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06/05/2025 | FRANCE | N°24-85.007

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle - formation de section, 06 mai 2025, 24-85.007


N° V 24-85.007 FS-B

N° 00477


ODVS
6 MAI 2025


CASSATION PARTIELLE


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 MAI 2025



M. [N] [Z]-[Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 15 mai 2024, qui, dans l'infor

mation suivie contre lui des chefs d'importation de stupéfiants et blanchiment, en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants, associat...

N° V 24-85.007 FS-B

N° 00477


ODVS
6 MAI 2025


CASSATION PARTIELLE


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 MAI 2025



M. [N] [Z]-[Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 15 mai 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'importation de stupéfiants et blanchiment, en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants, associations de malfaiteurs, blanchiment, en récidive, et abus de biens sociaux, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance du 14 octobre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [N] [Z]-[Y], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, MM. Cavalerie, Maziau, Seys, Dary, Mme Chaline-Bellamy, M. Hill, conseillers de la chambre, M. Violeau, Mme Merloz, M. Pradel, conseillers référendaires, M. Dureux, avocat général référendaire, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Mis en examen des chefs susvisés le 21 janvier 2023, M. [N] [Z]-[Y] a, le 6 juillet suivant, déposé une requête en annulation d'actes et de pièces de la procédure.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors « que, le juge d'instruction est saisi de manière irrévocable des faits qui sont contenus dans le réquisitoire introductif, ou dans ses pièces jointes ; qu'en conséquence, les faits dont est saisi le juge d'instruction ne peuvent donner lieu ni à l'ouverture, ni à la poursuite d'investigations parallèles dans le cadre d'une enquête qui serait menée sous le contrôle du parquet, ni a fortiori à l'ouverture d'une nouvelle information judiciaire ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir que par un réquisitoire introductif en date du 28 mai 2020, visant expressément divers procès-verbaux d'investigations réalisés par les enquêteurs du C3N et portant sur l'identification des utilisateurs « [4] », « [8] » ou encore « [10] » sur le service de messagerie cryptée « [3] », auteurs supposés d'un trafic de stupéfiants, une information judiciaire (JIRSAC20/5) a été ouverte et le juge d'instruction de la JIRS de Lille a été irrévocablement saisi de ces faits, or il ressort d'un soit-transmis en date du 27 avril 2020, que les enquêteurs du C3N ont poursuivi les investigations relatives à ce même trafic et visant ces mêmes utilisateurs, jusqu'à l'ouverture d'une seconde information judiciaire, laquelle constitue la présente procédure, en violation de l'irrévocabilité de la saisine du premier juge d'instruction ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, d'une part qu'« il en ressort [des réquisitoires introductifs et supplétifs de la première information] que si les chefs d'infractions poursuivies comportent des qualifications similaires – importation de stupéfiants en bande organisée, trafic de stupéfiants, blanchiment aggravé, association de malfaiteurs… -, le réquisitoire introductif pris le 28 mai 2020 dans l'information distincte JIRSAC20/5 a également saisi le magistrat instructeur d'infractions en matière de matériel de guerre, armes et munitions de catégories A ou B, ainsi qu'en matière de cryptologie, et vise des faits commis de courant 2017 jusqu'au 28 mai 2020 et depuis temps, non prescrit, à [Localité 7], sur le ressort de la JIRS de Lille, en tout cas sur le territoire national et de manière indivisible avec des faits commis notamment au Canada, en République Dominicaine, en Espagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Allemagne, à [Localité 5], au Panama. Le réquisitoire supplétif complète la période de saisine du 29 mai 2020 au 6 juillet 2021 (D1500/4) », d'autre part qu'« ainsi, l'information JIRSAC20/5 vise le démantèlement de l'architecture du réseau criminel [3] destiné au trafic de stupéfiants, au trafic d'armes, et au blanchiment, ainsi que de ses ramifications dans le monde, la compétence de [Localité 7] et du ressort de la JIRS découlant du lieu d'implantation du serveur. En revanche, le réquisitoire introductif pris le 28 avril 2021 dans la présente information a saisi le magistrat instructeur de faits commis de courant mars 2020 au 26 avril 2021 à [Localité 6], dans le département du Nord, sur le ressort de la JIRS de [Localité 6], en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, en connexité et de manière indivisible en Belgique et aux Pays-Bas (D123). L'information porte sur le démantèlement de l'un des trafics de stupéfiants mis à jour par les données [3], dont les protagonistes et le lieu de commission sont basés à [Localité 6] et dans le Nord » pour déduire que « les deux informations ouvertes sur la base de l'enquête préliminaire dont sont extraites les pièces arguées de nullité visant des faits parfaitement distincts, n'est en conséquence caractérisée aucune atteinte à la régularité de la saisine du magistrat instructeur » quand la saisine initiale (JIRSAC20/5) visait bien des faits de trafic de stupéfiants, précisément identifiés dans les pièces jointes du réquisitoire introductif du 28 mai 2020, ayant donné lieu à l'ouverture de la présente information judiciaire, et qu'il était parfaitement inopérant que la première saisine ne porte pas seulement sur ces faits de trafic de stupéfiants mais plus généralement sur diverses formes de trafics liées à l'utilisation du système « [3] », la Chambre de l'instruction, qui a dénaturé les éléments de la procédure en sa possession, et en particulier le réquisitoire introductif du 28 mai 2020 et les pièces-jointes de celui-ci, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 80, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

