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22/01/2025 | FRANCE | N°23-14.548

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 22 janvier 2025, 23-14.548


CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 janvier 2025




Cassation partielle sans renvoi


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 106 F-D

Pourvoi n° P 23-14.548



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2025

Mme [P] [N], domiciliée [Adresse 1

], a formé le pourvoi n° P 23-14.548 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2023 par la cour d'appel de Besançon (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [M] [X], d...

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 janvier 2025




Cassation partielle sans renvoi


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 106 F-D

Pourvoi n° P 23-14.548



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2025

Mme [P] [N], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 23-14.548 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2023 par la cour d'appel de Besançon (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [M] [X], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

M. [X] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Peyregne-Wable, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de Mme [N], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [X], après débats en l'audience publique du 26 novembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Peyregne-Wable, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 26 janvier 2023), M. [X] et Mme [N] (les emprunteurs) ont contracté solidairement deux emprunts au cours des années 2011 et 2013 auprès de la Caisse d'épargne de Bourgogne Franche-Comté (la banque).

2. Faute de règlement des échéances par les emprunteurs, la banque a prononcé la déchéance du terme des prêts et exigé le remboursement des sommes dues.

3. La banque a été désintéressée à hauteur d'une certaine somme par Mme [N] en suite de la vente d'un bien immobilier lui appartenant en propre.

4. Le 3 avril 2019, après séparation du couple, Mme [N] a assigné M. [X] en remboursement de la moitié de la somme versée à la banque.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. Mme [N] fait grief à l'arrêt d'écarter des débats le dossier de pièces déposé au greffe le 1er décembre 2022 par son conseil, alors « que l'obligation, imposée par l'article 906 du code de procédure civile, de communiquer simultanément au dépôt et à la notification des conclusions les pièces produites à leur soutien, n'impose pas au juge d'écarter des débats les pièces communiquées non simultanément à la notification des conclusions dès lors qu'il constate que leur destinataire a été mis, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre ; qu'en écartant des débats des pièces communiquées le 13 septembre 2022 par Mme [N], plusieurs mois avant la clôture de l'instruction, au seul motif que faute d'avoir été communiquées simultanément à des écritures, lesdites pièces doivent être écartées des débats, comme le demande le conseil de l'appelant, sans constater que l'appelant n'aurait pas été en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre en temps utile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 15, 135 et 906 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Après avoir relevé qu'une avocate s'était constituée pour le compte de Mme [N] le 15 avril 2022, qu'elle n'avait pas déposé de conclusions mais avait adressé le 1er décembre 2022 au greffe de la cour un dossier comportant sept pièces, selon un bordereau de communication de pièces daté du 13 septembre 2022, l'arrêt retient que faute d'avoir été communiquées simultanément avec des écritures, ces pièces doivent être écartées des débats.

7. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche invoquée par le moyen, que l'absence de dépôt de conclusions rendait inopérante, a légalement justifié sa décision.

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

8. Mme [N] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement d'une certaine somme outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation, alors :

« 1°/ que le recours en contribution à la dette exercé par le coemprunteur qui acquitte celle-ci est fondé sur la subrogation légale et non sur l'existence, entre les co-obligés, d'un lien contractuel; qu'en décidant au contraire de rejeter le recours en contribution à la dette exercé à l'encontre de M. [X], co-emprunteur, dès lors que le remboursement du prêt opéré par Mme [N] n'emporte pas ipso facto obligation pour le co-emprunteur solidaire de devoir rembourser, la cour d'appel a violé l'article 1251 3° devenu 1346 du code civil ;

2°/ subsidiairement que l'obligation contractée solidairement envers le créancier se divise de plein droit entre les débiteurs, qui n'en sont tenus entre eux que chacun pour leur part et portion et que saisi d'un recours en garantie réciproques formé par des coobligés condamnés in solidum, le juge est tenu de statuer sur la répartition finale de la dette ; qu'en décidant au contraire, bien que saisie d'un recours en garantie entre coobligés, de ne pas examiner la répartition finale de la dette entre Mme [N] et M. [X], aux motifs inopérants que le paiement de Mme [N] n'emporte pas ipso facto obligation pour le co-emprunteur solidaire de devoir rembourser et que la contribution à la dette du co-emprunteur n'est pas établie, la cour d'appel a violé les articles 1220 devenu 1309, 1213 devenu 1317 et 1216 devenu 1318 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen, contestée en défense

9. Mme [N] n'a pas conclu devant la cour d'appel et il ne résulte pas de l'arrêt qu'ait été appréciée la part respective des intérêts des codébiteurs dans leurs engagements communs.

10. Le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est pas recevable.

Sur le troisième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

11. Mme [N] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. [X] une certaine somme correspondant au remboursement des échéances des prêts contractés auprès de la banque acquitté postérieurement au 1er août 2015, alors « que le recours en contribution à la dette exercé par le co-emprunteur qui acquitte celle-ci est fondé sur la subrogation légale et non sur l'existence, entre les co-obligés, d'un lien contractuel ; qu'en décidant au contraire de faire droit au recours en contribution à la dette exercé par M. [X], co-emprunteur, sur le fondement de l'article 1216 du code civil relatif à la subrogation conventionnelle, la cour d'appel a violé l'article 1251 3° devenu 1346 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen, contestée en défense

12. Le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit en ce qu'il impliquerait d'apprécier les conditions factuelles d'application du texte invoqué, n'est pas recevable.

