La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2024 | FRANCE | N°23/02699

France | France, Tribunal judiciaire de Bobigny, Chambre 27 / proxi fond, 07 mars 2024, 23/02699


TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DU RAINCY
[Adresse 4]
[Adresse 4]

Téléphone : [XXXXXXXX01]

@ : [Courriel 5]





REFERENCES : N° RG 23/02699 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YODM

Minute : 24/186







S.A. CA CONSUMER FINANCE
Représentant : Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0430



C/


Monsieur [T] [L]
Madame [B] [I]










Exécutoire délivrée le :
à :


Copie certifiée conforme délivrée le :
à :





AU NOM

DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT






Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité du Raincy en date du 07 Mars 2024 par Madame Fanny TEMAM, en qualité de juge des contentieux de la protection assi...

TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DU RAINCY
[Adresse 4]
[Adresse 4]

Téléphone : [XXXXXXXX01]

@ : [Courriel 5]

REFERENCES : N° RG 23/02699 - N° Portalis DB3S-W-B7H-YODM

Minute : 24/186

S.A. CA CONSUMER FINANCE
Représentant : Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0430

C/

Monsieur [T] [L]
Madame [B] [I]

Exécutoire délivrée le :
à :

Copie certifiée conforme délivrée le :
à :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT

Jugement rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité du Raincy en date du 07 Mars 2024 par Madame Fanny TEMAM, en qualité de juge des contentieux de la protection assistée de Madame Sandra GAGNOUX, greffier ;

Après débats à l'audience publique du 18 Janvier 2024 tenue sous la présidence de Madame Fanny TEMAM, juge des contentieux de la protection, assistée de Madame Sandra GAGNOUX, greffier audiencier ;

ENTRE DEMANDEUR :

S.A. CA CONSUMER FINANCE,
demeurant [Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]

Représenté par Me Eric BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0430

D'UNE PART

ET DÉFENDEURS :

Monsieur [T] [L],
demeurant [Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

non comparant, ni représenté

Madame [B] [I],
demeurant [Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]

non comparante, ni représentée

D'AUTRE PART

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 26 mai 2021, la SA CA CONSUMER FINANCE a consenti à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] un prêt personnel d'un montant en capital de 99.372 euros, au titre d’un regroupement de crédits, avec intérêts au taux débiteur de 4,345%, remboursable en 180 mensualités s'élevant à 763,60 euros, hors assurance.

La SA CA CONSUMER FINANCE a adressé à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] une mise en demeure d'avoir à payer la somme de 5259,28 euros sous 15 jours au titre des échéances impayées par lettre recommandée en date du 16 mai 2023, reçue par chacun des débiteurs le 22 mai 2023.

Par lettre recommandée du 16 juin 2023, reçue par chacun des débiteurs le 22 juin 2023, la SA CA CONSUMER FINANCE a entendu se prévaloir de la déchéance du terme du contrat de crédit.

Par acte d'huissier en date du 9 novembre 2023, la SA CA CONSUMER FINANCE a fait assigner Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] devant le juge des contentieux de la protection siégeant au Tribunal de proximité du Raincy afin de :
à titre principal, condamner solidairement Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] à payer la somme de 106.925,70 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,34%, à compter du 16 juin 2023,à titre subsidiaire, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit et condamner solidairement Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] à payer la somme de 106.925,70 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,34%, à compter du 16 juin 2023,condamner solidairement Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 18 janvier 2024.

A l'audience, la SA CA CONSUMER FINANCE, représentée, maintient ses demandes dans les termes de son acte introductif d'instance.

Elle indique que les mensualités de l'emprunt n'ont pas été régulièrement payées, ce qui l'a contraint à prononcer la déchéance du terme, rendant la totalité de la dette exigible. Subsidiairement, elle expose, sur le fondement des articles 1224 et suivant du code civil que Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] ont manqué à leurs obligations contractuelles en ne payant pas les échéances. Elle précise que la forclusion biennale n'est pas encourue, le premier incident de paiement non régularisé étant intervenu le 29 août 2022, et qu'elle est dès lors bien fondée à obtenir la condamnation des défendeurs au paiement du solde des sommes dues augmentées des intérêts au taux contractuel, au visa des articles L311-1 et suivants du code de la consommation.

Elle a également pu émettre ses observations sur le respect des règles d'ordre public fixées par le code de la consommation et notamment sur le respect des formalités de l'offre de prêt, le respect des formalités tenant à l'assurance, la production et la conformité de la FIPEN, la consultation préalable du FICP et la vérification de la solvabilité de l'emprunteur.

Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L], régulièrement cités à personne, ne comparaissent pas et ne sont pas représentés.

À l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a avisé les parties que le jugement serait prononcé le 7 mars 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction.

MOTIVATION

Aux termes de l'article 472 du Code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande principale

Sur l'office du juge

En application de l'article R632-1 du code de la consommation, le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application.

L'article L314-26 du code de la consommation précise que les dispositions des chapitres II et III et des sections II à VII du chapitre IV du code de la consommation sont d'ordre public.