4. Pour rejeter le moyen de nullité du soit-transmis du 27 avril 2020, de l'enquête du centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) et de l'information ouverte le 28 avril 2021, l'arrêt attaqué énonce qu'une même procédure d'enquête peut donner lieu à des poursuites distinctes portant sur des faits distincts et qu'il résulte de l'examen des réquisitoires introductif et supplétif de la première information, versés au dossier, que la saisine, incluant des infractions à la législation sur les armes et en matière de cryptologie, a visé au démantèlement de l'architecture du réseau criminel [3] dédié aux trafics de stupéfiants et d'armes et au blanchiment, et de ses ramifications dans le monde, tandis que la saisine dans la seconde information a visé au démantèlement de l'un des trafics locaux découverts par l'examen des données captées sur le réseau [3].

5. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a, sans dénaturer les pièces de la procédure, justifié sa décision.

6. En effet, il résulte du soit-transmis du 27 avril 2020 que, avant toute saisine d'un juge d'instruction, le procureur de la République, exerçant les prérogatives de direction de l'action publique qui lui sont dévolues, a décidé de scinder les poursuites ainsi que l'a analysé la chambre de l'instruction et, par son réquisitoire introductif du 28 mai 2020, n'a pas saisi le premier juge d'instruction de la poursuite de la répression du trafic de stupéfiants en cours localement.

7. Par ailleurs, la saisine simultanée des deux juges d'instruction qui résulte du réquisitoire introductif du 28 avril 2021 pour la période allant de courant mars 2020 au 28 mai 2020 ne saurait entraîner la nullité de ce réquisitoire qui répond, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale.

8. En tout état de cause, une telle situation, à supposer qu'elle emporte des conséquences pour le requérant, ce qui n'est ni allégué ni démontré, se résout, au besoin, par la mise en oeuvre de procédures autres que celle de l'annulation des actes et pièces de la procédure d'information ouverte en second lieu.

9. Le moyen doit, dès lors, être écarté.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors « que la date du réquisitoire est une mention substantielle de cet acte qui, seule, permet à la Cour de cassation de vérifier si les actes accomplis par le juge d'instruction l'ont été postérieurement à sa délivrance ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir qu'au terme d'une ordonnance de soit-transmis en date du 2 mai 2022, le juge d'instruction avait sollicité l'extension de sa saisine aux faits commis entre le 27 avril 2021 et le 2 mai 2022 ; que par une simple mention manuscrite non datée et apposée au bas de cette ordonnance, le parquet a requis « qu'il soit instruit supplétivement sur les faits susvisés commis du 27/04/2021 au 02/05/2022 » ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, qu' « à la suite de l'ordonnance de soit-communiqué du magistrat instructeur du 2 mai 2022 aux fins d'extension de sa saisine, comportant les réquisitions supplétives visant des faits commis jusqu'au 2 mai 2022 (D262), le juge d'instruction a délivré aux enquêteurs de l'Office anti-stupéfiant OFAST de [Localité 6] un soit transmis daté du même jour 2 mai 2022 afin de les saisir sur la période de prévention étendue, en mentionnant : « Vu les réquisitions en date du 2 mai 2022 » (D463), éléments qui permettent d'établir de manière certaine que les réquisitions supplétives, bien que non datées, ont été prises par le parquet le 2 mai 2022, et que le réquisitoire supplétif satisfait donc aux conditions essentielles de son existence légale » quand la mention apposée par le juge d'instruction, au sein de sa commission rogatoire, se référant à un réquisitoire en date du 2 mai 2022, ne suffisait à établir que le réquisitoire supplétif non-daté ait bien été délivré à cette date, la Chambre de l'instruction a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et a violé les articles 80, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

