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15/05/2024 | FRANCE | N°22-20.747

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation de section, 15 mai 2024, 22-20.747


COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 mai 2024




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 255 FS-B

Pourvoi n° F 22-20.747




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MAI 2024

1°/ La société [F] Pizz, société à respo

nsabilité limitée à associé unique, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ M. [F] [G], domicilié [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° F 22-20.747 contre deux arrêts rendus les 6 ...

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 mai 2024




Rejet


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 255 FS-B

Pourvoi n° F 22-20.747




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MAI 2024

1°/ La société [F] Pizz, société à responsabilité limitée à associé unique, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ M. [F] [G], domicilié [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° F 22-20.747 contre deux arrêts rendus les 6 novembre 2019 et 29 juin 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Fra-Ma-Pizz, société par actions simplifiée unipersonnelle, venant aux droits de la société FP Nord,

2°/ à la société Pizza Center France,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bellino, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société [F] Pizz et de M. [G], de la SCP Alain Bénabent, avocat des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France, et l'avis de Mme Texier, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 mars 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bellino, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Poillot-Peruzzetto, Michel-Amsellem, Sabotier, Tréfigny, conseillers, M. Le Masne de Chermont, Mmes Comte, Bessaud, M. Regis, conseillers référendaires, Mme Texier, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Paris, 6 novembre 2019 et 29 juin 2022) et les productions, la société holding Food Court Finance était la société mère des sociétés Fra-Ma-Pizz, qui exploite et anime un réseau de franchise de restauration rapide sous l'enseigne Pizza Sprint, Pizza Center France, centrale d'achat de ce réseau, et FP Nord, qui exploite certains points de vente Pizza Sprint ou donne en location-gérance des fonds de commerce exploités sous cette enseigne.

2. Les 5 et 7 avril 2013, la société à responsabilité limitée à associé unique [F] Pizz, représentée par son gérant, M. [G], a conclu, avec la société FP Nord, des contrats de location-gérance de deux fonds de commerce à [Localité 3], d'une durée d'un an chacun à compter du 7 avril 2013, renouvelables annuellement par tacite reconduction, et, avec la société Fra-Ma-Pizz, des contrats de franchise, pour chacun de ces fonds, d'une durée de dix ans chacun à compter du 7 avril 2013.

3. En octobre 2015, la société Fra-Ma-Pizz a informé ses franchisés de la signature d'un protocole d'accord avec le groupe Domino's Pizza ayant pour objet l'acquisition par ce dernier des activités du réseau Pizza Sprint.

4. Le 6 janvier 2016, soutenant craindre son éviction du réseau, la société [F] Pizz a assigné les sociétés Fra-Ma-Pizz et FP Nord en exécution forcée du contrat de franchise et, à titre subsidiaire, en résolution des contrats aux torts exclusifs du franchiseur, outre le versement d'une certaine somme à titre de dommages et intérêts.

5. La cession effective des sociétés Fra-Ma-Pizz et FP Nord au groupe Domino's Pizza est intervenue le 26 janvier 2016.

6. Le 25 avril 2016, la société FP Nord a informé la société [F] Pizz qu'en application de l'article 4 des contrats de location-gérance, ceux-ci ne seraient pas renouvelés et prendraient fin de plein droit le 6 avril 2017.

7. En novembre 2016, la société FP Nord a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société Fra-Ma-Pizz, suivie de sa dissolution.

8. Le 3 avril 2017, la société Fra-Ma-Pizz, venant aux droits de la société FP Nord, a indiqué à la société [F] Pizz que les contrats de location-gérance prendraient fin comme prévu le 6 avril et qu'à cette date, elle ne ferait donc plus partie du réseau Pizza Sprint.

9. La société [F] Pizz ayant exigé de rester dans les lieux et de conserver les services liés à son contrat de franchise, par lettre du 8 avril 2017, la société Fra-Ma-Pizz lui a indiqué qu'elle n'était plus franchisée depuis le 6 avril 2017, la cessation du contrat de location-gérance ayant emporté la caducité du contrat de franchise.

