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13/01/1932 | FRANCE | N°JURITEXT000006952824

France | France, Cour de cassation, Chambres reunies, 13 janvier 1932, JURITEXT000006952824


CASSATION, sur le pourvoi du sieur X..., d'un jugement rendu, le 13 juin 1930, par le juge de paix des cantons sud et sud-est de Limoges, au profit de la veuve Y....

ARRET.

Du 13 Janvier 1932.

LA COUR,

Statuant toutes chambres réunies ;

Ouï, en audience publique du 13 janvier 1932, M. le conseiller Pilon, en son rapport ; M. le procureur général Paul Matter, en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Sur les moyens réunis du pourvoi :

Vu les articles 2 du Code civil, 21, alinéas 1er et 2, de la lo

i du 1er avril 1926, lesquels sont ainsi conçus : article 2 du Code civil : "La loi ne dispose que pour l...

CASSATION, sur le pourvoi du sieur X..., d'un jugement rendu, le 13 juin 1930, par le juge de paix des cantons sud et sud-est de Limoges, au profit de la veuve Y....

ARRET.

Du 13 Janvier 1932.

LA COUR,

Statuant toutes chambres réunies ;

Ouï, en audience publique du 13 janvier 1932, M. le conseiller Pilon, en son rapport ; M. le procureur général Paul Matter, en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Sur les moyens réunis du pourvoi :

Vu les articles 2 du Code civil, 21, alinéas 1er et 2, de la loi du 1er avril 1926, lesquels sont ainsi conçus : article 2 du Code civil : "La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif" ; article 21 de la loi du 1er avril 1926, alinéa 1er :

"Aucune prorogation, quelle qu'elle soit, ne pourra être opposée au propriétaire qui veut démolir un immeuble pour construire ou aménager, sur le même emplacement, un autre immeuble contenant au moins le même nombre de logements que l'immeuble démoli" ; alinéa 2 :

"L'exercice du droit de reprise du propriétaire sera subordonné aux conditions suivantes : 1° qu'un préavis de six mois soit donné à chacun des locataires congédiés pour vider les lieux ; 2° qu'une indemnité préalable égale à un an du montant du loyer annuel soit versée par le propriétaire à chacun desdits locataires ; 3° que les travaux de reconstruction soient commencés dans les six mois";

Attendu que si toute loi nouvelle régit, en principe, les situations établies et les rapports juridiques formés dès avant sa promulgation, il est fait échec à ce principe par la règle de la non-rétroactivité des lois formulée par l'article 2 du Code civil, lorsque l'application d'une loi nouvelle porterait atteinte à des droits acquis sous l'empire de la législation antérieure ;

Attendu que le jugement attaqué a décidé d'appliquer les dispositions résultant de la loi du 29 juin 1929 à un congé-préavis donné par le propriétaire à son locataire en vertu d'un bail verbal, aux fins de reprendre l'immeuble pour le surélever et y construire une annexe, bien qu'il résulte des constatations du jugement que ce congé, conforme aux prescriptions de l'article 21 de la loi du 1er avril 1926, a été donné à une date et pour une époque antérieures à la promulgation de la loi de 1929, et validé par un jugement de défaut, rendu également avant cette promulgation, l'opposition au jugement, seule, lui étant postérieure ;

Or, attendu que l'article unique de la loi du 29 juin 1929 énonce que plusieurs articles de la loi du 1er avril 1926 parmi lesquels figure l'article 21 "seront modifiés et complétés ainsi qu'il suit, à dater du 1er juillet 1929" ; qu'il ressort de cette disposition que la loi nouvelle n'a pas pour objet d'interpréter les textes visés, mais, au contraire, de les modifier et de les compléter sans rétroactivité ;

Attendu, d'autre part, que le congé-préavis donné par le propriétaire pour l'exercice du droit de reprise n'est pas un acte de procédure ; qu'en effet, l'instance ne commence, ainsi que le prévoit l'article 15 de la loi du 1er avril 1926, que par la déclaration au greffe consécutive au préavis lequel est seulement l'une des conditions auxquelles l'article 21 subordonne l'exercice du droit de reprise ; que, par suite, donné le 27 novembre 1928 pour le 27 mai 1929, il ne saurait être régi par la loi du 29 juin 1929 sans porter atteinte au droit régulièrement acquis par le propriétaire sous l'empire de la loi antérieure ;

D'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le juge de paix a violé et faussement appliqué les textes visés par le

pourvoi ;

Par ces motifs ;

CASSE,


Synthèse
Formation : Chambres reunies
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952824
Date de la décision : 13/01/1932
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Chambre mixte

Analyses

LOUAGE - Baux à loyer - Reprise des locaux - Lois du 1er avril 1926, article 21, et du 29 juin 1929 - Droits acquis - Non-rétroactivité de la loi nouvelle

Si toute loi nouvelle régit, en principe, les situations établies et les rapports juridiques formés dès avant sa promulgation, il est fait échec à ce principe par la règle de la non-rétroactivité des lois formulée par l'article 2 du Code civil, lorsque l'application de la loi nouvelle porterait atteinte à des droits acquis sous l'empire de la législation antérieure. La loi du 29 juin 1929 n'a pas eu pour objet d'interpréter les articles de la loi du 1er avril 1926 visés dans son article unique, mais au contraire, ainsi qu'il résulte de ce dernier texte, de les modifier et de les compléter, sans rétroactivité. Dès lors, le propriétaire qui, sous l'empire de l'article 21 de la loi du 1er avril 1926, a exercé son droit de reprise pour surélever ou reconstruire par un congédiement donné, conformément audit article 21, à une date et pour une époque antérieures à la promulgation de la loi du 29 juin 1929, a un droit régulièrement acquis à la reprise des locaux qui ne saurait être modifié et régi par les nouvelles dispositions de cette dernière loi.


Références :

Code civil 2
LOI du 01 avril 1926
LOI du 29 juin 1929

Décision attaquée : Juge de paix des cantons sud et sud-est de Limoges, 13 juin 1930


Publications
Proposition de citation : Cass. ch. réun., 13 jan. 1932, pourvoi n°JURITEXT000006952824, Bull. civ. des arrêts Cour de Cassation Chambres réunies N. 11 P. 17
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles des arrêts Cour de Cassation Chambres réunies N. 11 P. 17

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1932:JURITEXT000006952824
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