11. Pour rejeter le moyen de nullité du réquisitoire supplétif non daté, l'arrêt attaqué énonce que, à la suite de l'ordonnance de soit-communiqué du juge d'instruction aux fins d'extension de saisine, datée du 2 mai 2022, sur laquelle ont été portées les réquisitions supplétives du procureur de la République visant des faits commis jusqu'à cette date, le magistrat a délivré aux enquêteurs, le même jour, un soit-transmis visant les « réquisitions en date du 2 mai 2022 » et les saisissant des faits commis jusqu'à cette même date.

12. Les juges en concluent que ces éléments établissent que le réquisitoire supplétif a été délivré le 2 mai 2022 et qu'en cet état, cet acte satisfait aux conditions essentielles de son existence légale.

13. En statuant ainsi, par des motifs propres à exclure toute ambiguïté sur la date à laquelle le réquisitoire supplétif a été délivré, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

14. Celui-ci doit, dès lors, être écarté.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

15. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors « que toute personne est recevable à présenter un moyen de nullité tiré du détournement et du contournement de procédure que constitue le fait, pour un agent pénitentiaire, de retranscrire les conversations tenues lors d'un parloir auquel il n'avait le droit d'assister qu'aux fins d'assurer le bon ordre, la sécurité ou la prévention d'infractions ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir qu'un agent pénitentiaire avait adressé au chef d'établissement de la maison d'arrêt de [Localité 11] un courrier au sein duquel il retranscrivait la teneur des conversations échangées au parloir entre Monsieur [H] [L], détenu, et Madame [W] [I], venue lui rendre visite ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, que « le surveillant pénitentiaire a établi un simple compte-rendu de propos entendus au cours d'une conversation qui s'est déroulée en sa présence sans aucun artifice ni stratagème de sa part puisque le détenu et son interlocutrice ont tenu ces propos dans un parloir, soit en toute connaissance de la présence au demeurant obligatoire, visible et évidente du surveillant. Les conditions dans lesquelles les propos ont été entendus ne sauraient donc être assimilées, comme il est soutenu par la défense, à une mesure consistant à contourner une procédure d'interception ou de sonorisation. Dès lors, en l'absence d'atteinte au principe de loyauté de la preuve par un détournement de procédure qui entacherait l'acte critiqué de nullité d'ordre public, la recevabilité de la demande en annulation de [N] [Z]-[Y] est subordonnée à la démonstration de son intérêt et de sa qualité à agir, outre la démonstration d'un grief qui lui aurait été causé, toutes conditions qui font défaut en l'espèce » quand le fait, pour un agent pénitentiaire d'utiliser sa présence au parloir – qui n'a vocation qu'à garantir la sécurité des échanges – aux fins d'établir a posteriori un compte-rendu des propos tenus, destinés à l'administration pénitentiaire ou aux enquêteurs constitue précisément un détournement de l'objet de sa mission aux fins de réaliser une mesure non-prévue par la loi et dont l'effet a été de contourner le formalisme légal applicable aux interceptions et sonorisations de parloir, la Chambre de l'instruction a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, R. 314-14 du Code pénitentiaire, préliminaire, 428, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

16. Pour rejeter le moyen de nullité de la note d'un surveillant pénitentiaire adressée au chef d'établissement, l'arrêt attaqué énonce que cet agent a rendu compte de propos échangés entre un détenu et sa visiteuse, recueillis sans recours à un quelconque artifice ou stratagème de sa part, sa présence au parloir étant obligatoire, visible et évidente.

17. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction, qui a retenu que l'agent de l'administration pénitentiaire avait agi dans l'exercice normal de sa mission, a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

18. Celui-ci doit, dès lors, être écarté.

Sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

19. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors :

« 1°/ d'une part, que toute perquisition diligentée au domicile, fût-t-il familial, d'une personne mise en cause doit être réalisée en sa présence ou, à défaut, en présence d'un représentant désigné par elle ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir que la mesure de perquisition menée à son domicile était irrégulière pour avoir été réalisée en son absence et en l'absence d'un représentant qu'il aurait désigné ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, qu' « ayant été réalisée en présence de l'épouse, la perquisition critiquée a bien eu lieu « en présence de la personne au domicile de laquelle la perquisition a lieu » au sens de la loi » quand la perquisition menée au domicile du mis en cause, doit avoir lieu en présence du mis en cause lui-même, et non des membres de sa famille qui pourraient éventuellement habiter avec lui, la Chambre de l'instruction a violé les articles 56, 57, 95, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

2°/ d'autre part, que la personne mise en cause qui conteste au cours de la procédure, l'intégrité ou la présence des éléments découverts lors d'une mesure de perquisition réalisée en méconnaissance du formalisme d'authentification, justifie d'un grief ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir au terme d'une requête en annulation déposée devant la Chambre de l'instruction, qu'il contestait la réalité des découvertes prétendument révélées lors de la perquisition de son domicile ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, que « lors de son audition de garde à vue, [N] [Z] [Y] a reconnu que les 1.050 euros trouvés dans la poche de son manteau lors de la perquisition provenaient de son compte en banque (D1363), et le seul fait qu'il conteste par ailleurs les faits qui lui sont imputés sur la base des éléments issus de la perquisition réalisée, ne suffit pas à caractériser un grief susceptible de remettre en cause la régularité de la mesure de perquisition réalisée en présence de l'occupante des lieux, qui également placée en garde à vue, n'a formulé aucune contestation sur les objets trouvés lors de la perquisition (D1349, D1373), s'est expliquée sur un contrat de la société [1] relatif à l'acquisition d'une maison à [Localité 2] ainsi que sur la clef Ledger permettant de sécuriser les cryptomonnaies (D1379), de même qu'elle a admis posséder l'ensemble des sacs à mains saisis au cours de la perquisition pour une valeur de 9.998 euros (D1384) » quand l'exposant n'était pas tenu de contester la réalité des découvertes supposément révélées à l'occasion de la perquisition de son domicile - qui ne se limitaient pas à la somme de 1.050 euros trouvée dans la poche de son manteau - lors de son audition de garde à vue mais qu'il pouvait le faire dans le cadre d'une requête en annulation, la Chambre de l'instruction qui a statué par des motifs inopérants et impropres à écarter l'existence de la qualité à agir et du grief subi par Monsieur [Z]-[Y] consécutivement à la perquisition irrégulière de son domicile, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 56, 57, 95, 171, 802, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

3°/ de troisième part, que le grief tiré de la contestation, par une personne mise en cause, de l'authenticité des découvertes révélées lors de la perquisition de son domicile ne saurait être écarté en raison de l'absence de contestation, par d'autres parties, de la réalité de ces découvertes ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir au terme d'une requête en annulation déposée devant la Chambre de l'instruction, qu'il contestait la réalité des découvertes prétendument révélées lors de la perquisition de son domicile ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, que « lors de son audition de garde à vue, [N] [Z] [Y] a reconnu que les 1.050 euros trouvés dans la poche de son manteau lors de la perquisition provenaient de son compte en banque (D1363), et le seul fait qu'il conteste par ailleurs les faits qui lui sont imputés sur la base des éléments issus de la perquisition réalisée, ne suffit pas à caractériser un grief susceptible de remettre en cause la régularité de la mesure de perquisition réalisée en présence de l'occupante des lieux, qui également placée en garde à vue, n'a formulé aucune contestation sur les objets trouvés lors de la perquisition (D1349, D1373), s'est expliquée sur un contrat de la société [1] relatif à l'acquisition d'une maison à [Localité 2] ainsi que sur la clef Ledger permettant de sécuriser les cryptomonnaies (D1379), de même qu'elle a admis posséder l'ensemble des sacs à mains saisis au cours de la perquisition pour une valeur de 9.998 euros (D1384) » quand l'exposant était bien recevable à contester la réalité des découvertes prétendument révélées lors de la perquisition de son domicile, peut important que son épouse, n'ait pas formulé de contestation en ce sens, la Chambre de l'instruction qui a statué par des motifs inopérants et impropres à écarter l'existence de la qualité à agir et du grief subi par Monsieur [Z]-[Y], consécutivement à la perquisition irrégulière de son domicile, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 56, 57, 95, 171, 802, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

