de la jouissance de l’étage en surélévation qu’il était censé occuper (99.000 euros, voir page 21 et 22 des conclusions sur le détail du calcul), les travaux de surélévation et de démolition réalisés en pure perte (factures et relevés bancaires à l’appui), la perte d’exploitation sur l’activité de chambres d’hôtes exercée aux étages existants le temps des travaux de démolition (à raison de 4.950 euros HT par mois sur 4 mois), la perte de valeur de la surface créée par la surélévation, et la perte de chance de réaliser un meilleur investissement ; il ajoute qu’il n’appartient pas à la victime lésée de minimiser son préjudice, ce qu’il a pourtant fait dans la mesure du possible ; qu’il n’a été définitivement fixé sur l’existence de la servitude qu’à compter de la décision de la Cour de cassation ; que lorsque les propriétaires riveraines se sont manifestées, la surélévation litigieuse était déjà achevée ; qu’il a néanmoins gelé les travaux d’aménagement intérieur.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 11 octobre 2023, maître [U] [H] et la SELARL Office Notarial de [Localité 6] demandent au tribunal de rejeter les prétentions adverses, d’écarter l’exécution provisoire, et de condamner monsieur [Z] [K] aux dépens ainsi qu’à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de leurs prétentions, ils soutiennent qu’aucune faute ne peut être reprochée au notaire, qui n’a pas à rechercher l’origine de propriété ou l’existence de servitudes au-delà de trente ans avant la vente projetée, sauf déclarations contraires du vendeur ou circonstances exceptionnelles susceptibles d’imposer une vérification plus approfondie, non démontrées en l’espèce ; que ni le titre antérieur, constitué par l’attestation immobilière après décès, ni l’état hypothécaire, ni les vendeurs, ni le certificat d’urbanisme, ne faisaient état de la servitude litigieuse ; qu’il n’est pas plus établi que le notaire était informé du projet de surélévation du demandeur, ni de ce que cette surélévation était une condition déterminante. Ils ajoutent que le manquement reproché au notaire est sans lien de causalité avec le préjudice invoqué dans la mesure où le demandeur a poursuivi ses travaux après avoir été informé, par les riverains, de l’existence de la servitude ; que l’arrêt d’appel a clairement précisé que la servitude permettait certains travaux, de sorte qu’il appartenait au demandeur d’adapter son projet en temps utile, d’autant qu’il était assisté d’un architecte, qui aurait dû lui conseiller cette adaptation, le notaire étant exonéré par cette faute. Ils font enfin valoir que le préjudice n’est pas prouvé ; qu’il appartenait à monsieur [K] d’agir en garantie contre ses vendeurs sur le fondement de l’article 1638 du code civil, lequel n’exige pas d’élément intentionnel, sans possibilité de se retourner contre le notaire en lieu et place, s’agissant en fait de réclamer une réduction du prix de vente ; que mieux informé, le demandeur n’aurait pas acheté le bien litigieux, de sorte que ses demandes indemnitaires sont sans lien avec le manquement reproché ; que divers frais, exposés après la révélation de la servitude, doivent rester à la charge du demandeur, qui ne peut invoquer sa propre turpitude ; que les frais de procédure relèvent de l’article 700 du code de procédure civile ; que les éléments invoqués au soutien du préjudice moral ne sont pas imputables au notaire ; que le trouble de jouissance n’est lié qu’au refus du demandeur d’adapter son projet de travaux ; que le paiement effectif des travaux n’est pas justifié, outre que les travaux de démolition, dont la réalisation n’est pas justifiée, constituent l’exécution d’une décision de justice à laquelle le notaire est étranger ; que la perte d’exploitation n’est pas plus justifiée dans son principe, son quantum et son lien de causalité ; que la dévalorisation alléguée est inexistante et constitue au mieux une réduction de prix, à réclamer aux vendeurs ; que la perte de chance de réaliser un meilleur investissement n’est pas prouvée, d’autant que l’usage déclaré était l’habitation.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties, il sera renvoyé à la lecture des conclusions précitées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la mise en état a été fixée au 11 octobre 2023 par ordonnance du même jour.

Par conclusions notifiées le 25 octobre 2023, monsieur [Z] [K] demande la révocation de la clôture. Le 27 décembre 2023, il dépose de nouvelles conclusions au fond ainsi qu’une pièce complémentaire.

Par message RPVA notifié le 16 janvier 2024, maître [U] [H] et la SELARL Office Notarial de [Localité 6] acceptent la demande de révocation de la clôture à la condition que l’affaire soit renvoyée à la mise en état pour leur permettre de répliquer.

A l'audience du 22 janvier 2024, les défendeurs ont accepté la révocation de la clôture sans renvoi à la mise en état et ont été autorisés à produire une note en délibéré sur la nouvelle pièce communiquée en demande (ce qu’ils n’ont finalement pas fait).

L'affaire a été mise en délibéré au 25 mars 2024, date du présent jugement.

