La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/02/2004 | FRANCE | N°03CRD053

France | France, Cour de cassation, Commission reparation detention, 06 février 2004, 03CRD053


INFIRMATION sur le recours formé par l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Versailles, en date du 27 juin 2003, qui a alloué à M. Alain X... une indemnité de 110 848,26 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité.

LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,

Attendu que par décision du 27 juin 2003, le premier président de la cour d'appel de Versailles a alloué à M. X... la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral et 80 848,26 euros au titre de son préjudice matériel à la suite d'

une détention provisoire effectuée du 10 juillet 1998 au 19 novembre 1999, d...

INFIRMATION sur le recours formé par l'agent judiciaire du Trésor, contre la décision du premier président de la cour d'appel de Versailles, en date du 27 juin 2003, qui a alloué à M. Alain X... une indemnité de 110 848,26 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité.

LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,

Attendu que par décision du 27 juin 2003, le premier président de la cour d'appel de Versailles a alloué à M. X... la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral et 80 848,26 euros au titre de son préjudice matériel à la suite d'une détention provisoire effectuée du 10 juillet 1998 au 19 novembre 1999, d'une durée de seize mois et neuf jours ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor a formé un recours contre cette décision, tendant à la réduction de l'indemnité accordée au titre du préjudice matériel ;

Qu'en réponse M. X... conclut au rejet du recours de l'agent judiciaire du Trésor et sollicite l'augmentation des sommes accordées au titre de ses préjudices matériel et moral ;

I. Sur la recevabilité du recours incident formé par M. X... :

Attendu que par conclusions déposées le 23 octobre 2003 M. X..., après avoir conclu au rejet du recours de l'agent judiciaire du Trésor, reprend sa demande initiale en paiement d'une somme de 60 000 euros au titre de son préjudice moral et sollicite la fixation de son préjudice matériel à 171 696,52 euros ;

Mais attendu que M. X... n'a pas saisi la Commission d'un recours personnel dans le délai imposé par l'article 149-3 du Code de procédure pénale et dans les formes exigées par l'article R. 40-4 dudit Code ; que, par suite, sont irrecevables les demandes de l'intéressé formées dans l'instance introduite par le seul recours de l'agent judiciaire du Trésor ;

II. Sur le recours de l'agent judiciaire du Trésor :

Attendu que pour fixer à 80 848,26 euros la somme réparant le préjudice économique de M. X..., le premier président a retenu qu'il percevait un salaire mensuel moyen net de 2 994,38 euros avant sa détention, qu'il a été licencié au cours de sa détention et que la période indemnisable, s'étend, outre la période d'incarcération, au temps normalement nécessaire pour retrouver un salaire, soit un an compte tenu de son âge et de sa profession ; que les pertes de salaires s'élèvent à 2 294,31 euros pour le mois de juillet 1998, compte tenu des sommes déjà versées et 2 994,38 euros pour les vingt-sept mois suivants, les indemnités de congés payés n'ayant pas à être déduites de la réparation due ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor demande la déduction des sommes que le requérant a perçues pendant sa période de détention, en relation avec son activité salariée correspondant au salaire des dix premiers jours de juillet, aux congés payés et aux indemnités de licenciement versées en août et octobre 1998 ; qu'il conteste également la durée d'indemnisation retenue par le premier président de la cour d'appel, au motif que M. X... avait changé à plusieurs reprises d'employeur auparavant, sans jamais attendre une année entière pour retrouver un travail et qu'il a consacré une période importante à étudier la possibilité de racheter une société ;

Mais attendu qu'en fixant à un an, compte tenu de l'âge et de la profession de l'intéressé, le temps normalement nécessaire pour retrouver un emploi, le premier président a fait une évaluation objective et raisonnable du préjudice matériel occasionné à M. X... par un licenciement motivé exclusivement par sa détention ;

Et attendu que les congés payés, qui compensent un avantage dont l'intéressé a été privé alors qu'il l'avait acquis grâce à son activité antérieure à son placement en détention, et les indemnités de licenciement, que la loi impose à l'employeur de verser dès lors qu'il décide de mettre fin au contrat de travail, n'ont pas à être déduites de l'indemnité allouée au titre d'une action autonome en réparation de l'entier préjudice causé par une détention injustifiée ;

Attendu dès lors que la décision du premier président, qui ne retient de perte de revenus qu'à compter du 10 juillet 1998, ne doit être réformée que par la déduction des allocations ASSEDIC perçues par M. X... pour la période allant de novembre 1999 à novembre 2000, et qu'il avait lui-même retirées du montant de sa demande ;

Qu'il y a lieu en conséquence de fixer le préjudice matériel de l'intéressé à la somme de 62 824,15 euros ;

Que le recours de l'agent judiciaire du Trésor est fondé sur ce dernier point ;

Par ces motifs :

DECLARE irrecevables les demandes de M. X... ;

ACCUEILLE le recours formé par l'agent judiciaire du Trésor et alloue à M. X..., au titre de son préjudice matériel, une indemnité de 62 824,15 euros (soixante deux mille huit cent vingt-quatre euros et quinze centimes).


Synthèse
Formation : Commission reparation detention
Numéro d'arrêt : 03CRD053
Date de la décision : 06/02/2004
Sens de l'arrêt : Infirmation

Analyses

1° REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION - Recours devant la Commission nationale - Déclaration de recours - Délai - Non-respect - Portée.

REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION - Recours devant la Commission nationale - Déclaration de recours - Forme - Non-respect - Portée.

1° Lorsque le requérant n'a pas saisi la Commission d'un recours personnel dans le délai imposé par l'article 149-3 du Code de procédure pénale et dans les formes exigées par l'article R. 40-4 dudit Code, les demandes qu'il a formées dans l'instance introduite par le seul recours de l'agent judiciaire du Trésor sont irrecevables.

2° REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION - Préjudice - Préjudice matériel - Appréciation - Critères.

2° Le préjudice matériel occasionné par un licenciement motivé exclusivement par la détention comprend le temps normalement nécessaire pour retrouver un emploi, évalué objectivement en fonction de l'âge et de la profession de l'intéressé. Les congés payés et les indemnités de licenciement n'ont pas à être déduits de l'indemnité qui est allouée au titre d'une action autonome en réparation de l'intégralité du préjudice matériel causé par une détention injustifiée.


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 149
Code de procédure pénale 149-3, R.40-4

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (premier président), 27 juin 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Commission reparation detention, 06 fév. 2004, pourvoi n°03CRD053, Bull. civ. criminel 2004 CNRD N° 1 p. 1
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles criminel 2004 CNRD N° 1 p. 1

Composition du Tribunal
Président : Président : Canivet
Avocat général : Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Nesi
Avocat(s) : Avocats : Me Couturier-Heller, Me Giraud.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03CRD053
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award