20. Pour rejeter le moyen de nullité de la perquisition, l'arrêt attaqué énonce que celle-ci a été réalisée hors la présence du requérant, alors gardé à vue sur commission rogatoire, mais en présence de son épouse, qui s'est déclarée locataire et occupante des lieux, ce qui correspond aux prévisions de la loi.

21. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a, à bon droit, fait application de l'article 96 du code de procédure pénale, disposition applicable dès lors qu'au moment de la réalisation de la perquisition, le requérant n'avait pas encore la qualité de personne mise en examen qui commande l'application de l'article 95 du même code.

22. En effet, la perquisition du domicile de l'intéressé pouvait être régulièrement effectuée en présence d'une autre personne également domiciliée dans les lieux, la présence de la personne mise en cause n'étant pas exigée, celle-ci serait-elle même, à ce moment, placée en garde à vue.

23. Dès lors, le moyen, inopérant en ses deux dernières branches en l'absence d'irrégularité, doit être écarté.

Sur le sixième moyen

Enoncé du moyen

24. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors « que la mesure attentatoire à la vie privée préalablement autorisée par un juge d'instruction, qui n'est pas installée dans un délai raisonnable à compter de cette décision, ne peut être mise en place qu'à condition que ledit juge ait donné, fut-ce oralement, son avis sur le maintien des motifs de sa décision et que la réalité de cette actualisation soit constatée en procédure ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir que le 1er juillet 2022, le juge d'instruction avait autorisé la mise en place d'une mesure de sonorisation au sein de son domicile, toutefois le dispositif n'a été effectivement installé que le 19 août 2022, soit plus d'un mois et demi plus tard, sans qu'un avis, fût-t-il oral du juge d'instruction, soit recueilli sur la nécessité et la proportionnalité de cette mesure ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de ce chef, que « d'une part, le texte légal ne prévoit pas de délai de mise en place, alors qu'au contraire, il est constant que le point de départ des mesures de sonorisation doit être fixé au jour de leur mise en place effective, d'autre part, ce délai en soi n'a rien d'anormal en ce que la mise en place du dispositif un mois et demi après la décision de sonorisation apparaissait justifiée par les motifs mêmes ayant conduit le magistrat instructeur à l'ordonner, mentionnant dans son ordonnance que « les malfaiteurs semblent faire l'objet d'une vigilance accrue pour la commission des faits, se montrant particulièrement discret dans leurs activités », ou « la difficulté de mettre en place des surveillances physiques dans ce quartier et la prudence dont font preuve les malfaiteurs dont les écoutes téléphoniques classiques n'apportent que très peu d'éléments », et que les enquêteurs ont relaté avoir choisi un moment propice d'éloignement du mis en cause de son domicile, déterminé à partir de la géolocalisation croisée du téléphone et du véhicule utilisé par [N] [Z]-[Y] en mentionnant dans leur procès-verbal d'exécution : « Vu l'opportunité qui se présente à nous en terme de délai », la mise en place du dispositif ayant encore nécessité le recours aux effectifs spécialisés du SIAT de [Localité 6], ainsi que des effectifs afin de sécuriser le secteur de leur intervention (D1296) », pour déduire qu' « il n'existe pas de discordance entre la décision de sonorisation, et sa mise en œuvre non pas tardive mais différée pour des motifs de précautions et d'opportunité, en l'espèce parfaitement anticipés et intégrés par le magistrat instructeur dans sa motivation, qui n'a donc aucunement perdu le contrôle effectif de la mesure » quand faute, pour les enquêteurs d'avoir recueilli une autorisation actualisée, fut-elle orale, du juge d'instruction au moment de l'installation du dispositif, il n'y a pas eu de contrôle effectif a priori de la nécessité de la mesure de sonorisation litigieuse ni de la proportionnalité de l'atteinte à la vie privée qu'elle causerait, la Chambre de l'instruction a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, préliminaire, 706-96, 706-95-12, 706-95-13, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

