La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2024 | FRANCE | N°23/03042

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 27 / proxi fond, 07 mars 2024, 23/03042


TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DU RAINCY
[Adresse 4]
[Localité 7]

Téléphone : [XXXXXXXX01]

@ : [Courriel 8]





REFERENCES : N° RG 23/03042 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YP5V

Minute : 24/188







Société CA CONSUMER FINANCE venant aux droits de la société MENAFINANCE
Représentant : Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0430



C/


Monsieur [E] [F] [P]










Exécutoire délivrée le :
à :


Copie certifiée conforme délivrée le :


à :





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT






Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité du Raincy en date du 07 Mars 2024 par Madame Fanny TEMAM, en qualité de juge ...

TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DU RAINCY
[Adresse 4]
[Localité 7]

Téléphone : [XXXXXXXX01]

@ : [Courriel 8]

REFERENCES : N° RG 23/03042 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YP5V

Minute : 24/188

Société CA CONSUMER FINANCE venant aux droits de la société MENAFINANCE
Représentant : Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0430

C/

Monsieur [E] [F] [P]

Exécutoire délivrée le :
à :

Copie certifiée conforme délivrée le :
à :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT

Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité du Raincy en date du 07 Mars 2024 par Madame Fanny TEMAM, en qualité de juge des contentieux de la protection assistée de Madame Sandra GAGNOUX, greffier ;

Après débats à l'audience publique du 18 Janvier 2024 tenue sous la présidence de Madame Fanny TEMAM, juge des contentieux de la protection, assistée de Madame Sandra GAGNOUX, greffier audiencier ;

ENTRE DEMANDEUR(S) :

Société CA CONSUMER FINANCE venant aux droits de la société MENAFINANCE,
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 5]

Représentée Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0430

D'UNE PART

ET DÉFENDEUR :

Monsieur [E] [F] [P],
demeurant [Adresse 3]
[Localité 6]

non comparant, ni représenté

D'AUTRE PART

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 31 août 2017, la SA MENAFINANCE a consenti à Monsieur [E] [F] [P] un crédit renouvelable d’une durée d’un an renouvelable d'un montant maximum en capital de 700 euros, avec intérêts au taux débiteur variable, calculé selon les sommes réellement utilisées.

Selon offre d’augmentation de capital acceptée le 25 août 2021, la SA CA CONSUMER FINANCE le montant total du crédit accordé a été fixé à 1000 euros, avec intérêts au taux débiteur variable, calculé selon les sommes réellement utilisées.

La SA CA CONSUMER FINANCE a adressé à Monsieur [E] [F] [P] une mise en demeure d'avoir à régulariser les échéances impayées à hauteur de 1373,62 euros par lettre recommandée en date du 17 février 2023, reçue le 3 mars 2023.

Elle a prononcé la résiliation du contrat et demandé le paiement des sommes dues par lettre recommandée en date du 10 mars 2023.

Par acte d'huissier en date du 20 novembre 2023, la SA CA CONSUMER FINANCE a fait assigner Monsieur [E] [F] [P] devant le juge des contentieux de la protection siégeant au Tribunal de proximité du Raincy afin de :
condamner Monsieur [E] [F] [P] au paiement de la somme de 11813,49 euros, avec intérêts au taux de 4,82% l'an à compter du 10 mars 2023, le condamner au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.
L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 18 janvier 2024.

A l'audience la SA CA CONSUMER FINANCE, représentée, maintient ses demandes.

Elle précise que la forclusion biennale n'est pas encourue, le premier incident de paiement non régularisé se situant le 7 août 2022, et qu'elle est dès lors bien fondée à obtenir la condamnation de l’emprunteuse au paiement du solde des sommes dues augmentées des intérêts au taux contractuel, au visa des articles L311-1 et suivants du code de la consommation. Elle indique que les mensualités de l'emprunt n'ont pas été régulièrement payées, ce qui l'a contraint à prononcer la déchéance du terme, rendant la totalité de la dette exigible.
Elle a également pu émettre ses observations sur le respect des règles d'ordre public fixées par le code de la consommation et notamment elle précise que les fonds ont été mis à disposition de l’emprunteuse après l’expiration du délai de sept jours. Elle indique disposer de la fiche d’information préalable, de la notice de l'assurance, de la fiche de dialogue, des éléments de solvabilité et de la justification de consultation du FICP.

