SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 septembre 2022
Cassation partielle
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 932 F-D
Pourvois n°
H 20-16.209
Q 20-20.517 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 SEPTEMBRE 2022
I. La société Grtgaz, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 20-16.209 contre un arrêt rendu le 20 février 2020 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant à Mme [Y] [H], domiciliée [Adresse 1],
défenderesse à la cassation
II. Mme [Y] [H], a formé le pourvoi n° Q 20-20.517 contre le même arrêt rendu dans le litige l'opposant à la société Grtgaz, société anonyme,
La demanderesse au pourvoi n° H 20-16.209 invoque, à l'appui de son recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi n° Q 20-20.517 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme [H], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Grtgaz, après débats en l'audience publique du 9 juin 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° H 20-16.209 et Q 20-20.517 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 20 février 2020), Mme [H] a été engagée par la société Grtgaz à compter du 4 février 2011 en qualité de cadre juridique et réglementaire.
3. Le 30 décembre 2016, elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution de son contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen du pourvoi de l'employeur
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande aux fins de caducité de l'appel incident de la salariée et de prononcer diverses condamnations à son encontre, alors « qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les conclusions doivent être notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour ou signifiées, au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus aux articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile, aux parties qui n'ont pas constitué avocat, étant précisé que si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat ; qu'en l'espèce, l'employeur sollicitait la caducité de l'appel incident dès lors que les conclusions de la salariée ne lui avaient pas été signifiées dans les délais prescrits ; qu'en refusant de prononcer la caducité au motif inopérant que la salariée avait remis au greffe ses conclusions par l'intermédiaire du RPVA le 19 octobre 2018, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur les conditions et délai de remise des conclusions de la salariée à la société ou le cas échéant à son avocat, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 911 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 908 et 911 du code de procédure civile dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 :
5. Selon ces textes, à peine de caducité de sa déclaration d'appel, l'appelant doit, d'une part, remettre ses conclusions au greffe dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel, d'autre part, soit les notifier aux avocats des parties dans le même délai, soit les signifier aux parties qui n'ont pas constitué avocat avant l'expiration du délai de quatre mois courant à compter de la déclaration d'appel.
6. Pour rejeter la demande de caducité de l'appel formé par la salariée, l'arrêt retient qu'il ressort du dossier que cette dernière a interjeté appel « incident » (procédure RG 18/1815) par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 23 juillet 2018 et qu'elle a remis au greffe ses conclusions par l'intermédiaire du RPVA le 19 octobre 2018, soit dans le délai prévu par l'article 908 du code de procédure civile.
7. En se déterminant ainsi sans constater que la salariée avait signifié ses conclusions à l'employeur dans le délai imparti par l'article 911 du code de procédure civile, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur le premier moyen du pourvoi n° H 20-16.209 de l'employeur entraîne, par voie de conséquence, la cassation, d'une part, des chefs de dispositif déclarant irrecevable comme prescrite la demande de la salariée tendant à se voir classée sur la base du GF14 NR 285 et, en conséquence, ses demandes en paiement de rappels de rémunération afférents, d'autre part, des chefs de dispositif disant que la salariée doit être classée sur la base du GF14 NR 240 et condamnant l'employeur à lui payer certaines sommes à titre de rappels de rémunération afférents, de dommages-intérêts pour préjudice moral et de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de la société Grtgaz tendant à voir prononcer la nullité du jugement du 2 juillet 2018, l'arrêt rendu le 20 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;
Condamne Mme [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-deux.
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Grtgaz, demanderesse au pourvoi n° H 20-162.209
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR rejeté la demande formée par la société GRTgaz tendant à voir prononcer la caducité de l'appel incident de Mme [Y] [H] et d'AVOIR prononcé diverses condamnations à son encontre,
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande tendant à voir prononcer la caducité de l'appel incident : La société GRTgaz expose que l'appel incident formé par Mme [Y] [H] est caduc en ce qu'elle a signifié ses conclusions tardivement ; toutefois, il ressort du dossier que Mme [H] a interjeté appel incident (procédure RG 18/1815) par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 23 juillet 2018, et a remis au greffe ses conclusions par l'intermédiaire du RPVA le 19 octobre 2018, soit dans le délai prévu par l'article 908 du code de procédure civile ; l'exception de caducité formée par la société GRTgaz sera donc rejetée »,
ALORS QU'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les conclusions doivent être notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour ou signifiées, au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus aux articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile, aux parties qui n'ont pas constitué avocat, étant précisé que si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat ; qu'en l'espèce, la société GRTgaz sollicitait la caducité de l'appel incident dès lors que les conclusions de Mme [H] ne lui avaient pas été signifiées dans les délais prescrits (conclusions d'appel page 8 et 9) ; qu'en refusant de prononcer la caducité au motif inopérant que la salariée avait remis au greffe ses conclusions par l'intermédiaire du RPVA le 19 octobre 2018, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur les conditions et délai de remise des conclusions de Mme [H] à la société GRTgaz ou le cas échéant à son avocat, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 911 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé la décision entreprise en ses dispositions disant que Mme [H] doit être classée sur la base du GF 14 NR 240 à la date de la décision de 1re instance et condamnant la SA GRTgaz à payer à la salariée les sommes de 7 262,99 euros brut à titre de rappel de salaires pour la période du 10 avril 2014 au 10 avril 2017 et 7 278,95 euros brut à titre de rappel de salaires pour la période du 10 avril 2017 jusqu'au jour du jugement outre 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi, sauf à préciser qu'il est fait droit à la demande de rappel de rémunération à hauteur de 11 127,66 euros pour la période du 10 avril 2017 au 31 décembre 2018, sous réserve de la somme de 7 278,95 euros brut pour la période du 10 avril 2017 au 2 juillet 2018, et à hauteur de 3 789,28 euros pour la période du 1er janvier 2019 au 31 mai 2019, outre les sommes dues du 1er juin 2019 à la signification du présent arrêt,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « 2,3 - Sur l'inégalité de traitement.
