N° X 23-81.624 FS-B
N° 00563
SL2
21 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 MAI 2025
M. [G] [W] a formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises de l'Eure, en date du 9 mars 2023, qui, pour violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente aggravées et délits connexes, l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle et dix ans d'interdiction du territoire français, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé le retrait de l'autorité parentale.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Laurent, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [G] [W], et les conclusions de M. Fusina, avocat général, l'avocat du demandeur ayant eu la parole en dernier, après débats en l'audience publique du 26 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, Mme Leprieur, MM. Turbeaux, Gouton, Brugère, Tessereau, conseillers de la chambre, M. Mallard, Mmes Guerrini, Diop-Simon, conseillers référendaires, M. Fusina, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance du 6 octobre 2020, un juge d'instruction a renvoyé M. [G] [W] devant la cour criminelle départementale sous l'accusation susvisée.
3. Par arrêt du 10 septembre 2021, cette cour l'a déclaré coupable, condamné à douze ans de réclusion criminelle, à l'interdiction définitive du territoire français, et a ordonné le retrait de l'autorité parentale.
4. M. [W] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [W] coupable de violences volontaires ayant entrainé une mutilation ou une infirmité permanente par concubin, alors « que la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, ont convaincu la cour d'assises et qui ont été exposés au cours des délibérations menées par la cour et le jury ; que la mutilation, au sens de l'article 222-9 du code pénal, suppose le constat d'une ablation, une amputation ou une perte de substance ; que la feuille de motivation constate « une plaie au visage de 9 cm, très marquée, partant du bord latéral de la bouche, que l'expert qualifie de «déficit fonctionnel permanent constitutif d'une mutilation» » et retient que « cette plaie, irréversible malgré la chirurgie réparatrice, est une atteinte permanente à l'intégrité physique de Mme [L], en ce qu'elle est située sur son visage, zone du corps exposée aux regards, siège de son identité, de sa personnalité et de son image, caractérisant une perte irrémédiable, constitutive d'une mutilation au sens de l'article 222-9 du code pénal » ; que la cour d'assises, qui n'a pas constaté de perte de substance, a violé les articles 222-9 du code pénal et 365-1 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte de l'article 359 du code de procédure pénale que la culpabilité de l'accusé est établie, pour chacun des faits, par un vote affirmatif à la question ou aux questions qui s'y rapportent, acquis à la majorité prévue par ce texte.
7. Selon l'article 365-1 de ce code, la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, ont convaincu la cour d'assises et qui ont été exposés au cours des délibérations.
8. Il se déduit de ces textes que la feuille de motivation n'a pas à caractériser chacun des éléments constitutifs de chacune des infractions dont l'accusé est déclaré coupable, dès lors que cette caractérisation procède des réponses affirmatives apportées aux questions posées.
9. Il appartient à la Cour de cassation de contrôler l'absence de contradiction entre les réponses contenues dans la feuille de questions et les énonciations de la feuille de motivation.
10. En l'espèce, la cour d'assises, en répondant par l'affirmative aux questions principales n° 1 à 3, a caractérisé en tous ses éléments le crime de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, commises par le concubin de la victime, dont elle a déclaré l'accusé coupable.
11. Les énonciations de la feuille de motivation ne contiennent aucune contradiction avec les réponses ainsi apportées aux questions posées, la cour d'assises ayant souverainement apprécié l'existence d'une mutilation.
12. Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
13. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné le retrait de l'autorité parentale exercée par M. [W] sur [V] [L], alors :
« 1°/ que faute de constater la paternité de M. [G] [W] sur l'enfant [V] [L], la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 378 du code civil et 222-48-2 du code pénal ;
2°/ en toute hypothèse qu'en se bornant à constater que l'accusé a été condamné pour des faits d'une exceptionnelle gravité commis sur la mère de l'enfant, que celle-ci demande le retrait de l'autorité parentale et que M. [W] n'a quasiment aucun lien avec cet enfant compte tenu de son séjour en Allemagne suivi de son incarcération, la cour d'appel n'a pas énoncé en quoi, dans l'intérêt de l'enfant, retirer l'autorité parentale à M. [W] est nécessaire ; qu'elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 378 du code civil et violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
14. Pour ordonner le retrait de l'autorité parentale, l'arrêt attaqué retient que l'accusé a été condamné pour des faits d'une exceptionnelle gravité sur la mère de l'enfant, né le [Date naissance 1] 2018, avec lequel il n'a quasiment aucun lien, compte tenu de son séjour en Allemagne, suivi de son incarcération.
15. En se déterminant ainsi, par des motifs desquels il résulte que les juges ont estimé que l'accusé exerçait l'autorité parentale sur l'enfant, dont ils ont pris en considération l'intérêt, la cour seule a justifié sa décision.
16. Le moyen ne saurait donc être accueilli.
17. Par ailleurs, la procédure est régulière et la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mai deux mille vingt-cinq.