SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 14 mai 2025
Rejet
Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 505 F-D
Pourvoi n° Q 23-20.966
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 MAI 2025
La société Kipopluie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 23-20.966 contre l'arrêt rendu le 21 juin 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à M. [O] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Kipopluie, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 1er avril 2025 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 21 juin 2023), M. [D] a été engagé en qualité de technico-commercial à compter du 2 mai 2012 par la société Kipopluie. Par avenant du 2 janvier 2014, il a été nommé responsable commercial et des ventes de l'entreprise, puis à la suite d'un avenant du 1er avril 2016, il a de nouveau occupé des fonctions de technico-commercial.
2. Le salarié a été placé en arrêt maladie à compter du 24 juin 2016, de manière ininterrompue jusqu'à la rupture de son contrat de travail.
3. A la suite de deux examens médicaux des 28 février et 9 mars 2017, le salarié a été déclaré « inapte à tout poste de l'entreprise » par le médecin du travail.
4. Le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 31 mars 2017 et a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappels de salaire et de commissions.
Examen des moyens
Sur le second moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié une somme au titre du maintien de salaire pour la période du 24 juin au 24 septembre 2016, alors :
« 1°/ qu'en vertu de l'article L. 1226-1 du code du travail, tout salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, et s'il satisfait à certaines conditions, d'une indemnité complémentaire à l'allocation journalière prévue à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en vertu de l'article D. 1226-1 du code du travail, l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 est calculée selon les modalités suivantes : 1° Pendant les trente premiers jours, 90% de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ; 2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération ; que l'article 3.4.1 de la convention collective nationale des salariés du négoce des matériaux de construction du 8 décembre 2015 dispose, à propos de la maladie non professionnelle, des accidents à l'exception des accidents du travail et des accidents de trajet, d'une part, que le salarié cadre répondant à certaines conditions et comptant une ancienneté de 1 an à 4 ans inclus doit bénéficier d'une indemnité complémentaire durant 90 jours avec un taux de 100%, d'autre part, que "l'indemnité est égale au montant de la rémunération nette (heures supplémentaires comprises) que le salarié aurait perçue s'il avait travaillé, à l'exclusion des primes ou indemnités liées directement à la présence effective dans l'entreprise pendant la période d'indemnisation, la CSG et la CRDS restant à la charge du salarié" et enfin que "les garanties d'indemnisation accordées pendant la période d'absence s'entendent déduction faite des allocations que le salarié perçoit -de la sécurité sociale (Toutefois, lorsque celles-ci sont réduites du fait d'une sanction de la caisse pour non-respect de son règlement intérieur, les allocations sont réputées être servies intégralement) ; -des régimes complémentaires de prévoyance ; -des indemnités journalières versées par les responsables de l'accident ou leur assurance (dans ce cas, les appointements sont versés à titre d'avance sur les indemnités) ; que lorsque le salarié perçoit une rémunération variable, le salaire de référence retenu pour faire application de la garantie légale ou conventionnelle de salaire du salarié malade doit être significatif au regard de l'absence indemnisée ; que pour retenir que la période de référence devait porter sur "les rémunérations perçues au cours des douze derniers mois précédant son arrêt de travail", la cour d'appel s'est bornée à relever "que la rémunération de M. [D] [ayant] baissé au cours des dernières années ou des derniers mois, la seule référence à la moyenne des rémunérations des trois derniers mois [n'était] pas significative", que "le salarié n'a de nouveau occupé ses fonctions de technico-commercial que pendant deux mois et qu' "il [convenait] d'élargir la période de référence " ; qu'en se déterminant de la sorte, sans établir les raisons liées à la baisse de la rémunération du salarié au cours des derniers mois, voire des dernières années, et cependant qu'elle avait constaté que ce dernier avait, par avenant en date du 2 janvier 2014, été nommé responsable commercial et des ventes de l'entreprise, mais qu'il était redevenu technico-commercial par avenant en date du 1er avril 2016, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à justifier la période de référence qu'elle a retenue, et a en conséquence privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
2°/ que l'exposante faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la rémunération de M. [D] sur les mois, voire les années précédant son congé maladie, était en baisse car celui-ci se désinvestissait de son travail et n'avait plus les mêmes performances commerciales, de sorte que si, par extraordinaire, la cour d'appel faisait droit à la demande de M. [D] de calculer son salaire de référence en prenant compte les douze mois précédant son congé, celui- ci percevrait une indemnisation supérieure à la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait travaillé ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pertinent, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
7. Selon l'article 3.4.1 de la convention collective nationale des salariés du négoce des matériaux de construction du 8 décembre 2015, après un an d'ancienneté dans l'entreprise ou l'établissement, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident de trajet dûment constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, à condition d'avoir justifié dans les 48 heures de cette incapacité, d'être pris en charge par la sécurité sociale, d'être soigné sur le territoire français ou dans l'un des autres États membres de la Communauté européenne ou dans l'un des autres États partie à l'accord sur l'Espace économique européen, le salarié ayant une ancienneté inférieure à quatre ans a droit au maintien de son salaire pendant 90 jours au taux de 100%.
La rémunération à prendre en considération est celle correspondant à l'horaire pratiqué dans l'entreprise pendant l'absence de l'intéressé, et l'indemnité est égale au montant de la rémunération nette (heures supplémentaires comprises) que le salarié aurait perçue s'il avait travaillé, à l'exclusion des primes ou indemnités liées directement à la présence effective dans l'entreprise pendant la période d'indemnisation, la CSG et la CRDS restant à la charge du salarié.
8. L'arrêt qui relève que la rémunération du salarié était en partie composée d'une part variable, énonce à bon droit que le salaire de référence devait être significatif.
9. L'arrêt relève ensuite que la rémunération du salarié avait baissé au cours des dernières années ou des derniers mois et, répondant aux conclusions prétendument délaissées, que le salarié n'avait de nouveau occupé ses fonctions de technico-commercial que pendant deux mois.
10. La cour d'appel, qui a pu déduire de ces motifs que la seule référence à la moyenne des rémunérations des trois derniers mois n'était pas significative et que la période de référence porterait sur les rémunérations perçues au cours des douze derniers mois précédant son arrêt de travail, a légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Kipopluie aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Kipopluie et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le quatorze mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.