Monsieur [E] [F] [P], régulièrement assigné à l'étude, ne comparait pas et n'est représenté.

À l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a avisé les parties que le jugement serait prononcé le 7 mars 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction.

MOTIVATION DE LA DECISION

Conformément à l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait alors droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande principale

Sur l'office du juge

En application de l'article R632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

L'article L314-26 du code de la consommation précise que les dispositions des chapitres II et III et des sections II à VII du chapitre IV du code de la consommation sont d'ordre public.

En l'espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE a évoqué la régularité de l'offre de prêt et a pu formuler ses observations quant au respect des dispositions d'ordre public des articles L312-1 et suivants du code de la consommation.

Sur la recevabilité de la demande

En application de l'article R312-35 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat de prêt du 31 août 2017, les actions en paiement engagées devant le tribunal judiciaire à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme, le premier incident de paiement non régularisé ou encore, dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable, le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti.

En l'espèce, il ressort de l'historique de compte que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu le 7 août 2022 et que l'assignation a été signifiée le 20 novembre 2023. Dès lors, la demande en paiement est recevable.

Sur l’exigibilité de la créance 

Aux termes de l’article L312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

En application des articles 1224 et 1225 du code civil, la résolution peut résulter de l'application d'une clause résolutoire, qui précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat. En ce cas, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution, qui ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.
Ainsi, si le contrat de prêt peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque être déclarée acquise au créancier sans délivrance d’une mise en demeure restée sans effet précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le prêt stipule qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

Il ressort des pièces communiquées que Monsieur [E] [F] [P] a cessé de régler les échéances du prêt. La SA CA CONSUMER FINANCE, qui a fait parvenir à Monsieur [E] [F] [P] une demande de règlement des échéances impayées le 17 février 2023, restée sans réponse, était dès lors bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme et de la résiliation de plein droit du contrat et à demander le remboursement immédiat des sommes exigibles selon les termes du contrat.

Sur la déchéance du droit aux intérêts 

Sur la FIPEN

Aux termes de l'article L. 312-12 du Code de la consommation, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte-tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Il résulte de ces dispositions que doit figurer parmi les pièces du dossier du prêteur une fiche d'informations précontractuelle qui doit mentionner l'ensemble des informations énumérées par l'article R. 312-2 du Code de la consommation, et notamment, le montant, le nombre et la périodicité des échéances, et, sauf en cas de location avec option d'achat, le taux débiteur et les conditions applicables à ce taux ainsi que le taux annuel effectif global, à l'aide d'un exemple représentatif mentionnant toutes les hypothèses utilisées pour le calcul de ce taux. Ces informations sont présentées conformément à la fiche d'information annexée à l'article R. 312-5 du Code précité.

Il est désormais constant qu'en application de ce texte, la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations, lui a remis la fiche précontractuelle d'information normalisée européenne, constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, étant précisé que la production par la banque de la fiche d'informations pré-contractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs, renseignée notamment des chefs de l'identité du prêteur, de la description des principales caractéristiques du crédit et du coût du crédit, le document portant sur chacune des 3 pages comme référence le numéro du contrat de prêt, si elle ne porte pas la signature des emprunteurs ni même l'indication de leurs initiales, est insuffisante à conforter utilement l'offre (Cass. Civ. 1ère, 7 juin 2023, n°22-15.552)

Le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par l’article L. 312-12 est déchu du droit aux intérêts, en application de l’article L. 341-1 du Code de la consommation.

En l'espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE produit aux débats une fiche d'information précontractuelles qui aurait été fournie à Monsieur [P].