Il résulte du principe "à travail égal, salaire égal", dont s'inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22.9, L. 2271-1.8° et L. 3221-2 du code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale. Sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L.3221-4 du code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. En application de l'article 1315 du code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe "à travail égal, salaire égal" de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.
- Sur les éléments de comparaison
Mme [Y] [H] apporte au dossier des éléments de comparaison relatifs à une différence de traitement entre sa situation et celle de plusieurs autres salariés de l'entreprise, dont elle détaille la classification professionnelle. Il convient à ce stade de rappeler que Mme [H] a été recrutée dans le cadre du programme "jeunes cadres" évoqué plus haut ; que seuls les salariés ayant été engagés dans ce cadre peuvent entrer à ce titre dans le "panel" de comparaison, les salariés n'appartenant pas à ce groupe dont la situation est évoquée par Mme D. disposent d'une ancienneté supérieure dans l'entreprise où d'un niveau de formation supérieur ; compte tenu de ces éléments, seront retenues les situations de Mmes [V] [G], [S] [B], [K] [D], et de M. [J] [F]. Mme [V] [G] exerce son activité dans le même domaine que Mme [Y] [H] et possède le même niveau de formation initiale ; Mme [S] [B] occupe un poste de contrôleur de gestion, poste dont la nature, les responsabilités exercées et la charge physique ou nerveuse sont comparables aux postes occupés par Mmes [H] et [G]. En revanche, les postes d'ingénieur d'exploitation réseau occupés par Mme [K] [D] et M. [J] [F] ne sont pas comparables aux précédents, la formation de base et les responsabilités exercées étant de nature différente. Les situations respectives de Mmes [Y] [H], [V] [G] et [S] [B] sont les suivantes :
Nom
Date d'embauche
Classification d'embauche
Classification en avril 2016
Moyenne
NR/an
Mme [Y] Dorge
02/2011
GF 12 NR 185
GF 13 NR 210
0,9
Mme [V]
[G]
06/2012
GF 12 NR 175
GF 13 NR 185
1,1
Mme [S] [B]
12/2012
G 12 NR 160
GF 13 NR 180
1,7
Il ressort de ces éléments que Mme [Y] [H] a connu une évolution de sa classification moins favorable que Mmes [V] [G] et [S] [B]. Mme [H] présente donc des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération.
La société GRTgaz conteste ces données, exposant que Mme [H] a connu en réalité une progression de sa classification plus favorable que celle des personnes dont la salariée évoque la situation, et produit sur ce point un graphique faisant état des progressions respectives. Toutefois, il convient de relever, comme l'ont fait les premiers juges, que ce document ne fait pas apparaître la donnée de temps de telle sorte qu'il n'est pas possible de déterminer si la comparaison porte sur une même période pour tous les agents concernés. Par ailleurs, il convient également de relever que la société GRTgaz, pour soutenir que Mme [H] a connu une évolution favorable, retient pour Mmes [G] et [B] une ancienneté qui comprend une période d'emploi antérieure à leur embauche statutaire, période qui ne peut être retenue pour la comparaison des situations respectives. Il convient de constater que la société GRTgaz n'apporte pas de justification à l'inégalité de traitement constatée au détriment de Mme [H].
C'est par une exacte appréciation des éléments de comparaison apportés par Mme [Y] [H] que les premiers juges ont dit que celle-ci devait bénéficier de la classification GF 14 NR 240 ; la décision entreprise sera confirmée sur ces points.
