SOC.
JL10
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 4 juin 2025
Cassation
M. BARINCOU, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président
Arrêt n° 570 F-D
Pourvoi n° D 24-13.554
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 JUIN 2025
1°/ Mme [H] [Y], domiciliée [Adresse 2],
2°/ le syndicat CNT des travailleurs de la santé, du social et des collectivités territoriales de la région parisienne, dont le siège est [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° D 24-13.554 contre l'arrêt rendu le 28 septembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige les opposant à la société People & Baby, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Maitral, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [Y] et du syndicat CNT des travailleurs de la santé, du social et des collectivités territoriales de la région parisienne, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société People & Baby, après débats en l'audience publique du 5 mai 2025 où étaient présents M. Barincou, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Maitral, conseiller référendaire rapporteur, Mme Douxami, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 septembre 2023), Mme [Y] a été engagée en qualité d'éducatrice de jeunes enfants le 16 février 2007 par la société People & Baby.
2. Licenciée pour faute grave le 25 mars 2010, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
3. Le syndicat CNT des travailleurs de la santé, du social et des collectivités territoriales de la région parisienne (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance.
Sur le moyen relevé d'office
4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.
Vu l'article R. 1452-8 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 :
5. Il résulte de ce texte qu'en matière prud'homale, l'instance est périmée lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
6. Pour constater la péremption de l'instance, l'arrêt relève d'abord que, par ordonnance du 24 juin 2011, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes a ordonné à la salariée et au syndicat de communiquer leurs pièces et moyens au plus tard le 31 juillet 2011, que ceux-ci étaient représentés à l'audience au cours de laquelle l'ordonnance a été rendue le jour même puis leur a été notifiée par lettre simple le 26 août 2011. Il ajoute que, par ordonnance du 28 novembre 2011, en réalité du 4 octobre 2011, le bureau de jugement du conseil de prud'hommes leur a ordonné de communiquer leurs pièces et moyens au plus tard le 12 janvier 2012, que la salariée et le syndicat étaient représentés à l'audience au cours de laquelle l'ordonnance a été rendue le jour même et que celle-ci leur a également été notifiée par lettre simple le 28 novembre 2011.
7. Il en déduit que, dès l'audience du 24 juin 2011, le syndicat et la salariée étaient informés par le conseil de prud'hommes qu'ils devaient accomplir des diligences, à savoir la communication de leurs pièces et moyens, que le délai de péremption avait commencé à courir le 24 juin 2011 et qu'il avait expiré le 25 juin 2013.
8. Il retient ensuite que ces diligences n'ont été accomplies que le 31 mars 2015, soit après l'expiration du délai de péremption.
9. En statuant ainsi, alors que les décisions des 24 juin et 4 octobre 2011 se bornaient à renvoyer l'affaire à une audience ultérieure, en fixant un calendrier de procédure encadrant les échanges entre les parties, sans mettre expressément à leur charge des diligences de nature à faire courir le délai de péremption, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 septembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société People & Baby aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société People & Baby et la condamne à payer à Mme [Y] et au syndicat CNT des travailleurs de la santé, du social et des collectivités territoriales de la région parisienne la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le quatre juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.