COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 25/07/2023
la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS
la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS
ARRÊT du : 25 JUILLET 2024
N° : 182 - 23
N° RG 21/02020 -
N° Portalis DBVN-V-B7F-GM7Z
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 19 Février 2021
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265271249065441
S.A.S. HERVE THERMIQUE RCS TOURS
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 11]
[Localité 4]
Ayant pour avocat Me Stéphanie BAUDRY, membre de la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS
D'UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265294939672455
La SA FRANCE AIR,
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 1]
Ayant pour avocat postulant Me Sophie GATEFIN, membre de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Joaquim RUIVO, avocat au barreau de PARIS
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265266049278979
S.A.R.L. JBBL ARCHITECTURE
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 6]
Ayant pour avocat postulant Me Valérie BOURGUEIL-PORTEBOEUF, membre de la SCP ABCD (AVOCATS BRUGIERE-DUBOIS-BOURGUEIL-CLOCET), avocat au barreau de TOURS, et pour avocat plaidant Me Jacques MIQUEL, avocat au barreau de PARIS
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265267358180101
Société LA VIADENE SARL
Prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Ayant pour avocat postula,t Me Flora GALLY, membre de la SELARL KROVNIKOFF GALLY, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Barbara SUREAU GIRODON, avocat au barreau de PARIS
Société LA MODER SAS
Prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 2]
Ayant pour avocat postula,t Me Flora GALLY, membre de la SELARL KROVNIKOFF GALLY, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Barbara SUREAU GIRODON, avocat au barreau de PARIS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 15 Juillet 2021
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 05 Octobre 2023
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 12 OCTOBRE 2023, à 14 heures, Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en charge du rapport, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, et Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 805 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, et Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller,
Greffier :
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 25 JUILLET 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
La société La Moder, propriétaire d'un fonds de commerce de café-restaurant qu'elle exploite [Adresse 8] dans le [Localité 2], a confié par contrat du 12 mai 2014 à la société JBBL Architecture la maîtrise d'oeuvre du chantier d''aménagement d'une brasserie dans un bâtiment existant. Mission complète pour l'aménagement de la brasserie'.
La société Herve Thermique -qui réalise des travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation- a établi 'une étude thermique de la surface commerciale [Adresse 8] à [Localité 2]' et, sur la base de cette étude, une 'analyse des consommations 'Restaurant' avant de proposer le 10 septembre 2014 à la société La Moder un devis n° 1181223-3 portant sur 'la remise à neuf de la ventilation' moyennant le prix total TTC de 105 821,18 euros. Ce devis a été signé par le client le 25 septembre 2014 qui y a ajouté la mention manuscrite 'installation complète avant le 6 novembre 2014".
Le 1er octobre 2014, la société Herve Thermique a établi un nouveau devis n°1181223-4 à destination cette fois de la société La Viadene, société mère de la société La Moder, pour la même prestation de remise à neuf de la ventilation de la brasserie [Adresse 8], au même prix. Ce devis a été signé le 2 octobre 2014 par la société La Viadene -dont les dirigeants sont les mêmes que ceux de la société La Moder-, ainsi que les conditions générales d'intervention. Aucune clause imposant un délai de livraison n'y figure.
Le 6 octobre 2014, la société Herve Thermique a commandé à la société France Air la fourniture de divers matériels de ventilation pour un montant HT de 17 414,70 euros dont la CTA (centrale de traitement d'air) Cooler Play.
Les travaux ont été réalisés et livrés le 22 décembre 2014. Ils ont fait l'objet de trois factures :
* la première du 6 octobre 2014 d'un montant de 31 746 euros réglée par chèque débité le 10 octobre 2014,
* la deuxième du 24 novembre 2014 pour un montant de 58 201, 44 euros, impayée,
* la troisième du 20 janvier 2015 d'un montant de 15 873,36 euros, impayée.
