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17/12/2001 | FRANCE | N°C3273

France | France, Tribunal des conflits, 17 décembre 2001, C3273


Vu l'arrêt et la décision attaqués ;

Vu, enregistré le 31 juillet 2001, le mémoire présenté par Mme C... qui conclut au rejet de la requête ;

Vu, enregistré le 1er août 2001, les observations présentées par le ministre de l'emploi et de la solidarité qui conclut à l'absence de déni de justice dans la mesure où, Mme C... n'étant pas tenue à l'obligation alimentaire mais devant contribuer aux charges du mariage en qualité de conjoint, la commission centrale d'aide sociale était seule compétente pour trancher le litige entre le DEPARTEMENT DE L'ISERE et Mme C...

, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat par une décision du 6 avril 2001 relative...

Vu l'arrêt et la décision attaqués ;

Vu, enregistré le 31 juillet 2001, le mémoire présenté par Mme C... qui conclut au rejet de la requête ;

Vu, enregistré le 1er août 2001, les observations présentées par le ministre de l'emploi et de la solidarité qui conclut à l'absence de déni de justice dans la mesure où, Mme C... n'étant pas tenue à l'obligation alimentaire mais devant contribuer aux charges du mariage en qualité de conjoint, la commission centrale d'aide sociale était seule compétente pour trancher le litige entre le DEPARTEMENT DE L'ISERE et Mme C..., ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat par une décision du 6 avril 2001 relative à un autre litige ;

Fin de visas de l'Affaire N° C3273

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu la loi du 20 avril 1932 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;

Entendus de l'Affaire N° C3273

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Robineau, membre du Tribunal,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DE L'ISERE,

- les conclusions de M. Duplat, Commissaire du gouvernement ;

Considérants de l'Affaire N° C3273

Sur la recevabilité de la requête du DEPARTEMENT DE L'ISERE :

Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 20 avril 1932 les décisions définitives rendues par les juridictions de l'ordre administratif et les tribunaux judiciaires dans les instances introduites devant ces deux ordres de juridiction pour des litiges portant sur le même objet peuvent être déférées au Tribunal lorsque lesdites décisions présentent contrariété conduisant à un déni de justice ; que ce dernier existe au sens de ladite loi lorsqu'un demandeur est mis dans l'impossibilité d'obtenir une satisfaction à laquelle il a droit, par suite d'appréciations inconciliables entre elles portées par les juridictions de chaque ordre, soit sur des éléments de fait, soit en fonction d'affirmations juridiques contradictoires ;

Considérant que, par une décision du 31 octobre 2000, la commission centrale d'aide sociale a confirmé la décision de la commission départementale relative à la prise en charge par l'aide sociale de l'hébergement et de l'entretien de M. C..., adulte handicapé, au Centre Jean-Janin aux Abrets, et fixé le montant de la charge du DEPARTEMENT DE L'ISERE à 16 610 F par mois, compte tenu des ressources que l'intéressé et son épouse étaient en mesure d'y consacrer ; que la commission a évalué la contribution de Mme C... à 500 F par mois, en précisant que cette contribution d'entretien conjugal fondée sur l'article 212 du code civil était distincte de l'obligation alimentaire résultant de l'article 205 du même code, qui est seule à ne pas être prise en compte, en vertu des dispositions de l'article 168 du code de la famille et de l'aide sociale, parmi les ressources de la personne handicapée ;

Considérant que, le DEPARTEMENT DE L'ISERE ayant auparavant saisi le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu de conclusions tendant à ce que Mme C... soit condamnée au paiement de cette somme mensuelle de 500 F au titre du devoir de secours entre époux de l'article 212 du code civil, le tribunal fixa cette contribution à un montant de 200 F par mois ; que, saisie par Mme C..., la Cour d'appel de Grenoble a jugé, par un arrêt du 2 février 2000, que ce devoir de secours étant l'expression de l'obligation alimentaire entre époux, Mme C... en était exonérée par l'effet de l'article 168 du code de la famille et de l'aide sociale ;

Considérant que le DEPARTEMENT DE L'ISERE soutient qu'il y a entre les deux décisions juridictionnelles rendues respectivement par la commission centrale d'aide sociale et la Cour d'appel de Grenoble une contrariété conduisant à un déni de justice le mettant dans l'impossibilité d'obtenir une satisfaction à laquelle il a droit ;

Considérant qu'il appartient aux seules juridictions de l'aide sociale de fixer le montant du concours des collectivités publiques en vue de l'hébergement des personnes prises en charge, compte tenu des ressources des intéressés et, le cas échéant, de la contribution du conjoint, au titre de l'obligation visée à l'article 212 du code civil, et de celle des débiteurs de l'obligation alimentaire ; qu'il appartient en revanche au seul juge judiciaire, à défaut d'entente entre les parties, de fixer le montant de la contribution individuelle requise au titre de l'une ou l'autre de ces obligations ; que, dans le cas où, du fait de la décision du juge judiciaire, le montant du concours assigné à l'aide sociale par le juge administratif spécialisé se révèle insuffisant pour couvrir la totalité des dépenses exposées, il incombe à ce juge de statuer à nouveau pour le majorer à due concurrence des sommes non couvertes par application de la décision du juge judiciaire ;