25. Pour rejeter le moyen de nullité de la mesure de sonorisation, l'arrêt attaqué énonce que la loi ne pose aucune condition de délai à la mise en place du dispositif autorisé et que le délai d'un mois et demi séparant l'autorisation de la pose du dispositif technique s'explique par les motifs, déjà relevés par le juge d'instruction dans son ordonnance d'autorisation, tenant à la prudence et à la discrétion des personnes suspectées, les enquêteurs ayant précisé avoir trouvé un moment propice par suite de l'éloignement du requérant.

26. Les juges en concluent qu'il n'y a aucune discordance entre la décision et sa mise en oeuvre, non tardive, mais différée pour des motifs de précaution et d'opportunité anticipés par le juge d'instruction, lequel n'a pas perdu le contrôle effectif de la mesure.

27. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

28. En effet, d'une part, les articles 706-95-11 et suivants et 706-96 du code de procédure pénale qui encadrent la mesure de sonorisation ne posent, contrairement à l'article 706-92 du même code autorisant les perquisitions nocturnes dans un local d'habitation, aucune condition d'urgence à la réalisation de la mesure de sonorisation une fois qu'elle a été autorisée.

29. D'autre part, après que le juge a constaté la nécessité d'une telle mesure, le choix du moment de la pose du dispositif technique relève de l'appréciation des enquêteurs en fonction de l'état d'avancement de leurs investigations et de la recherche du moment le plus opportun, sans qu'il soit nécessaire que le juge d'instruction en soit avisé.

30. Le moyen doit, dès lors, être écarté.

Sur le septième moyen

Enoncé du moyen

31. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors « que dès lors que le procès-verbal de notification des droits de la personne gardée à vue fait apparaître qu'elle a formulé la volonté de s'entretenir avec un avocat, cet avocat doit être avisé de sa désignation sans délai ; qu'au cas d'espèce, l'exposant faisait valoir qu'il avait été placé en garde à vue le 18 janvier 2023, à 6 heures du matin ; qu'à 6h05, il sollicitait l'assistance d'un avocat, en la personne de Maître Gregory Billet, avocat au barreau de Lille or c'est seulement à 6h50, soit 45 minutes plus tard, que ce dernier a été avisé de sa désignation ; qu'en retenant, pour rejeter le moyen d'annulation tiré de chef, qu' « au vu des mentions cochées sur l'imprimé de notification des droits de la garde à vue du 18 janvier 2023 à 6h05, [N] [Z]-[Y] a désigné Maître [U] [P] du barreau de Lille pour l'assistance aux interrogatoires et confrontations, tout en indiquant : « pour le moment, je ne désire pas m'entretenir avec un avocat » (D1348/4) », que l'avis visé au sein de l'article 63-3-1 du Code de procédure pénale ne concerne que le cas où l'avocat est commis d'office et que le droit à l'assistance d'un avocat avait bien été notifié à l'exposant dès le début de sa garde à vue, pour déduire que « dès lors que [N] [Z] [Y] avait renoncé à son droit à bénéficier d'un entretien confidentiel avec son conseil « dès le début de la garde à vue ». et ne souhaitant l'entretien que pour les interrogatoires et confrontations, demande parfaitement satisfaite lors de ses auditions, l'avis à l'avocat n'est pas tardif et ne comporte aucune irrégularité, et ce moyen de nullité sera donc également rejeté » quand il ressortait explicitement du procès-verbal litigieux que Monsieur [Z] [Y] avait souhaité s' « entretenir avec Maître [U] [P] du barreau de Lille » et donc, que ce dernier devait être avisé de sa désignation sans délai, peut important que les enquêteurs aient coché la case préremplie selon laquelle l'exposant aurait renoncé à ce droit – la mention explicite contraire supplantant cette erreur purement matérielle, la Chambre de l'instruction a dénaturé les mentions de ce procès-verbal et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 63-3-1, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

32. Pour rejeter le moyen de nullité de la garde à vue, l'arrêt attaqué énonce que l'avocat choisi a été informé de la demande d'assistance du requérant à 6 heures 50, que l'intéressé a pu s'entretenir avec lui à 14 heures 45 et qu'il a été assisté dès sa première audition.

