CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 5 juin 2025
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 565 F-D
Pourvoi n° N 23-14.593
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025
Mme [Z] [F], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 23-14.593 contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 12), dans le litige l'opposant à La Maison départementale des personnes handicapées de l'Essonne, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de Me Occhipinti, avocat de Mme [F], et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 janvier 2023), Mme [F] (l'allocataire) bénéficiait, depuis 2009, de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) pour son fils mineur, dont le taux d'incapacité permanente avait été fixé à plus de 80%, et du complément d'allocation de catégorie 4.
2. Par décision du 9 juin 2020, la maison départementale pour les personnes handicapées de l'Essonne (la MDPH) a informé l'allocataire que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a reconnu à l'enfant un taux d'incapacité permanente entre 50 et 79 %, et lui a attribué un complément d'allocation de catégorie 3 pour la période du 1er décembre 2020 au 30 novembre 2023.
3. L'allocataire a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen des moyens
Sur le second moyen
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. L'allocataire fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa contestation du taux d'incapacité permanente reconnu à son fils, alors « que les juges du fond ne peuvent pas relever d'office un moyen sans le soumettre à la discussion des parties ; que la cour d'appel a relevé d'office, sans le soumettre à la discussion des parties, le moyen tiré de ce que la décision d'attribution de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé aurait été prise par une décision distincte de celle du 9 juin 2020 attaquée par l'exposante, de sorte que la contestation du taux d'invalidité aurait été irrecevable ; qu'elle a ainsi méconnu le principe du contradictoire, violant l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
6. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
7. En procédure orale, il ne peut être présumé qu'un moyen relevé d'office par le juge a été débattu contradictoirement, dès lors qu'une partie n'était pas présente à l'audience.
8. Pour déclarer irrecevable la contestation du taux d'incapacité permanente reconnu au fils de l'allocataire, l'arrêt retient que l'attribution de l'AEEH résulte d'une décision distincte de celle 9 juin 2020 dont il n'est pas allégué qu'elle a fait l'objet, conformément à l'article R. 241-32 du code de l'action sociale et des familles, d'un recours préalable à l'action contentieuse.
9. En statuant ainsi, alors que la MDPH n'était pas présente à l'audience et qu'il ne ressort pas des énonciations de la décision que la partie présente ait été, au préalable, invitée à formuler ses observations sur le moyen relevé d'office, pris de l'irrecevabilité de la demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la contestation du taux d'incapacité permanente reconnue au fils de Mme [F] par la maison départementale des personnes handicapées de l'Essonne à la suite de sa demande de compensation du handicap formé le 6 janvier 2020, l'arrêt rendu le 13 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la maison départementale pour les personnes handicapées de l'Essonne aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.