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12/06/2006 | FRANCE | N°05-07.1

France | France, Cour de cassation, Autre, 12 juin 2006, 05-07.1


SAISINE DE LA COUR DE REVISION de la demande présentée par X... Béatrice, épouse Y..., et tendant à la révision de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 13 mai 2004, qui, pour homicide involontaire et défaut de maîtrise, l'a condamnée à six mois d'emprisonnement avec sursis, à l'annulation de son permis de conduire avec interdiction d'en solliciter un nouveau avant l'expiration d'un délai de trois ans, ainsi qu'à une amende de 250 euros ; ainsi qu'à la suspension de l'exécution de cette condamnation.



LA COMMISSION DE REVISION,


Vu la

demande susvisée ;


Vu les articles 622 et suivants du code de procédure pénale ;...

SAISINE DE LA COUR DE REVISION de la demande présentée par X... Béatrice, épouse Y..., et tendant à la révision de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 13 mai 2004, qui, pour homicide involontaire et défaut de maîtrise, l'a condamnée à six mois d'emprisonnement avec sursis, à l'annulation de son permis de conduire avec interdiction d'en solliciter un nouveau avant l'expiration d'un délai de trois ans, ainsi qu'à une amende de 250 euros ; ainsi qu'à la suspension de l'exécution de cette condamnation.

LA COMMISSION DE REVISION,

Vu la demande susvisée ;

Vu les articles 622 et suivants du code de procédure pénale ;

Mme Y... circulait le 20 janvier 2001, vers 10 heures, lorsqu'elle a heurté, avec l'avant droit de son véhicule, un piéton, M. René Z..., âgé de 80 ans, qui traversait la chaussée de sa gauche vers sa droite. Le piéton, projeté à plusieurs mètres, devait succomber le jour même à ses blessures.

Les policiers qui se sont transportés sur les lieux ont relevé que l'accident s'était produit en agglomération, au niveau d'un passage pour piétons réglementé par un feu tricolore, sur la voie de droite d'une chaussée rectiligne, bordée par des haies de 1,20 mètre, comprenant, dans le sens de circulation de Mme Y..., trois voies de 3,40 mètres chacune, que la visibilité y était bonne, qu'à 75 mètres avant le passage protégé étaient implantés des panneaux indiquant ce passage et rappelant la vitesse maximale autorisée, de 50 kilomètres/heure, qu'enfin le véhicule de Mme Y... avait laissé, avant le passage protégé et jusqu'à la limite de ce passage, des traces de freinage de 14,60 mètres.

Mme Y... a déclaré avoir été surprise par le piéton qui aurait "débouché des fourrés" sans emprunter le passage protégé alors qu'elle bénéficiait du feu vert. Elle affirme avoir tenté de l'éviter en se déportant sur la gauche, le percutant ainsi avec son avant droit.

Une automobiliste qui la suivait, Mme Sylvie A..., a confirmé ses dires sur les circonstances de la collision tout en indiquant : " Je n'ai pas souvenir exact de la position exacte du piéton par rapport au passage protégé mais je pense qu'il se trouvait au dehors. Par contre, je suis certaine que le feu était au vert pour les véhicules ".

Deux autres témoins, Mme Marie-Claude B... et M. Michel C..., qui se trouvaient sur le trottoir, ont affirmé que la victime avait été heurtée par la voiture sur le passage protégé, Mme B... confirmant que le feu était vert pour les véhicules, M. C... insistant sur la vitesse excessive de la voiture de Mme Y...

La cour d'appel, en l'état de ces témoignages mentionnant notamment que le feu était au vert pour les véhicules, a considéré qu'il n'était pas démontré que le piéton ait été régulièrement engagé dans la traversée de la chaussée et a relaxé en conséquence Mme Y... du chef de refus de priorité à un piéton régulièrement engagé dans la traversée d'une chaussée. Mais elle a relevé qu'il appartenait à la conductrice de rester constamment, en application de l'article R. 413-17 du code de la route, maître de sa vitesse et de régler cette dernière en fonction de l'état de la chaussée, des difficultés de la circulation et de l'obstacle prévisible que constitue un piéton traversant la chaussée en agglomération à hauteur d'un passage protégé annoncé par un panneau. La cour d'appel a retenu qu'une vitesse adaptée à l'approche d'un tel passage, fût-il réglementé par un feu, aurait permis à la prévenue, circulant sur voie de droite d'une chaussée comprenant trois voies de 3,40 mètres chacune, d'éviter un piéton âgé de 80 ans traversant ladite chaussée de sa gauche vers sa droite. Elle a considéré en conséquence que le manquement commis par Mme Y... aux obligations de prudence et de sécurité prévues par l'article susvisé était la cause directe de l'accident au cours duquel René Z... a trouvé la mort. La cour d'appel a confirmé le jugement du tribunal correctionnel en ce qu'il a déclaré Mme Y... coupable d'homicide involontaire et de conduite d'un véhicule à une vitesse excessive eu égard aux circonstances.

