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11/10/2004 | FRANCE | N°04-01.1

France | France, Cour de cassation, Autre, 11 octobre 2004, 04-01.1


INFIRMATION PARTIELLE sur le recours formé par l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Dijon en date du 20 janvier 2004 qui a alloué à M. Jean X... les indemnités de 13 500 euros au titre de son préjudice moral et de 14 288,88 euros au titre de son préjudice matériel sur le fondement de l'article 149 du Code précité.



LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,


Attendu que par décision du 20 janvier 2004 le premier président de la cour d'appel de Dijon a alloué à M. X... les sommes de 13 500

euros en réparation de son préjudice moral, de 3 353,88 euros au titre des intérêts...

INFIRMATION PARTIELLE sur le recours formé par l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Dijon en date du 20 janvier 2004 qui a alloué à M. Jean X... les indemnités de 13 500 euros au titre de son préjudice moral et de 14 288,88 euros au titre de son préjudice matériel sur le fondement de l'article 149 du Code précité.

LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,

Attendu que par décision du 20 janvier 2004 le premier président de la cour d'appel de Dijon a alloué à M. X... les sommes de 13 500 euros en réparation de son préjudice moral, de 3 353,88 euros au titre des intérêts perdus d'une somme saisie par le juge d'instruction et de 10 935 euros au titre de salaires perdus, à raison d'une détention provisoire de huit mois et quinze jours effectuée du 24 octobre 1992 au 9 juillet 1993 ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor a régulièrement formé le 29 janvier 2004 un recours contre cette décision pour contester la recevabilité de la requête et subsidiairement obtenir le rejet de la demande d'indemnisation du préjudice matériel et la diminution de l'indemnité allouée en réparation du préjudice moral ;

1° Sur la recevabilité du recours :

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor fait valoir que M. X... a déposé sa requête aux fins d'indemnisation en 2003 soit plus de six mois après l'arrêt d'acquittement rendu le 28 septembre 2000 par la cour d'assises de Saône-et-Loire et que faute pour lui de produire le procès-verbal des débats prévu à l'article 378 du Code de procédure pénale démontrant que l'information sur son droit de demander réparation ne lui a pas été donnée ;

Attendu qu'en application de l'article 149-1 du Code de procédure pénale tel que modifié par la loi du 15 juin 2000, lorsque la décision de non-lieu de relaxe ou d'acquittement lui est notifiée, la personne est avisée de son droit de demander une indemnisation ainsi que des dispositions de l'article 149-1 du même Code qui précisent que la requête aux fins d'indemnisation doit parvenir au greffe dans le délai de six mois à compter de la date à laquelle cette décision est devenue définitive ;

Que l'article R. 26 du Code de procédure pénale dans sa rédaction issue du décret du 12 décembre 2000 entré en vigueur le 16 décembre 2000 prévoit que le délai prévu à l'article 149-1 ne court que si lors de la notification de cette décision la personne a été avisée de son droit de demander une réparation ainsi que des dispositions des articles 149-1, 149-2 et 149-3, alinéa premier, du même Code ;

Attendu que l'arrêt de la cour d'assises ayant été notifié à l'intéressé le 27 juin 2002, il importe peu de connaître les mentions du procès-verbal des débats de la cour d'assises, que M. X... n'a d'ailleurs pas en sa possession ; que dès lors que cette notification ne comporte pas la mention de l'information prévue par les articles précités, le délai de six mois n'a pas couru et la requête a été à bon droit déclarée recevable ;

2° Sur la réparation :

Vu les articles 149 à 150 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ;

Que, selon l'article 149 précité, l'indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral causé par la privation de liberté ;

a) sur le préjudice matériel :

sur la perte de salaire :

