Vu la lettre par laquelle le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure engagée par M. Albert pour obtenir réparation par M. Peretti, maire de la commune d'Argiusta-Moriccio (Corse-du-Sud), du préjudice causé par un écrit qu'il estime diffamatoire à son égard ;
Vu le déclinatoire présenté le 6 avril 1999 par le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par les motifs que la faute éventuelle n'est pas dépourvue de tout lien avec la mission de service public confiée au maire, dès lors que le communiqué critiqué par M. Albert a été élaboré durant une séance du conseil municipal, qu'il ressort des procès-verbaux d'audition des conseillers municipaux que la rédaction du texte a été inscrite à l'ordre du jour du conseil municipal et qu'il est, par conséquent, incontestable que la " mise au point de la municipalité ", comme son titre l'indique, ressort de l'action municipale ;
Vu l'arrêt du 11 mai 2000 par lequel la cour d'appel de Bastia a rejeté le déclinatoire de compétence et a sursis à toute procédure ;
Vu l'arrêté du 31 mai 2000 par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu l'arrêt du 29 juin 2000 par lequel la cour d'appel a sursis à toute procédure ;
Vu le mémoire présenté par le ministre de l'Intérieur, tendant à ce qu'il soit décidé que le juge administratif est compétent pour connaître du litige, par les motifs que les faits reprochés à M. Peretti ne sont pas constitutifs d'une faute personnelle, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'il a été animé par la recherche d'un intérêt personnel ou une volonté de nuire à M. Albert, que les faits qui lui sont imputés ne sont pas d'une gravité de nature à justifier la qualification de faute personnelle et, à titre subsidiaire, qu'à la supposer établie la faute personnelle n'est pas détachable du service ;
Vu le mémoire présenté pour M. Albert, tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit et à ce qu'il soit décidé que le juge judiciaire est compétent pour connaître de la demande, par les motifs que M. Perretti a commis une faute personnelle en prenant l'initiative de la rédaction du texte incriminé et en procédant personnellement à son affichage en divers lieux de la commune, peu important que ledit texte ait été approuvé par le conseil municipal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Considérant que les époux Albert ont été autorisés par le tribunal administratif de Nice à exercer aux lieu et place de la commune d'Argiusta-Moriccio (Corse-du-Sud) une action tendant à revendiquer, pour le compte de la commune, une parcelle de terrain sur laquelle une construction privée avait été édifiée ; que la juridiction saisie a ordonné sous astreinte la démolition de la construction litigieuse ; que le conseil municipal d'Argiusta-Moriccio a adopté le 24 août 1994, à l'intention des habitants de la commune, une " mise au point de la municipalité " ; que ce texte, qui rappelle les raisons de l'opposition des élus au procès et qui suggère que les époux Albert auraient agi pour satisfaire des intérêts personnels, tout en proclamant que l'une des préoccupations essentielles de l'équipe municipale est la défense des intérêts et des biens communaux établit une distinction entre deux catégories de citoyens, selon leurs origines et l'ancienneté de l'implantation de leur famille en Corse ; que le maire a procédé à l'affichage de la " mise au point de la municipalité " en divers lieux de la commune ; que le comportement ainsi incriminé au maire l'a été dans l'exercice de ses fonctions et avec les moyens des services de la commune ; que ses agissements ne sauraient être regardés comme une faute personnelle détachable du service ; que, par suite, la juridiction administrative est seule compétente pour statuer sur l'action engagée par M. Albert aux fins d'obtenir réparation du préjudice qu'il prétend avoir subi du fait des agissements de M. Peretti ; que, dès lors, c'est à bon droit que le préfet de la Corse-du-Sud a élevé le conflit sur l'action intentée devant la juridiction judiciaire ;
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 31 mai 2000 par le préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud, est confirmé ;
Article 2 : Sont déclarés nuls et non avenus la procédure engagée par M. Albert contre M. Peretti devant la cour d'appel de Bastia et l'arrêt de cette juridiction en date du 11 mai 2000.