Néanmoins, ce document, bien qu'il comporte les caractéristiques essentielles du contrat de prêt, l'identité du prêteur, le coût du crédit et le numéro du contrat de prêt, ne porte pas la signature de l'emprunteur ni même l'indication de ses initiales. Dès lors, ce document est insuffisant à corroborer utilement la mention contenue à l'offre selon laquelle l'emprunteur reconnaît que la fiche d'informations précontractuelles lui a été remise lors de la conclusion du contrat de prêt. En outre, le fichier de preuve de la signature électronique vise « l'ensemble des documents contractuels », sans autre précision et sans preuve que la FIPEN était incluse dans lesdits documents.

A défaut de preuve de la remise de la fiche d'information précontractuelle, il est donc établi que l'offre de crédit faite à Monsieur [P] n'est pas conforme aux prescriptions des articles susvisés.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat, l'irrégularité sanctionnée affectant les conditions de sa formation.
Sur la notice d’assurance

L’article L.312-29 du code de la consommation dispose que lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus.

L'article L. 341-4 du même code sanctionne le non-respect de ces dispositions par la déchéance du droit aux intérêts.

Par ailleurs, en application des dispositions l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Il est désormais constant qu'en application de ces textes, la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations, lui a remis la notice d'assurance, constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, étant précisé que la production par la banque de ladite notice, si elle ne porte pas la signature des emprunteurs ni même l'indication de leurs initiales, est insuffisante à conforter utilement l'offre (Cass. Civ. 1ère, 7 juin 2023, n°22-15.552).

En l’espèce, Monsieur [E] [F] [P] a adhéré à l’assurance facultative qui a été proposée en même temps que le crédit qu’il a souscrit. La SA CA CONSUMER FINANCE verse aux débats son exemplaire du contrat de crédit consenti à Monsieur [J] [X] aux termes duquel l'emprunteur reconnaît « être en possession […] de la notice d’information sur l’assurance” mais elle ne produit pas d’exemplaire de ladite notice.

Les seules mentions pré-imprimées contenues dans l'offre de prêt précédant la signature de l'emprunteur, si elles peuvent constituer des indices de la remise de documents, ne sont pas corroborées.

Ainsi, le demandeur ne démontre pas avoir remis à Monsieur [E] [F] [P] une notice conforme aux dispositions du code de la consommation.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur la consultation du FICP

Selon l'article L.312-16 du code de la consommation, avant de conclure un contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations ; notamment le prêteur doit consulter le fichier national des incidents de paiement caractérisé (FICP), dans les conditions prescrites par l'arrêté du 26 octobre 2010, qui prévoit une consultation obligatoire par l'organisme de crédit avant toute décision effective d'octroyer un crédit à la consommation.

Le prêteur doit pouvoir justifier de la consultation du fichier, selon les modalités de l'article 13 du même arrêté.

Il résulte de l’article L341-2 du même code, que le prêteur qui n'a pas respecté les obligations des articles L312-14 et L312-16 dudit code est déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En l’espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE produit diverses consultations du fichier national des incidents de paiement caractérisé (FICP) entre 2017 et 2021, la dernière portant la date du 4 mai 2021. Il s’agit des consultations obligatoires lors de la souscription du premier contrat de crédit et des consultations annuelles afférentes à ce contrat.

Néanmoins, la banque ne justifie pas de la consultation du FICP lors de l’augmentation de capital du mois d’août 2021, de sorte qu'il n'est pas rapporté la preuve par le prêteur que la consultation du FICP a eu lieu antérieurement au déblocage des fonds lors de l’augmentation de capital.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur les sommes dues

En application de l'article L341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, et les sommes perçues au titre des intérêts sont restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.

En outre, la déchéance du droit aux intérêts exclut la possibilité pour le prêteur d'obtenir le paiement de l’indemnité prévue par les articles L312-39 et D312-16 du code de la consommation.