MOTIFS

Sur la révocation de la clôture

Conformément à l’accord des parties et pour permettre d’approfondir le débat contradictoire, il convient de révoquer l’ordonnance de clôture du 11 octobre 2023 et de fixer la nouvelle clôture au 22 janvier 2024.

Sur les demandes principales

Engage sa responsabilité civile à l'égard de son client, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, le notaire qui commet un manquement dans l'exercice de sa mission légale d'authentification des actes juridiques, tant à raison de son obligation d'assurer la validité et l'efficacité des actes reçus, qu'au titre de son devoir d'information et de conseil dont il n'est pas dispensé par les compétences personnelles de son client ou l'intervention d'un autre professionnel et dont la preuve de l'exécution lui incombe.

En particulier, le notaire qui reçoit une vente immobilière est tenu d'informer l'acquéreur de l'étendue des droits de propriété cédés avec précision et sans ambiguïté, et de vérifier les éléments qui, par leur nature ou leur portée juridique, conditionnent la validité ou l'efficacité de l’opération à laquelle il participe, ou bien qui ne paraissent pas conformes aux informations dont il est par ailleurs en possession.

Il appartient en revanche au client qui entend voir engager la responsabilité civile de son notaire de rapporter la preuve du préjudice dont il sollicite réparation ; qu'il soit entier ou résulte d'une perte de chance, ce préjudice, pour être indemnisable, doit être certain, actuel et en lien direct avec le manquement commis ; la réparation de la perte de chance doit être mesurée en considération de l'aléa jaugé et ne saurait être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

En l’espèce, parmi les investigations et contrôles que le devoir d’efficacité impose nécessairement au notaire chargé d’instrumenter une vente immobilière, indépendamment des éléments, déclarations et informations portés à sa connaissance, figurent la recherche et consultation du dernier acte translatif de propriété, quel que soit son ancienneté, même au-delà de trente ans ; il s’agit en effet d’une vérification élémentaire qui, le cas échéant, peut en susciter de plus approfondies, quant à l’étendue des droits cédés et les éventuelles charges pesant sur le bien vendu.

Au cas particulier, maître [U] [H] ne pouvait donc se contenter de l’attestation notariée de propriété dressée par maître [B] [J] le 24 octobre 2016, qui confirme uniquement que les consorts [P] ont effectivement hérité de l’immeuble litigieux de [L] [Y], mais ne dit rien de la désignation exacte du bien vendu ni des éventuelles charges pesant sur celui-ci.

Précisément, la recherche et consultation de l’acte notarié du 9 décembre 1963 par lequel [L] [Y] avait acquis l’immeuble en cause – pourtant visé à l’acte de vente litigieux – aurait permis au notaire de découvrir l’existence de la servitude d’interdiction de surélever en vigueur, nonobstant les déclarations des consorts [P], et de porter cette information à la connaissance de monsieur [Z] [K].

Ce faisant, maître [U] [H] expose sa responsabilité, solidairement avec sa société d’exercice, à l’égard du demandeur, à charge pour ce dernier de rapporter la preuve du préjudice dont il sollicite réparation.

A cet égard, contrairement à ce qui est soutenu en défense, le défaut d’information reproché au notaire n’a pas généré qu’une perte de chance de renoncer à l’acquisition de l’immeuble litigieux – qui existe indépendamment de la réalisation des travaux de surélévation et n’est pas réclamée par le demandeur –, mais a aussi permis l’accomplissement desdits travaux en violation de la servitude litigieuse.

En effet, le notaire, à qui incombe sur ce point la charge de la preuve, ne démontre pas suffisamment que, mieux informé, monsieur [Z] [K] aurait tout de même entrepris les travaux de surélévation litigieux ; en effet :
il est au contraire établi (pièces numéro 72 et 73 du demandeur) que les travaux de surélévation étaient déjà achevés lorsque le demandeur a été informé, pour la première fois, fin novembre 2017, de l’existence de la servitude en cause par ses riverains ; le fait que le demandeur se soit, a posteriori, défendu en justice, en contestant l’existence et l’opposabilité de la servitude litigieuse, pour éviter d’avoir à démolir la surélévation ainsi édifiée, ne permet pas de considérer qu’il aurait, a priori, pris sciemment le risque de construire la surélévation en violation de ladite servitude.
Il est ainsi acquis que, sans la faute du notaire, monsieur [Z] [K] n’aurait pas procédé aux travaux de surélévation litigieux, peu important que le demandeur dispose d’un éventuel autre recours contre ses vendeurs, dès lors que la responsabilité du notaire n’est pas subsidiaire.