33. En l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

34. En effet, il résulte des pièces de la procédure, dont la Cour de cassation a le contrôle, qu'il s'est écoulé un délai de quarante minutes entre la fin de la notification des droits de la garde à vue et l'avis à l'avocat, délai qui ne saurait être regardé comme excessif.

35. Le moyen doit, dès lors, être écarté.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

36. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité formée par le demandeur, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes ou pièces de la procédure, a constaté que la procédure est régulière et a ordonné le retour du dossier au juge d'instruction saisi, alors « que le mis en cause à qui l'on impute d'avoir tenu des propos captés au cours d'une opération de captation des données ou d'interception de communication, sur sa propre ligne ou sur la ligne d'un tiers, est recevable à solliciter l'annulation de cette mesure ; qu'au cas d'espèce, l'exposant critiquait, au sein de ses deuxième, troisième, quatrième et onzième moyens d'annulation la régularité des mesures d'interception et de captation diligentées dans le cadre des procédures « souches » en faisant valoir que, suite à la mise en œuvre de ces mesures, les enquêteurs lui avaient attribué divers propos et conversations tenus sous le pseudonyme « Brazza » ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables les moyens tirés de chef, que le fait qu'un certain « Brazza » - surnom que l'exposant ne contestait pas détenir - soit évoqué ou intervienne au cours des conversations litigieuses ne suffisait à justifier d'une atteinte au respect de sa vie privée dans la mesure où Monsieur [Z]-[Y] contestait avoir participé à ces conversations, qu'aucun identifiant « [9] » ne lui avait été attribué lors de l'enquête et qu'il n'était ni le titulaire, ni l'utilisateur des lignes identifiées, quand il résultait expressément des éléments de la procédure que les enquêteurs avaient imputé à l'exposant des conversations qu'il aurait passées depuis le téléphone d'un autre utilisateur surnommé « [S] », et donc que les mesures de captation de données et d'interception de communication avaient bien eu pour effet direct de causer une intrusion dans sa vie privée, peu important qu'il n'ait pas été lui-même titulaire d'une ligne ou d'une des solution visées par ces mesures, la Chambre de l'instruction a dénaturé les éléments de la procédure en sa possession et a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, préliminaire, 171, 802, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »



Réponse de la Cour

Vu les articles 171 et 802 du code de procédure pénale :

37. Il résulte de ces textes que la méconnaissance des formalités substantielles régissant les mesures de captation de données informatiques et d'interception de correspondances émises par la voie des communications électroniques peut être invoquée à l'appui d'une demande d'annulation d'actes ou de pièces de la procédure par la partie qui établit qu'il a, à l'occasion d'une telle investigation, été porté atteinte à sa vie privée.

38. Pour refuser au requérant la qualité pour agir en nullité de mesures de captation de données informatiques et d'interception de correspondances, l'arrêt attaqué énonce que celui-ci pourrait s'être ponctuellement immiscé dans l'une des conversations captées tenue entre deux interlocuteurs, mais que ce fait n'est pas démontré et est au surplus contesté par l'intéressé, de sorte qu'il ne démontre pas en quoi il aurait été porté atteinte à sa vie privée à l'occasion des investigations en cause.

39. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé.

40. En effet, ainsi qu'elle l'a elle-même relevé, il résulte des pièces de la procédure que les enquêteurs ont attribué au requérant des propos qui ont été recueillis lors des mesures contestées puis retranscrits, cette seule constatation suffisant à conférer à l'intéressé la qualité pour agir en nullité de ces mesures, peu important qu'il conteste être l'auteur des propos en cause.

41. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 15 mai 2024, mais en ses seules dispositions ayant déclaré irrecevable le moyen de nullité des mesures de captation de données informatiques et d'interception de correspondances émises par la voie des communications électroniques, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle - formation de section
Numéro d'arrêt : 24-85.007
Date de la décision : 06/05/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Publications
Proposition de citation : Cass. Crim. - formation de section, 06 mai. 2025, pourvoi n°24-85.007, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:24.85.007
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