Vu la requête enregistrée le 16 avril 1998, sous le n° 98617, par laquelle M. Christophe A., demande au tribunal :
- de déclarer l'administration pénitentiaire responsable pour défaut de surveillance du préjudice moral qu'il a subi lors de son incarcération à la maison d'arrêt de Rouen,
- de condamner l'administration pénitentiaire à lui verser une somme de 30.000 F à titre de dommages et intérêts,
- de condamner l'administration pénitentiaire à lui verser une somme de 15.000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience publique qui a eu lieu le 8 janvier 1999 ;
Le tribunal a examiné la requête, la décision attaquée ainsi que les mémoires et les pièces produits par les parties.
Il a entendu à l'audience publique :
- le rapport de Mme Briançon, conseiller,
- les observations de Me Noël, avocat, pour M. A,
- et les conclusions de Mme Régnier-Birster, commissaire du gouvernement,
Au vu :
- de la décision d'aide juridictionnelle en date du 16 mars 1998,
- du code de procédure pénale,
- et du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les graves sévices physiques et sexuels dont a été victime M. A. de la part de MM. B. et C. dans la cellule desquels il avait été placé alors même que le précédent codétenu avait été transféré dans une autre cellule après avoir été retrouvé inanimé, révèlent une faute lourde tant en ce qui concerne le placement de M. B., individu particulièrement dangereux, qu'en ce qui concerne la surveillance qu'il impliquait ; que la responsabilité de l'Etat sur le fondement de la faute ne peut cependant être retenue qu'en conséquence de sa part de responsabilité dans la survenance des dommages ; que, dans les circonstances de l'espèce, cette part de responsabilité peut être estimée à 20 % ;
Sur le montant de l'indemnité due à M. A. :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la cour d'assises de la Seine-Maritime a condamné les auteurs de sévices à réparer l'intégralité du préjudice subi par M. A. qu'elle a évalué à 2.122,60 F au titre du préjudice matériel, 50.000 F au titre du pretium doloris et 120.000 F au titre du préjudice moral ; que cette indemnité comprend nécessairement la partie correspondant à la propre responsabilité de l'Etat ; qu'il sera fait une juste appréciation du dommage subi par M. A., dont l'Etat lui doit réparation, en le condamnant à payer 20 % du montant du préjudice évalué comme l'a fait la cour d'assises, soit la somme de 34.425 F sous réserve toutefois que le paiement en soit subordonnée à la subrogation de l'Etat par M. A. aux droits résultant pour lui, à concurrence du montant de cette somme, de la condamnation prononcée par la cour d'assises ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. A. la somme de 4000 F sur le fondement de l'article susmentionné ;
Article 1er : L'Etat est condamné à payer à M. A. la somme de trente quatre mille quatre cent vingt cinq francs (34.425 F) sous réserve de sa subrogation jusqu'à concurrence de ladite somme aux droits résultant pour M. A. de la condamnation prononcée par la cour d'assises de la Seine-Maritime.
Article 2 : L'Etat est condamné à payer à M. A. la somme de quatre mille francs (4000 F) sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.