SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
______________________
Arrêt du 11 juin 2025
Cassation partielle
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 639 F-D
Pourvoi n° G 23-14.382
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [J].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 décembre 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 JUIN 2025
M. [G] [J], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 23-14.382 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2023 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 5e chambre sociale PH), dans le litige l'opposant :
1°/ à l'association Unedic délégation AGS-CGEA de [Localité 5], dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à Mme [O] [H], domiciliée [Adresse 4], exploitant sous l'enseigne PACA Sud nettoyage,
3°/ à la société Bleu Sud, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en la personne de Mme [B] [Z], en qualité de mandataire ad hoc de Mme [O] [H], exploitant sous l'enseigne PACA Sud nettoyage,
4°/ à la société BRMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], pris en qualité de mandataire liquidateur de Mme [O] [H],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de Me Ridoux, avocat de M. [J], après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [J] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société BRMJ, en sa qualité de liquidateur de Mme [H], exerçant sous l'enseigne PACA Sud nettoyage.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 janvier 2023), M. [J] a été engagé en qualité d'agent de service par Mme [H], exerçant sous l'enseigne PACA Sud nettoyage, le 6 février 2016.
3. Un tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de l'employeur le 19 avril 2017 et a désigné la société BRMJ en qualité de mandataire liquidateur.
4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.
5. La liquidation judiciaire de l'employeur a été clôturée le 7 avril 2021.
6. La société Bleu Sud a été désignée en qualité de mandataire ad hoc par jugement d'un tribunal de commerce du 31 juillet 2024.
Examen des moyens
Sur le second moyen
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
8. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger que la résiliation judiciaire ne produit pas les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le débouter de ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, l'indemnité légale de licenciement et de l'indemnité pour résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée à la demande du salarié dans le cas d'un manquement de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail ; que la résiliation judiciaire produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit d'un licenciement nul ; qu'en l'espèce, à la demande de M. [J], la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail, ce qui impliquait nécessairement que la rupture était prononcée aux torts de l'employeur, la résiliation devant alors produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que dès lors, en jugeant que la résiliation judiciaire intervenue le 6 février 2020 n'était pas aux torts exclusifs de l'employeur et qu'elle ne produisait pas les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article L. 1222-1 du code du travail, ensemble les articles 1134 et 1184 du code civil dans leur ancienne rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1231-1 du code du travail, 1224 et 1227 du code civil :
9. Il résulte de ces textes que la résiliation judiciaire du contrat de travail qui ne peut être prononcée qu'aux torts exclusifs de l'employeur lorsqu'il a commis des manquements empêchant la poursuite du contrat de travail, produit les effets soit d'un licenciement nul, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
10. Pour débouter le salarié des demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt, après avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail, retient qu'elle n'est pas aux torts exclusifs de l'employeur et qu'elle ne produit pas les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ni ne donne lieu aux indemnisations subséquentes.
11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il juge que la résiliation judiciaire du contrat de travail ne produit pas les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et déboute M. [J] de ses demandes tendant à l'inscription sur l'état des créances de Mme [H], exploitant sous l'enseigne PACA Sud nettoyage, de ses créances à hauteur des sommes de 2 915,10 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 291,51 euros au titre des congés payés afférents, 1 184,25 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement et de 7 500 euros à titre d'indemnité pour résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes autrement composée ;
Condamne la société Bleu Sud, en sa qualité de mandataire ad hoc de Mme [H], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bleu Sud, ès qualités, à payer à Maître Ridoux la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le onze juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.