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09/11/1989 | FRANCE | N°CETATEXT000008277465

France | France, Tribunal administratif de Limoges, 09 novembre 1989, CETATEXT000008277465


Vu, la requête enregistrée au Greffe le 24 janvier 1989 présentée par la Clinique Saint François dont le siège se trouve ... et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision en date du 25 novembre 1988 par laquelle le Ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection Sociale lui a refusé l'autorisation de poursuivre ses activités de procréation médicalement assistée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Après avoir entendu le rapport de M. Gourdon, Président, et le

s conclusions de M. Foucher, Commissaire du Gouvernement ;

Sans qu'il soit...

Vu, la requête enregistrée au Greffe le 24 janvier 1989 présentée par la Clinique Saint François dont le siège se trouve ... et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision en date du 25 novembre 1988 par laquelle le Ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection Sociale lui a refusé l'autorisation de poursuivre ses activités de procréation médicalement assistée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Après avoir entendu le rapport de M. Gourdon, Président, et les conclusions de M. Foucher, Commissaire du Gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Sur le moyen relatif au premier motif de rejet de la demande d'autorisation et tiré de ce que "compte-tenu de la date de la demande le Ministre ne pouvait motiver son refus en considérant que les besoins sanitaires de la population étaient déjà satisfaits".
Considérant qu'en vertu des articles 2 et 7 du Décret n° 88-327 du 8 avril 1988 les établissements privés relevant de la loi hospitalière du 31 décembre 1970 qui pratiquaient des activités de procréation médicalement assistée (P.M.A.) ont été tenus pour poursuivre lesdites activités d'en solliciter l'autorisation dans les conditions prescrites par l'article 34 de cette loi ; qu'il résulte de l'ensemble des dispositions des articles 31, 32, 33, 44, 45 et 46, de cette dernière, auxquelles renvoie l'article 34, que les établissements privés qui sollicitent l'autorisation d'installer des équipements matériels lourds au sens de l'article 46 ou d'implanter des services de haute technicité dont les activités de soins et de diagnostic se situent dans des domaines de pointe d'un coût élevé, ne peuvent obtenir celle-ci qu'à condition que la carte sanitaire ne fasse pas apparaître que les besoins pour ce type d'équipements ou de services et pour le territoire concerné ne sont pas déjà satisfaits ; que la liste de ces équipements ou services est fixée par décret ; que le décret n° 88-460 du 22 avril 1988 a rangé au nombre des établissements ou équipements en question ceux qui correspondent à "13° (1') activité de procréation médicalement assistée" ;

Considérant que dans l'hypothèse même où cette carte serait opposable à des équipements et services déjà existants à la date de publication du décret et non pas aux seuls projets envisagés qui n'auraient pas connu un commencement d'exécution, il convient d'examiner si ce n'est pas à tort, comme le soutient la clinique requérante, que le ministre a considéré que "les besoins pouvaient être tenus pour couverts dans la région en raison du nombre et de la localisation des autorisations délivrées" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 44 de la loi du 31 décembre 1970 et du décret n° 7354 du 11 janvier 1973 que la carte sanitaire comporte d'une part la définition des besoins théoriques déterminés à partir d'un indice fixé par le Ministre, d'autre part un inventaire des équipements ou services existants ou déjà autorisés permettant de satisfaire auxdits besoins ; qu'elle peut, selon les cas, être établie par secteur, par région sanitaire, par groupe de secteurs ou de régions, ou pour le territoire national et tenir compte de la localisation des installatitons ;