La demande de révision :

A l'appui de sa demande de révision, Béatrice Y... invoque, à titre de fait nouveau au sens de l'article 622 4° du code de procédure pénale, la découverte que Michel C... a fait un faux témoignage.

En effet, il résulte de la procédure, diligentée suite à la plainte déposée par Mme Y... le 20 décembre 2004, que Michel C... a reconnu avoir fait un faux témoignage. Il indiquait en effet, le 5 janvier 2005, aux enquêteurs qu'il n'était pas présent sur les lieux de l'accident et que la famille Z..., avec laquelle il entretenait des relations suivies, est venue lui demander, en raison de l'absence de témoin, de " faire des déclarations pour les assurances, afin que celles-ci les indemnisent correctement ". Il ajoutait que tout ce qu'il avait pu dire sur l'accident lui avait été dicté par la famille Z... En l'état des pièces versées à l'appui de la présente requête en révision, les suites données à cette procédure par le parquet de Toulon ne sont pas connues à ce jour.

Dans le cadre de la procédure diligentée à la suite de l'accident, Michel C... s'était présenté spontanément, le 26 janvier 2001, à la suite d'un appel à témoins lancé par les policiers. Il avait alors déclaré qu'il faisait son jogging sur le trottoir, lorsqu'une voiture rouge est arrivée à très vive allure, à au moins 90 kilomètres à l'heure, qu'il a été surpris par le bruit du moteur qui tournait à haut régime et par la grande vitesse du véhicule, qu'il a vu un piéton sur le passage protégé lequel a été, à la suite d'un choc très violent avec la voiture, projeté à plusieurs mètres.

La demande de révision fait valoir que ce faux témoignage, pris en considération par la cour d'appel, a exercé une influence directe sur la déclaration de culpabilité.

Discussion :

La révélation d'un faux témoignage résultant des aveux du témoin corroborés par d'autres éléments de fait ne saurait donner ouverture à révision sur le fondement du troisième paragraphe de l'article 622 si le faux témoignage n'a pas fait l'objet de poursuites suivies d'une condamnation, mais elle peut constituer un fait nouveau au sens du paragraphe 4 de ce texte.

Quant à l'appréciation de l'influence du faux témoignage sur la condamnation et de l'opportunité de procéder à de nouveaux débats, elle dépend de l'analyse des autres charges qui pèsent sur le condamné. En l'espèce, il apparaît que l'enquête complémentaire effectuée par la police en 2005 a non seulement révélé que Michel C... n'avait pas été témoin de l'accident, mais que deux autres témoins ont apporté un éclairage nouveau, voire différent, sur les circonstances de l'accident.

Mme Sylvie A..., qui avait été entendue succinctement en 2001, a précisé, le 13 janvier 2005, que la voiture venait de démarrer au feu devant elle, qu'elle roulait à environ 40, 50 kilomètres à l'heure et que le comportement du piéton avait rendu l'accident inévitable.

Mme Marie-Claude B..., avait déclaré le 22 janvier 2001 que le piéton était sur le passage protégé, et qu'elle a entendu un violent coup de frein et senti une odeur de caoutchouc lorsque le piéton a été projeté en l'air ; elle a indiqué le 18 janvier 2005 que la voiture, qui circulait sur la voie du milieu ne roulait pas vite, et ne confirmait pas avoir senti une odeur de caoutchouc brûlé.

En cet état ;

Attendu qu'il apparaît que le faux témoignage reconnu par Michel C... sur les circonstances de l'accident justifie la saisine de la chambre criminelle, statuant comme cour de révision, sur l'ensemble des infractions dont Béatrice Y... a été déclarée coupable, en raison de l'indivisibilité existant entre le délit d'homicide involontaire et la contravention de défaut de maîtrise ; qu'il convient de suspendre l'exécution de la condamnation ;

Par ces motifs :

DIT qu'il y a lieu de saisir la chambre criminelle de la Cour de cassation, statuant comme cour de révision ;

SUSPEND l'exécution de la condamnation.


Synthèse
Formation : Autre
Numéro d'arrêt : 05-07.1
Date de la décision : 12/06/2006

Analyses

Constitue un fait nouveau, au sens de l'article 622 4° du code de procédure pénale, justifiant la saisine de la cour de révision, la révélation d'un témoignage mensonger sur les circonstances d'un accident, fait par une personne qui a reconnu, postérieurement à la condamnation, qu'elle n'était pas sur les lieux lors des faits auxquels elle n'avait pas assisté.

revision - cas - fait nouveau ou élément inconnu de la juridiction au jour du procès - définition - rétractation d'un témoin - recevabilité - contravention - conditions - indivisibilité avec un délit.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2004-05-13


Publications
Proposition de citation : Cass. Autre, 12 jui. 2006, pourvoi n°05-07.1, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.07.1
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