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

13. M. [X] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre de l'enrichissement injustifié s'agissant des travaux réalisés sur la maison appartenant à Mme [N], alors :

« 1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, respecter le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'application de l'article 1303-2 du code civil, et en jugeant sur le fondement de ce texte que M. [X] aurait accompli les travaux litigieux en vue d'un profit personnel, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que si aucune disposition légale ne règle la contribution des concubins aux charges de la vie commune, de sorte que chacun d'eux doit, en l'absence de volonté exprimée à cet égard, supporter les dépenses de la vie courante qu'il a engagées, le concubin justifie d'un enrichissement injustifié lorsque les travaux réalisés par lui dans l'immeuble appartenant à son compagnon excèdent, par leur ampleur, sa participation normale à ces dépenses ; qu'en se bornant à énoncer que les travaux réalisés par M. [X] sur le bien propre de Mme [N] l'avaient été en vue d'un profit personnel, à savoir l'amélioration de son cadre de vie quotidien et la possibilité à terme de s'installer avec Mme [N] dans un logement entièrement neuf, agencé conformément au goût des futurs occupants, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si les travaux ainsi réalisés n'avaient pas, par leur ampleur, excédé la participation normale de M. [X] aux dépenses courantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1303, 1303-1 et 1303-2 du code civil. »

Réponse de la Cour

14. L'arrêt relève que lorsque les travaux ont été réalisés par M [X], le couple avait le projet de s'installer dans une maison neuve édifiée sur un terrain proche de celui sur lequel était située la maison ancienne alors habitée par les parties, que les travaux accomplis par l'intéressé, aussi bien dans le logement du couple pour le rénover, que dans leur futur domicile l'ont été en vue d'un profit personnel, à savoir l'amélioration de son cadre de vie quotidien et la possibilité à terme de s'installer avec Mme [N] dans un logement neuf.

15. De ces constatations et énonciations faisant ressortir le profit personnel retiré par M. [X], la cour d'appel, qui n'a pas méconnu le principe de la contradiction, en a exactement déduit que le coût de la main d'oeuvre ne pouvait donner lieu à indemnisation.

16. Le moyen, inopérant en sa deuxième branche, n'est pas fondé.

Mais sur le troisième moyen du pourvoi incident, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

17. M. [X] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement d'une certaine somme consécutive au jugement rendu le 20 octobre 2017, alors « que le juge ne peut méconnaître la chose antérieurement jugée, telle qu'elle s'évince du dispositif de la décision de justice antérieure ; que le dispositif du jugement du 20 octobre 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Montbéliard avait désigné, comme créanciers des indemnités allouées au titre des travaux de reprise et des frais irrépétibles, Mme [N] et M. [X] ; qu'en jugeant pourtant que M. [X] n'avait droit à aucune somme à ce titre, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 1355 du code civil :

Il résulte de ce texte que l'autorité de chose jugée a lieu à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché expressément dans son dispositif.

18. Pour rejeter la demande de M. [X] en remboursement de moitié des indemnités de travaux de reprise et frais irrépétibles alloués par jugement du 20 octobre 2017, l'arrêt relève, d'abord, que M. [X] communique la copie du jugement précité qui a condamné la société Bois et Dérivés de [Localité 3] à lui payer ainsi qu'à Mme [N] une somme de 21 395 euros hors taxe au titre de travaux de reprise de malfaçons, et la somme de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral, outre une indemnité de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles.

19. Il relève, ensuite, qu'il résulte de cette décision que l'indemnité allouée au titre des travaux de reprise revient au maître de l'ouvrage, que M. [X], intervenu en qualité de maître d'oeuvre, aurait pu voir sa responsabilité engagée, qu'il ne peut prétendre à la moitié de l'indemnité précitée, et qu'il en est de même s'agissant de la somme allouée au titre des frais irrépétibles, l'interessé ne démontrant pas qu'il a personnellement supporté les frais de représentation.

20. En statuant ainsi, alors qu'il avait été définitivement jugé par le jugement du 20 octobre 2017 que M. [X] et Mme [N] étaient conjointement créanciers des sommes allouées au titre des travaux de reprise et des frais irrépétibles, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

21. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

22. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de M. [X] en remboursement de moitié des indemnités de travaux de reprise et frais irrépétibles alloués par jugement du 20 octobre 2017 du tribunal de grande instance de Montbéliard, l 'arrêt rendu le 26 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne Mme [N] à payer à M. [X] la somme de 11 947,50 euros en remboursement de moitié des indemnités de travaux de reprise et frais irrépétibles alloués par jugement du 20 octobre 2017 du tribunal de grande instance de Montbéliard ;

Condamne Mme [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 23-14.548
Date de la décision : 22/01/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte hors rnsm/na, 22 jan. 2025, pourvoi n°23-14.548


Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2025
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:23.14.548
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