Mais considérant qu'en décidant, par son arrêt en date du 2 février 2000, que les dispositions de l'article 168 du code de la famille et de l'aide sociale, alors en vigueur, écartant la mise en jeu de l'obligation alimentaire pour l'hébergement des personnes handicapées s'appliquaient non seulement aux personnes visées par les articles 203 à 207 du code civil, mais également aux époux visés par l'article 212, la Cour d'appel de Grenoble s'est livrée à une interprétation du droit de l'aide sociale directement contraire à celle à laquelle a procédé la commission centrale d'aide sociale dans sa décision du 31 octobre 2000 ; que cette interprétation ne portant pas sur le montant de la contribution mais sur le fondement légal de l'obligation à la charge de l'épouse, la commission centrale d'aide sociale n'est pas tenue d'en tirer les conséquences en majorant le montant du concours assigné au DEPARTEMENT DE L'ISERE au titre de l'aide sociale ;

Considérant que, dès lors, il existe entre ces deux décisions définitives, en tant qu'elles portent sur le même objet, une contrariété conduisant à un déni de justice, ni l'intéressé, ni son conjoint, ni le DEPARTEMENT DE L'ISERE n'étant légalement tenus de couvrir la somme dont la Cour d'appel de Grenoble a déchargé Mme C..., alors que la commission centrale d'aide sociale en avait tenu compte pour fixer le montant de la contribution du département ; qu'ainsi, la requête du DEPARTEMENT DE L'ISERE introduite sur le fondement de l'article 1er de la loi du 20 avril 1932 est recevable ;

Sur le fond :

Considérant qu'en exonérant les personnes tenues à l'obligation alimentaire à l'égard de la personne handicapée de toute participation aux frais d'hébergement de celle-ci, l'alinéa 3 de l'article 168 du code de la famille et de l'aide sociale, issu de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975, et repris à l'article L. 344-5 du code de l'action sociale et des familles, n'a pas entendu faire obstacle à la prise en compte de l'obligation particulière de secours qui incombe au conjoint en vertu de l'article 212 du code civil ;

Considérant que, par suite, l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble du 2 février 2000 qui a déchargé Mme C... de toute contribution au titre de l'article 212 du code civil doit être annulé ;

Considérant qu'en l'absence d'éléments nouveaux il y a lieu de rejeter l'appel de Mme C... contre le jugement du 16 septembre 1998 du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu qui, dans l'exercice de la compétence qui incombe au juge judiciaire, a fixé à 200 F par mois le montant de cette contribution et que le DEPARTEMENT DE L'ISERE n'a pas frappé d'appel ; qu'il appartiendra, sauf accord, aux juridictions de l'aide sociale de modifier à due concurrence le montant du concours mis à la charge du DEPARTEMENT DE L'ISERE ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme C... à verser au DEPARTEMENT DE L'ISERE la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Dispositif de l'Affaire N° C3273

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble en date du 2 février 2000 est déclaré nul et non avenu.

Article 2 : L'appel de Mme C... devant la Cour d'appel de Grenoble est rejeté. Chacune des parties supportera ses dépens.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du DEPARTEMENT DE L'ISERE est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.

Délibéré de l'Affaire N° C3273

Délibéré dans la séance du 19 novembre 2001 où siégeaient : M. Waquet, Vice-Président du Tribunal des Conflits, présidant ; Mme X..., M. Z..., M. B..., Mme D..., M. Robineau, M. Y..., M. E..., membres du Tribunal.

Lu en séance publique le 17 décembre 2001.

Signature 2 de l'Affaire N° C3273

Le Président :

Signé : M. Waquet

Le rapporteur :

Signé : M. Robineau

Le secrétaire :

Signé : Mme A...

Certifié conforme,

Le secrétaire

Signature 1 de l'Affaire N° C3273

Le Président :

Le rapporteur :

e secrétaire :

Moyens de l'Affaire N° C3273

En tête de projet de l'Affaire N° C3273

TRIBUNAL

DES CONFLITS

dp

N° 3273

Conflit de la loi du 20 avril 1932

DEPARTEMENT DE L'ISERE

c/Mme C...

M. Robineau

Rapporteur

M. Duplat

Commissaire du Gouvernement

Séance du 19 novembre 2001

Lecture du 17 décembre 2001

P R O J E T

En tête HTML de l'Affaire N° XXXXXX

En tête Visas de l'Affaire N° XXXXXX

TRIBUNAL DES CONFLITS

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Rapporteur

Commissaire du Gouvernement

Séance du

Lecture du

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRIBUNAL DES CONFLITS

Formule exécutoire de l'Affaire N° XXXXXX

Ordonnance de l'Affaire N° XXXXXX

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N° 3273- 8 -


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3273
Date de la décision : 17/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. Waquet
Rapporteur ?: M. Robineau
Rapporteur public ?: M. Duplat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2001:C3273
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