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21/05/2025 | FRANCE | N°24-86.718

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle - formation de section, 21 mai 2025, 24-86.718


N° E 24-86.718 FS-B

N° 00756


GM
21 MAI 2025


CASSATION PARTIELLE


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 MAI 2025



La procureure générale près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de ladite cour d'a

ppel, en date du 3 octobre 2024, qui a prononcé sur la libération conditionnelle de M. [U] [I].

Un mémoire et des observations complémentaires ont été produit...

N° E 24-86.718 FS-B

N° 00756


GM
21 MAI 2025


CASSATION PARTIELLE


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 MAI 2025



La procureure générale près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de ladite cour d'appel, en date du 3 octobre 2024, qui a prononcé sur la libération conditionnelle de M. [U] [I].

Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, et les conclusions de M. Crocq, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, MM. de Larosière de Champfeu, Turbeaux, Laurent, Gouton, Brugère, Tessereau, conseillers de la chambre, M. Mallard, Mmes Guerrini, Diop-Simon, conseillers référendaires, M. Crocq, avocat général, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.



Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [U] [I] a été condamné, le 29 juin 1989, par la cour d'assises du Rhône à la réclusion criminelle à perpétuité, notamment pour meurtre, complicité et tentative, vol avec arme, complicité et tentative. Il a également été condamné, le 3 juillet 1995, par la cour d'assises de Paris, spécialement composée, à trente ans de réclusion criminelle, notamment pour destruction du bien d'autrui par substance explosive, incendiaire ou tout autre moyen dangereux et destruction du bien d'autrui par moyen dangereux, suivie d'une infirmité permanente, faits entrant dans le champ d'application de l'article 706-16 du code de procédure pénale visant des actes de terrorisme.

3. Par jugement du 16 juillet 2024, le tribunal de l'application des peines de Paris, compétent en matière de terrorisme, a admis M. [I] au bénéfice de la libération conditionnelle, sous condition de satisfaire à une mesure de détention sous surveillance électronique probatoire pendant une période de huit mois, à compter du 24 juillet 2024.

4. Le ministère public a relevé appel suspensif de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen est pris de la violation des articles 723-7 et 730-2 du code de procédure pénale.

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a placé M. [I] sous le régime de la détention à domicile sous surveillance électronique pour une durée de huit mois, probatoire à une libération conditionnelle, alors :

1°/ que la chambre de l'application des peines s'est, à tort, fondée sur l'article 723-7 du code de procédure pénale, qui prévoit une mesure probatoire facultative d'une durée maximum d'un an, alors qu'elle aurait dû faire application de l'article 730-2, alinéa 2, du même code, qui prévoit une mesure probatoire, obligatoire en l'absence de placement sous surveillance électronique mobile, d'une durée d'un à trois ans pour une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ou à une peine égale ou supérieure à 15 ans prononcée pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru ; en effet, dès lors qu'aucune disposition spécifique n'est actuellement prévue concernant les modalités d'une libération conditionnelle pour une personne condamnée pour des faits de terrorisme, il convient d'appliquer, l'alinéa 2, de l'article 730-2 du code de procédure pénale, s'agissant tant du caractère obligatoire d'une mesure probatoire, en l'absence de placement sous surveillance électronique mobile, que de la durée de ladite mesure ;


2°/ qu'exclure l'application de l'alinéa 2 de l'article 730-2 du code de procédure pénale aboutirait, au regard des conditions d'octroi d'une libération conditionnelle, à une situation plus favorable pour une personne condamnée à une peine de réclusion criminelle à perpétuité ou à une peine égale ou supérieure à quinze ans visée par ledit article pour des infractions à caractère terroriste, que pour une personne condamnée à l'une de ces mêmes peines mais pour des faits de droit commun.

Réponse de la Cour

Vu l'article 730-2, alinéa 2, du code de procédure pénale :

7. Selon ce texte, la libération conditionnelle, lorsqu'elle n'est pas assortie d'un placement sous surveillance électronique mobile, ne peut être accordée à une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ou aux autres peines qu'il énumère qu'après l'exécution, à titre probatoire, d'une mesure de semi-liberté, de placement à l'extérieur ou de placement sous surveillance électronique pendant une période d'un an à trois ans.

8. Pour fixer à huit mois la durée de la mesure, probatoire à la libération conditionnelle, de détention à domicile sous surveillance électronique, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de l'article 723-7, alinéa 2, du code de procédure pénale que le juge de l'application des peines peut subordonner la libération conditionnelle du condamné à l'exécution, à titre probatoire, d'une mesure de détention à domicile sous surveillance électronique pour une durée n'excédant pas un an.

9. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé pour les motifs qui suivent.

10. La Cour de cassation a jugé, s'agissant des modalités d'évaluation de la dangerosité de la personne condamnée, que le régime de la libération conditionnelle instauré par les dispositions de l'article 730-2-1 du code de procédure pénale, applicable aux condamnés pour certaines infractions de terrorisme, dérogatoire au droit commun, est exclusif des dispositions de l'article 730-2 du même code (Crim., 9 mars 2022, pourvoi n° 21-80.600, publié au Bulletin). Cette solution est limitée aux dispositions de ces articles, incompatibles entre elles, relatives aux modalités d'évaluation de la dangerosité de la personne condamnée.

11. Les dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 730-2-1 du code de procédure pénale, relatives à la mesure probatoire, préalable obligatoire à la libération conditionnelle, identiques à celles de l'article 730-2, alinéa 2, du même code, ont été abrogées par l'effet de la décision n° 2019-799/800 QPC du Conseil constitutionnel du 6 septembre 2019, à compter du
1er juillet 2020.

12. Elles n'ont pas été remplacées.


13. Dès lors, les dispositions de l'article 730-2, alinéa 2, du code de procédure pénale, relatives à la mesure probatoire, et celles-ci seulement, sont redevenues applicables aux personnes condamnées pour certaines infractions de terrorisme.

14. Dans ces conditions, il convient de juger que les dispositions de l'article 730-2, alinéa 2, du code de procédure pénale sont applicables aux personnes condamnées à une peine visée par cet article pour des infractions terroristes relevant de l'article 730-2-1 du même code.

15. La cassation est par conséquent encourue.

Portée et conséquences de la cassation

16. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la durée de la mesure probatoire de détention à domicile sous surveillance électronique, et celles relatives aux dates de la mesure de libération conditionnelle. Les autres dispositions seront donc maintenues.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Paris, en date du 3 octobre 2024, mais en ses seules dispositions relatives à la durée de la mesure probatoire de détention à domicile sous surveillance électronique et aux dates de la mesure de libération conditionnelle, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mai deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle - formation de section
Numéro d'arrêt : 24-86.718
Date de la décision : 21/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Publications
Proposition de citation : Cass. Crim. - formation de section, 21 mai. 2025, pourvoi n°24-86.718, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:24.86.718
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