Vu, enregistrée à son secrétariat le 24 avril 1995, la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Mlle X... à l'agent judiciaire du Trésor, au centre hospitalier du Fau à Thiers et au docteur de Y..., chef de service audit hôpital ;
Vu le déclinatoire, présenté le 13 octobre 1993 par le préfet de Paris, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente ;
Vu l'arrêté du 15 juillet 1994 par lequel le préfet de Paris a élevé le conflit ;
Vu le jugement du 21 novembre 1994 par lequel le tribunal de grande instance de Paris a sursis à statuer sur cette affaire ;
Vu les observations de l'agent judiciaire du Trésor, en date du 24 avril 1995, tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit ;
Vu les observations présentées par M. de Y... de Chauvance, tendant à la compétence de la juridiction administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les lois des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Rougevin-Baville, membre du Tribunal,
- les observations de Me Mattéi-Dawance, avocat du Docteur de Y...,
- les conclusions de M. Gaunet, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mlle X... a demandé au tribunal de grande instance de Paris de condamner solidairement l'agent judiciaire du Trésor public, le centre hospitalier de Thiers et le docteur de Y..., médecin dudit centre, à lui verser une somme de deux millions de francs, en réparation du préjudice résultant de son placement d'office à l'hôpital du Fau à Thiers du 23 novembre 1985 au 10 novembre 1987 ; que les parties ainsi poursuivies ont demandé au Tribunal de se déclarer incompétent en ce qui concerne la longueur du délai séparant l'arrêté de placement provisoire du maire de Sauviat de la décision préfectorale de placement d'office, la légalité de l'admission et du maintien à l'hôpital, et la légalité des "sorties d'essai" qui ont été pratiquées pendant le séjour de l'intéressée ; que le tribunal de grande instance, puis la Cour d'appel de Paris ayant retenu la compétence judiciaire, le préfet de Paris a élevé le conflit ;
Considérant que si l'autorité judiciaire est seule compétente, en vertu des articles L. 333 et suivants du code de la santé publique, pour apprécier la nécessité d'une mesure de placement d'office en hôpital psychiatrique et les conséquences qui peuvent en résulter, il appartient à la juridiction administrative d'apprécier la régularité de la décision administrative qui ordonne le placement, et, le cas échéant, les conséquences dommageables de son défaut de notification ainsi que des fautes du service public qui auraient pu être commises à cet égard ;
Considérant qu'il suit de là qu'il appartenait en l'espèce à la juridiction administrative de statuer sur le litige portant sur le délai séparant l'arrêté municipal provisoire de la décision préfectorale et le défaut de notification de cette dernière à l'intéressée ; qu'en revanche, les irrégularités invoquées en ce qui concerne l'absence de décision pendant le premier semestre 1987, et les sorties à l'essai relèvent exclusivement de l'autorité judiciaire ;
Article 1er : L'arrêté de conflit du préfet de Paris en date du 15 juillet 1994 est confirmé en ce qui concerne le litige portant sur la longueur du délai séparant l'arrêté du maire de Sauviat et celui du préfet du Puy-de-Dôme et le défaut de notification de ce dernier arrêté à Mlle X.... Il est annulé pour le surplus.
Article 2 : Sont déclarés nuls et non avenus la procédure relative aux chefs de demande mentionnée à l'article 1er et l'arrêt de la Cour d'appel du 30 juin 1994 en ce qu'il a déclaré la juridiction judiciare compétente pour en connaître.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.