Par courrier du 20 janvier 2015, la société Herve Thermique a mis en demeure la société La Viadene de lui régler la facture du 24 novembre 2015, la troisième facture n'étant pas encore arrivée à échéance à cette date.
Par courrier du 22 janvier 2015, la société La Viadene s'est plainte de très nombreux manquements de la part de la société Herve Thermique.
Afin de 'préserver ses relations commerciales avec la société La Viadene', la société Herve Thermique a, le 24 février 2015, établi un avoir de 1.798,96 euros TTC dont le montant correspond aux pénalités de retard prévues par la norme AFNOR NF P 03-001, exposant que les travaux n'avaient pas été réalisés dans le planning prévisionnel donné à titre purement indicatif. Elle a en outre, par le même courrier, mis en demeure la société La Viadene de réceptionner les travaux avec effet au 22 décembre 2014 et de payer la somme de 72 275,84 euros augmentée des intérêts moratoires et clause pénale dus à la date de paiement.
Cette mise en demeure étant restée sans effet, la société Herve Thermique a, par acte du 20 août 2015, fait assigner la société La Viadene devant le juge des référés du tribunal de commerce de Tours, en paiement des sommes restant dues à titre provisionnel.
Suivant ordonnance du 24 novembre 2015, le tribunal de commerce de Tours a constaté l'existence d'une contestation sérieuse sur la demande en paiement par provision formée par la société Herve Thermique, a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [B] [K] et a ordonné à la société La Viadene de consigner en garantie de paiement, conformément aux dispositions de l'article 1799-1 du code civil, la somme de 15 000 euros sur le compte CARPA.
Cette ordonnance a été confirmée par arrêt de cette cour du 27 octobre 2016, sauf sur les modalités de la garantie de paiement. Statuant à nouveau de ce chef, la cour a condamné la société La Viadene à fournir à la société Herve Thermique dans les vingt jours de la signification du présent arrêt, au titre de la garantie de paiement de l'article 1799-1 du code civil pour le marché portant sur l'installation d'une centrale de traitement d'air dans l'établissement '[10]...' à [Localité 7], un cautionnement d'un montant de 72 275,84 euros consenti par un établissement de crédit, une société de financement, une entreprise d'assurance ou un organisme de garantie collective.
Par ordonnance du 20 mai 2016, confirmée par un arrêt de cette chambre du 19 janvier 2017, le juge des référés du tribunal de commerce de Tours a rendu opposables les opérations d'expertise à la société France Air, fournisseur du matériel, et mis hors de cause la société JBBL Architecture, maître d'oeuvre.
Les opérations d'expertise ont été déclarées communes à la société La Moder par ordonnance du 21 avril 2017.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 11 juin 2018. Il indique que :
'Le restaurant rencontre depuis la fin des travaux des problèmes importants de manque de chauffage.
Les manques peuvent donc être résumés ainsi :
- incohérence de la programmation horaire,
- manque de puissance pour la température extérieure de base,
- apports de l'ouverture de la porte avec gradient de température non pris en compte,
- déséquilibre de chauffage par manque d'une bouche de soufflage dans la zone périphérique cloisonnée gauche.
Les désordres proviennent :
- d'une non-confomité aux règles de l'art,
- d'un problème de conception,
- d'une exécution défectueuse.
Le bilan thermique fourni est erroné, le matériel choisi est inadapté (d'après la documentation fournisseur). Les pièces sont alors chauffées insuffisamment'.
Par acte du 21 novembre 2018, les sociétés La Moder et La Viadène ont fait assigner en ouverture de rapport la société Herve Thermique devant le tribunal de commerce de Tours, statuant au fond.
Par actes en date des 14 et 15 mars 2019, la société Herve Thermique a appelé à la cause les sociétés France Air et JBBL Architecture en intervention forcée et garantie.