3. Sur la demande de rappel de salaire.
C'est par une exacte appréciation des éléments apportés par Mme [Y] [H] que les premiers juges ont, tenant compte de la prescription applicable, fixé le montant des sommes dues au titre du rappel de salaire à 7 262,99 euros brut pour la période du mois d'avril 2014 au mois d'avril 2017 ; il convient, sur le même fondement, de faire droit aux demandes sur ce point à hauteur de 11 127,66 euros pour la période du 10 avril 2017 au 31 décembre 2018, sous réserve de la somme de 7 278,95 euros brut pour la période du 10 avril 2017 au 2 juillet 2018, et à hauteur de 3789,28 euros pour la période du 1° janvier 2019 au 31 mai 2019, outre les sommes dues du 1° juin 2019 à la signification du présent arrêt, sur la base du niveau de rémunération retenu précédemment.
4. Sur le préjudice de carrière.
C'est par une exacte appréciation des éléments du dossier et par une motivation que la cour adopte que les premiers juges ont relevé d'une part que la société GRTgaz n'a pas fait preuve de la diligence nécessaire pour répondre à la demande de Mme [Y] [H] relative à l'inégalité de traitement qu'elle alléguait et que la réponse qui lui a été apportée était insuffisamment motivée, et d'autre part que la société ne lui a pas permis de changer de poste notamment en répondant avec retard à la société Enedis sur la disponibilité de sa salariée. Les premiers juges ont exactement évalué la réparation du préjudice subi à la somme de 5000 euros ; il sera fait droit à la demande et la décision entreprise sera confirmée sur ce point,
ET AUX MOTIFS PARTIELLEMENT ADOPTES QUE « Sur l'inégalité de traitement. L'article L. 3221-2 du code du travail dispose que : « Tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. » L'article L. 3221-4 du même code précise que : « Sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. » En application de ces dispositions et du principe « à travail égal, salaire égal », consacré de longue date par la jurisprudence, le salarié qui prétend être victime d'une inégalité de traitement de la part de son employeur doit prouver que des collègues qui se trouvent dans une situation similaire ou identique à la sienne bénéficient ou ont bénéficié d'une évolution de carrière plus favorable que la sienne. Il doit prouver, tout d'abord, que les situations présentées sont bien identiques ou similaires à la sienne puis qu'il existe une différence de traitement. Une fois cette preuve apportée, il incombe à l'employeur de justifier que la différence de traitement repose sur des raisons objectives.
Sur les collègues se trouvant dans une situation similaire ou identique En l'espèce, il convient donc de comparer l'évolution de carrière de Mme [H] à celle de collègues se trouvant dans une situation similaire ou identique, c'est-à-dire présentant un niveau hiérarchique, une classification et des responsabilités similaires. Le niveau de classification et de rémunération de Mme [H] à son embauche n'étant pas étudié par le conseil, celui-ci examinera une comparaison d'évolutions de carrières sur une même durée de cinq années, sachant que sur cette durée, Mme [H] a évolué d'un GF (groupe fonctionnel) et de cinq NR (niveau de rémunération) et se trouve donc en GF 13 NR210. Mme [H] compare, tout d'abord, l'évolution de sa carrière à celles de collègues embauchés comme elle au statut « jeune cadre » et travaillant également au service ressources humaines, notamment Mme [G] et Mme [B], Mme [H] compare, ensuite, sa situation avec celles de collègues qui n'ont pas été embauchés au statut « jeune cadre », mais qui exercent des fonctions de cadres au sein de la filière RH comme elle. Il s'agit de Mmes [W], [T], [U], [C] et [M] ainsi que de M. [P].
( )
Mme [G] est titulaire d'un BAC+5, elle a intégré le groupe GDF SUEZ en 2009 et la société GRTgaz en 2012. Elle est chargée d'études RH. Mme [B] est titulaire d'un BAC et d'un autre diplôme non précisé dans sa fiche de carrière. Elle est contrôleur de gestion au service RH.
( )
Il ressort de l'examen des fiches de carrières de ces salariés de la société GRTgaz que la situation de Mme [H] peut être comparée à celle de M. [P] et de Mmes [G], [U] et [M]. Les autres salariés de la filière RH ayant des diplômes différents de ceux de Mme [H] et occupant des postes différents ou comportant des responsabilités plus importantes que celles assumées par Mme [H] sont donc écartés.
Les autres situations évoquées concernent des salariés d'autres services qui ne peuvent être considérés dans une situation identique ou similaire.