C’est donc à bon droit que monsieur [Z] [K] réclame la réparation intégrale des conséquences préjudiciables résultant de la réalisation de ces travaux illicites, soit, en l’état des justificatifs communiqués :
63.728 euros au titre des frais exposés dans le cadre de la défense à la procédure judiciaire initiée par les riverains en démolition de la surélévation (pièces numéro 14 à 23 du demandeur), sans possibilité de reprocher à ce titre au demandeur de s’être défendu jusqu’au bout, dès lors qu’il est justifié et pas réellement discuté que sa défense n’était pas manifestement dénuée de sérieux ; il sera précisé que les dépens et indemnités payées au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure avec les riverains constituent bien un préjudice réparable dans le cadre de l’action en responsabilité du notaire ; 86.704 euros au titre du coût des travaux de surélévation (pièces numéro 22 à 45 du demandeur), exposé en pure perte compte tenu de la démolition judiciairement ordonnée, étant relevé que les relevés bancaires communiqués (pièce numéro 78 du demandeur) corroborent en partie le paiement effectif de cette somme, laquelle est en toute hypothèse due par le demandeur compte tenu des factures produites ; 4.000 euros au titre de la perte de chance d’employer les sommes précitées à de meilleurs investissements, calculée, comme le propose à juste titre le demandeur, à partir du taux d’intérêt du livret A, qui correspond à un rendement minimal, sur lequel est appliqué un taux de perte de chance compte tenu de l’aléa en présence sur le sort qui aurait été réellement réservé à ces fonds, donc sur leur rentabilité réelle ; 77.539 euros au titre du coût des travaux de démolition de la surélévation (pièces numéro 46 à 50, 70 du demandeur), exposé en pure perte, étant relevé que les relevés bancaires communiqués (pièce numéro 79 du demandeur) corroborent en partie le paiement effectif de cette somme, laquelle est en toute hypothèse due par le demandeur compte tenu des factures produites, et que la réalisation effective des travaux est également justifiée par les factures produites et l’attestation de conformité versée au débat (pièce numéro 90 du demandeur) ; 10.000 euros au titre du trouble moral lié aux tracas de tous ordres occasionnés par la situation litigieuse (énergie consacrée, déception et stress, exposition médiatique locale).
Seront en revanche écartés :
les frais de psychothérapie Gelstalt exposés, en ce que leur rapport avec le présent litige n’est pas démontré ; la somme réclamée au titre de la perte de jouissance, en ce que l’impossibilité d’habiter les combles est sans lien démontré avec la faute reprochée au notaire, mais plutôt avec l’interdiction de surélever, outre que rien ne permet d’établir que monsieur [Z] [K] avait pour projet d’habiter l’étage surélevé ; la somme réclamée au titre de la perte d’exploitation des chambres d’hôtes le temps des travaux de démolition, en ce que son quantum suppose de connaître, de manière objective, par une attestation comptable par exemple, et non par des factures établies par le demandeur lui-même, le chiffre d’affaires moyen tiré de l’exploitation de ces chambres d’hôtes ; la somme réclamée au titre de la dévalorisation du bien, qui est sans rapport avec la faute reprochée au notaire, puisque rien n’indique que le prix payé pour acquérir l’immeuble litigieux sera excessif eu égard à l’existence de la servitude d’interdiction de surélever, ni que le bien aurait perdu en valeur entre son état à l’achat – avant surélévation – et son état depuis les travaux de démolition de la surélévation.
Sur les demandes accessoires

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En application de l'article 700 du même code, le tribunal condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par principe, le tribunal alloue à ce titre une somme correspondant aux frais réellement engagés, à partir des justificatifs produits par les parties, ou, en l’absence de justificatif, à partir des données objectives du litige (nombre de parties, durée de la procédure, nombre d’écritures échangées, complexité de l’affaire, incidents de mise en état, mesure d’instruction, etc.). Par exception et de manière discrétionnaire, le tribunal peut, considération prise de l’équité ou de la situation économique des parties, allouer une somme moindre, voire dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En conséquence, les défendeurs, parties perdantes, seront condamnés in solidum aux dépens, ainsi qu'à payer au demandeur une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens fixée, en équité et en l'absence de justificatif, à 5.000 euros.

Enfin, aucun élément ne justifie d'écarter l'exécution provisoire de droit, laquelle est compatible avec la nature de l'affaire au sens de l'article 514-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et rendu en premier ressort,

Ordonne la révocation de l’ordonnance de clôture du 11 octobre 2023 ;

Fixe la nouvelle clôture au 22 janvier 2024 ;

Condamne solidairement maître [U] [H] et la SELARL Office Notarial de [Localité 6] à payer à monsieur [Z] [K] les sommes suivantes :
63.728 euros au titre des frais exposés dans le cadre de la défense à la procédure judiciaire initiée par les riverains en démolition de la surélévation ; 86.704 euros au titre du coût des travaux de surélévation ; 4.000 euros au titre de la perte de chance d’employer les sommes précitées à de meilleurs investissements ; 77.539 euros au titre du coût des travaux de démolition de la surélévation ; 10.000 euros au titre du préjudice moral ;
Déboute monsieur [Z] [K] du surplus de ses demandes indemnitaires ;

Condamne in solidum maître [U] [H] et la SELARL Office Notarial de [Localité 6] aux dépens ;

Condamne in solidum maître [U] [H] et la SELARL Office Notarial de [Localité 6] à payer à monsieur [Z] [K] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit du présent jugement ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La minute a été signée par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, et par Madame Reine TCHICAYA, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 6/section 3
Numéro d'arrêt : 21/12128
Date de la décision : 25/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-25;21.12128 ?
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