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22/10/2001 | FRANCE | N°01-03236

France | France, Tribunal des conflits, 22 octobre 2001, 01-03236


Vu l'expédition de la décision du 28 juillet 2000 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'une demande de Mme Issa et de Mme Le Gouy tendant, d'une part, à l'annulation des décisions en date du 24 juin 1994 du proviseur du lycée Jean-Mermoz à Dakar mettant fin à leur contrat de travail à compter du 1er septembre 1994, ainsi que des décisions implicites du directeur de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger rejetant leurs recours contre ces décisions et, d'autre part, au versement d'indemnités pour licenciement abusif et en réparation des préju

dices de toute nature qu'elles estiment avoir subis du fait de ...

Vu l'expédition de la décision du 28 juillet 2000 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'une demande de Mme Issa et de Mme Le Gouy tendant, d'une part, à l'annulation des décisions en date du 24 juin 1994 du proviseur du lycée Jean-Mermoz à Dakar mettant fin à leur contrat de travail à compter du 1er septembre 1994, ainsi que des décisions implicites du directeur de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger rejetant leurs recours contre ces décisions et, d'autre part, au versement d'indemnités pour licenciement abusif et en réparation des préjudices de toute nature qu'elles estiment avoir subis du fait de ces décisions, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu l'arrêt du 16 novembre 1998 par lequel la cour d'appel de Paris s'est déclarée incompétente pour connaître de ce litige ;

Vu le mémoire présenté pour Mme Issa et Mme Le Gouy tendant à ce que la juridiction de l'ordre judiciaire soit déclarée compétente par les motifs que les contrats de travail des intéressées étaient exécutés au Sénégal, qu'il ne résulte pas de leurs clauses que la commune volonté des parties ait été de les soumettre à la loi française, que la situation des salariées en tant qu'employées du lycée Jean-Mermoz à Dakar n'était régie par aucune règle de droit public français et que si le juge judiciaire, en vertu des règles nationales de compétence juridictionnelle, peut avoir à connaître d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat de travail soumis à une loi étrangère, il n'appartient pas au juge administratif, juge d'attribution, de se prononcer sur l'application d'un contrat qui n'est en aucune façon régi par le droit public français ;

Vu le mémoire présenté pour l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, tendant à ce que la juridiction de l'ordre judiciaire soit déclarée compétente par les motifs précités du mémoire présenté pour Mme Issa et Mme Le Gouy ;

Vu le mémoire complémentaire présenté pour Mme Issa, tendant à ce qu'il soit constaté qu'il ne peut être considéré qu'il résulte des clauses de son contrat de travail et de celui de Mme Le Gouy que la commune volonté des parties ait été de soumettre lesdits contrats à la loi sénégalaise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu la loi du 26 octobre 1849 modifiée ;

Vu l'article 1er de la loi n° 90-588 du 6 juillet 1990 devenu l'article L. 452-1 du Code de l'éducation ;

Considérant, d'une part, que les contrats conclus par les services de l'Etat à l'étranger pour le recrutement sur place de personnels non statutaires sont, à défaut de dispositions législatives ou réglementaires contraires, régis par la loi choisie par les parties, selon un choix exprès ou qui doit résulter de façon certaine des stipulations du contrat ; qu'à défaut, ces contrats sont régis par la loi du pays où ils sont exécutés ;

Considérant, d'autre part, que le juge administratif, juge d'attribution en matière de contrat international de travail, n'est pas compétent pour connaître des litiges nés de l'exécution et de la rupture de contrats qui ne sont pas régis par la loi française et dont la connaissance appartient au seul juge judiciaire en vertu des règles de conflits de lois et de compétence juridictionnelle ;

Considérant que Mmes Issa et Le Gouy ont été recrutées en 1977 et en 1978 par le lycée Jean-Mermoz à Dakar dont la gestion est assurée par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, établissement public national à caractère administratif placé sous la tutelle du ministre chargé des Affaires étrangères et du ministre chargé de la Coopération ; qu'il ne résulte pas de façon certaine des contrats de travail qui étaient exécutés au Sénégal que la commune volonté des parties ait été de les soumettre à la loi française ; qu'il s'ensuit, à défaut de dispositions législatives ou réglementaires contraires, que le litige qui oppose Mmes Issa et Le Gouy au lycée Jean-Mermoz à Dakar et à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger au sujet de la modification puis de la rupture de leurs contrats de travail relève de la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire ;

DECIDE :

Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant Mmes Issa et Le Gouy au lycée Jean-Mermoz à Dakar et à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ;

Article 2 : L'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 16 novembre 1998 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant cette juridiction.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 01-03236
Date de la décision : 22/10/2001

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Contrat de travail - Service public - Services de l'Etat à l'étranger - Personnel non statutaire - Conflit de lois - Loi applicable .

SEPARATION DES POUVOIRS - Contrat de travail - Service public - Services de l'Etat à l'étranger - Personnel non statutaire - Conflit de lois - Contrat régi par une loi étrangère - Litige né de l'exécution ou de la rupture du contrat - Compétence judiciaire

Les contrats conclus par les services de l'Etat à l'étranger pour le recrutement sur place de personnels non statutaires sont, à défaut de dispositions législatives ou réglementaires contraires, régis par la loi choisie par les parties, selon un choix exprès ou qui doit résulter de façon certaine des stipulations du contrat, et à défaut, sont régis par la loi du pays où ils sont exécutés. Le juge administratif, juge d'attribution en matière de contrat international de travail, n'est pas compétent pour connaître des litiges nés de l'exécution et de la rupture de contrats qui ne sont pas régis par la loi française et dont la connaissance appartient au seul juge judiciaire en vertu des règles de conflit de lois et de compétence juridictionnelle.


Références :

Code de l'éducation L452-1
Loi 90-588 du 06 juillet 1990 art. 1

Décision attaquée : Conseil d'Etat, 28 juillet 2000

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1996-06-18, Bulletin 1996, V, n° 249, p. 175 (rejet) ; Chambre sociale, 1996-07-09, Bulletin 1996, V, n° 275, p. 193 (cassation sans renvoi)

arrêt cité ; Chambre sociale, 1996-10-28, Bulletin 1996, V, n° 335, p. 253 (cassation sans renvoi)

arrêt cité ; Tribunal des conflits, 1996-03-25, Bulletin 1996, Tribunal des conflits, n° 6, p. 7 ; Tribunal des conflits, 1996-06-03, Bulletin 1996, Tribunal des conflits, n° 7, p. 9 ; Tribunal des conflits, 2001-03-12, Bulletin 2001, Tribunal des conflits, n° 8, p. 11 et l'arrêt cité ; Conseil d'Etat, 1968-05-08, époux Fourmy, Rec. Lebon, p. 289 ; Conseil d'Etat, 1979-05-25, Mme Rabut, Rec. Lebon, p. 231 ; Conseil d'Etat, 1983-01-28, Mme Johnston, Rec. Lebon, p. 28 ; Conseil d'Etat 1991-06-07, M. Troquet, Rec. Lebon, p. 223 ; Conseil d'Etat, 1997-03-10, Mme de Waele, Revue critique de droit international privé 1997, p. 695, note Coursier.


Composition du Tribunal
Président : M. Waquet .
Avocat général : Commissaire du Gouvernement : M. Schwartz
Rapporteur ?: M. Chagny.
Avocat(s) : la SCP Coutard et Mayer, la SCP Baraduc et Duhamel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2001:01.03236
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