10. La société [F] Pizz s'est maintenue dans les lieux jusqu'au 31 août 2018.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en ses deuxième, cinquième et sixième branches

11. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen, pris en ses première et troisième branches

Enoncé du moyen

12. La société [F] Pizz et M. [G] font grief à l'arrêt du 29 juin 2022 de constater la caducité des contrats de franchise à effet du 6 avril 2017 en conséquence du non-renouvellement des contrats de location-gérance, de rejeter leurs demandes et de condamner la société [F] Pizz à payer la somme de 24 000,69 euros TTC au titre de la part des loyers relative à la jouissance des locaux pour la période d'occupation du 1er décembre 2017 au 31 août 2018 au titre des deux fonds de commerce, la somme de 42 639,53 euros TTC restant due au titre des contrats de location-gérance et de franchise et la somme de 3 439,80 euros au titre du pack e-commerce et de la commande en ligne pour la période d'avril 2017 à février 2018, et de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer à la société Fra-Ma-Pizz la somme de 67 872 euros au titre des loyers non payés, sauf à préciser qu'il s'agit des redevances (hors loyers des murs) pour la période d'occupation du 7 avril 2017 au 31 août 2018, alors :

« 1°/ qu'en jugeant qu' "en raison de l'indivisibilité du contrat de location-gérance et du contrat de franchise associé au même fonds de commerce, au demeurant mentionnée à l'article 1er de chacun des contrats de location-gérance, le locataire-gérant indiquant (article 3) « avoir pleine connaissance du caractère indivisible du présent contrat avec le contrat de franchise conclu pour l'exploitation de l'établissement de ... », la cessation du contrat de location-gérance à son terme a entraîné de plein droit la caducité du contrat de franchise à cette même date", tout en constatant que le contrat de franchise stipulait une durée de dix ans et la location-gérance une durée d'un an, que l'article 3 du contrat de franchise stipulait que "l'agrément du franchiseur consenti pour le magasin défini à l'article 2 des présentes vaut seulement pour celui-ci. Tout déménagement du magasin existant ou toute modification de la surface de vente du Franchisé, ne pourra intervenir que dans le territoire et sous réserve de l'agrément exprès et écrit du Franchiseur" et que son article 3 stipulait que "la perte de la qualité de locataire gérant entraînera, à la demande et au choix du franchiseur, la résiliation anticipée du contrat de franchise", soit autant de clauses qui contredisaient l'impossibilité pour le contrat de franchise de survivre au non-renouvellement du contrat de location-gérance, la cour d'appel a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil ;

3°/ qu'en jugeant qu' "en raison de l'indivisibilité du contrat de location-gérance et du contrat de franchise associé au même fonds de commerce, au demeurant mentionnée à l'article 1er de chacun des contrats de location-gérance, le locataire-gérant indiquant (article 3) « avoir pleine connaissance du caractère indivisible du présent contrat avec le contrat de franchise conclu pour l'exploitation de l'établissement de ... », la cessation du contrat de location-gérance à son terme a entraîné de plein droit la caducité du contrat de franchise à cette même date" et qu' "en l'absence de résiliation du contrat de location-gérance, s'agissant d'un non-renouvellement de celui-ci à son terme, et de faute imputable au franchiseur de ce chef, le franchisé ne peut prétendre être indemnisé du préjudice qu'il invoque du fait de la caducité du contrat de franchise qui en résulte", sans vérifier, comme il lui était demandé, si ce non-renouvellement n'était pas abusif parce qu'uniquement destiné à mettre un terme prématuré au contrat de franchise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

13. D'une part, l'arrêt retient que le contrat de location-gérance constitue le support du contrat de franchise sans lequel celui-ci ne peut s'exécuter et que le sort du contrat de franchise est ainsi lié à celui du contrat de location-gérance, et relève que cette indivisibilité entre ces deux contrats est mentionnée à l'article 1er des contrats de location-gérance et que le locataire-gérant indique à l'article 3 de ces contrats « avoir pleine connaissance du caractère indivisible du présent contrat avec le contrat de franchise conclu pour l'exploitation de l'établissement ». Il retient, ensuite, que la différence de durée des deux contrats n'emporte pas de contrariété entre les clauses, qu'il ne peut être déduit de la clause 3 des contrats de franchise relative au déménagement du magasin que ces contrats ne seraient pas liés aux fonds de commerce initiaux, cependant qu'aucun déménagement du fonds de commerce ne pouvait intervenir après la cessation des contrats de location-gérance, et qu'il est également indifférent que la clause 3 point 2 de chacun des contrats de location-gérance prévoie que « la perte de la qualité de locataire-gérant entraînera, à la demande et au choix du franchiseur, la résiliation anticipée du contrat de franchise Pizza Sprint conclu pour l'exploitation de l'établissement ».