Sur la comparaison des évolutions de carrière M. [P], qui est moins diplômé que Mme [H], a évolué, depuis l'acquisition du statut cadre en 2011 et sur les cinq années en question, de deux GF et de huit NR soit 1,6 NR par an. Selon sa fiche de carrière, Mme [G] a acquis un GF et deux NR entre juin 2012 et juillet 2014 soit un NR par an et un changement de groupe fonctionnel au bout de 2 ans au lieu de 3 ans et demi pour Mme [H]. Selon sa fiche de carrière, Mme [U], qui n'est pas titulaire d'un diplôme BAC+5, a évolué de deux GF et huit NR sur la période de 5 ans étudiée soit 1,6 NR par an, Selon sa fiche de carrière, Mme [M] a été embauchée le 2 janvier 2015, Elle a évolué d'un GF et de deux NR en 15 mois soit 1,6 NR par an. Il convient d'en conclure que la comparaison de l'évolution de la carrière des quatre collègues retenus comme ayant des situations identiques ou similaires avec celle de Mme [H] sur la période de 2011 à 2016, fait apparaître une inégalité de traitement au détriment de la demanderesse. Trois collègues ont bénéficié d'une évolution de leur rémunération plus rapide que Mme [H] et la quatrième, Mme [G], a changé de groupe fonctionnel au bout de deux ans alors que Mme [H] a mis trois ans et demi pour obtenir ce changement.
Sur les éléments apportés par l'employeur pour justifier cette différence de traitement Il ressort des écritures de la société GRTgaz qu'elle conteste toute différence de traitement et s'appuie pour cela sur la comparaison des situations à l'embauche alors même qu'il s'agit de comparer une évolution de carrière. Il convient de préciser qu'aucun reproche n'est fait à Mme [H] sur la qualité de son travail. La société GRTgaz produit un document comparatif des évolutions de carrière de plusieurs agents dont ceux qui ont été retenus par le conseil. Ce comparatif retrace l'évolution en termes de GF (en ordonnée) et de NR (en abscisse), mais ne fait pas apparaître la donnée de temps de sorte qu'il n'est pas possible de savoir si la comparaison porte sur une même période pour tous les agents.
En ce qui concerne M. [P], l'employeur évoque ses 23 ans de carrière et non l'évolution de sa carrière entre 2011 et 2016. En ce qui concerne Mme [G], la société évoque sa classification à l'embauche et son ancienneté, mais ne répond pas sur l'évolution présentée sur les cinq années. De même pour Mme [U]. Quant à Mme [M], seule sa classification à l'embauche est évoquée. Il convient d'en conclure que l'employeur échoue à justifier la différence de traitement entre les salariés retenus pour la comparaison en ce qu'il n'apporte aucun élément objectif justifiant que, sur ces cinq années, les salariés en question aient bénéficié d'une évolution de carrière plus satisfaisante que Mme [H]. Mme [H] a donc bien été victime d'une inégalité de traitement. Il convient, dès lors, de déterminer quelle classification aurait été la sienne si elle avait été traitée comme ses collègues.
Sur la classification à octroyer à Mme [H]
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Subsidiairement, Mme [H] demande à être positionnée au GF 14 NR 240 soit une évolution de 1,6NR par an. La société GRTgaz s'oppose oralement à cette classification GF 14 NR 240. Il apparaît que cette évolution de deux GF et huit NR en cinq ans donc 1,6 NR par an est celle dont ont bénéficié deux des quatre collègues qui ont servi de comparants. Une troisième a également connu une évolution de 1,6 NR par an, mais dans le même GF du fait de son embauche en 2015. L'évolution proposée peut donc être retenue et il sera ainsi fait droit à la demande de Mme [H] de se voir positionnée au GF 14 NR 240.
Sur le rappel de salaires
Mme [H] établit l'évolution de carrière qui aurait dû être la sienne et sollicite un rappel de salaires à compter du 10 avril 2014 en application de la prescription triennale prévue à l'article L. 3245-1 du code du travail. Mme [H] fournit un calcul détaillé de l'évolution de son salaire, année après année en fonction de l'évolution de son NR. L'employeur ne répond pas aux derniers calculs opérés par Mme [H]. Il convient donc de faire droit à la demande de rappel de salaires de Mme [H] pour un montant de 7 262,99 euros brut d'avril 2014 à avril 2017 et de 7 278,95 euros brut d'avril 2017 au jour du jugement.
Sur le préjudice de carrière et de santé
Mme [H] invoque le comportement de son employeur dans la gestion de sa demande comme étant à l'origine de son préjudice. Elle prétend que celui-ci a tout fait pour ne pas répondre à sa demande de manière à ce qu'elle se lasse et abandonne et que son immobilisme lui a causé un préjudice à la fois de carrière et de santé.