En l'espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE a évoqué la régularité de l'offre de prêt et a pu formuler ses observations quant au respect des dispositions d'ordre public des articles L312-1 et suivants du code de la consommation.

Sur la recevabilité de la demande

En application de l'article R312-35 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat de prêt du 26 mai 2021, les actions en paiement engagées devant le tribunal judiciaire à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ou le premier incident de paiement non régularisé.

En l'espèce, il ressort de l'historique de compte que le premier impayé non régularisé est intervenu au 29 août 2022 et que l'assignation a été signifiée le 9 novembre 2023. Dès lors, la demande en paiement est recevable.

Sur l’exigibilité de la créance

Aux termes de l’article L312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés.

En application des articles 1224 et 1225 du code civil, la résolution peut résulter de l'application d'une clause résolutoire, qui précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat. En ce cas, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution, qui ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.

Ainsi, si le contrat de prêt peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque être déclarée acquise au créancier sans délivrance d’une mise en demeure restée sans effet précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l'espèce, le prêt stipule qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés. Il n'est pas fait mention expressément de l'absence d'une mise en demeure préalable.

Il ressort des pièces communiquées que Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] a cessé de régler les échéances du prêt.

La SA CA CONSUMER FINANCE a fait parvenir à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] une demande de règlement des échéances impayées le 16 mai 2023, restée sans réponse.

La banque était dès lors bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme et de la résiliation de plein droit du contrat et à demander le remboursement immédiat des sommes exigibles selon les termes du contrat.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Sur la FIPEN

Aux termes de l'article L. 312-12 du Code de la consommation, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte-tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

Il résulte de ces dispositions que doit figurer parmi les pièces du dossier du prêteur une fiche d'informations précontractuelle qui doit mentionner l'ensemble des informations énumérées par l'article R. 312-2 du Code de la consommation, et notamment, le montant, le nombre et la périodicité des échéances, et, sauf en cas de location avec option d'achat, le taux débiteur et les conditions applicables à ce taux ainsi que le taux annuel effectif global, à l'aide d'un exemple représentatif mentionnant toutes les hypothèses utilisées pour le calcul de ce taux. Ces informations sont présentées conformément à la fiche d'information annexée à l'article R. 312-5 du Code précité.

Il est désormais constant qu'en application de ce texte, la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations, lui a remis la fiche précontractuelle d'information normalisée européenne, constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, étant précisé que la production par la banque de la fiche d'informations pré-contractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs, renseignée notamment des chefs de l'identité du prêteur, de la description des principales caractéristiques du crédit et du coût du crédit, le document portant sur chacune des 3 pages comme référence le numéro du contrat de prêt, si elle ne porte pas la signature des emprunteurs ni même l'indication de leurs initiales, est insuffisante à conforter utilement l'offre (Cass. Civ. 1ère, 7 juin 2023, n°22-15.552)

Le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par l’article L. 312-12 est déchu du droit aux intérêts, en application de l’article L. 341-1 du Code de la consommation.

En l'espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE produit aux débats une fiche d'information précontractuelles qui aurait été fournie à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L].

Néanmoins, ce document, bien qu'il comporte les caractéristiques essentielles du contrat de prêt, l'identité du prêteur, le coût du crédit et le numéro du contrat de prêt, ne porte pas la signature de l'emprunteur ni même l'indication de ses initiales. Dès lors, ce document est insuffisant à corroborer utilement la mention contenue à l'offre selon laquelle l'emprunteur reconnaît que la fiche d'informations précontractuelles lui a été remise lors de la conclusion du contrat de prêt.

A défaut de preuve de la remise de la fiche d'information précontractuelle, il est donc établi que l'offre de crédit faite à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] n'est pas conforme aux prescriptions des articles susvisés.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat, l'irrégularité sanctionnée affectant les conditions de sa formation.

Sur la notice d'assurance

L’article L.312-29 du code de la consommation dispose que lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus.

L'article L. 341-4 du même code sanctionne le non-respect de ces dispositions par la déchéance du droit aux intérêts.

Par ailleurs, en application des dispositions l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Il est désormais constant qu'en application de ces textes, la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur, qui doit rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations, lui a remis la notice d'assurance, constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, étant précisé que la production par la banque de ladite notice, si elle ne porte pas la signature des emprunteurs ni même l'indication de leurs initiales, est insuffisante à conforter utilement l'offre (Cass. Civ. 1ère, 7 juin 2023, n°22-15.552)

En l’espèce, Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] ont adhéré à l’assurance facultative qui a été proposée en même temps que le crédit qu’ils ont souscrit. La SA CA CONSUMER FINANCE verse aux débats son exemplaire du contrat de crédit consenti à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] aux termes duquel ils reconnaissent rester en possession de la notice d’information sur l’assurance mais elle ne produit pas d’exemplaire de ladite notice.

Les seules mentions pré-imprimées contenues dans l'offre de prêt précédant la signature de l'emprunteur, si elles peuvent constituer des indices de la remise de documents, ne sont pas corroborées.

