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05/06/2024 | FRANCE | N°23-12.525

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation de section, 05 juin 2024, 23-12.525


CIV. 1

IJ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 5 juin 2024




Cassation


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 304 FS-B

Pourvoi n° Q 23-12.525




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2024

Mme [W] [I], domiciliée [Adresse 2] (Belgique), a formé l

e pourvoi n° Q 23-12.525 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 7), dans le litige l'opposant à la société Lagardere Media News...

CIV. 1

IJ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 5 juin 2024




Cassation


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 304 FS-B

Pourvoi n° Q 23-12.525




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2024

Mme [W] [I], domiciliée [Adresse 2] (Belgique), a formé le pourvoi n° Q 23-12.525 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 7), dans le litige l'opposant à la société Lagardere Media News, société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU), dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [I], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Lagardere Media News, et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 avril 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Jessel, M. Mornet, Mme Kerner-Menay, Mme Bacache-Gibeili, conseillers, Mme de Cabarrus, Mme Dumas, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2022), Mme [I], soutenant que l'article intitulé « [U] [S] visé par une plainte pour viol », comportant le sous-titre « Une liaison épisodique avec [U] [S] », publié le 19 mai 2018 par le Journal du Dimanche sur son site internet, relatant la plainte pour viol qu'elle avait déposée contre M. [S] et illustré par une photographie les montrant côte à côte, portait atteinte à l'intimité de sa vie privée et à son droit à l'image, a assigné la société Lagardère Media News, éditrice du journal, en suppression de cet article et réparation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

2. Mme [I] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que, devant les juges du fond, Mme [I] avait expressément fait valoir que la publication de l'article litigieux ne pouvait être utilement mise en parallèle avec les mouvements #balancetonporc et #metoo dès lors que le principe même de ces deux mouvements repose sur la dénonciation publique de leurs agresseurs par les victimes quand, au contraire, Mme [I], qui avait saisi la justice d'une plainte pénale, n'avait pas saisi le tribunal médiatique, seul le JDD ayant publié l'information que Mme [I] voulait garder secrète ; qu'en l'espèce, en retenant que « cet article s'inscrit dans le contexte des mouvements #balancetonporc et #metoo (…) » pour en déduire que « de fait, il s'inscrit dans un débat d'intérêt général majeur » et pour écarter, en conséquence, toute atteinte illégitime à la vie privée de Mme [I] sans répondre aux conclusions de celle-ci invoquant une différence essentielle dans la démarche faite par les victimes, à savoir pour les unes, de porter au grand jour les comportements à connotation sexuelle et non consentis dans le cadre de relations professionnelles et, pour l'autre [Mme [I]], la volonté de rester anonyme en ne révélant pas publiquement les faits litigieux, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ».


Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

3. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

4. Pour rejeter les demandes de Mme [I], l'arrêt retient que l'article s'inscrit dans un débat d'intérêt général majeur relatif aux comportements à connotation sexuelle et non consentis intervenant dans le cadre de relations professionnelles, que, loin de chercher à satisfaire la curiosité d'un certain lectorat, il vise à informer le public d'une nouvelle plainte relative à un viol commis dans le milieu du cinéma, impliquant un producteur mondialement connu, sur fond d'un chantage à l'emploi dans la perspective de la carrière, qu'il adopte un ton particulièrement neutre, ayant soin d'employer le conditionnel et se conclut sur les interrogations du milieu du cinéma sur d'éventuelles plaintes susceptibles d'être déposées par d'autres actrices.

5. En statuant ainsi, alors que l'identité d'une plaignante, souhaitant rester anonyme, ne peut être révélée que si cette information contribue à nourrir le débat d'intérêt général, la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions de Mme [I], qui soutenait qu'elle n'avait pas souhaité médiatiser l'affaire à la différence des victimes s'inscrivant dans les mouvements #balancetonporc et #metoo mais saisir la justice d'une plainte en conservant l'anonymat, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Lagardère Media News aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Lagardère Media News et la condamne à payer à Mme [I] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation de section
Numéro d'arrêt : 23-12.525
Date de la décision : 05/06/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris C7


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation de section, 05 jui. 2024, pourvoi n°23-12.525, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:23.12.525
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