Sur le préjudice de carrière
Mme [H] produit un échange de mail qu'elle a eu avec sa supérieure hiérarchique directe, Mme [I], en date du 15 décembre 2015 duquel il ressort qu'il ne s'agit pas de leur premier échange au sujet de la plainte de Mme [H] relative à son évolution de carrière. Il ressort des pièces versées aux débats que Mme [I] n'a transmis cette demande à sa hiérarchie qu'à la fin janvier 2016. C'est Mme [H] qui s'adresse à la DRH par mail du 5 avril 2016 et la réponse ne lui sera apportée à l'oral que le 28 septembre 2016 ce qui est confirmé par l'employeur dans une réponse qu'il adresse le 4 novembre 2016 au syndicat CGT. La société GRTgaz fait valoir que Mme [H] n'a pas respecté une procédure qu'elle connaissait nécessairement du fait de ses fonctions en ne saisissant pas la commission secondaire du personnel. Ceci n'explique, toutefois, pas l'absence de réponse de la DRH à la demande de Mme [H] entre janvier et septembre 2016, Il apparaît également qu'il n'y a pas eu de suite à la demande de rencontre formulée par la CGT en novembre 2016 alors même que l'employeur avait, tout d'abord, déclaré y être favorable. Il apparaît que la société GRTgaz, si elle était en droit de contester les affirmations de Mme [H] sur l'inégalité de traitement invoquée, se devait toutefois de lui apporter des réponses écrites détaillées sur les motifs de son désaccord et de lui faire des propositions, d'autant qu'il ressort de l'ensemble des entretiens d'évaluation de Mme [H] que celle-ci donnait toute satisfaction. Mme [H] accuse son employeur d'avoir fait preuve d'immobilisme face aux demandes formulées par la société Enedis au sein de laquelle elle avait postulé en vue d'une mutation. Il ressort des échanges de mail versés aux débats que M. [L], de la société Enedis, a interpellé M. [R], DRH à GRTgaz, sur la disponibilité de Mme [H] sans obtenir de réponse. Il a obtenu cette réponse pour un second poste après avoir relancé M. [R]. La société GRTgaz répond que Mme [H] n'a pas rempli le formulaire prévu pour faire acte de candidature au sein de la branche ce qui n'explique pas l'absence de réponse de M. [R]. La société GRTgaz soutient avoir proposé un nouveau poste à Mme [H] en novembre 2016, poste qu'elle aurait refusé. Mme [H] conteste cela et affirme qu'un poste lui a été proposé en août 2016 et qu'elle ne l'a pas refusé. Elle indique avoir formulé des réserves au vu de sa demande relative à son évolution de carrière. Elle en justifie en produisant un mail envoyé à Mme [N] et à Mme [I] le 9 août 2016 dans lequel elle détaille le contenu du poste tel qu'il lui a été présenté par téléphone ainsi que les raisons pour lesquelles elle ne peut accepter ce poste d'emblée. Il convient d'en conclure que la société GRTgaz n'a pas fait preuve de la diligence nécessaire pour traiter la demande de Mme [H] relative à l'inégalité de traitement dont elle se disait victime et que la réponse apportée a été insuffisamment motivée. La société n'a, également, pas permis à Mme [H] de changer de poste en ne donnant pas suite à son mail du 9 août 2016 et en répondant avec retard à la société Enedis sur la disponibilité de sa salariée. Il en résulte que Mme [H] a subi, du fait du comportement de son employeur, un préjudice moral qu'il convient d'indemniser en lui accordant une somme de 5 000 euros. Le préjudice de santé invoqué par Mme [H] n'apparaissant pas différent de celui résultant du manquement à l'obligation de sécurité, il sera étudié à ce titre » ;
1) ALORS QUE le principe d'égalité de traitement n'impose pas que des salariés, même placés dans une situation identique ou similaire, connaissent des évolutions de carrière strictement identiques ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que Mme [H] ne pouvait se comparer qu'à deux salariés, Mmes [G] et [B], que lors de l'embauche, et en avril 2016, les salariées appartenaient au même groupe fonctionnel (GF), Mme [H] ayant, à ces deux moments, un niveau de rémunération (NR) supérieur à celui des deux autres salariées, celui de Mmes [G] et [B] restant d'ailleurs toujours inférieur ou égal au NR d'embauche de Mme [H], de sorte qu'il ne ressort pas de la décision attaquée que Mme [H] aurait eu à un quelconque moment une classification ou une rémunération inférieure à celle des salariées auxquelles elle se comparait ; qu'en se bornant à relever que Mme [H] avait vu son NR progresser en moyenne de 0,9 par an, contre 1,1 et 1,7 pour Mmes [G] et [B], la première ayant en outre changé de GF plus vite que Mme [H], motifs impropres à caractériser une atteinte au principe d'égalité, d'autant que l'employeur soulignait qu'il n'existait aucun droit acquis d'un salarié à se voir attribué un niveau de GF ou de NR supérieur, le manager seul appréciant in concreto si une telle évolution était justifiée ou non, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ;
