Vu la requête, enregistrée au greffe le 3 juin 1976, présentée pour Mme X... (Hélène), demeurant ... à Colombes (Hauts-de-Seine), et tendant à ce que le Tribunal annule la décision du 29 avril 1986, par laquelle le préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine lui a refusé la restitution de la somme de 3.750 F que la requérante avait versée à l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes, en exécution d'une convention, conclue le 19 décembre 1983 avec cet établissement public, déterminant les modalités de la compensation financière imposée par l'article 3 de l'arrêté du préfet, commissaire de la République, en date du 21 décembre 1983, dont l'article 1er autorise la requérante à affecter à sa profession de gynécologue la totalité d'un appartement à usage d'habitation sis ... à Colombes ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986, modifiée, et, notamment, son article 18 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
le rapport de Mme Roul, conseiller ;
et les conclusions de Mme Pons, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'article L.631-7, alinéa 1er, 1° du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction issue de la loi du 2 juin 1983, interdit, dans certaines communes, et sous réserve des dérogations prévues à l'alinéa 2 du même article, l'affectation des locaux d'habitation à un autre usage ;
Considérant que, par l'article 1er de son arrêté du 21 décembre 1983, le préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine a accordé la dérogation prévue par les dispositions susmentionnées de l'article L.631-7 du code de la construction et de l'habitation à Mme X..., qui sollicitait l'autorisation d'affecter à sa profession de gynécologue, la totalité d'un appartement à usage d'habitation, sis ... à Colombes ; qu'il a, toutefois, assorti cette dérogation d'une condition tenant au respect par l'intéressée des stipulations d'un contrat conclu avec l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes, le 19 décembre 1983, selon lesquelles Mme X... consentait un prêt sans intérêts à cet établissement public ; que la requête de Mme X... tend, à titre principal, à l'annulation de la décision du 29 avril 1986, par laquelle le préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine a entendu lui refuser la restitution de la somme de 3.750 F qu'elle avait versée à l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes en application de la convention du 19 décembre 1983 ; qu'elle tend, à titre subsidiaire, à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 1983, en tant que, par cet arrêté, le préfet, commissaire de la République a imposé à la requérante, en contrepartie de la dérogation accordée, une compensation financière consistant en un versement d'un prêt sans intérêts à l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes ;
Sur les conclusions principales de la requête :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports :
Considérant que le préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine, qui agissait au nom de l'Etat, n'avait pas compétence pour restituer à Mme X... une somme que celle-ci avait versée à un établissement public communal ; qu'il était, dès lors, tenu de rejeter la demande dont l'intéressée l'avait saisi à cette fin ; que, par suite, et quels que soient les motifs sur lesquels repose la décision du 29 avril 1986, Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation de ladite décision ;
Sur les conclusions subsidiaires de la requête :
Sur leur recevabilité :
Considérant, en premier lieu, que, dès lors qu'il n'est pas justifié de la date à laquelle a commencé à courir le délai du recours contentieux contre l'arrêté du préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine, en date du 21 décembre 1983, les conclusions tendant à l'annulation partielle de cet arrêté ne sauraient être entachées d'aucune forclusion ;
Considérant, en second lieu, que, si l'autorité compétente dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour accorder ou refuser les dérogations prévues par le second alinéa de l'article L.631-7 du code de la construction et de l'habitation, le ministre chargé du logement a, par des circulaires en date des 3 octobre 1972, 20 novembre 1975, et 7 avril 1981, fixé l'assiette, le taux, et les modalités de recouvrement de la compensation financière dont il a prescrit d'assortir les dérogations susmentionnées, dans des cas qu'il a également définis, ne laissant, ainsi, aucun pouvoir d'appréciation à l'autorité compétente ; que la compensation ainsi édictée n'a, au surplus, pas le caractère d'une prescription technique, mais d'une prescription financière ; qu'il en résulte que les dispositions d'une décision assujettissant un pétitionnaire à une telle compensation ne forment pas, avec celles accordant la dérogation sollicitée, un ensemble indivisible ; qu'elles sont, par suite, susceptibles de faire l'objet d'un recours contentieux indépendamment de ces dernières dispositions ; que Mme X... est, dès lors, recevable à demander l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 1983, en tant que, par cet arrêté, le préfet, commissaire de la République lui a imposé une compensation financière ;
Sur la légalité des dispositions attaquées ;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 : "La loi fixe les règles concernant ... l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ..." ;
Considérant que, lorsque l'autorité compétente subordonne l'octroi de la dérogation prévue par l'article L.637-1 du code de la construction et de l'habitation à une condition de nature financière, tenant à l'obligation pour le bénéficiaire de verser une somme à un office public d'habitations à loyer modéré, ce versement, qui n'a pas le caractère d'une rémunération pour services rendus, et qui, perçu au profit d'un établissement public administratif dépendant d'une collectivité territoriale, n'a pas non plus le caractère d'une taxe parafiscale, ne peut qu'être rangé, quelles que soient ses modalités de perception par cet établissement public, parmi les impositions de toutes natures qui relèvent de la compétence du législateur, en vertu des dispositions, précitées, de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 ; que, dès lors, les dispositions de l'arrêté du 21 décembre 1983, par lesquelles Mme X... a été assujettie au versement d'un prêt sans intérêts à l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes, alors que les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement de cette imposition n'avaient pas été fixées par une loi, mais par des circulaires ministérielles, sont dépourvues de base légale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine, en tant que cet arrêté lui a imposé une compensation financière ;
Article 1er : L'arrêté du préfet, commissaire de la République du département des Hauts-de-Seine est annulé, en tant que, par cet arrêté, le préfet, commissaire de la République a imposé à Mme X... l'obligation de verser un prêt sans intérêts à l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme X..., à l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Colombes, et au ministre d'Etat, ministre de l'équipement et du logement.