CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 12 juin 2025
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 418 F-D
Pourvoi n° J 23-13.900
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 janvier 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [G] [F] [K], domiciliée Société immobilière du département de La Réunion (SIDR), [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 23-13.900 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2022 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. [Z] [T], domicilié Société immobilière du département de La Réunion (SIDR), [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de la SAS Zribi et Texier, avocat de Mme [K], et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 6 juillet 2022), des relations entre Mme [K] et M. [T], est née [B] [K], le 11 février 2015.
2. Par requête du 29 octobre 2020, Mme [K] a saisi un juge aux affaires familiales pour voir statuer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et sur la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.
Examen des moyens
Sur le premier moyen,
Enoncé du moyen
3. Mme [K] fait grief à l'arrêt de constater l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur l'enfant mineur [B] [K], de dire que le droit de visite et d'hébergement du père s'exercera les fins de semaines paires du vendredi à la sortie d'école au dimanche 18 heures, et pendant la moitié des vacances scolaires, la première moitié les années paires et la seconde moitié les années impaires et de rejeter toutes les demandes plus amples ou contraires, alors :
« 1°/ que dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet ; que lorsque la demande est formée par le mineur, le refus d'audition ne peut être fondé que sur son absence de discernement ou sur le fait que la procédure ne le concerne pas et que lorsque la demande est formée par les parties, l'audition peut également être refusée si le juge ne l'estime pas nécessaire à la solution du litige ou si elle lui paraît contraire à l'intérêt de l'enfant mineur ; qu'en énonçant, pour rejeter la demande d'audition de l'enfant, sur la circonstance que les cinq lignes manuscrites produites au soutien de cette demande ne portaient que sur des événements qui ne sauraient motiver de faire droit à l'audition d'une enfant âgée de 7 ans et par conséquent beaucoup trop jeune et que rien ne permet de dire pour quelles raisons l'enfant devrait être entendue en cause d'appel, en se bornant à se référer à l'âge de l'enfant mineur, sans expliquer en quoi celui-ci ne serait pas capable de discernement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de articles 388-1 du code civil et 338-4 du code de procédure civile ;
2°/ que dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet ; que lorsque la demande est formée par le mineur, le refus d'audition ne peut être fondé que sur son absence de discernement ou sur le fait que la procédure ne le concerne pas et que lorsque la demande est formée par les parties, l'audition peut également être refusée si le juge ne l'estime pas nécessaire à la solution du litige ou si elle lui paraît contraire à l'intérêt de l'enfant mineur ; qu'en énonçant, pour rejeter la demande d'audition de l'enfant, que les cinq lignes manuscrites produites au soutien de cette demande ne portaient que sur des événements qui ne sauraient motiver de faire droit à l'audition d'une enfant âgée de 7 ans et par conséquent beaucoup trop jeune et que rien ne permet de dire pour quelles raisons l'enfant devrait être entendue en cause d'appel, et en statuant ainsi par des motifs impropres à justifier le rejet de la demande d'audition de l'enfant formée par sa mère, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de articles 388-1 du code civil et 338-4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 388-1 du code civil et 338-4, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile :
4. Selon le premier de ces textes, dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut être entendu par le juge.
5. Aux termes du second, lorsque la demande est formée par le mineur, le refus d'audition ne peut être fondé que sur son absence de discernement ou sur le fait que la procédure ne le concerne pas. Lorsque la demande est formée par les parties, l'audition peut également être refusée si le juge ne l'estime pas nécessaire à la solution du litige ou si elle lui paraît contraire à l'intérêt de l'enfant mineur.
6. Pour constater l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur l'enfant mineur [B] [K], fixer le droit de visite et d'hébergement du père et rejeter toutes les demandes plus amples ou contraires relatives à l'enfant, l'arrêt, après avoir constaté que la mère demande que celle-ci soit entendue, au motif qu'elle ne souhaiterait plus voir son père, car toutes ses visites auraient été catastrophiques, retient que les cinq lignes manuscrites de la mineure, produites au soutien de la demande, ne portent que sur des événements qui ne sauraient motiver de faire droit à l'audition d'une enfant âgée de sept ans, par conséquent beaucoup trop jeune. Il ajoute que cette demande n'a pas été présentée en première instance et que rien ne permet de dire pour quelles raisons l'enfant devrait être entendue en appel, de sorte qu'elle doit être rejetée.
7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à justifier le refus de procéder à l'audition de l'enfant demandée par la mère, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur certaines dispositions de l'arrêt entraîne celle de toutes les autres dispositions de l'arrêt relatives à l'enfant [B] [K], qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée ;
Condamne M. [T] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le douze juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.