2) ALORS QUE le juge ne peut accueillir ou rejeter les demandes dont il est saisi sans examiner tous les éléments de preuve qui lui sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions, et en particulier les nouvelles pièces produites à hauteur d'appel ; qu'en l'espèce, pour obtenir l'infirmation du jugement qui avait reproché à l'employeur de présenter un document comparatif de carrière (pièce n° 37) ne faisant pas apparaître la donnée de temps, de sorte qu'il aurait été impossible de savoir si la comparaison portait sur une même période pour tous les agents, l'employeur versait aux débats en cause d'appel une pièce n° 37 bis comportant une analyse mois par mois de l'évolution des salariés concernés par la comparaison ; qu'en jugeant pourtant qu'il convenait « de relever, comme l'ont fait les premiers juges » que le graphique produit par l'employeur « ne fait pas apparaître la donnée de temps de telle sorte qu'il n'est pas possible de déterminer si la comparaison porte sur une même période pour tous les agents concernés », sans examiner la nouvelle pièce n° 37 bis produite en cause d'appel qui faisait apparaître cette donnée temporelle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS à tout le moins QUE le juge ne peut pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que si la cour d'appel a implicitement examiné la pièce d'appel n° 37 bis et considéré qu'elle « ne fait pas apparaître la donnée de temps de telle sorte qu'il n'est pas possible de déterminer si la comparaison porte sur une même période pour tous les agents concernés », elle a dénaturé cette pièce d'appel n° 37 bis, qui faisait bel et bien apparaître la donnée temporelle dès lors qu'elle contenait un tableau montrant l'évolution mois par mois de la classification des salariés, en violation du principe susvisé ;
4) ALORS QUE le juge ne peut accueillir ou rejeter les demandes dont il est saisi sans examiner tous les éléments de preuve qui lui sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions, et en particulier les nouvelles pièces produites à hauteur d'appel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a reproché à la société GRTgaz d'avoir, pour soutenir que Mme [H] avait connu une évolution favorable, retenu pour Mmes [G] et [B] une ancienneté qui comprenait une période d'emploi antérieure à leur embauche statutaire, période qui ne pouvait être retenue pour la comparaison des situations respectives ; qu'en statuant ainsi sans examiner la nouvelle pièce n° 37 bis dont se prévalait l'employeur en cause d'appel et qui offrait de comparer l'évolution mois par mois de la classification (GF et NR) de Mmes [H], [G] et [B] depuis leur embauche effective aux dates retenues par la cour d'appel jusqu'en 2016, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5) ALORS à tout le moins QUE le juge ne peut pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a reproché à la société GRTgaz d'avoir, pour soutenir que Mme [H] avait connu une évolution favorable, retenu pour Mmes [G] et [B] une ancienneté qui comprenait une période d'emploi antérieure à leur embauche statutaire, période qui ne pouvait être retenue pour la comparaison des situations respectives ; qu'il ressort pourtant de la simple lecture de la pièce 37 bis de l'employeur qu'elle permettait la comparaison de l'évolution mois par mois de la classification (GF et NR) de Mmes [H], [G] et [B] depuis leur embauche effective aux dates retenues par la cour d'appel jusqu'en 2016, de sorte que si la cour d'appel a implicitement examiné cette pièce, elle l'a dénaturée, en violation du principe susvisé ;
6) ALORS en tout de cause QUE la contradiction de motifs constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la salariée ne pouvait comparer sa situation qu'à celle de deux salariés, Mmes [G] et [B], au contraire des premiers juges qui avaient admis une comparaison avec quatre salariés, soit M. [P], Mmes [U] et [M] et Mme [G], cette dernière étant la seule personne présente à la fois dans le panel admis par la cour d'appel et celui retenu – dans des motifs incompatibles avec ceux de la cour d'appel – par le conseil de prud'hommes ; que la cour d'appel a néanmoins confirmé l'octroi à Mme [H] du niveau GF 14 NR 240 en se bornant à affirmer que c'était par une exacte appréciation des éléments de comparaison apportés par Mme [Y] [H] que les premiers juges avaient dit que celle-ci devait bénéficier de la classification GF 14 NR 240 ; que pourtant, pour retenir ce niveau, le conseil de prud'hommes s'était expressément référé à la situation de trois salariés du panel qu'il avait retenu, mais pas de Mme [G], en soulignant que l'évolution qu'il accordait de 1,6 NR par an était celle dont avaient bénéficié deux des quatre collègues ayant servi de comparants, une troisième ayant connu une évolution de 1,6 NR, mais dans le même GF (jugement page 8) ; qu'en adoptant une motivation des premiers juges non compatible avec la sienne propre admettant un panel de seulement deux salariés ayant connu des évolutions de 1,1 NR (Mme [G]) et 1,7 NR (Mme [B]) soit une moyenne moindre de seulement 1,4 NR, la cour d'appel, qui a statué par des motifs contradictoires, a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé la décision entreprise en ses dispositions condamnant la SA GRTgaz à payer à la salariée 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « 4. Sur le préjudice de carrière.