Considérant que le décret n° 88-460 du 22 avril 1988 susmentionné précise en son araticle 2 que les besoins correspondant aux activités de P.M.A. "sont évalués dans le cadre de chaque région sanitaire" ; que, par arrêté en date du 20 septembre 1988, le Ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection Sociale a fixé l'indice de besoins afférents aux activités de P.M.A. à "une structure d'activités cliniques pour une population de 100.000 à 125.000 femmes âgées de 20 à 40 ans" ; qu'au regard de la définition susrappelée de ce document, cet arrêté ne saurait être regardé comme constituant à lui seul la carte sanitaire des activités de P.M.A. dans la région dont relève la clinique requérante ; qu'il ne ressort pas de l'instruction et que le Ministre n'établit pas ni même n'allègue qu'à la date à laquelle la clinique Saint François a formé sa demande ou à celle où il a pris sa décision, le nombre optimum de structures d'activité clinique de P.M.A. ait été fixé pour la région sanitaire dont relève cet établissement, pas plus que celui des équipements existants ou autorisés, même s'il soutient qu'il aurait accordé, la veille de la décision litigieuse, un nombre indéterminé d'autorisations non localisées sur "des critères de carte sanitaire" ; que, dans ces conditions, la carte sanitaire instituée par les articles 33 et 44 de la loi ne pouvait être regardée comme établie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Ministre n'était ainsi pas en mesure de constater si les besoins de la région pouvaient ou non être tenus pour couverts, et que le premier motif sur lequel il s'est fondé pour rejeter la demande d'autorisation sollicitée doit donc être regardé comme erroné ;

Sur le moyen relatif au second motif de rejet et tiré de ce que, dès lors que l'établissement répondait à toutes les normes d'équipement et de fonctionnement fixées par le décret n° 88-327 du 8 avril 1988, le Ministre ne pouvait, pour rejeter la demande d'autorisation, considérer qu'il "ne présentait pas de garanties suffisantes dans l'intérêt de la santé publique".
Considérant qu'en effet, le ministre a estimé "que les conditions de fonctionnement de cet établissement en ce qui concerne les activités cliniques de P.M.A. ne présentent pas de garanties suffisantes dans l'intérêt de la santé publique" ;
Considérant que dans la mesure où le ministre aurait entendu sous cette formule aussi générale qu'ambigue, soutenir que la clinique Saint-François ne remplissait pas les normes techniques fixées par le décret, cette affirmation n'est confirmée par aucun élément du dossier et ne fait l'objet, dans le cadre de la présente procédure contentieuse, d'aucune précision permettant d'apprécier la portée exacte et le mérite du motif ainsi retenu ; que le Ministre, qui ne produit même pas le dossier instruit par ses services, ne conteste pas utilement le point de vue de la clinique ; qu'ainsi, le motif invoqué doit être regardé comme reposant sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant que dans la mesure où le Ministre aurait entendu retenir des considérations relatives à l'intérêt de la santé publique autres que la constatation du respect des normes techniques prescrites par le décret du 8 avril 1988, il ne pouvait, pour invoquer ce motif, se fonder que sur le 3ème alinéa de l'article 33 de la loi du 31 Décembre 1970 aux termes duquel, outre le respect de la carte sanitaire et des normes techniques fixées par décret exigé de l'établissement "l'autorisation peut être subordonnée à des conditions particulières imposées dans l'intérêt de la santé publique" ; que, néanmoins, pour être opposables aux établissements qui sollicitent l'autorisation de poursuivre leurs activités de P.M.A., les conditions particulières en question devaient, si elles revêtaient un caractère général faire l'objet d'un texte réglementaire publié, ou, si elles se rattachaient uniquement aux caractéristiques propres à l'établissement, lui être notifiées antérieurement à la décision définitive ; qu'il ressort de l'instruction que les conditions particulières auxquelles la clinique Saint-François n'aurait pas satisfait n'ont fait l'objet ni d'un texte réglementaire, ni d'une décision individuelle notifiée antérieurement à la décision attaquée ; que, dans cette hypothèse, le Ministre a fait une inexacte application du 3ème alinéa de l'article 33 de la loi en opposant à la clinique requérante l'absence de garanties que présenteraient ses conditions de fonctionnement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le second motif retenu par le Ministre doit, lui aussi, être regardé comme erroné ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la décision attaquée repose sur des motifs erronés et ne saurait donc qu'être annulée pour excès de pouvoir ;

Article 1er - La décision du 25 novembre 1988 par laquelle le Ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection Sociale a rejeté la demande de la clinique Saint-François est annulée.

Article 2 - Le présent jugement sera notifié au Directeur de la clinique de Saint-François, et au Ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection Sociale. Une copie en sera adressée au Préfet de l'Indre.


Synthèse
Tribunal : Tribunal administratif de Limoges
Numéro d'arrêt : CETATEXT000008277465
Date de la décision : 09/11/1989
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

SANTE PUBLIQUE - ETABLISSEMENTS PRIVES D'HOSPITALISATION - AUTORISATIONS DE CREATION - D'EXTENSION OU D'INSTALLATION D'EQUIPEMENTS MATERIELS LOURDS - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION - Garanties suffisantes dans l'intérêt de la santé publique.

