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14/05/2025 | FRANCE | N°23-21.807

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 14 mai 2025, 23-21.807


CIV. 1

IJ



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 14 mai 2025




Cassation


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 312 F-D

Pourvoi n° D 23-21.807




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 MAI 2025

1°/ Mme [R] [E], veuve [U], domiciliée [Adresse 1],

2°/ M.

[F] [U],

3°/ Mme [J] [A], épouse [U],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° D 23-21.807 contre l'arrêt rendu le 25 août 2023 par la cour d'appel de Saint...

CIV. 1

IJ



COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 14 mai 2025




Cassation


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 312 F-D

Pourvoi n° D 23-21.807




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 MAI 2025

1°/ Mme [R] [E], veuve [U], domiciliée [Adresse 1],

2°/ M. [F] [U],

3°/ Mme [J] [A], épouse [U],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° D 23-21.807 contre l'arrêt rendu le 25 août 2023 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile TGI), dans le litige les opposant à M. [B] [D], domicilié [Adresse 3], défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de Mme [E], de M. [U] et Mme [A], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [D], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 mars 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 25 août 2023), par jugement du 26 février 2015, un tribunal pour enfants a condamné M. [N] pour violences ayant entraîné la mort de [L] [U] sans intention de la donner et alloué différentes sommes à [W] [U], Mmes [E] et [A] et M. [F] [U], parties civiles (les consorts [U]), assistés de M. [D], avocat, qui a ensuite été chargé de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI).

2. Le 26 février 2020, les consorts [U] ont assigné l'avocat en responsabilité et indemnisation, lui reprochant de ne pas avoir saisi la CIVI dans le délai d'un an après ce jugement conformément à l'article 706-5 du code de procédure pénale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Les consorts [U] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors « que tout jugement doit être motivé ; que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation sans répondre aux arguments péremptoires des parties ; qu'en écartant l'existence d'une faute professionnelle de M. [B] [D], par voie de simple affirmation, en considérant que "la faute de Me [B] [D], malgré l'absence de dépôt effectif de la requête en indemnisation, n'est pas démontrée avec certitude", sans répondre à l'argumentation des exposants qui faisaient valoir que Me [B] [D], contrairement à ses affirmations, n'avait pas déposé devant la CIVI, dans les délais impartis, la requête pour laquelle il avait été mandaté et n'avait pas répondu aux multiples demandes de ses clients qui s'inquiétaient du suivi de cette procédure, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

5. Pour rejeter les demandes des consorts [U], l'arrêt retient que, malgré l'absence de dépôt effectif de la requête en indemnisation, la faute de l'avocat n'est pas démontrée avec certitude.

6. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts [U] qui soutenaient que l'avocat n'avait pas déposé de requête devant la CIVI et ne les avait pas tenus informés, malgré leurs demandes réitérées, du suivi de cette procédure qu'il avait reçu mandat de conduire, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

7. Les consorts [U] font le même grief à l'arrêt, alors « que méconnaît son office le juge qui refuse d'apprécier si le préjudice résultant de l'absence d'exécution d'un mandat est constitué ; que la cour d'appel a considéré que le préjudice tiré de l'absence de saisine de la CIVI dans les délais légaux n'était qu'éventuel en l'absence de saisine de cette commission ; qu'en se bornant ainsi à renvoyer à la CIVI le soin d'apprécier si la demande en indemnisation n'aurait pas été tardive après le 26 février 2016, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 4 et 1231-1 du code civil :

8. Il résulte de ces textes qu'il incombe au juge du fond, afin d'apprécier la perte de chance occasionnée par un manquement commis par l'avocat dans ses missions de représentation et d'assistance, de procéder à la reconstitution fictive du procès manqué et des discussions qui n'ont pu avoir lieu.

9. Pour rejeter les demandes indemnitaires, après avoir relevé que l'avocat n'avait pas saisi la CIVI de la requête en indemnisation qu'il avait préparée et soumise aux consorts [U] et qu'il soutenait qu'en l'absence de mention du jugement du tribunal pour enfants sur la possibilité pour les parties civiles de saisir la CIVI, le délai d'un an prévu à l'article 706-5 du code de procédure pénale n'avait pas couru, l'arrêt énonce que la CIVI, que les consorts [U] n'ont pas tenté de saisir avec le concours de leur nouveau conseil, est seule compétente pour apprécier la régularité de sa saisine, tant en la forme qu'au fond, de sorte qu'il n'appartient pas à la juridiction appelée à connaître de l'action en responsabilité engagée contre l'avocat initialement chargé de saisir la CIVI d'apprécier si l'avis aux parties civiles d'avoir à saisir celle-ci dans le délai d'un an à compter du caractère définitif de la décision leur a été donné ou non et les conséquences à en tirer et en déduit que la faute reprochée à l'avocat est incertaine et que le préjudice invoqué est éventuel.
10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 août 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée ;
Condamne M. [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile condamne M. [D] à payer à Mme [E], M. [U] et Mme [A] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le quatorze mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-21.807
Date de la décision : 14/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint Denis de la Réunion


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 14 mai. 2025, pourvoi n°23-21.807


Origine de la décision
Date de l'import : 20/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.21.807
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