La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2003 | FRANCE | N°03-CRD036

France | France, Cour de cassation, Commission reparation detention, 19 décembre 2003, 03-CRD036


La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :

Statuant sur les recours formés par :

- L'agent judiciaire du Trésor

- Kiiko X...

contre la décision du premier président de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 25 avril 2003, qui a alloué à Mme Kiiko X... une somme de 50 000 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité ;

Les débats ayant eu lieu en audience publique le 14 novembre 2003, le demandeur ne s'y étant pas opposé ;

Vu

les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;

Vu les conclusions de Maîtr...

La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :

Statuant sur les recours formés par :

- L'agent judiciaire du Trésor

- Kiiko X...

contre la décision du premier président de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 25 avril 2003, qui a alloué à Mme Kiiko X... une somme de 50 000 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité ;

Les débats ayant eu lieu en audience publique le 14 novembre 2003, le demandeur ne s'y étant pas opposé ;

Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;

Vu les conclusions de Maître Temine, avocat de Mme X... ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;

Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;

Vu la notification de la date d'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur et à l'agent judiciaire du Trésor, en date du 22 octobre 2003 ;

Sur le rapport de M. le Président Gueudet, les observations de Maître Temine et celles de Maître Couturier-Heller, avocat de l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Finielz, l'avocat de Mme X... ayant eu la parole en dernier ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;

LA COMMISSION

Attendu que par décision du 25 avril 2000 le premier président de la cour d'appel de Versailles a alloué à Mme Kiido X... une somme globale de 50 000 euros en réparation des préjudices moral et physique qu'elle a subis, à raison d'une détention provisoire de 11 mois 7 jours effectuée du 19 janvier 1996 au 26 décembre 1996 et a rejeté sa demande d'indemnisation de son préjudice matériel ;

Attendu que Mme X... a régulièrement formé un recours contre cette décision pour obtenir à titre principal une indemnisation de 150 000 euros par jour de détention soit au total 1 683 870, 97 euros et subsidiairement des indemnités de 600 000 euros chacune en réparation de ses préjudices matériel et moral et de 200 000 euros en réparation de son préjudice physique ;

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor a également régulièrement formé un recours contre cette décision pour obtenir une diminution de l'indemnité allouée en réparation du préjudice moral ;

Vu les articles 149 à 150 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ;

Que, selon l'article 149 précité, l'indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral causé par la privation de liberté ;

Sur le préjudice physique :

Attendu que Mme X... fait valoir qu'elle a subi pendant sa détention un préjudice physique résultant de la perte de 9 kilos et de l'apparition d'une ménopause prématurée non traitée ;

Attendu que l'intéressée ne justifie pas du second grief et ne justifie pas que l'amaigrissement qu'elle a subi aurait laissé subsister des séquelles corporelles indemnisables ;

Attendu toutefois que cette perte de poids importante démontre la souffrance morale qu'a subie Mme X... pendant sa détention et sera prise en compte au titre de l' indemnisation du préjudice moral ;

Sur le préjudice moral :

Attendu que Mme X... soutient qu'elle a subi un préjudice moral d'une gravité exceptionnelle qu'elle chiffre globalement avec les autres préjudices à 150 000 euros par journée de détention et à titre subsidiaire à 600 000 euros ;

Attendu qu'il n'est pas établi que l'atteinte à sa réputation provenant d'articles de presse qu'elle qualifie d'ignominieux serait directement causé par sa détention ;

Attendu que selon un examen médico-psychologique pratiqué à la demande du juge d'instruction, Mme X... présentait au jour de l'expertise le 8 octobre 1996 "un état dépressif réactionnel en relation directe avec un isolement et une absence de communication renforcée par une très grande méfiance, troubles consécutifs à la détention", qu'aucune psychothérapie ne pouvait être envisagée compte tenu de la nationalité de l'intéressée qui ne parlait pas le français ; que l'expert soulignait encore que la prolongation de la détention pouvait aboutir à des troubles psychiques notamment des troubles psychosomatiques avec évolution de la méfiance vers la paranoïa ;

Que compte tenu de cet état dépressif, de la perte importante de poids, de l'âge de l'intéressée (51 ans) au moment de son incarcération, de la durée de celle-ci (11 mois et 7 jours) de l'isolement dans lequel elle s'est trouvée en ne parlant pas le français et en étant éloignée des membres de sa famille, l'indemnité réparant l'intégralité de son préjudice moral doit être fixée à 34 000 euros ;

Sur le préjudice matériel :

Attendu que Mme X... sollicite une indemnité de 600 000 euros réparant d'une part une perte des actifs qu'elle détenait dans différentes sociétés, résultant du fait qu'elle n'a pu correctement défendre ses intérêts en raison de son incarcération, d'autre part les frais et honoraires d'avocat qu'elle a du engager pour se défendre ;

Attendu que Mme X... qui était assistée par des conseils dans les différentes affaires l'opposant à son demi frère ne justifie pas que les pertes qu'elle dit avoir subies seraient la conséquence directe de sa détention ;

Que la note d'honoraires émise par le cabinet d'avocats couvre des sommes facturées entre septembre 1996 et mars 1998 et ne comporte pas le détail des prestations fournies en raison de son placement en détention et notamment les visites à l'établissement pénitentiaire et les diligences effectuées pour faire cesser cette situation par des demandes de mise en liberté ;

Qu'ainsi faute pour Mme X... de justifier de son préjudice matériel, la demande doit être rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours de Mme X... ;

Accueille partiellement le recours de l'agent judiciaire du Trésor ;

Alloue à Mme Kiido X... une indemnité de 34 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

Rejette les autres demandes.

Condamne Mme Kiiko X... aux dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique par la Commission Nationale de réparation des détentions, le 19 décembre 2003, où étaient présents : M. Gueudet, président et rapporteur, Mme Karsenty, Mme Gailly, M. Finielz, avocat général, Mme Guénée, greffier.

En foi de quoi la présente décision a été signée par le président et le greffier.


Synthèse
Formation : Commission reparation detention
Numéro d'arrêt : 03-CRD036
Date de la décision : 19/12/2003

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 25 avril 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Commission reparation detention, 19 déc. 2003, pourvoi n°03-CRD036


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gueudet
Avocat général : Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Gueudet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.CRD036
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award