Par jugement contadictoire du 19 février 2021 rectifié le 18 juin 2021, le tribunal de commerce de Tours a :
Vu les articles 1103, 1104, 1147 ancien, 1231-1, 1223, 1240 et 1792 du code civil,
Vu les articles 63 et 367 du code de procédure civile,
Vu le rapport d'expertise,
Vu les pièces versées au débat,
- condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Viadène la somme de 128.042,22 euros se répartissant de la façon suivante :
' 73.877,22 euros au titre des travaux réparatoires,
' 18.397,44 euros au titre des frais de maîtrise d'oeuvre et
' 35.767,56 euros au titre des frais d'expertise,
- condamné la société La Viadène à payer à la société Hervé Thermique les sommes de :
' 72.275,84 euros, outre les intérêts au taux appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points à compter du 20 août 2015, date d'assignation en référé,
' 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,
' 14.455,17 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat,
- ordonné la compensation des sommes dues entre la société La Viadène et la société Hervé Thermique,
- condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Moder la somme de 70.163 euros à titre de dommages et intérêts pour insuffisance de chauffage,
- condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Moder la somme de 3.937 euros au titre de dommages et intérêts pour surconsommation d'énergie,
- condamné la société France Air à garantir la société Hervé Thermique de la condamnation prononcée à son encontre relative à la mise en service de l'installation à hauteur de 14.032 euros,
- débouté les sociétés La Viadène et La Moder de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Viadène la somme de 35.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Hervé Thermique à payer à la société JBBL Architecture la somme de 1.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les sociétés Hervé Thermique et France Air de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamné les sociétés Hervé Thermique et France Air à supporter les dépens de la présente instance à raison respectivement de 80 % pour la première, et 20 % pour la deuxième, lesquels dépens liquidés, concernant les frais de greffe, à la somme de 139,21 euros.
Suivant déclaration du 15 juillet 2021, la SAS Hervé Thermique a interjeté appel de ce jugement, en intimant les sociétés France Air, JBBL Architecture, La Viadène et La Moder, et en critiquant le jugement en ce qu'il :
- l'a condamnée à payer à la société La Viadène la somme de 128.042,22 euros se répartissant de la façon suivante :
o 73.877,22 euros au titre des travaux réparatoires,
o 18.397,44 euros au titre des frais de maîtrise d''uvre,
o 35.767,56 euros au titre des frais d'expertise,
- a ordonné la compensation des sommes dues entre la société La Viadène et la société Hervé Thermique,
- l'a condamnée à payer à la société La Moder la somme de 70.163 euros au titre de dommages et intérêts pour insuffisance de chauffage,
- l'a condamnée à payer à la société La Moder la somme de 3.937 euros au titre de dommages et intérêts pour surconsommation d'énergie,
- a limité la garantie de la société France Air à hauteur de 14.032 euros,
- l'a condamnée à payer à la société La Viadène la somme de 35.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamnée à payer à la société JBBL Architecture la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a déboutée de ses demandes formées contre la société JBBL Architecture,
- l'a condamnée à supporter 80 % des dépens.
Ce dossier a été enregistré sous le RG n° 21/02020.
Suivant déclaration du 6 août 2021, la SARL La Moder a interjeté appel de ce même jugement, en intimant la société Hervé Thermique, et en critiquant le jugement en ce qu'il a :
- rejeté ses demandes tendant au paiement des sommes suivantes :
' 27.507 euros ayant limité sa condamnation à 70.163 euros au lieu de 97.670 euros,
' 123.816,03 euros au titre du préjudice de retard de livraison,
' 3.447,60 euros au titre de la facture de Luso Rénovation,
' 15 874 euros au titre du préjudice de retard d'installation,
' 12.765,04 euros au titre du remboursement des mesures complémentaires de chauffage,
' 18.000 euros au titre des frais d'expert financier,
' 2.338,99 euros au titre du remboursement des frais de bilan thermique.
- rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Hervé Thermique au paiement d'une somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Ce dossier a été enregistré sous le RG n° 21/02252.
