CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 janvier 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 35 F-D
Pourvoi n° N 22-11.139
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 JANVIER 2025
M. [S] [V], domicilié [Adresse 4], [Localité 2], a formé le pourvoi n° N 22-11.139 contre les arrêts rendus les 3 juin 2020 et 30 novembre 2021 par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (section : accidents du travail (B)), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [V], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 novembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Sara, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon les arrêts attaqués (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 3 juin 2020 et 30 novembre 2021), par décision du 1er décembre 2014, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain (la caisse) a retenu l'incapacité permanente partielle de M. [V] (l'assuré) au taux de 3 % à la suite d'un accident du travail.
2. Saisie d'un recours par l'assuré, une juridiction chargée du contentieux technique a fixé ce taux à 12 %, par un jugement dont la caisse a relevé appel.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. L'assuré fait grief à l'arrêt du 3 juin 2020 de rejeter l'exception de péremption d'instance opposée à la caisse, alors :
« 1°/ que les juges ne peuvent rejeter une exception de péremption en se contentant d'énumérer les actes ou courriers prétendument interruptifs mais doivent expliquer en quoi ces actes ont manifesté la volonté de leur auteur de faire progresser le litige vers sa solution et sont intervenus à l'intérieur du délai biennal ; que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de péremption soulevée par l'exposant en énumérant divers actes et courriers, depuis un mémoire transmis le 29 août 2016 jusqu'à « d'autres diligences » effectuées avant l'ordonnance de clôture, pour ensuite affirmer qu'il « ne s'(était) donc pas écoulé de délai de plus de deux ans sans qu'aucune des parties n'(eût) accompli de diligences aux fins d'avancement de la procédure » ; que n'ayant aucunement explicité en quoi les divers actes ou courriers cités par elle auraient été de nature à faire progresser le litige vers sa solution, ne mettant pas ainsi le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'existence de diligences interruptives du délai de péremption, la Cour nationale a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 386 du code de procédure civile ;
2°/ que ne constitue pas une diligence interruptive du délai biennal une simple demande de renseignements sur l'état d'avancement de la procédure ; que l'arrêt attaqué a constaté que le mémoire transmis le 29 août 2016 par une partie et reçu par l'autre le 10 octobre suivant avait été suivi d'une télécopie du 21 mars 2018 par laquelle une partie avait interrogé le secrétariat de la cour sur l'état d'avancement de la procédure, et qu'ensuite l'exposant avait expédié un nouveau mémoire le 15 novembre 2019 ; que ces énonciations faisaient ressortir que le délai de péremption courait au plus tard à compter du 10 octobre 2016, de sorte qu'il était acquis le 10 octobre 2018 ; qu'en rejetant néanmoins l'exception de péremption au prétexte qu'une partie aurait adressé le 21 mars 2018, au secrétariat de la cour, une demande de renseignements sur l'avancement de la procédure, quand une telle missive ne constituait pas une diligence interruptive de péremption, la Cour nationale a violé l'article 386 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'article 386 du code de procédure civile, rendu applicable à la procédure devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (la Cour nationale) par l'article R. 143-20-1 du code de la sécurité sociale, alors en vigueur, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligence pendant deux ans.
5. Selon l'article R. 143-26 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à son abrogation par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, la procédure devant la Cour nationale est orale. Toutefois, les parties qui adressent à la Cour nationale un mémoire dans les conditions prévues par l'article R. 143-25 sont dispensées de se présenter à l'audience conformément à l'article 446-1 du code de procédure civile.
6. Il résulte des articles R. 143-27 et R. 143-28-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction antérieure à leur abrogation par le décret précité, que lorsque l'affaire n'est pas en état d'être jugée, le président de la section à laquelle elle a été confiée en assure l'instruction et que, dans ce cas, une ordonnance de clôture, mentionnant la date de l'audience, est notifiée à chacune des parties.
7. En l'absence d'instruction, les parties sont, en application de l'article R. 143-28-2 du même code, dans sa rédaction antérieure à son abrogation par le décret précité, convoquées à l'audience par le secrétariat de la Cour nationale. La convocation les informe de la possibilité qu'elles ont d'y présenter des observations orales.
8. Par un arrêt rendu le 10 octobre 2024 (2e Civ., 10 octobre 2024, pourvoi n° 22-12.882, publié), la Cour de cassation a jugé qu'il résulte des dispositions précitées, interprétées à la lumière de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'à moins que les parties ne soient tenues d'accomplir une diligence particulière mise à leur charge par la juridiction, la direction de la procédure leur échappe. Elles n'ont, dès lors, pas de diligences à accomplir en vue de l'audience à laquelle elles sont convoquées par le secrétariat de la Cour nationale.
9. En particulier, il ne saurait leur être imposé de solliciter la fixation de l'affaire à une audience à la seule fin d'interrompre le cours de la péremption, laquelle ne peut leur être opposée pour ce motif.
10. Ayant relevé que les parties avaient adressé leurs mémoires respectifs les 29 août 2016 et le 10 octobre suivant puis le 15 novembre 2019, c'est à bon droit que la Cour nationale a rejeté l'incident de péremption, aucune diligence particulière n'ayant été mise à la charge des parties par la juridiction.
11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
12. M. [V] fait grief à l'arrêt du 30 novembre 2021 de limiter, à la demande de la caisse, à 5 % son taux d'incapacité permanente partielle, alors « qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen consacré à la péremption de l'instance entraînera l'annulation de plein droit de la disposition ayant limité à 5 % le taux d'incapacité permanente partielle de l'exposant. »
Réponse de la Cour
13. En l'état du rejet du premier moyen, le second moyen qui tend à une cassation par voie de conséquence, est, dès lors, sans objet.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [V] et le condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille vingt-cinq.