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14/11/1989 | FRANCE | N°CETATEXT000008277459

France | France, Tribunal administratif de Dijon, 14 novembre 1989, CETATEXT000008277459


Vu, enregistrée au greffe du tribunal, bureau central, le 14 juin 1986, la requête présentée pour l'association de protection de l'environnement et de la nature, des rus et ruisseaux de Vénizy et des communes limitrophes dont le siège est situé à la mairie de Vénizy (Yonne), tendant à ce que le tribunal :
1) annule la délibération en date du 2 janvier 1989 pour laquelle le conseil municipal de la commune de Chailley a demandé l'ouverture d'une enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique des travaux d'extension de la station d'épuration communale ;

2) annule l'arrêté en date du 18 avril 1989 par lequel le préfet de l'Yo...

Vu, enregistrée au greffe du tribunal, bureau central, le 14 juin 1986, la requête présentée pour l'association de protection de l'environnement et de la nature, des rus et ruisseaux de Vénizy et des communes limitrophes dont le siège est situé à la mairie de Vénizy (Yonne), tendant à ce que le tribunal :
1) annule la délibération en date du 2 janvier 1989 pour laquelle le conseil municipal de la commune de Chailley a demandé l'ouverture d'une enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique des travaux d'extension de la station d'épuration communale ;
2) annule l'arrêté en date du 18 avril 1989 par lequel le préfet de l'Yonne a déclaré d'utilité publique les travaux d'extension de la station d'épuration de la commune de Chailley et autorisé ladite commune à déverser l'effluent épuré dans le ru de Chailley ;
3) subsidiairement, impose les prescriptions propres à assurer efficacement le respect des intérêts protégés par la loi du 10 juillet 1976 ;
4) condamne l'Etat à lui verser la somme de 10.000 F en réparation du préjudice subi ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;
Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Après avoir entendu, à l'audience publique du 7 novembre 1989,
- le rapport de M. Darrieutort, conseiller,
- les conclusions de M. Silvestre, commissaire du gouvernement, et après en avoir délibéré ;

Considérant que, par arrêté en date du 18 avril 1989, le préfet de l'Yonne a déclaré d'utilité publique les travaux d'extension de la station d'épuration de la commune de Chailley et autorisé ladite commune à déverser l'effluent épuré dans le ru de Chailley ; que l'association de protection de l'environnement et de la nature, des rus et ruisseaux de Vénizy et des communes limitrophes conteste cette décision et en demande l'annulation ; qu'en outre, ladite association demande également l'annulation de la délibération en date du 2 janvier 1989 par laquelle le conseil municipal de Chailley a notamment demandé l'ouverture d'une enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique des travaux d'extension de la station d'épuration communale et s'est engagé à faire face à la dépense au moyen de subventions et d'emprunts ; qu'enfin, l'association requérante demande une indemnité en réparation du préjudice qu'elle aurait subi ;
Sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Chailley en date du 2 janvier 1989 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-35 du code des communes : "sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part les membres du conseil intéressé à l'affaire qui en a fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataire" ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le maire de la commune de Chailley était intéressé par la construction d'une station d'épuration communale ; qu'il s'est cependant abstenu de prendre part au vote lors de la séance du conseil du 2 janvier 1989 ; que, par suite, l'association requérante n'est pas fondée à poursuivre l'annulation de la délibération susvisée ;

Sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral en date du 18 avril 1989 :
Considérant que la commune de Chailley dispose d'une station d'épuration d'une capacité de mille équivalents habitants ; que cette station est suffisante pour assurer le traitement des eaux usées des six cents habitants de la commune ;
Considérant que ladite commune a décidé de procéder à l'extension de cette station pour porter sa capacité à huit mille cinq cents équivalents habitants ; que le coût de ce projet s'élève à la somme de 4.500.000 F dont une part importante devra être prise en charge par la commune ; que, par ailleurs, la société La Chaillotine projette d'édifier et d'exploiter dans ladite commune un complexe industriel comprenant un atelier d'abattage de volailles d'une capacité maximale de 40.000 poulets par jour et une unité de fabrication d'aliments pour volailles ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que l'extension de la station d'puration communale n'a été rendue nécessaire qu'en raison du projet de développement de la société La Chaillotine ; qu'il est constant que cet établissement constitue une installation classée pour la protection de l'environnement, soumise à autorisation ; que la loi du 19 juillet 1976 et le décret du 21 septembre 1977 permettent au préfet d'imposer à l'exploitant et à ses frais les mesures nécessaires pour assurer la protection de l'environnement ; que notamment le préfet disposait, en l'espèce, du pouvoir de subordonner l'autorisation au retraitement des eaux utilisées par l'établissement ; que, par suite, en déclarant d'utilité publique les travaux d'extension de la station communale d'épuration le préfet de l'Yonne a entendu transférer sur la communes de Chailley, dont le maire est d'ailleurs le président directeur général de l'entreprise La Chaillotine, une charge qui incombait normalement à cette dernière ; qu'ainsi sa décision n'a pas été prise dans un but d'intérêt général mais dans l'intérêt d'une entreprise privée ; qu'elle est, par suite, entachée de détournement de pouvoir et qu'il y a lieu, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, d'en prononcer l'annulation ;

