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18/03/2024 | FRANCE | N°23/02393

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 6/section 3, 18 mars 2024, 23/02393


TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY



JUGEMENT CONTENTIEUX DU 18 MARS 2024


Chambre 6/Section 3
AFFAIRE: N° RG 23/02393 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XJKV
N° de MINUTE : 24/00191



Madame [V] [R] épouse [B]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Pierre COLAS DE LA NOUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0583

Monsieur [S] [B]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Pierre COLAS DE LA NOUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0583

DEMANDEURS

C/

Madame [A] épouse [J]
[Adresse 3]>[Localité 5]
représentée par Me Jérémy MARUANI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 1555

Monsieur [N] [D] [Z] [J]
[Adresse 3]
[Localité 5]
r...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 18 MARS 2024

Chambre 6/Section 3
AFFAIRE: N° RG 23/02393 - N° Portalis DB3S-W-B7H-XJKV
N° de MINUTE : 24/00191

Madame [V] [R] épouse [B]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Pierre COLAS DE LA NOUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0583

Monsieur [S] [B]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Pierre COLAS DE LA NOUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0583

DEMANDEURS

C/

Madame [A] épouse [J]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Jérémy MARUANI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 1555

Monsieur [N] [D] [Z] [J]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Jérémy MARUANI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 1555

DEFENDEURS

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur François DEROUAULT, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Maud THOBOR, greffier.
DÉBATS

Audience publique du 15 Janvier 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 18 Mars 2024.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement Contradictoire et en premier ressort, par Monsieur François DEROUAULT, assisté de Madame Madame Reine TCHICAYA, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant promesse unilatérale de vente du 11 juillet 2022 instrumentée par Me [C], M. et Mme [B] ont consenti à vendre à M. et Mme [J] un appartement sis [Adresse 1] (Hauts-de-Seine) pour un prix de 252 000 euros, sous la condition suspensive d’obtention d’un prêt immobilier.

Un acompte a été versé à hauteur de 12 600 euros par les époux [J] sur le compte du notaire désigné séquestre.

Les époux [J] n’ont pas obtenu de prêt. Les parties ne s’accordent pas sur l’accomplissement par ces derniers de leurs diligences.

Par acte d'huissier en date du 6 février 2023, les époux [B] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Bobigny les époux [J] aux fins d’indemnisation de leur préjudice.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 mai 2023, les époux [B] demandent au tribunal de :
- dire que la somme consignée auprès de la Caisse des dépôts et consignations doit être virée sur le compte CARPA de leur avocat ;
- condamner les époux [J] à payer la somme de 12 600 euros au titre de l’indemnité d’immobilisation, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 décembre 2022 ;
- condamner les époux [J] à payer la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 mars 2023, les époux [J] demandent au tribunal de :
- débouter les demandeurs de leurs prétentions ;
- les condamner à payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- les condamner à payer la somme de 5 000 euros au titre de la procédure abusive ;
- les condamner à payer la somme de 5 400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens ;
- faire injonction aux époux [B] de donner instruction à la Caisse des dépôts et consignations sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 septembre 2023.

L'affaire a été inscrite au rôle de l'audience du 15 janvier 2024, où elle a été appelée.

Sur quoi elle a été mise en délibéré au 18 mars 2024 afin qu'y soit rendue la présente décision.

MOTIFS DE LA DECISION

I. Sur les demandes en paiement

L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 1304-3 du même code précise que la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.

Il résulte par ailleurs des dispositions d'ordre public de l'article L313-41 du code de la consommation que :
- lorsque la promesse de vente immobilière indique que le prix est payé, directement ou indirectement, même partiellement, à l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les dispositions du code de la consommation relatives au crédit immobilier, cet acte est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assument le financement ;
- que la durée de validité de cette condition suspensive ne peut être inférieure à un mois à compter de la date de la signature de l'acte ou, s'il s'agit d'un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la formalité de l'enregistrement, à compter de la date de l'enregistrement ;
- que lorsque la condition suspensive n'est pas réalisée, toute somme versée d'avance par l'acquéreur à l'autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit ;
- que les parties ne peuvent imposer à l'acquéreur un délai intermédiaire pour déposer sa demande de prêt (voir en ce sens Cass, Civ 3, 12 février 2014, 12-27.182), ni lui imposer de notifier au vendeur la non-obtention du prêt dans le délai prévu (voir en ce sens Cass, Civ 1, 9 mai 1996, 94-12.133) ;
- que les parties peuvent en revanche exiger de l'acquéreur qu'il justifie avoir sollicité plusieurs établissements de crédit (voir en ce sens Cass, Civ 3, 21 juillet 1998) ;
- qu'il appartient au bénéficiaire de la promesse de vente de démontrer qu'il a bien sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse, auquel cas, il revient au promettant de rapporter la preuve que le bénéficiaire a empêché l'accomplissement de la condition suspensive.