61-07-01-03 Décision du 25 novembre 1988 du ministre chargé de la santé refusant à une clinique l'autorisation de poursuivre ses activités de procréation médicalement assistée aux motifs que les besoins pouvaient être tenus pour couverts dans la région et que les conditions de fonctionnement de l'établissement en ce qui concerne les activités cliniques de procréation médicalement assistée ne présentaient pas de garanties suffisantes dans l'intérêt de la santé publique. Si par ce second motif le ministre entendait retenir des considérations relatives à l'intérêt de la santé publique autres que la constatation du respect des normes techniques prescrites par le décret du 8 avril 1988, il ne pouvait, pour invoquer ce motif, se fonder que sur le 3ème alinéa de l'article 33 de la loi du 31 décembre 1970 aux termes duquel, outre le respect de la carte sanitaire et des normes techniques fixées par décret exigé de l'établissement "l'autorisation peut être subordonnée à des conditions particulières imposées dans l'intérêt de la santé publique". Néanmoins, pour être oppposables aux établissements qui sollicitent l'autorisation de poursuivre leurs activités de procréation médicalement assistée, les conditions particulières en question devaient, si elles revêtaient un caractère général faire l'objet d'un texte réglementaire publié, ou, si elles se rattachaient uniquement aux caractéristiques propres à l'établissement, lui être notifiées antérieurement à la décision définitive. Dès lors qu'il ressort de l'instruction que les conditions particulières auxquelles la clinique n'aurait pas satisfait n'ont fait l'objet ni d'un texte réglementaire, ni d'une décision individuelle notifiée antérieurement à la décision attaquée, c'est par une inexacte application du 3ème alinéa de l'article 33 de la loi que le ministre a opposé à la clinique requérante l'absence de garanties que présenteraient ses conditions de fonctionnement.

SANTE PUBLIQUE - ETABLISSEMENTS PRIVES D'HOSPITALISATION - AUTORISATIONS DE CREATION - D'EXTENSION OU D'INSTALLATION D'EQUIPEMENTS MATERIELS LOURDS - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION - BESOINS DE LA POPULATION - ETABLISSEMENT DE LA CARTE SANITAIRE - Absence - Carte des besoins en matière de procréation médicalement assistée - Arrêté du 20 septembre 1988 ne pouvant en tenir lieu.

61-07-01-03-01-01 Décision du 25 novembre 1988 du ministre chargé de la santé refusant à une clinique l'autorisation de poursuivre ses activités de procréation médicalement assistée aux motifs que les besoins pouvaient être tenus pour couverts dans la région et que les conditions de fonctionnement de l'établissement en ce qui concerne les activités cliniques de procréation médicalement assistée ne présentaient pas de garanties suffisantes dans l'intérêt de la santé publique. A la date de la décision attaquée, le nombre optimum de structures d'activité clinique de procréation médicalement assistée n'ayant pas été fixé pour la région sanitaire considérée, ni les équipements existants ou autorisés recensés, la carte sanitaire prévue par les articles 33 et 44 de la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 ne pouvait être regardée comme établie. L'arrêté du 20 septembre 1988 par lequel le ministre a fixé l'indice des besoins afférents aux activités de procréation médicalement assistée à une structure d'activités cliniques pour une population de 100.000 à 125.000 femmes de 20 à 40 ans ne pouvant être considéré comme constituant à lui seul ladite carte. Par suite, le ministre n'était pas en mesure d'apprécier si les besoins de la région pouvaient ou non être tenus pour couverts.


Références :

Décret 73-54 du 11 janvier 1973
Décret 88-327 du 08 avril 1988 art. 2, art. 7
Décret 88-460 du 22 avril 1988 art. 2
Loi 70-1318 du 31 décembre 1970 art. 34, art. 31, art. 32, art. 33, art. 44, art. 45, art. 46


Composition du Tribunal
Président : M. Gourdon
Rapporteur ?: M. Gourdon
Rapporteur public ?: M. Foucher

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.administratif.limoges;arret;1989-11-09;cetatext000008277465 ?
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