Sur les conclusions aux frais d'indemnité :
Considérant que l'association requérante demande que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 10.000 F en réparation des frais qu'elle a engagés pour assurer la protection du ru du Creaton ; qu'en tout état de cause, l'association n'établit pas que l'arrêté préfectoral en date du 18 avril 1989 aurait effectivement été préjudiciable aux intérêts qu'elle défend ; que, par suite, sa demande ne peut qu'être rejetée.

Article 1er - L'arrêté en date du 18 avril 1989 par lequel le préfet de l'Yonne a déclaré d'utilité publique les travaux d'extension de la station d'épuration de la commune de Chailley et autorisé ladite commune à déverser l'effluent épuré dans le ru de Chailley est annulé.

Arrêté 2 - Le surplus des conclusions de la requête de l'association de protection de l'environnement et de la nature, des rus et ruisseaux de Vénizy et des communes limitrophes est rejeté.

Article 3 - Expédition du présent jugement sera notifiée à l'association de protection de l'environnement et de la nature, des rus et ruisseaux de Vénizy et des communes limitrophes, au secrétaire d'Etat, chargé de l'environnement et à la commune de Chailley ; en outre, copie en sera transmise au préfet du département de l'Yonne.


Synthèse
Tribunal : Tribunal administratif de Dijon
Numéro d'arrêt : CETATEXT000008277459
Date de la décision : 14/11/1989
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - DETOURNEMENT DE POUVOIR ET DE PROCEDURE - DETOURNEMENT DE POUVOIR - Existence - Décision prise dans un intérêt privé - Déclaration d'utilité publique de l'extension d'une station d'épuration uniquement destinée à permettre le traitement des rejets d'un complexe industriel privé en projet constituant une installation classée soumise à autorisation.

01-06-01, 34-01-01, 44-02-02-01 Arrêté préfectoral déclarant d'utilité publique l'extension d'une station d'épuration communale qui n'est rendue nécessaire que par un projet d'installation par une société privée d'un complexe industriel soumis à autorisation au titre des installations classées. La loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 et le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 relatifs aux installations classées permettant au préfet d'imposer à l'exploitant et à ses frais les mesures nécessaires pour assurer la protection de l'environnement et notamment de subordonner l'autorisation de création au retraitement des eaux utilisées par l'établissement, en déclarant d'utilité publique les travaux d'extension de la station communale d'épuration le préfet a entendu transférer sur la commune, dont le maire est d'ailleurs le président-directeur général de l'entreprise en cause, une charge qui incombait normalement à cette dernière. Ainsi sa décision n'a pas été prise dans un but d'intérêt général mais dans l'intérêt d'une entreprise privée. Elle est, par suite, entachée de détournement de pouvoir.

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - NOTIONS GENERALES - NOTION D'UTILITE PUBLIQUE - Extension d'une station d'épuration uniquement destinée à permettre le traitement des rejets d'un complexe industriel privé en projet constituant une installation classée soumise à autorisation.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - LOI DU 19 JUILLET 1976 RELATIVE AUX INSTALLATIONS CLASSEES POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT - REGIME JURIDIQUE - POUVOIRS DU PREFET - Pouvoir de subordonner la création d'une installation soumise à autorisation au retraitement de ses eaux usées par l'établissement - Conséquences - Illégalité de la déclaration d'utilité publique de l'extension d'une station d'épuration destinée à permettre le traitement des rejets d'un complexe industriel constituant une installation classée soumise à autorisation.


Références :

Arrêté préfectoral du 18 avril 1989 Yonne déclaration d'utilité publique décision attaquée annulation
Code des communes L121-35
Décret 77-1133 du 21 septembre 1977
Loi 76-663 du 19 juillet 1976


Composition du Tribunal
Président : M. Mégier
Rapporteur ?: M. Darrieutort
Rapporteur public ?: M. Silvestre

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.administratif.dijon;arret;1989-11-14;cetatext000008277459 ?
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