Vu, enregistrée à son secrétariat le 21 juillet 1999, la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Mme Y... veuve Z... au PREFET DE LA REGION PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, préfet des Bouches du Rhône devant le tribunal de grande instance de Marseille ;
Vu le déclinatoire présenté le 1er juin 1999 par le PREFET DE LA REGION PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, préfet des Bouches du Rhône tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu l'article 6 de la convention du 19 juin 1990 d'application de l'accord de Scène du 14 juin 1985 ;
Vu l'accord franco-algérien du 28 septembre 1994 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Mazars, membre du Tribunal,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de Mme X...
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme Y..., ressortissante algérienne, a assigné, le 2 juin 1999, le préfet des Bouches du Rhône et le commissaire de la police de l'air et frontières devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille ; que, soutenant que le refus qui lui était opposé d'embarquer pour son pays d'origine sans ses deux enfants mineurs qu'elle laissait en France, était constitutif de voie de fait, elle a demandé au juge judiciaire d'enjoindre aux services de police de la laisser quitter le territoire national et de condamner le préfet à lui verser des dommages-intérêts provisionnels ;
Considérant que, par ordonnance de référé du 9 juin 1999, le président du tribunal de grande instance de Marseille a rejeté le déclinatoire de compétence déposé par le PREFET DE LA REGION PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, préfet des Bouches du Rhône, et, énonçant que le refus qui lui était opposé était constitutif de voie de fait, a fait droit aux demandes de Mme Y... ;
Sur la régularité de l'arrêté de conflit :
Considérant qu'il est allégué que l'arrêté de conflit intervenu le 22 juin 1999 serait irrégulier au motif qu'il serait signé, non du préfet du département mais du secrétaire général, sans que celui-ci puisse justifier d'une délégation à cet effet ;
Mais considérant que le secrétaire général de préfecture avait reçu délégation de signature du préfet par arrêté du 26 février 1997, publié au recueil des actes administratifs du département, pris sur le fondement de l'article 17 (1er) du décret n° 82-389 du 10 mai 1982 ; que, dès lors, l'arrêté de conflit est régulier ;
Sur la régularité de la procédure de conflit ;
Considérant qu'en vertu de l'article 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828, la juridiction qui rejette le déclinatoire de compétence doit surseoir à statuer pendant le délai laissé au préfet pour, s'il l'estime opportun, élever le conflit ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Marseille, qui statue au fond par la même décision que celle qui écarte le déclinatoire de compétence, doit être déclarée nulle et non avenue ;
Sur la compétence :
Considérant qu'il résulte du décret n° 82-442 du 27 mai 1982 relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France, du décret n° 94-885 du 14 octobre 1994 modifié par le décret n° 99-58 du 29 janvier 1999 et de l'article 6 de la convention du 19 juin 1990 d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 que la police de l'air et des frontières est chargée de veiller au respect des textes relatifs à la circulation transfrontalière aux frontières extérieures, et d'assurer la coopération internationale dans les domaines de sa compétence ; que selon l'accord franco-algérien du 28 septembre 1994, les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois doivent disposer des garanties de rapatriement confirmées par un titre de transport nominatif valable pour le retour ;
Considérant qu'en s'opposant, le 15 mai 1999, à l'embarquement de Mme Y..., qui, entrée en France, le 19 avril 1999, accompagnée de ses deux enfants mineurs et munie d'un visa touristique d'une durée de 20 jours, entendait retourner dans son pays d'origine en laissant ses enfants en France dans une situation irrégulière, le chef de service de la police de l'air et des frontières, a pris une mesure qui n'est pas manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration et n'a donc pas commis une voie de fait donnant compétence à l'autorité judiciaire pour connaître d'un acte de l'autorité administrative ;
Que, dès lors, c'est à bon droit que le PREFET DE LA REGION PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, préfet des Bouches du Rhône a élevé le conflit ;
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 22 juin 1999 par le PREFET DE LA REGION PROVENCE ALPES COTE-D'AZUR, préfet des Bouches du Rhône est confirmé.
Article 2 : Est déclarée nulle et non avenue la procédure engagée par Mme Y... veuve Z... contre le PREFET DE LA REGION PROVENCE ALPES COTE-DAZUR, préfet des Bouches du Rhône devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille et l'ordonnance rendue par ce magistrat le 9 juin 1999.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice qui est chargé d'en assurer l'exécution.