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23/10/2006 | FRANCE | N°06-03.5

France | France, Cour de cassation, Autre, 23 octobre 2006, 06-03.5


INFIRMATION PARTIELLE sur les recours formés par M. Chedli X..., l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Paris en date du 22 mars 2006 qui a alloué à M. Chedli X... une indemnité de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral sur le fondement de l'article 149 du code de procédure pénale.



LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,


Attendu que, par décision du 22 mars 2006, le premier président de la cour d'appel de Paris a alloué à M. X... la somme de 3 000 euros en réparation du préj

udice moral subi à raison d'une détention provisoire de deux mois et vingt-six jours ...

INFIRMATION PARTIELLE sur les recours formés par M. Chedli X..., l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Paris en date du 22 mars 2006 qui a alloué à M. Chedli X... une indemnité de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral sur le fondement de l'article 149 du code de procédure pénale.

LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,

Attendu que, par décision du 22 mars 2006, le premier président de la cour d'appel de Paris a alloué à M. X... la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral subi à raison d'une détention provisoire de deux mois et vingt-six jours effectuée du 29 janvier 2002 au 23 avril 2002, pour des faits ayant conduit à une décision de non-lieu devenue définitive ; qu'il a en revanche rejeté sa demande au titre du préjudice matériel ;

Attendu que M. X... a formé le 30 mars 2006 un recours contre cette décision pour obtenir diverses sommes au titre de son préjudice matériel, 3 000 euros au titre d'un préjudice corporel, 15 000 euros au titre de son préjudice moral et 4 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor, qui avait déposé un recours le 3 avril 2006, s'est désisté le 19 mai 2006 ; qu'il a conclu au rejet du recours de M. X... ;

Attendu que l'avocat général a conclu au rejet du recours en ce qui concerne le préjudice matériel et corporel mais s'est déclaré favorable à une réévaluation du préjudice moral ;

Vu les articles 149 à 150 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ; que cette indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral, causé par la privation de liberté ;

Sur le préjudice matériel :

Attendu que le premier président a estimé que le requérant ne justifiait d'aucune perte de revenus, d'autant qu'il avait indiqué être en arrêt de travail au moment de son placement en détention, et qu'il ne rapportait pas davantage la preuve des frais de déplacement exposés par son épouse ni des honoraires d'avocat ;

Attendu que M. X... expose qu'il organisait un pèlerinage pour ses coreligionnaires à la Mecque au moment où il a été incarcéré et sollicite l'allocation d'une somme de 9 000 euros correspondant aux sommes qu'il a dû dépenser pour réserver des chambres dans des hôtels ;

Mais attendu que les seuls documents produits ne permettent pas d'établir les réservations alléguées et le versement des sommes indiquées ;

Attendu que les frais de déplacement exposés par la famille ne constituent pas un préjudice personnel ouvrant droit à réparation sur le fondement de l'article 149 du code de procédure pénale ;

Attendu que les frais de cantine dont le requérant demande le remboursement à hauteur de 690,45 euros ne peuvent pas être pris en compte, dès lors que ces dépenses auraient été exposées également en dehors du milieu carcéral par la personne pour son entretien courant ;

Attendu en revanche que M. X... est fondé à demander le remboursement de son billet de retour sur Marseille après sa levée d'écrou soit 63,10 euros ainsi que des honoraires d'avocat qui sont justifiés et liés à la détention pour un montant de 1 350 euros ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence d'accueillir partiellement le recours de M. X... et de lui allouer, en réparation de son préjudice matériel, la somme de 1 413,10 euros ;

Sur le préjudice moral :

Attendu que pour limiter ce poste de préjudice à 3 000 euros le premier président a pris en compte, outre l'âge de l'intéressé et la durée de la détention, le fait que son épouse était enceinte d'un enfant né le 18 juillet 2002 et son absence d'incarcération antérieure ; qu'il a en revanche considéré que M. X... ne rapportait pas la preuve que la détention soit à l'origine des troubles de santé invoqués ;

Attendu que le requérant, qui demande 3 000 euros à ce seul titre, invoque également l'atteinte portée à sa réputation et l'impossibilité de se rendre dans son pays d'origine où, compte tenu de la nature de la poursuite, il serait désormais fiché comme radicaliste ;

Mais attendu qu'en l'absence de lien direct et exclusif avec la détention, ces deux éléments, qui sont rattachés à la nature de l'infraction, ne sauraient ouvrir droit à réparation ;

Attendu en revanche que les certificats médicaux produits par l'intéressé démontrent la réalité d'un état anxio-dépressif dû à la détention, se traduisant par des troubles du sommeil et du comportement ;

Que compte tenu des facteurs d'aggravation déjà retenus par le premier président, et notamment l'éloignement de la famille, il convient d'accueillir le recours de M. X... de ce chef et de fixer à 10 500 euros l'indemnité réparant intégralement son préjudice moral ;

Sur le préjudice corporel :

Attendu que les troubles de santé se traduisant par un état anxio-dépressif ayant été pris en compte pour l'évaluation du préjudice moral, ne peuvent être encore être indemnisés à ce titre ;

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens :

Attendu que les frais irrépétibles exposés devant le premier président ont été équitablement réparés par l'allocation d'une somme de 1 000 euros ; qu'il convient de rejeter le recours de M. X... à ce titre ;

Attendu que l'équité commande de lui allouer 2 000 euros à ce titre pour la procédure de recours devant la commission nationale et de laisser les dépens à la charge du Trésor public ;

Par ces motifs :

DONNE acte à l'agent judiciaire du Trésor de ce qu'il se désiste de son recours ;

ACCUEILLE partiellement le recours de M. Chedli X... et statuant à nouveau ;

ALLOUE à M. Chedli X... les sommes de 1 413,10 euros (mille quatre cent treize euros et dix centimes) au titre de son préjudice matériel et de 10 500 euros (dix mille cinq cents euros) au titre de son préjudice moral ;

REJETTE le recours pour le surplus ;

Lui ALLOUE la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

LAISSE les dépens à la charge du Trésor public.


Synthèse
Formation : Autre
Numéro d'arrêt : 06-03.5
Date de la décision : 23/10/2006

Analyses

Les frais de cantine dont le requérant demande le remboursement ne peuvent être pris en compte, dès lors qu'ils auraient également été exposés pour son entretien courant en dehors du milieu carcéral.

reparation a raison d'une detention - préjudice - préjudice matériel - réparation - préjudice économique - frais qui auraient été exposés en dehors du milieu carcéral (non).


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 2006-03-22


Publications
Proposition de citation : Cass. Autre, 23 oct. 2006, pourvoi n°06-03.5, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:06.03.5
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