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15/04/2013 | FRANCE | N°C3892

France | France, Tribunal des conflits, 15 avril 2013, C3892


Vu, enregistrée à son secrétariat le 18 juillet 2012, l'expédition de l'arrêt du 9 juillet 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, saisie d'une demande de la société Allianz tendant à la condamnation de la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), assureur de la société Socotec, à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre par le tribunal de grande instance de Nice dans le litige l'opposant à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, a renvoyé au Tribunal, par application

de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de dé...

Vu, enregistrée à son secrétariat le 18 juillet 2012, l'expédition de l'arrêt du 9 juillet 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, saisie d'une demande de la société Allianz tendant à la condamnation de la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), assureur de la société Socotec, à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre par le tribunal de grande instance de Nice dans le litige l'opposant à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 1er octobre 2009 par lequel la cour d'appel d'Aix-en-Provence a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître de ce litige ;

Vu, enregistré à son secrétariat le 6 septembre 2012, le mémoire présenté pour la société Allianz, tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente, par le motif qu'une telle compétence est commandée par l'objectif d'unification du contentieux des marchés publics poursuivi par le législateur ainsi que par l'exigence d'une bonne administration de la justice ;

Vu, enregistré à son secrétariat le 7 janvier 2013, le mémoire présenté pour la SMABTP, qui conclut à la compétence de la juridiction judiciaire et à ce que soit mise à la charge de la société Allianz la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, par le motif qu'il n'appartient qu'aux tribunaux de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement de l'indemnité d'assurance due par un assureur au titre de ses obligations de droit privé ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à la société Socotec et au ministère de l'économie et des finances, qui n'ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code des assurances, notamment son article L.124-3 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Canas, membre du Tribunal,

- les observations de la SCP Baraduc et Duhamel pour la compagnie d'assurance Allianz,

- les observations de la SCP Odent-Poulet pour la SMABTP,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, commissaire du gouvernement ;

Considérant que si l'action directe ouverte par l'article L.124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l'assureur de l'auteur responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance ; qu'il s'ensuit qu'il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'action directe engagée par la société Allianz, assureur de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, à l'encontre de la SMABTP, assureur de la société Socotec, titulaire d'un marché public, relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Société Allianz la somme que demande la SMABTP en application de l'article 75-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la société Allianz à la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP).

Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 1er octobre 2009 est déclaré nul et non avenu en ce qu'il a décliné la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ce litige. La cause et les parties sont renvoyées, dans cette mesure, devant cette juridiction.

Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Nice et la cour administrative d'appel de Marseille est déclarée nulle et non avenue en tant qu'elle concerne le litige opposant la société Allianz à la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), à l'exception de l'arrêt rendu par cette cour le 9 juillet 2012.

Article 4 : Les conclusions de la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3892
Date de la décision : 15/04/2013
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - CONTRATS - CONTRATS DE DROIT PRIVÉ - ACTION DIRECTE OUVERTE PAR L'ARTICLE L - 124-3 DU CODE DES ASSURANCES À LA VICTIME OU À SON ASSUREUR CONTRE L'ASSUREUR DU RESPONSABLE DU DOMMAGE - ACTION POURSUIVANT L'EXÉCUTION DE L'OBLIGATION DE RÉPARER QUI PÈSE SUR L'ASSUREUR EN VERTU DU CONTRAT D'ASSURANCE - CONSÉQUENCE - ACTION TENDANT AU PAIEMENT DES SOMMES DUES PAR UN ASSUREUR AU TITRE D'UN CONTRAT DE DROIT PRIVÉ - COMPÉTENCE JUDICIAIRE - EXISTENCE - ALORS MÊME QUE L'APPRÉCIATION DE LA RESPONSABILITÉ DE L'ASSURÉ DANS LA RÉALISATION DU DOMMAGE RELÈVERAIT DU JUGE ADMINISTRATIF [RJ1].

17-03-02-03-01 Si l'action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l'assureur du responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance. Dès lors, il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative. Par suite, compétence du juge judiciaire pour connaître de l'action directe dirigée par l'assureur d'une collectivité publique victime d'un dommage, subrogé dans les droits de celle-ci, contre l'assureur de la société auteur de ce dommage, titulaire d'un marché public.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - RESPONSABILITÉ - ACTION DIRECTE OUVERTE PAR L'ARTICLE L - 124-3 DU CODE DES ASSURANCES À LA VICTIME OU À SON ASSUREUR CONTRE L'ASSUREUR DU RESPONSABLE DU DOMMAGE - ACTION POURSUIVANT L'EXÉCUTION DE L'OBLIGATION DE RÉPARER QUI PÈSE SUR L'ASSUREUR EN VERTU DU CONTRAT D'ASSURANCE - CONSÉQUENCE - ACTION TENDANT AU PAIEMENT DES SOMMES DUES PAR UN ASSUREUR AU TITRE D'UN CONTRAT DE DROIT PRIVÉ - COMPÉTENCE JUDICIAIRE - EXISTENCE - ALORS MÊME QUE L'APPRÉCIATION DE LA RESPONSABILITÉ DE L'ASSURÉ DANS LA RÉALISATION DU DOMMAGE RELÈVERAIT DU JUGE ADMINISTRATIF [RJ1].

17-03-02-05 Si l'action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l'assureur du responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance. Dès lors, il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative. Par suite, compétence du juge judiciaire pour connaître de l'action directe dirigée par l'assureur d'une collectivité publique victime d'un dommage, subrogé dans les droits de celle-ci, contre l'assureur de la société auteur de ce dommage, titulaire d'un marché public.


Références :

[RJ1]

Rappr. TC, 3 mars 1969, Esposito c/ Compagnie La Foncière, n° 1924, p. 681. Comp., pour le cas où le contrat d'assurance est un contrat administratif, CE, avis, 31 mars 2010, Mme Renard, n° 333627, p. 86.


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Rapporteur ?: Mme Sophie Canas
Rapporteur public ?: Mme Escaut

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2013:C3892
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