Suivant déclaration du 6 août 2021, la SNC La Viadène a interjeté appel de ce jugement, en intimant la société Hervé Thermique, et en critiquant le jugement en ce qu'il :
- l'a condamnée à payer à la société Hervé Thermique les sommes de :
' 72.275,84 euros outre les intérêts au taux appliqués par la BCE à son opération de refinancement la plus récente, majorés de 10 points à compter du 20 août 2015 date d'assignation en référé,
' 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,
' 14.455,17 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat,
- a rejeté ses demandes tendant à la condamnation de la société Hervé Thermique au paiement des sommes suivantes :
' 2.318,39 euros au titre des travaux réparatoires ayant limité sa condamnation à la somme de 73.877,22 euros au lieu de 76.195,61 euros,
' 1.800 euros au titre des frais d'expert technique,
' 1.467,84 euros au titre du remboursement des frais de cautionnement bancaire,
' 245,08 euros à titre de remboursement des frais de constat d'huissier,
- rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Hervé Thermique au paiement d'une somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- limité la condamnation de la société Hervé Thermique au titre de l'article 700 à la société La Viadène à une somme de 35.000 euros aux lieu et place de la somme de 70.141,56 euros.
Ce dossier a été enregistré sous le RG n° 21/02253.
Par ordonnances du 25 novembre 2021, le président de cette chambre chargé de la mise en état a joint les procédures inscrites sous les numéros 21/02020, 21/02252 et 21/02253 sous le numéro 21/02020.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 20 septembre 2023, la SAS Herve Thermique demande à la cour de :
Vu les articles 1147 (ancien) et suivants du code civil,
Vu l'article 1792 du code civil,
Vu les articles 1240 et suivants du code civil,
Vu l'article 2224 du code civil,
Vu les articles 31 et 32 du code de procédure civile,
Vu les articles 63 et suivants du code de procédure civile,
Vu l'article 122 du code de procédure civile,
Vu l'article 367 du code de procédure civile,
Vu l'article 564 du code de procédure civile,
Vu l'article 910-4 du code de procédure civile,
- réformer le jugement du tribunal de commerce de Tours en date du 19 février 2021, en ce qu'il a :
' condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Viadène le somme de 128.042,22 euros se répartissant de la façon suivante :
' 73.877,22 euros au titre des travaux réparatoires,
' 18.397,44 euros au titre des frais de maîtrise d''uvre,
' 35.767,56 euros au titre des frais d'expertise,
' condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Moder la somme de 70.163 euros au titre de dommages et intérêts pour insuffisance de chauffage,
' condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Moder la somme de 3.937 euros au titre de dommages et intérêts pour surconsommation d'énergie,
' limité la garantie de la société France Air à hauteur de 14.032 euros,
' condamné la société Hervé Thermique à payer à la société La Viadène la somme de 35.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamné la société Hervé Thermique à payer à la société JBBL Architecture la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' débouté la société Hervé Thermique de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' débouté la société Hervé Thermique de ses demandes formées contre la Société JBBL Architecture,
' condamné la société Hervé Thermique à supporter 80% des dépens.