Ainsi, le demandeur ne démontre pas avoir remis à Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] une notice conforme aux dispositions du code de la consommation.

En conséquence, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à compter de la date de conclusion du contrat.

Sur les sommes dues

En application de l'article L341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, et les sommes perçues au titre des intérêts sont restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.

En outre, la déchéance du droit aux intérêts exclut la possibilité pour le prêteur d'obtenir le paiement de l’indemnité prévue par les articles L312-39 et D312-16 du code de la consommation.

Conformément à l'article L.341-8 précité, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital et la déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par la demanderesse, notamment de l'historique de compte arrêté au 16 juin 2023 et du décompte du 15 juin 2023 que la créance de la SA CA CONSUMER FINANCE est établie.

Elle se calcule donc comme suit :
➢Capital emprunté depuis l'origine : 99.372 €
➢Déduction des versements réalisés :
* antérieurement à la déchéance du terme : 12.768,99 €
* postérieurement à la déchéance du terme : 0 €

Soit un total restant dû de 86.603,01 euros, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans l'historique de compte et le décompte.

En conséquence, il convient de condamner Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] au paiement de cette somme.

En vertu de l’article 1310 du code civil, la solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas.

En l’espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE ne démontre aucune cause de solidarité légale. En outre, le contrat de prêt ne contient pas de clause de solidarité.

Par conséquent, Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] ne seront pas tenus solidairement.

Sur les intérêts

En application de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Selon l’article L.313-3 du code monétaire et financier, en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire. Le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

Par ailleurs, le Juge doit assurer l’effectivité de la sanction prévue par le droit communautaire (Cour de Justice de l'Union Européenne, 27 mars 2014, C-565/12).

Sur ce point, la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) statuant sur une demande de décision préjudicielle du tribunal d’instance d’Orléans relève qu'il appartient à la juridiction nationale de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté ses obligations avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de ces mêmes obligations , et que dès lors que les montants dont il est déchu sont inférieurs à ceux résultant de l’application des intérêts au taux légal majoré ou si les montants susceptibles d’être perçus par lui ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations, le régime de sanctions en cause au principal n’assure pas un effet réellement dissuasif à la sanction encourue.

La CJUE rappelle qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci.

Elle estime que l’article 23 de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application d’un régime national de sanctions en vertu duquel, en cas de violation par le prêteur de ses obligations, le prêteur est déchu de son droit aux intérêts conventionnels, mais bénéficie de plein droit des intérêts au taux légal, exigibles à compter du prononcé d’une décision de justice condamnant l'emprunteur, lesquels sont en outre majorés de cinq points si, à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit ce prononcé, celui-ci ne s’est pas acquitté de sa dette.

En l'espèce, compte tenu du taux contractuel de 4,345%, il apparaît que les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal, s'élevant à 5,07% pour le premier semestre 2024, pour les créanciers professionnels, majoré de plein droit de cinq points deux mois après la signification du jugement, en application de l’article L313-3 du code monétaire et financier, sont supérieurs à ceux dont il aurait pu bénéficier s'il avait respecté ses obligations.

Si le débiteur peut solliciter, après condamnation, l'exonération de la majoration, une telle mesure ne reste que facultative, subordonnée à la mise en œuvre d'un recours au stade de l'exécution. Or le prononcé d'une condamnation impliquant la majoration automatique du taux d'intérêt contrevient aux objectifs du droit communautaire, puisque la possible exonération par le juge de l'exécution demeure aléatoire, ce qui laisse subsister dans l'ordonnancement juridique des décisions portant une sanction non effective.

Il convient dès lors également d’écarter la majoration des intérêts afin d'assurer le caractère effectif et dissuasif de la sanction de déchéance du droit aux intérêts.

En conséquence, il convient de condamner Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 86.603,01 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter de la mise en demeure du 16 juin 2023.

Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

En application des dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile, il convient de condamner in solidum Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] aux dépens de l'instance.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SA CA CONSUMER FINANCE les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés dans le cadre de la présente instance. Il convient de condamner in solidum Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] à lui payer la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l'article 514 du code de procédure civile, le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire, de droit, sans qu'il soit nécessaire de la prononcer ou de la rappeler.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant en audience publique, par jugement réputé contradictoire en premier ressort, rendu par mise à disposition au greffe le jour de son délibéré,

DECLARE recevable la demande en paiement,

DIT que la SA CA CONSUMER FINANCE est déchue de son droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de prêt conclu avec Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] le 26 mai 2021,

CONDAMNE Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 86.603,01 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 16 juin 2023,

CONDAMNE in solidum Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] aux dépens,

CONDAMNE in solidum Madame [B] [I] et Monsieur [T] [L] à payer à la SA CA CONSUMER FINANCE la somme de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Bobigny
Formation : Chambre 27 / proxi fond
Numéro d'arrêt : 23/02699
Date de la décision : 07/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-07;23.02699 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award