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10/05/2004 | FRANCE | N°03-05.8

France | France, Cour de cassation, Autre, 10 mai 2004, 03-05.8


La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :

Statuant sur les recours formés par :

- M. Roland X...


- L'agent judiciaire du Trésor

contre la décision du premier président de la cour d'appel d'Aix en Provence en date du 24 juin 2003 qui a alloué à M. X... une indemnité de 5.500 euros au titre de son préjudice moral sur le fondement de l'article 149 du Code précité et 920 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;<

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Les débats ayant eu lieu en audience publique le 5 avril 2004 le demandeur et son avocat ...

La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :

Statuant sur les recours formés par :

- M. Roland X...

- L'agent judiciaire du Trésor

contre la décision du premier président de la cour d'appel d'Aix en Provence en date du 24 juin 2003 qui a alloué à M. X... une indemnité de 5.500 euros au titre de son préjudice moral sur le fondement de l'article 149 du Code précité et 920 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Les débats ayant eu lieu en audience publique le 5 avril 2004 le demandeur et son avocat ne s'y étant pas opposé ;

Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;

Vu les conclusions de M. Marchiani, avocat au barreau de Marseille représentant M. X... ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;

Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de Cassation ;

Vu les conclusions en réponse de M. Marchiani, avocat de M. X... ;

Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur et à l'agent judiciaire du Trésor, un mois avant l'audience ;

Sur le rapport de M. le conseiller Bizot, les observations de M. Marchiani, avocat assistant M. X..., celles de M. X..., comparant et de Mme Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Finielz, le demandeur et son avocat ayant eu la parole en dernier ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;

LA COMMISSION :

Attendu que par décision du 24 juin 2003, le premier président de la cour d'appel d'Aix en Provence a alloué à M. X... une somme de 5.500 euros en réparation du préjudice moral, à raison d'une détention provisoire de un mois et12 jours effectuée du 6 novembre 1992 au 18 décembre 1992 et l'a débouté de sa demande de réparation du préjudice matériel ;

Attendu que M. X... et l'agent judiciaire du Trésor ont régulièrement formé un recours contre cette décision, tendant, pour le premier à l'augmentation de la somme réparant le préjudice moral et à l'allocation d'une indemnité au titre du préjudice matériel, pour le second à la réduction de l'indemnité réparant le préjudice moral ;

Vu les articles 149 à 150 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ;

Que, selon l'article 149 précité, l'indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral causé par la privation de liberté ;

Attendu que M. X... réclame une indemnité globale de 274.227,20 euros ; qu'il sollicite au titre du préjudice matériel la perte de ses rémunérations sur l'exercice 1992/1993, soit 134.000 euros, dont 9.903,35 euros au titre de la période de détention, ainsi que 59.427,20 euros au titre de sa retraite, outre la perte à la revente du fonds d'entreprise société X... dont il était le co-gérant ; qu'il réclame 77.000 euros au titre du préjudice moral, en invoquant le choc psychologique de l'incarcération, une dépression nerveuse, son divorce, sa réputation ternie par la médiatisation et un sentiment d'injustice ; qu'il réclame encore 3.048 euros au titre des frais de défense et 3.800 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code procédure civile ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor fait valoir que le montant de l'indemnité réparant le préjudice moral pour quarante deux jours de détention provisoire tel que fixé par le premier président est excessif et doit être réduit ;

Sur le préjudice moral :

Attendu que l'article 149 précité ne réparant que le préjudice moral causé par la détention, il s'ensuit que n'entrent pas dans le champ d'application de ces dispositions spéciales les dommages résultant de la publication d'articles de presse mettant en cause le requérant, même s'ils relatent son arrestation, sa mise en examen et son incarcération et s'ils portent atteinte à la présomption d'innocence dont il bénéficie ; que dès lors, c'est à juste titre que, pour apprécier l'étendue du préjudice moral de M. X..., le premier président a exclu les effets de la médiatisation de l'affaire ;

Attendu par ailleurs qu'en l'absence de lien direct démontré entre l'incarcération subie par M. X... en novembre et décembre 1992 et son divorce prononcé en 1995 ou son état de santé postérieurement à sa remise en liberté, le premier président a exclu à bon droit ces événements personnels de l'appréciation du préjudice moral subi par le requérant ;

Attendu que compte tenu de l'âge de M. X... lors de l'incarcération et de la circonstance qu'il n'avait pas d'antécédents en matière de privation de liberté, l'indemnité allouée par le premier président au titre du choc carcéral et de la durée de la détention répare intégralement le préjudice moral qu'il a subi ; que les recours de l'agent judiciaire du Trésor et de M. X... de ce chef doivent être rejetés ;

Sur le préjudice matériel :

Attendu sur les pertes de salaires, que les pièces produites par M. X... sont insuffisantes à établir d'une part qu'il a été privé de son salaire de co-gérant de la société X... durant le temps de l'incarcération, d'autre part que les pertes de salaires et de retraite qu'il allègue pour les périodes postérieures à la détention provisoire sont sans relation causale directe et certaine avec la privation de liberté ; qu'il s'ensuit que la décision déférée doit être approuvée en ce qu'elle a débouté M. X... de ces chefs de demandes ;

Attendu, sur les pertes financières, que selon les pièces produites, la société X... a été dissoute et liquidée amiablement à partir du 15 janvier 1998 ; qu'il n'est pas établi de lien direct et certain entre cet événement relevant de la volonté des associés et l'incarcération de quarante deux jours de M. X..., co-gérant minoritaire, survenue plus de cinq années auparavant ;

que dès lors c'est à bon droit que le premier président a rejeté la demande de M. X... tendant à l'indemnisation des pertes financières qu'il prétend avoir subies en qualité d'associé de cette société au titre d'une diminution de dividendes et de la vente du fonds d'entreprise ;

Attendu sur les frais d'avocat, que seuls peuvent être pris en compte au titre de la réparation du préjudice matériel les frais de défense directement liés à l'incarcération, en particulier au titre des visites à l'établissement pénitentiaire et des prestations de l'avocat tendant, par des demandes de mise en liberté, à mettre fin à la privation de liberté ; que ces frais doivent être justifiés par la production de factures ou du compte détaillé que doit établir l'avocat avant tout règlement définitif en application de l'article 245 du décret n 91-1197 du 27 novembre 1991 ; qu'en l'espèce, la demande de M. X... n'est accompagnée d'aucune pièce propre à satisfaire à ces exigences, et ne peut donc qu'être rejetée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le recours de M. Roland X....

REJETTE le recours de l'agent judiciaire du Trésor.

REJETTE la demande de M. Roland X... au titre de l'article 700 du nouveau Code procédure civile.

LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public.

Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique par la Commission Nationale de réparation des détentions, le 10 mai 2004 où étaient présents : M. Canivet, président, M. Bizot, conseiller rapporteur, Mme Nési, conseiller référendaire, M Finielz, avocat général, Mme Grosjean, greffier.

En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier.


Synthèse
Formation : Autre
Numéro d'arrêt : 03-05.8
Date de la décision : 10/05/2004

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence 2003-06-24


Publications
Proposition de citation : Cass. Autre, 10 mai. 2004, pourvoi n°03-05.8, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.05.8
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