14. D'autre part, l'arrêt retient que la dénonciation de chacun des deux contrats de location-gérance est régulièrement intervenue, par deux lettres recommandées avec demande d'avis de réception adressées le 25 avril 2016, conformément à l'article 4 de chacun de ces contrats, que le bailleur a ainsi usé de son droit de ne pas renouveler le contrat de location-gérance à son échéance, qu'il ne peut donc être soutenu qu'a été mise en œuvre une « résiliation anticipée » des contrats de franchise de façon abusive et que, s'agissant d'un non-renouvellement du contrat de location-gérance à son terme, et en l'absence de faute imputable au franchiseur de ce chef, le franchisé ne peut prétendre être indemnisé du préjudice qu'il invoque du fait de la caducité du contrat de franchise qui en résulte.

15. En l'état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que le contrat de location-gérance et le contrat de franchise poursuivaient la réalisation d'une même opération économique et que la disparition du premier ne permettait pas la poursuite de l'exécution du second, ce dont le locataire-franchisé avait connaissance, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche invoquée par la troisième branche, a exactement retenu que le contrat de location-gérance et le contrat de franchise associé au même fonds de commerce étaient indivisibles, de sorte que la cessation du premier à son terme avait entraîné de plein droit la caducité du second à la même date.

16. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

17. La société [F] Pizz et M. [G] font le même grief à l'arrêt, alors « que le contrat de franchise, conclu en considération de la personne du franchiseur, ne peut être transmis par cession de la totalité des parts de la société à une société tierce, qu'avec l'accord du franchisé ; qu'en jugeant que "si le contrat de franchise, conclu en considération de la personne du franchiseur ne peut être transmis par fusion-absorption à une société tierce qu'avec l'accord du franchiseur, tel n'est pas le cas lorsque, comme en l'espèce, il y a eu cession de la totalité des parts ou actions de la société et changement de ses dirigeants, en raison du principe d'autonomie de la personne morale, cette dernière restant inchangée, en l'absence de clause interdisant ces changements sans l'accord préalable des franchisés", qu' "il sera ajouté qu'il n'est pas établi que les contrats de franchise en cause aient été conclus en considération de la personne du dirigeant" et qu'ainsi, "l'opération de rachat par la société Domino's Pizza France de la totalité des titres composant le capital social de la société Fra-Ma-Pizz ne peut être imputée à faute au franchiseur", la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

18. Si le contrat de franchise est conclu en considération de la personne du franchiseur, pour autant, la cession de la totalité des parts ou actions de la société franchiseur et l'évolution de ses dirigeants, qui n'impliquent pas de changement de la personne morale en considération de laquelle le franchisé s'est engagé et n'emportent aucune cession du contrat de franchise, ne requièrent pas, sauf clause contraire, l'accord préalable des franchisés.

19. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [F] Pizz et M. [G] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [F] Pizz et M. [G] et les condamne à payer aux sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation de section
Numéro d'arrêt : 22-20.747
Date de la décision : 15/05/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

Si le contrat de franchise est conclu en considération de la personne du franchiseur, pour autant, la cession de la totalité des parts ou actions de la société franchiseur et l'évolution de ses dirigeants, qui n'impliquent pas de changement de la personne morale en considération de laquelle le franchisé s'est engagé et n'emportent aucune cession du contrat de franchise, ne requièrent pas, sauf clause contraire, l'accord préalable des franchisés

concurrence.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris I4


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation de section, 15 mai. 2024, pourvoi n°22-20.747, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:22.20.747
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