Conformément à l'article L 341-8 précité, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital et la déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par la demanderesse, notamment le contrat de prêt, l’historique du compte et le décompte de la créance que la créance de la SA CA CONSUMER FINANCE est établie.

Elle s'élève au montant du capital emprunté depuis la dernière opération de crédit en exécution du contrat de crédit renouvelable, sous déduction de l'ensemble des versements de l’emprunteuse.

Le capital emprunté s’élève à 12.978,61 euros.

Les versements effectués par l’emprunteur s’élèvent à 4.285,79 euros antérieurement à la déchéance du terme. Aucun versement n’est intervenu postérieurement à la déchéance du terme.

Soit un total restant dû de 8.692,82 euros, selon historique de compte et décompte du 8 mars 2023.

Sur les intérêts

En application de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Selon l’article L313-3 du code monétaire et financier, en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire. Le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

Par ailleurs, le Juge doit assurer l’effectivité de la sanction prévue par le droit communautaire (Cour de Justice de l'Union Européenne, 27 mars 2014, C-565/12).

Sur ce point, la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) statuant sur une demande de décision préjudicielle du tribunal d’instance d’Orléans relève qu'il appartient à la juridiction nationale de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté ses obligations avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de ces mêmes obligations , et que dès lors que les montants dont il est déchu sont inférieurs à ceux résultant de l’application des intérêts au taux légal majoré ou si les montants susceptibles d’être perçus par lui ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations, le régime de sanctions en cause au principal n’assure pas un effet réellement dissuasif à la sanction encourue .

La CJUE rappelle qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci.

Elle estime que l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application d’un régime national de sanctions en vertu duquel, en cas de violation par le prêteur de ses obligations , le prêteur est déchu de son droit aux intérêts conventionnels, mais bénéficie de plein droit des intérêts au taux légal, exigibles à compter du prononcé d’une décision de justice condamnant l' emprunteur , lesquels sont en outre majorés de cinq points si, à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit ce prononcé, celui-ci ne s’est pas acquitté de sa dette .

En l'espèce, compte tenu du taux contractuel de 4,82%, il apparaît que les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal de 5,07% pour le premier semestre 2024 pour les créanciers professionnels, majoré de plein droit de cinq points deux mois après la signification du jugement, en application de l’article L313-3 du code monétaire et financier, sont supérieurs à ceux dont il aurait pu bénéficier s'il avait respecté ses obligations.

Si le débiteur peut solliciter, après condamnation, l'exonération de la majoration, une telle mesure ne reste que facultative, subordonnée à la mise en œuvre d'un recours au stade de l'exécution. Or le prononcé d'une condamnation impliquant la majoration automatique du taux d'intérêt contrevient aux objectifs du droit communautaire, puisque la possible exonération par le juge de l'exécution demeure aléatoire, ce qui laisse subsister dans l'ordonnancement juridique des décisions portant une sanction non effective.

Il convient dès lors également d’écarter la majoration des intérêts afin d'assurer le caractère effectif et dissuasif de la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, il convient de condamner Monsieur [E] [F] [P] à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 8.692,82 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 10 mars 2023, date de la mise en demeure.

Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

En application des dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile, il convient de condamner Monsieur [E] [F] [P] aux dépens de l'instance.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA CA CONSUMER FINANCE les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés dans le cadre de la présente instance. Il convient de condamner Monsieur [E] [F] [P] à lui payer la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En vertu de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement, sans qu’il soit nécessaire de la prononcer ou de la rappeler.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant en audience publique, par jugement réputé contradictoire en premier ressort, rendu par mise à disposition au greffe le jour de son délibéré,

DECLARE recevable la demande en paiement,

CONDAMNE Monsieur [E] [F] [P] à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 8.692,82 euros arrêtée au 8 mars 2023, avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 10 mars 2023,

CONDAMNE Monsieur [E] [F] [P] à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [E] [F] [P] aux dépens.

LE GREFFIER LE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 27 / proxi fond
Numéro d'arrêt : 23/03042
Date de la décision : 07/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-07;23.03042 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award