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03/03/2003 | FRANCE | N°02-CRD078

France | France, Cour de cassation, Commission reparation detention, 03 mars 2003, 02-CRD078


La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :

Statuant sur le recours formé par :

- X... Eliane épouse Y...

contre la décision du premier président de la cour d'appel de PARIS, en date du 12 juin 2002, qui lui a alloué la somme de 11 900 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité ;

Les débats ayant eu lieu en audience publique le 10 février 2003, la demanderesse et son avocat ne s'y étant pas opposé ;

Vu les dossiers de la procédure

de réparation et de la procédure pénale ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;...

La Commission Nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du Code de procédure pénale, a rendu la décision suivante :

Statuant sur le recours formé par :

- X... Eliane épouse Y...

contre la décision du premier président de la cour d'appel de PARIS, en date du 12 juin 2002, qui lui a alloué la somme de 11 900 euros sur le fondement de l'article 149 du Code précité ;

Les débats ayant eu lieu en audience publique le 10 février 2003, la demanderesse et son avocat ne s'y étant pas opposé ;

Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;

Vu les conclusions écrites de la SCP PEREZ-SITBON, avocat de Mme Eliane Y... ;

Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;

Vu la notification de la date d'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à la demanderesse et à l'agent judiciaire du Trésor, en date du 30 décembre 2002 ;

Sur le rapport de Mme le Conseiller référendaire Gailly, les observations de Maître Sitbon, avocat de Mme Eliane Y..., celles de Maître Ancel, avocat de l'agent judiciaire du Trésor, et les conclusions de M. l'avocat général Finielz ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;

LA COMMISSION :

Attendu que par décision du 12 juin 2002, le premier président de la cour d'appel de PARIS a alloué à Mme Eliane X... épouse Y... une indemnité de 5 000 euros pour le préjudice moral et une somme de 6900 euros pour le préjudice économique, en réparation de son préjudice résultant d'une détention provisoire effectuée du 11 juin 1993 au 27 août 1993, soit pendant 2 mois et 16 jours ;

Attendu que Mme Eliane X... épouse Y... a régulièrement formé un recours contre cette décision tendant à l'augmentation des sommes réparant ses préjudices ;

Au fond,

Vu les articles 149 à 150 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ;

Que, selon l'article 149 précité, l'indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral causé par la privation de liberté ;

Sur la réparation du préjudice moral :

Attendu que la requérante sollicite la somme de 300 000 euros en exposant qu'elle est a été détenue pendant plus de deux mois, alors que sa fille unique était restée seule au domicile familial, l'incarcération ayant eu lieu la veille des épreuves du baccalauréat, que l'interdiction de toute visite l'a privée du soutien de ses proches alors qu'à l'époque, elle était soignée pour un cancer ;

Attendu que compte tenu de la durée de la détention provisoire, de l'âge de la requérante, de son état de santé justifié et des conditions familiales particulières établies , il convient de fixer à 9 000 euros l'indemnité propre à assurer la réparation intégrale du préjudice moral souffert par Mme Eliane X... épouse Y... ; que le recours doit être accueilli de ce chef ;

Sur la réparation du préjudice matériel :

Attendu que Mme X... épouse Y... réclame, en premier lieu, sous réserve d'une expertise préalable, une indemnité de 500 000 euros au titre de la perte financière consécutive à la liquidation de la société dont elle était l'unique associée et gérante, de 160 000 euros, au titre des revenus qu'elle aurait du percevoir si cette société avait été maintenue en activité et de 100 000 euros au titre des pertes subies lors de la vente au enchères publiques de deux biens immobiliers dont elle était copropriétaire avec son époux ;

Attendu qu'il résulte des pièces produites que la société FORTESCO, dont Mme X... était l'unique associée et gérante, a été mise en liquidation judiciaire le 4 octobre 1993, la date de cessation des paiements ayant été fixée le 10 juin 1993, jour du placement en garde à vue suivie de la détention provisoire de la requérante ;

Que par ailleurs, durant la période de détention, la requérante a cessé de rembourser les prêts consentis pour l'achat de deux biens immobiliers qui, de ce fait, ont été vendus par adjudication à la requête des créanciers ;

Qu'en l'état des justifications produites et des prétentions de la requérante, une mesure d'instruction est nécessaire pour déterminer si la liquidation de la société FORTESCO et la vente des biens immobiliers ont été causés par la détention de l'intéressée, et, dans l'affirmative, d'évaluer, d'une part, le préjudice par elle subi du fait de la liquidation de ladite société, d'autre part , celui résultant de la vente des biens immobiliers ;

PAR CES MOTIFS,

ACCUEILLE le recours de Mme Eliane X... épouse Y... du chef du préjudice moral et, statuant à nouveau, lui alloue de ce chef une somme de 9 000 euros ;

SURSOIT à statuer sur les demandes de Mme Eliane X... épouse Y... tendant à la réparation de son préjudice matériel ;

Vu les articles 156 et suivants , R 40-15 du Code de procédure pénale,

ORDONNE une expertise,

COMMET pour y procéder Monsieur Jean TOURIN, expert près la Cour de cassation, ..., avec pour mission de : 1- Dire si la liquidation de la société FORTESCO a été causée par la détention provisoire de Mme X... épouse Y... et dans l'affirmative, évaluer les préjudices économiques subis par elle tant du point de vue patrimonial (perte de capital) que du point de vue des pertes de revenus pendant et après l'incarcération ; 2- Dire si la vente des biens immobiliers dont elle était copropriétaire, a été causée par l'incarcération de l'intéressée, et dans l'affirmative, chiffrer le préjudice économique subi de ce chef ;

FIXE à huit mois le délai dans lequel l'expert déposera son rapport au secrétariat de la Commission,

DESIGNE Madame le Conseiller référendaire GAILLY pour mettre en oeuvre l'expertise, en contrôler l'exécution, statuer, le cas échéant, sur des difficultés, et procéder à toutes auditions ou investigations qui pourraient s'avérer nécessaires ;

Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique par la Commission Nationale de réparation des détentions, le 3 mars 2003, où étaient présents : M. Canivet, président, Mme Gailly, conseiller-rapporteur, M. Gueudet, M. Finielz, avocat général, Mme Guénée, greffier.

En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier.


Synthèse
Formation : Commission reparation detention
Numéro d'arrêt : 02-CRD078
Date de la décision : 03/03/2003

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 juin 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Commission reparation detention, 03 mar. 2003, pourvoi n°02-CRD078


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Canivet
Avocat général : Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Gailly

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.CRD078
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