Vu la lettre par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant M. Alexandre X... et 255 autres requérants à la commune de Saint-Martin (Guadeloupe) et à l'Etat devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre ;
Vu le déclinatoire de compétence, présenté par le Préfet de la Guadeloupe, qui tend à voir déclarer la juridiction judiciaire incompétente au motif que les mesures de police litigieuses, prises pour supprimer des immeubles insalubres, étaient exigées par des impératifs d'ordre public ; qu'ainsi, elles ne sauraient être qualifiées de voie de fait ; que les requérants ont d'ailleurs parallèlement saisi le juge administratif d'actions en réparation ;
Vu l'ordonnance en date du 3 octobre 2000 par laquelle le président du tribunal de grande instance de Basse-Terre, statuant en référé, a rejeté le déclinatoire de compétence ;
Vu l'arrêté du 18 octobre 2000 par lequel le préfet de la Guadeloupe a élevé le conflit ;
Vu l'ordonnance du 24 octobre 2000 par laquelle le président du tribunal de grande instance de Basse-Terre, statuant en référé, a sursis à toute procédure ;
Vu le mémoire présenté par le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer qui conclut à la confirmation de l'arrêté de conflit, par les motifs que le Tribunal des conflits a déjà jugé que l'arrêté du maire de Saint-Martin en date du 9 septembre 1995, sur le fondement duquel les opérations litigieuses ont été décidées, n'avait pas le caractère d'une voie de fait ; que les constructions litigieuses, construites de manière précaire et ruinées par le cyclone, ont pu, sans voie de fait, être l'objet de mesures de démolition en raison des périls qu'elles représentaient ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le Code des communes ;
Vu le Code général des collectivités territoriales ;
Vu le Code de la construction et de l'habitation, notamment ses articles L. 511-1 à L. 511-4 ;
Vu le Code de l'urbanisme, notamment son article L. 480-2 ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Considérant que l'arrêté du 9 septembre 1995 par lequel le maire de Saint-Martin (Guadeloupe), prenant en considération l'état de péril dans lequel se trouvaient, à la suite du passage d'un cyclone survenu le 5 septembre 1995, des habitations précaires qui avaient été implantées dans des zones que le plan d'occupation des sols rendait inconstructibles, a, d'une part, dans son article 1er, mis en demeure les personnes habitant dans ces zones de " cesser immédiatement les travaux de construction et de reconstruction d'habitations précaires " et, d'autre part, dans son article 2, interdit dans ces zones tous travaux de construction ou de reconstruction, n'est pas manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir appartenant à l'administration ;
Considérant, toutefois, qu'à la suite du passage, les 14 et 15 septembre 1995, d'un second cyclone, le maire de Saint-Martin a fait procéder, sur le fondement de cet arrêté du 9 septembre 1995, à la destruction des habitations de M. X... et des deux cent cinquante cinq autres requérants qui, invoquant les préjudices que ces opérations leur avaient causés, ont saisi le tribunal de grande instance de Basse-Terre d'actions en indemnité dirigées contre l'Etat et contre la commune ;
Considérant qu'en dépit du caractère précaire de ces constructions, ni les dispositions des articles L. 131-2 et L. 131-7 du Code des communes alors en vigueur, ni celles des articles L. 511-1 à L. 511-4 du Code de la construction et de l'habitation, ni celles de l'article L. 480-2 du Code de l'urbanisme n'autorisaient l'autorité administrative à procéder d'office à leur destruction ; que, contrairement à ce que soutient le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, ni des circonstances exceptionnelles, ni une situation d'urgence découlant de périls graves et imminents ne justifiaient de telles mesures d'exécution forcée ; que, dans ces conditions, les destructions litigieuses présentent le caractère d'une voie de fait ; qu'il en résulte que l'arrêté de conflit du préfet de la Guadeloupe en date du 18 octobre 2000 doit être annulé ;
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 18 octobre 2000 par le Préfet de la Guadeloupe est annulé.