Attendu que le premier président, après avoir constaté que M. X... ne produisait qu'un avis de non-imposition pour 1993 et qu'il ne versait aucune pièce établissant l'origine de ses revenus avant sa détention, a retenu que l'intéressé qui ne disposait cependant pas de revenus, justifiait d'une perte de chance d'occuper un emploi et lui a alloué une somme de 10 935 euros correspondant aux montants du salaire minimum auquel il aurait pu prétendre durant sa détention ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor critique cette motivation et soutient que M. X... ne justifie pas de son préjudice matériel ni d'une perte de chance, faute de prouver qu'il percevait des salaires avant son incarcération ;

Attendu qu'il appartient à celui qui invoque un préjudice de le prouver ; que M. X... ne justifiant pas avoir perçu de revenus avant son incarcération ne peut obtenir aucune indemnisation au titre d'une perte de chance d'occuper un emploi ; que sa demande doit être rejetée ;

sur les intérêts d'une somme saisie :

Attendu que le premier président a alloué à M. X... une somme de 3 353,88 euros au titre des intérêts d'une somme de 90 000 francs qui avait été saisie par le juge d'instruction ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor soutient que cette indemnisation n'est pas justifiée ;

Attendu que seul le préjudice causé par la détention doit être indemnisé ; que la perte des intérêts d'une somme de 90 000 francs qui a été saisie au début de la procédure d'instruction est sans lien de cause à effet avec la détention ; que, dès lors, la demande doit être rejetée ;

b) sur le préjudice moral :

Attendu que le premier président, après avoir constaté que le préjudice moral était incontestable bien que M. X... ait été incarcéré auparavant à plusieurs reprises, lui a alloué une somme de 1 500 euros par mois de détention, soit 13 500 euros ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor soutient que le montant alloué arbitrairement à M. X... sans préciser les éléments de son préjudice et sans tenir compte de sa personnalité et de ses précédentes incarcérations est excessif et en tout cas erroné, le montant retenu de 1 500 euros par mois s'élevant en réalité à 12 750 euros ;

Attendu que M. X... sollicite la confirmation de la décision en soulignant notamment qu'il a été séparé de son épouse et de ses deux enfants et qu'il a vécu dans l'angoisse en sachant sa famille complètement démunie ;

Attendu que compte tenu de l'âge de M. X... au moment de son incarcération (49 ans) de la durée de la détention (huit mois et quinze jours), de la séparation d'avec son épouse et ses enfants, mais également de ses précédentes incarcérations, il apparaît que le montant de 12 750 euros tel qu'il résulte de la décision du premier président, est de nature à indemniser intégralement le préjudice moral de l'intéressé ;

Par ces motifs :

ACCUEILLE partiellement le recours de l'agent judiciaire du Trésor ;

DIT que le montant alloué au titre du préjudice moral s'élève à 12 750 euros (douze mille sept cent cinquante euros) ;

REJETTE la demande d'indemnisation du préjudice matériel de M. X... ;

REJETTE le recours pour le surplus.


Synthèse
Formation : Autre
Numéro d'arrêt : 04-01.1
Date de la décision : 11/10/2004

Analyses

En application des articles 149 et R. 26 du Code de procédure pénale, le bénéficiaire d'une décision de non-lieu de relaxe ou d'acquittement doit être avisé lors de la notification de cette décision de son droit de demander une réparation ainsi que des dispositions des articles 149-1 à 149-3 (premier alinéa) du même Code qui précisent notamment que la requête aux fins d'indemnisation doit parvenir au greffe dans le délai de six mois à compter de la date à laquelle cette décision est devenue définitive. A défaut de mention de cette information, le délai de six mois ne peut commencer à courir et la requête déposée au-delà du délai doit être déclarée recevable.

reparation a raison d'une detention - recours devant le premier président de la cour d'appel - requête - délai - point de départ - notification de la décision - conditions - notification comportant la mention du droit de demander réparation et des dispositions des articles 149 - 1 à 149 - 3 du code de procédure pénale.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 2004-01-20


Publications
Proposition de citation : Cass. Autre, 11 oct. 2004, pourvoi n°04-01.1, Bull. civ.Publié au
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Publié au

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:04.01.1
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