C'est par une exacte appréciation des éléments du dossier et par une motivation que la cour adopte que les premiers juges ont relevé d'une part que la société GRTgaz n'a pas fait preuve de la diligence nécessaire pour répondre à la demande de Mme [Y] [H] relative à l'inégalité de traitement qu'elle alléguait et que la réponse qui lui a été apportée était insuffisamment motivée, et d'autre part que la société ne lui a pas permis de changer de poste notamment en répondant avec retard à la société Enedis sur la disponibilité de sa salariée. Les premiers juges ont exactement évalué la réparation du préjudice subi à la somme de 5 000 euros ; il sera fait droit à la demande et la décision entreprise sera confirmée sur ce point »,
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Mme [H] invoque le comportement de son employeur dans la gestion de sa demande comme étant à l'origine de son préjudice. Elle prétend que celui-ci a tout fait pour ne pas répondre à sa demande de manière à ce qu'elle se lasse et abandonne et que son immobilisme lui a causé un préjudice à la fois de carrière et de santé.
Sur le préjudice de carrière Mme [H] produit un échange de mail qu'elle a eu avec sa supérieure hiérarchique directe, Mme [I], en date du 15 décembre 2015 duquel il ressort qu'il ne s'agit pas de leur premier échange au sujet de la plainte de Mme [H] relative à son évolution de carrière. Il ressort des pièces versées aux débats que Mme [I] nia transmis cette demande à sa hiérarchie qu'à la fin janvier 2016. C'est Mme [H] qui s'adresse à la DRH par mail du 5 avril 2016 et la réponse ne lui sera apportée à l'oral que le 28 septembre 2016 ce qui est confirmé par l'employeur dans une réponse qu'il adresse le 4 novembre 2016 au syndicat CGT. La société GRTgaz fait valoir que Mme [H] n'a pas respecté une procédure qu'elle connaissait nécessairement du fait de ses fonctions en ne saisissant pas la commission secondaire du personnel. Ceci n'explique, toutefois, pas l'absence de réponse de la DRH à la demande de Mme [H] entre janvier et septembre 2016, il apparaît également qu'il n'y a pas eu de suite à la demande de rencontre formulée par la CGT en novembre 2016 alors même que l'employeur avait, tout d'abord, déclaré y être favorable. Il apparaît que la société GRTgaz, si elle était en droit de contester les affirmations de Mme [H] sur l'inégalité de traitement invoquée, se devait toutefois de lui apporter des réponses écrites détaillées sur les motifs de son désaccord et de lui faire des propositions, d'autant qu'il ressort de l'ensemble des entretiens d'évaluation de Mme [H] que celle-ci donnait toute satisfaction. Mme [H] accuse son employeur d'avoir fait preuve d'immobilisme face aux demandes formulées par la société Enedis au sein de laquelle elle avait postulé en vue d'une mutation. Il ressort des échanges de mail versés aux débats que Monsieur [L], de la société Enedis, a interpellé Monsieur [R], DRH à GRTgaz, sur la disponibilité de Mme [H] sans obtenir de réponse. Il a obtenu cette réponse pour un second poste après avoir relancé Monsieur [R]. La société GRTgaz répond que Mme [H] n'a pas rempli le formulaire prévu pour faire acte de candidature au sein de la branche ce qui n'explique pas l'absence de réponse de Monsieur [R]. La société GRTgaz soutient avoir proposé un nouveau poste à Mme [H] en novembre 2016, poste qu'elle aurait refusé. Mme [H] conteste cela et affirme qu'un poste lui a été proposé en août 2016 et qu'elle ne l'a pas refusé. Elle indique avoir formulé des réserves au vu de sa demande relative à son évolution de carrière. Elle en justifie en produisant un mail envoyé à Mme [N] et à Mme [I] le 9 août 2016 dans lequel elle détaille le contenu du poste tel qu'il lui a été présenté par téléphone ainsi que les raisons pour lesquelles elle ne peut accepter ce poste d'emblée. Il convient d'en conclure que la société GRTgaz n'a pas fait preuve de la diligence nécessaire pour traiter la demande de Mme [H] relative à l'inégalité de traitement dont elle se disait victime et que la réponse apportée a été insuffisamment motivée. La société n'a, également, pas permis à Mme [H] de changer de poste en ne donnant pas suite à son mail du 9 août 2016 et en répondant avec retard à la société Enedis sur la disponibilité de sa salariée. Il en résulte que Mme [H] a subi, du fait du comportement de son employeur, un préjudice moral qu'il convient d'indemniser en lui accordant une somme de 5 000 euros » ;
1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas indemniser deux fois le même préjudice ; qu'en l'espèce, pour réparer le préjudice de carrière de la salariée, la cour d'appel a ordonné son repositionnement dans la classification conventionnelle et lui a accordé des rappels de salaire à partir d'avril 2014 ; qu'en lui accordant en outre 5 000 euros de dommages et intérêts au prétexte que la société GRTgaz n'a pas fait preuve de la diligence nécessaire pour traiter la demande de Mme [H] relative à l'inégalité de traitement dont elle se disait victime et que la réponse apportée avait été insuffisamment motivée, la cour d'appel a indemnisé deux fois le même préjudice en violation du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;
2) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir (conclusions page 56, § 4 et page 57 et s.) que la salariée n'avait pas respecté les procédures internes de mobilité en omettant de se porter candidate dans les formes requises auprès de la société Enedis, si bien que c'est le propre manquement de la salariée, et non pas le prétendu défaut de diligence de l'employeur, qui était à l'origine de l'impossibilité pour Mme [H] de rejoindre la société Enedis ; qu'en omettant de répondre à ces conclusions avant de condamner l'employeur à indemniser la salariée parce qu'il ne lui aurait pas permis de changer de poste en répondant avec retard à la société Enedis sur la disponibilité de sa salariée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR infirmé le jugement rendu le 2 juillet 2018 par le conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a débouté Mme [Y] [H] de sa demande d'indemnisation au titre du non-respect par l'employeur de ses obligations de santé et de sécurité et d'AVOIR condamné la société GRTgaz à payer à Mme [Y] [H] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de sécurité,
AUX MOTIFS QUE « 5. Sur le manquement à l'obligation de sécurité et le préjudice de santé.