En l’espèce, la promesse unilatérale de vente prévoit que « le bénéficiaire ayant recours à un financement soumis aux dispositions de l’article L. 313-40 du code de la consommation, le présent avant-contrat est conclu sous la condition suspensive, stipulée au seul profit du bénéficiaire de l’obtention par lui d’un ou plusieurs prêts pour acquérir l’immeuble objet du présent accord. Dans ce cadre, le bénéficiaire s’oblige à solliciter un prêt correspondant aux caractéristiques ci-après :
− Montant global maximum du ou des prêts envisagés : TROIS CENT DIX MILLE EUROS (310.000,00 €) ;
− Durée maximale : 25 ans ;
− Taux d’intérêt maximal hors frais de dossier, assurance et de garanties : 2,5 % 
[…]
Le bénéficiaire s’engage à effectuer toutes les démarches nécessaires pour obtenir son financement et notamment à solliciter une demande de prêt remplissant les caractéristiques sus-énoncées et ce, dans un délai de quinze (15) jours à compter d’aujourd’hui. Dans ce cadre, afin de faciliter l’obtention d’un tel crédit et de pouvoir choisir parmi ces offres proposées, il s’oblige à déposer à minima deux (2) demandes de prêt simultanément. Par courrier, le bénéficiaire devra tenir informé le promettant de ses principales démarches et notamment du dépôt de la demande de prêt ainsi que de la réponse de l’établissement bancaire sollicité et ce, sous un délai de dix (10) jours. Une copie de ces différents échanges devra être adressée pour information aux notaires soussignés et le cas échéant participant. »

Les époux [J] produisent :
- un courrier de refus de financement de la société Credixia dans les conditions de la promesse ;
- un courrier de refus de financement de la société Crédit du Nord dans les conditions de la promesse.

Les époux [B] exposent que ce dernier serait un faux au motif que le papier ne comporte pas l’en-tête de la société et que le courrier serait entaché de plusieurs anomalies (qualité du rédacteur, formules de politesse discordantes), sans pour autant rapporter la preuve objective et incontestable de leurs affirmations, alors que pèse sur eux la charge d’une telle preuve.

Partant, il sera retenu que les époux [J] ont accompli l’ensemble des diligences auxquelles ils s’étaient engagées en vue de la réalisation de la condition suspensive ; que celle-ci n’a pour autant pas été réalisé ; qu’en conséquence, la promesse de vente est caduque et il ne peut être fait application de la clause d’indemnité d’immobilisation.

Le tribunal observe que le moyen tiré de la non-communication par les bénéficiaires aux promettants de leur dépôt de demande de financement est inopérant dès lors qu’à le supposer bien-fondé, il ne peut avoir pour effet de réputer réalisée la condition suspensive et donc d’octroyer l’indemnité d’immobilisation au profit des promettants.

Par conséquent, les époux [B] seront déboutés de leurs demandes.

S’agissant de la restitution de la somme de 16 200 versée à titre d’acompte, les époux [J] ont formulé une demande dans leur dispositif dans les termes suivant : « faire injonction Monsieur [S] [I] [B] et Madame [V] [Y] [R] de donner instruction à la Caisse des dépôts et consignations dépositaire de la somme de 12 600 euros, transmise par Me [C], dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ».

Il s’infère de cette formulation – incomplète – que les époux [J] demandent la restitution de la somme de 12 600 euros versée par eux.

Compte tenu de ce qui précède, il sera fait droit à cette demande, étant toutefois pris en considération le fait qu’aucun élément produit aux débats ne justifie de la consignation de cette somme auprès de la Caisse des dépôts et consignations. Il n’apparaît pas nécessaire de prononcer une astreinte dès lors que les époux [B] ne sont pas en possession de cette somme. Partant, il sera ordonné la restitution de la somme de 12 600 euros versée par les époux [J] le 3 août 2022 sur le compte de Maître [C].

II. Sur les demandes reconventionnelles en paiement

Les époux [J] formulent une demande en paiement de la somme de 2 000 euros sans la justifier ni en préciser le fondement juridique ; ils en seront déboutés.

Ils formulent ensuite une demande en paiement de la somme de 5 000 euros pour procédure abusive.

Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Le tribunal déboutera les époux [J] de leur demande de ce chef dès lors que les observations formulées par les demandeurs contre leurs pièces justificatives, si elles sont insuffisantes à ôter à celles-ci toute force probante, n’en révèlent pas moins une lecture attentive et honnête qui rend infondée les accusations de mauvaise foi ou d’abus dans l’exercice du droit d’agir.

III. Sur les mesures de fin de jugement

A. Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à charge de l'autre partie.

Les époux [B] seront condamnés aux dépens.

B. Sur les frais irrépétibles

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le tribunal condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par principe, le tribunal alloue à ce titre une somme correspondant aux frais réellement engagés, à partir des justificatifs produits par les parties, ou, en l’absence de justificatif, à partir des données objectives du litige (nombre de parties, durée de la procédure, nombre d’écritures échangées, complexité de l’affaire, incidents de mise en état, mesure d’instruction, etc.). Par exception et de manière discrétionnaire, le tribunal peut, considération prise de l’équité ou de la situation économique des parties, allouer une somme moindre, voire dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

Les époux [B] seront condamnés à payer aux époux [J] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

C. Sur l’exécution provisoire

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Il sera rappelé l’exécution provisoire du jugement.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et en audience publique et mis à disposition au greffe,

DEBOUTE M. et Mme [B] de leurs demandes ;

ORDONNE la restitution à M. et Mme [J] de la somme de 12 600 euros versée par eux le 3 août 2022 sur le compte de Maître [C] ;

DEBOUTE M. et Mme [J] de leurs autres demandes ;

CONDAMNE M. et Mme [B] aux dépens ;

CONDAMNE M. et Mme [B] à payer à M. et Mme [J] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE l’exécution provisoire du jugement.

La minute est signée par Monsieur François DEROUAULT, juge, assisté de Madame Reine TCHICAYA, greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 6/section 3
Numéro d'arrêt : 23/02393
Date de la décision : 18/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-18;23.02393 ?
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