CIV. 1
LM
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 14 mai 2025
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 327 F-D
Pourvoi n° F 24-10.520
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 MAI 2025
La société Les Jardins de Coppélia, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], prise en son établissement situé [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 24-10.520 contre le jugement rendu le 14 novembre 2023 par le tribunal de commerce de Créteil (2e chambre), dans le litige l'opposant à la société Transavia France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Boullez, avocat de la société Les Jardins de Coppélia, de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société Transavia France, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 18 mars 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal de commerce de Créteil, 14 novembre 2023), rendu en dernier ressort, la société Les Jardins de Coppélia, qui a organisé une croisière de Rome à Barcelone pour ses salariés, a réservé auprès de la société Transavia France (le transporteur aérien) des billets d'avions sur les vols de cette société de Paris à Rome prévu le 30 janvier 2023 et de Barcelone à Paris prévu le 3 février 2023.
2. Le 5 décembre 2022, le transporteur aérien a informé la société Les Jardins de Coppélia de l'annulation du vol retour et lui a proposé un remboursement sans indemnité ou un autre vol le 2 ou le 5 février 2023.
3. La société Les Jardins de Coppélia n'a pas accepté cette dernière solution au motif que la croisière ne pouvait être écourtée ni rallongée et a acquis d'autres billets d'un coût supérieur sur un vol de [Localité 3] à [Localité 5] d'un autre transporteur aérien.
4. Après une mise en demeure infructueuse, elle a assigné le transporteur aérien sur le fondement de l'article 12 du règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 établissant des règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important d'un vol, et abrogeant le règlement (CEE) n° 295/91, en paiement du surcoût des billets acquis et en indemnisation de son préjudice moral.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. La société Les Jardins de Coppélia fait grief au jugement de rejeter ses demandes, alors « qu'il résulte de l'article 12 du règlement n° 261/2004 du 11 février 2004 que son application se cumule avec la convention de Montréal et le droit national ; qu'il s'ensuit que le respect par le transporteur aérien des obligations prévues par le règlement communautaire, en cas d'annulation d'un vol, ne l'exonère pas de la responsabilité qu'il encourt dans les termes du droit commun du fait de l'inexécution de son obligation contractuelle d'acheminer le passager du lieu de départ au lieu de destination ; qu'en dégageant la société Transavia France de toute responsabilité du seul fait qu'elle avait respecté le délai de prévenance de 14 jours prévu par le règlement communautaire, à défaut pour la société Les Jardins de Coppélia de justifier de son préjudice quand l'annulation du vol lui ouvrait droit à l'indemnisation de son préjudice dans les termes du droit commun, le tribunal de commerce a violé l'article 12 du règlement n° 261/2004 du 11 février 2004. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 12, alinéa 1er, du règlement CE n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004 :
6. Selon ce texte, le règlement s'applique sans préjudice du droit d'un passager à une indemnisation complémentaire en cas d'annulation d'un vol. L'indemnisation accordée en vertu du règlement peut être déduite d'une telle indemnisation.
7. Pour rejeter les demandes de la société Les Jardins de Coppélia, le jugement se borne à retenir que le transporteur aérien a respecté le délai de prévenance de quatorze jours prévu par le règlement en cas d'annulation du vol et qu'elle ne rapporte pas la preuve du préjudice invoqué.
8. En statuant ainsi, sans qu'il résulte de sa décision qu'il a examiné les pièces produites par la société Les jardins de Coppélia à l'appui de sa demande d'indemnisation complémentaire, le tribunal n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 novembre 2023, entre les parties, par le tribunal de commerce de Créteil ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal de commerce de Paris ;
Condamne la société Transavia France aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transavia France et la condamne à payer à la société Les Jardins de Coppélia la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le quatorze mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.