Mme [Y] [H] s'est trouvée en congé maladie à compter du 10 juillet 2017 ; il ressort des certificats établis par le Docteur [X] [A], psychiatre, ainsi que par le courrier établi par celui-ci le 20 avril 2018, que la dégradation de l'état de santé psychologique de Mme [H] est d'origine professionnelle, et que cette dégradation est contemporaine aux griefs formés par la salariée à l'encontre de l'employeur et analysés précédemment ; en s'abstenant de répondre aux demandes légitimes de sa salariée, la société GRTgaz a manqué à son obligation de sécurité telle qu'elle découle des dispositions du 4° de l'article L 4121-1 du code du travail. Il convient d'indemniser le préjudice subi par Mme [H], que la cour évalue au regard des pièces médicales du dossier à la somme de 5000 euros »,
ALORS QUE l'employeur ne peut être condamné à indemniser un préjudice que si l'existence d'un lien de causalité entre ce préjudice et un manquement de l'employeur à ses obligations est caractérisée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a accordé 5 000 euros de dommages et intérêts à Mme [H] pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité au prétexte qu'il ressortait des affirmations d'un médecin psychiatre que la dégradation de l'état de santé psychologique de Mme [H] était d'origine professionnelle et que cette dégradation était contemporaine aux griefs formés par la salariée à l'encontre de l'employeur ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à établir un lien de causalité entre un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et le préjudice réparé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail. Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme [H], demanderesse au pourvoi n° Q 20-20.517
Mme [H] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que sa demande principale tendant à se voir classée sur la base du GF 14 NR 285 et à se voir payer des rappels de rémunération consécutifs à ce reclassement était prescrite ;
1°) ALORS QUE le délai de prescription des salaires, qui est de trois ans en application de l'article L. 3245-1 du code du travail issu de la loi n° 2013-501 du 14 juin 2013, court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible ; que la prescription triennale instituée par cet article s'applique à toute action afférente au salaire, dont l'action tendant au versement, à la suite d'une reclassification conventionnelle au niveau pertinent en fonction de la qualification du salarié pour mettre fin à une inégalité de traitement établie ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a cru pouvoir affirmer que la demande de Mme [H] " se fonde sur le fait qu'elle a été recrutée à compter du 4 février 2011 dans le cadre du programme "jeunes cadres" " (arrêt, p. 5 § 6), pour en déduire qu'ayant " eu connaissance des conditions de son recrutement, et donc de son classement professionnel et de son niveau de rémunération d'embauche à la date de celle-ci", sa demande tendant à être reclassée au niveau GF 14 NR 285 était" prescrite "(arrêt, p. 5 § 8 et 9) ; qu'en statuant ainsi, tandis que le point de départ de la prescription courrait à compter de la date d'exigibilité des salaires, comprise comme la connaissance effective de Mme [H] à l'été de 2015 de l'inégalité de traitement dont elle faisait l'objet depuis son recrutement, la cour d'appel a violé l'article L. 3245-1 du code du travail par refus d'application et l'article L. 1471-1 du même code par fausse application ;
2°) ALORS, en tout état de cause, QUE la demande en paiement d'un rappel de salaires se prescrit par trois ans à compter du jour où le salarié a eu connaissance des faits lui permettant de l'exercer ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ; qu'en statuant comme elle l'a fait en l'espèce, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si ce n'était non pas la date d'embauche de Mme [H] qui avait constitué le point de départ de la prescription de son action mais sa "connaissance de la différence de traitement", laquelle est " intervenue à l'été 2015 lorsqu'elle a fait le bilan de son évolution de carrière dans le contingent "jeune cadre" "(conclusions d'appel, p. 13), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 3245-1 du code du travail.