- le confirmer pour le surplus, à savoir en ce qu'il a :
' condamné la société La Viadène à payer à la société Hervé Thermique les sommes de :
' 72.275,84 euros avec intérêt au taux appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points à compter de l'échéance de chacune des factures,
' 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,
' 14.455,17 euros au titre de la clause pénale,
Statuant à nouveau,
- rejeter l'appel des sociétés La Viadène et La Moder,
- débouter les sociétés La Viadène et La Moder de toutes demandes, fins et conclusions fondées sur l'application de la garantie décennale et l'article 1792 du code civil, à défaut de réception,
- dire irrecevables les demandes formées par la société La Viadène sur le fondement de l'article 1792 du code civil, en l'absence de qualité de maître de l'ouvrage,
A défaut,
- l'en débouter,
- dire irrecevables les demandes des sociétés La Viadène et La Moder fondées sur la responsabilité contractuelle ou la responsabilité délictuelle pour les désordres allégués relevant de la responsabilité décennale,
A défaut,
- les en débouter,
- dire irrecevables les demandes de la société La Viadène relatives au caractère non nécessaire du cautionnement, au déblocage et à la restitution des fonds conservés par la Banque Populaire en garantie du cautionnement donné,
A défaut,
- l'en débouter,
- dire irrecevables les demandes formées par la société La Moder et La Viadène au titre du préjudice moral,
A défaut,
- les en débouter,
- dire irrecevables les demandes des sociétés La Moder et La Viadène relatives aux factures des sociétés Clim Denfert et Dekostaff,
A défaut,
- les en débouter,
En tout état de cause,
- débouter les sociétés La Moder et La Viadène de toutes demandes, fins et conclusions,
A défaut,
- limiter la condamnation de la société Hervé Thermique au préjudice réparatoire, soit la somme de 2.967,24 euros au bénéfice de la société La Viadène,
- ordonner la compensation des sommes dues entre la société La Viadène et la société Hervé Thermique,
- condamner la société France Air à garantir la société Hervé Thermique de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre relative à un retard de livraison et à la mise en service de l'installation,
- condamner la société JBBL Architecture à garantir la société Hervé Thermique de toute condamnation prononcée à son encontre relative à un défaut de conception du projet,
- condamner les parties succombantes à régler à la société Hervé Thermique la somme de 45.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, et rejeter toute demande formée à l'encontre de la société Hervé Thermique à ce titre.
Dans leurs dernières conclusions notifiées le 21 septembre 2023, la SAS La Moder et la SARL La Viadène demandent à la cour de :
Vu les articles 1792, 1103, 1104, 1223 et 1231-1, 1240 et suivants du code civil,
Vu le rapport d'expertise déposé le 11 juin 2018 par M. [B] [K], expert judiciaire,
- recevoir la société La Moder et la société La Viadène en leur appel et leurs demandes et y faisant droit,
- prononcer la jonction des procédures RG n°21/02020, RG n°21/02252 et RG n°21/02253,
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Tours du 19 février 2021 en ce qu'il a reconnu que la société Hervé Thermique est responsable des malfaçons ayant causé les désordres constatés dans le système de chauffage fourni et installé au profit des sociétés La Moder et La Viadène et en ce qu'il a reconnu le lien de causalité avec le préjudice subi par les sociétés La Moder et La Viadène,
S'agissant de la société La Viadène :
- le confirmer en ce qu'il a condamné la société Hervé Thermique au paiement de dommages et intérêts de :
' 73 877,22 euros au titre des travaux réparatoires,
' 18 397,44 euros au titre des frais de maitrise d''uvre,
' 35 767,56 euros au titre des frais d'expertise,
- infirmer le jugement entrepris s'agissant des autres demandes présentées par la société La Viadène,
Y ajoutant :
- prononcer une condamnation complémentaire de la société Hervé Thermique au paiement des sommes suivantes :
' 2.318,39 euros au titre des travaux réparatoires, soit une demande de 76.195,61 euros,
' 1.800 euros au titre des frais d'expertise,
' 5.059,04 euros au titre du remboursement des frais de cautionnement bancaire,
A titre subsidiaire,
- condamner la société Hervé Thermique au paiement de ces sommes à la société La Moder,
- juger que le cautionnement ordonné par la cour d'appel d'Orléans par arrêt du 27 octobre 2016
pour une somme de 72.275,84 euros n'est plus nécessaire et par conséquent,
- ordonner la libération des fonds bloqués à titre de caution sur le compte Banque Populaire Occitane n°81021130148 à hauteur de 72.275,84 euros,
