CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 janvier 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 108 F-D
Pourvoi n° N 22-12.082
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JANVIER 2025
La caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-12.082 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2021 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Y] [K], domicilié [Adresse 4],
2°/ à M. [E] [R], domicilié [Adresse 1], pris en qualité de liquidateur de la société Pleiade Publishing Booking, anciennement dénommée société Villa Club,
3°/ à la société OCMJ, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], prise en la personne de M. [I] [D], en qualité de liquidateur de la société Les Reganeous II,
défendeurs à la cassation.
La société OCMJ, agissant en la personne de M. [I] [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Les Reganeous II, a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Hénon, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société OCMJ, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [K], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 décembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Hénon, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 15 décembre 2021), M. [K] (la victime), salarié de la société Les Reganeous I, a été victime, le 17 janvier 2016, d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault (la caisse).
2. La victime a saisi, le 7 juillet 2016, une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale à fin de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident formé par la victime
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi principal formé par la caisse
Enoncé du moyen
4. La caisse fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu de constater la péremption de l'instance en cause d'appel, alors :
« 1°/ que la péremption d'instance doit être prononcée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que cette règle, qui vise à assurer une bonne administration de la justice, ne porte pas d'atteinte excessive au droit d'accès au juge, lequel n'est pas absolu et se prête à des limitations, les tribunaux devant éviter, lorsqu'ils appliquent les règles procédurales, toute souplesse excessive qui aboutirait à supprimer les conditions de procédure établies par les lois et règlements ; qu'en l'espèce, aucune des parties en présence n'a accompli de diligences du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2021 dans le cadre de l'instance en cours devant la cour d'appel de Montpellier ; qu'en refusant néanmoins de constater la péremption d'instance en ce qu'elle constituerait une entrave à « l'effectivité du droit d'accès au juge », la cour d'appel a violé l'article 386 du code de procédure civile par refus d'application, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par fausse interprétation ;
2°/ que la cour d'appel a elle-même relevé que l'appelant avait, en l'espèce, été assisté d'un avocat, et que l'application des textes en vigueur sur la péremption ne devait présenter aucune difficulté pour un tel professionnel ; qu'en l'espèce, aucune des parties en présence n'a accompli de diligences du 1er janvier 2019 au 1er janvier 2021 dans le cadre de l'instance en cours devant la cour d'appel de Montpellier ; qu'en refusant pourtant de constater la péremption d'instance en ce qu'elle constituerait une entrave à « l'effectivité du droit d'accès au juge », quand ces constatations permettaient d'établir que l'application des textes en vigueur n'avait pu constituer une atteinte disproportionnée, au cas d'espèce, au droit d'accès au juge de l'appelant, la cour d'appel a derechef violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
6. Selon l'article R. 142-11 du code de la sécurité sociale, dans les litiges relevant du contentieux de la sécurité sociale défini à l'article L. 142-1 du même code, la procédure d'appel est sans représentation obligatoire.
7. Selon l'article 946 du code de procédure civile, la procédure sans représentation obligatoire est orale.
8. Par deux arrêts (2e Civ., 10 octobre 2024, pourvois n° 22-12.882 et 22-20.384, publiés), la Cour de cassation juge qu'en procédure orale, à moins que les parties ne soient tenues d'accomplir une diligence particulière mise à leur charge par la juridiction, la direction de la procédure leur échappe. Elles n'ont, dès lors, plus de diligences à accomplir en vue de l'audience à laquelle elles sont convoquées par le greffe.
9. En particulier, il ne saurait leur être imposé de solliciter la fixation de l'affaire à une audience à la seule fin d'interrompre le cours de la péremption, laquelle ne peut leur être opposée pour ce motif.
10. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui ne mentionne pas qu'une diligence particulière avait été mise à la charge des parties par la juridiction avant l'ordonnance d'injonction du 6 octobre 2021, se trouve légalement justifié.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille vingt-cinq.