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18/05/2015 | FRANCE | N°C4004

France | France, Tribunal des conflits, 18 mai 2015, C4004


Vu, enregistrée à son secrétariat le 8 janvier 2015, l'expédition du jugement du 6 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Versailles, saisi d'une demande de M. et Mme B...tendant à ce que la société Eparco Assainissement soit condamnée à leur verser la somme de 7.000 euros en réparation du trouble de jouissance qu'ils estiment avoir subi du fait de la défectuosité des travaux réalisés sur leur installation d'assainissement non collectif, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, alors en vigueur, le soin de déc

ider sur la question de compétence ;

Vu le jugement du 23 octobre...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 8 janvier 2015, l'expédition du jugement du 6 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Versailles, saisi d'une demande de M. et Mme B...tendant à ce que la société Eparco Assainissement soit condamnée à leur verser la somme de 7.000 euros en réparation du trouble de jouissance qu'ils estiment avoir subi du fait de la défectuosité des travaux réalisés sur leur installation d'assainissement non collectif, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, alors en vigueur, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu le jugement du 23 octobre 2006 par lequel le tribunal d'instance de Versailles s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à M. et MmeB..., à la SELARL François Carlo, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Eparco Assainissement, à la commune de Vicq et au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872, modifiée par la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, notamment le III de son article 13 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Canas, membre du Tribunal,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

Considérant que, par une convention conclue le 4 avril 1998, M. et Mme B..., propriétaires d'une maison individuelle située sur le territoire de la commune de Vicq, ont autorisé cette dernière à faire procéder à des travaux de mise en conformité de leur installation d'assainissement non collectif ; que ces travaux ont été réalisés par la société Eparco Assainissement, liée à la commune par un marché public ; que M. et Mme B...ont saisi les juridictions de l'ordre judiciaire pour obtenir réparation du préjudice de jouissance qu'ils estiment avoir subi du fait du fonctionnement défectueux de leur installation ; que, par jugement du 23 octobre 2006, le tribunal d'instance de Versailles s'est déclaré incompétent pour connaître du litige les opposant à la commune de Vicq et à la société Eparco Assainissement ; que saisi par M. et Mme B...d'une requête, tendant aux mêmes fins, dirigée contre la société Eparco Assainissement, depuis placée en liquidation judiciaire, le tribunal administratif de Versailles a, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, alors en vigueur, renvoyé au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ;

Considérant que si les collectivités publiques, leurs concessionnaires ou leurs entrepreneurs doivent, quelle que soit la nature du service public qu'ils assurent, réparer les dommages causés aux tiers par les ouvrages dont ils ont la charge ou les travaux qu'ils entreprennent et si la responsabilité qu'ils encourent ainsi, même en l'absence de toute faute relevée à leur encontre, ne peut être appréciée que par la juridiction administrative, il n'appartient pas, en revanche, à ladite juridiction de connaître des dommages imputables aux ouvrages ou travaux dont s'agit et d'apprécier la responsabilité encourue à raison de vices dans leur conception, leur exécution ou leur entretien lorsque ces dommages ont été causés à l'usager d'un service industriel et commercial par une personne ayant collaboré à l'exécution de ce service et à l'occasion de la fourniture de la prestation due par le service à cet usager ; qu'en raison des liens de droit privé existant entre les services publics industriels et commerciaux et leurs usagers, les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître de l'action formée par l'usager contre les personnes participant à l'exécution du service ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2224-11 du code général des collectivités territoriales : "Les services publics d'assainissement sont financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial" ; que selon l'article L. 2224-8 du même code dans sa rédaction issue de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992, alors en vigueur : " Les communes prennent obligatoirement en charge [...] les dépenses de contrôle des systèmes d'assainissement non collectif. / Elles peuvent prendre en charge les dépenses d'entretien des systèmes d'assainissement non collectif " ;

Considérant que les prestations de mise en conformité des installations d'assainissement non collectif proposées par la commune de Vicq à leurs propriétaires constituaient un prolongement direct des missions d'entretien de ces installations que la commune pouvait, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, prendre en charge dans le cadre du service public de l'assainissement non collectif ; que, dès lors, le dommage dont M. et Mme B...demandent réparation doit être regardé comme un dommage causé à des usagers du service public de l'assainissement, lequel a le caractère d'un service public industriel et commercial ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il appartient à la juridiction judiciaire de connaître du litige ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant M. et Mme B...à la SELARL François Carlo, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Eparco Assainissement.

Article 2 : Le jugement rendu le 23 octobre 2006 par le tribunal d'instance de Versailles est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant cette juridiction.

Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Versailles est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu par ce tribunal le 6 février 2014.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et MmeB..., à la SELARL François Carlo, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Eparco Assainissement, et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C4004
Date de la décision : 18/05/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - COMMUNE - ATTRIBUTIONS - SERVICES COMMUNAUX - ASSAINISSEMENT ET EAUX USÉES - ASSAINISSEMENT NON COLLECTIF (L - 2224-11 DU CGCT) - SPIC PAR DÉTERMINATION DE LA LOI - TRAVAUX DE MISE EN CONFORMITÉ DE L'INSTALLATION - LITIGE INDEMNITAIRE - COMPÉTENCE JUDICIAIRE [RJ1].

135-02-03-03-05 Des prestations de mise en conformité d'installations d'assainissement non collectif, proposées par une commune à leurs propriétaires, constituent un prolongement direct des missions d'entretien de ces installations que la commune peut, en vertu des dispositions de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT), prendre en charge dans le cadre du service public de l'assainissement non collectif. Dès lors, le litige entre le propriétaire d'une de ces installations et la société chargée d'effectuer ces travaux par la commune tend à la réparation d'un dommage causé à un usager du service public de l'assainissement, lequel a le caractère d'un service public industriel et commercial (SPIC) en vertu de l'article L. 2224-11 du CGCT. Il ressortit à la compétence des juridictions judiciaires.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX - ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - DIVERS CAS D`ATTRIBUTIONS LÉGALES DE COMPÉTENCE AU PROFIT DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES - SPIC PAR DÉTERMINATION DE LA LOI - ASSAINISSEMENT NON COLLECTIF (L - 2224-11 DU CGCT) - TRAVAUX DE MISE EN CONFORMITÉ DE L'INSTALLATION - LITIGE INDEMNITAIRE [RJ1].

17-03-01-02-05 Des prestations de mise en conformité d'installations d'assainissement non collectif, proposées par une commune à leurs propriétaires, constituent un prolongement direct des missions d'entretien de ces installations que la commune peut, en vertu des dispositions de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT), prendre en charge dans le cadre du service public de l'assainissement non collectif. Dès lors, le litige entre le propriétaire d'une de ces installations et la société chargée d'effectuer ces travaux par la commune tend à la réparation d'un dommage causé à un usager du service public de l'assainissement, lequel a le caractère d'un service public industriel et commercial (SPIC) en vertu de l'article L. 2224-11 du CGCT. Il ressortit à la compétence des juridictions judiciaires.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - TRAVAUX PUBLICS - RÉPARATION DES DOMMAGES CAUSÉS AUX USAGERS D'UN SPIC - COMPÉTENCE JUDICIAIRE Y COMPRIS SI LE DOMMAGE TROUVE SA SOURCE DANS L'EXÉCUTION DE TRAVAUX PUBLICS OU L'ENTRETIEN D'UN OUVRAGE PUBLIC [RJ1].

17-03-02-06 Si les collectivités publiques, leurs concessionnaires ou leurs entrepreneurs doivent, quelle que soit la nature du service public qu'ils assurent, réparer les dommages causés aux tiers par les ouvrages dont ils ont la charge ou les travaux qu'ils entreprennent et si la responsabilité qu'ils encourent ainsi, même en l'absence de toute faute relevée à leur encontre, ne peut, en vertu de la loi du 28 pluviôse an VIII, être appréciée que par la juridiction administrative, il n'appartient pas, en revanche, à cette juridiction de connaître des dommages imputables aux ouvrages ou travaux et d'apprécier la responsabilité encourue à raison de vices dans leur conception, leur exécution ou leur entretien lorsque ces dommages ont été causés à l'usager d'un service industriel et commercial (SPIC) par une personne ayant collaboré à l'exécution de ce service et à l'occasion de la fourniture de la prestation due par le service à cet usager. En raison des liens de droit privé existant entre les SPIC et leurs usagers, les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître de l'action formée par l'usager contre les personnes participant à l'exécution du service.


Références :

[RJ1]

Cf., sur la compétence de la juridiction judiciaire y compris lorsque le dommage trouve sa source dans la conception et l'exécution de travaux publics, TC, 21 mars 2005, M. de Haay, n° 3442, inédite au Recueil.


Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Sophie Canas
Rapporteur public ?: Mme Escaut

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2015:C4004
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