- ordonner la restitution de cette somme de 72.275,84 euros à la société La Viadène,
- ordonner la mainlevée du cautionnement décidé par la cour d'appel d'Orléans le 27 octobre 2016,
- ordonner à la société Hervé Thermique d'accomplir toute formalité nécessaire à cette mainlevée, notamment en signant l'acte de caution et en y apposant la mention demandée par la
Banque Populaire,
S'agissant de la société La Moder :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Hervé Thermique au paiement de dommages et intérêts à la société La Moder :
' au titre du préjudice lié à l'insuffisance de chauffage à hauteur de 70.163 euros,
' au titre de la surconsommation à hauteur de 3.937 euros,
- mais infirmer ce jugement sur les autres demandes présentées par la société La Moder et condamner la société Hervé Thermique au paiement à la société La Moder à titre de dommages et intérêts des sommes suivantes complémentaires :
' 27.507 euros à titre de condamnation complémentaire pour le préjudice lié à l'insuffisance de chauffage, soit à ce titre une somme totale de 97.670 euros,
' 123.816,03 euros au titre du préjudice de retard de livraison,
' 15.874 euros au titre du préjudice de retard d'installation,
' 3.447,60 euros au titre de la facture de Luso Renovation,
' 12.765,04 euros au titre du remboursement des mesures complémentaires de chauffage,
' 18.000 euros au titre des frais d'expert financier,
' 2.338,99 euros au titre du remboursement des frais de bilan thermique,
' 10.902,96 euros en remboursement des factures des sociétés Clim Denfert et Dekostaff,
A titre subsidiaire, condamner la société Hervé Thermique au paiement à titre de dommages et intérêts à la société La Viadène les sommes suivantes :
' 97.670 euros au titre de l'insuffisance de chauffage,
' 123.816,03 euros au titre du préjudice de retard de livraison,
' 15.874 euros au titre du préjudice de retard d'installation,
' 3.447,60 euros au titre de la facture de Luso Renovation,
' 12.765,04 euros au titre du remboursement des mesures complémentaires de chauffage,
' 18.000 euros au titre des frais d'expert financier,
' 2.338,99 euros au titre du remboursement des frais de bilan thermique,
' 10.902,96 euros en remboursement des factures des sociétés Clim Denfert et Dekostaff,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Tours en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral des sociétés La Moder et La Viadène et condamner la société Hervé Thermique au paiement d'une somme de 25.000 euros à ce titre à chacune des sociétés La Moder et La Viadène,
- assortir les condamnations en paiement de la société Hervé Thermique au profit des sociétés
La Moder et La Viadène des intérêts au taux légal avec capitalisation de ces derniers,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Tours en ce qu'il a condamné la société La Viadène à payer à la société Hervé Thermique les sommes de :
' 72.275,84 euros au titre du paiement de ses factures,
' 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,
' 14.455,17 euros au titre de la clause pénale,
- limiter la condamnation de la société La Viadène à l'égard de la société Hervé Thermique à une somme de 36.137,92 euros,
- l'infirmer également en ce qu'il assortit la condamnation à la somme de 72.275,84 euros à des intérêts au taux légal appliqués par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majorés de 10 points à compter du 20 août 2015, date de l'assignation en référé, et assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter de l'assignation délivrée par les sociétés La Moder et La Viadène en date du 21 novembre 2018,
- ordonner à la société Hervé Thermique de transmettre aux sociétés La Moder et La Viadène le carnet d'entretien de la centrale de traitement d'air sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 15 jours après la signification de l'arrêt à intervenir,
- rejeter les demandes, fins et conclusions de la société Hervé Thermique,
- rejeter le surplus des demandes de la société Hervé Thermique,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Hervé Thermique au paiement à la société La Viadène d'une somme de 35.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et y ajoutant condamner en outre la société Hervé Thermique au paiement
d'une somme de 35.141,56 euros (demande de première instance) et à une somme complémentaire au titre de l'article 700 de 15.481,98 euros, soit une somme totale de 85.623,54 euros,
- condamner la société Hervé Thermique aux dépens qui comprendront les frais d'établissement du procès-verbal de constat de 245,08 euros.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 19 septembre 2023, la SA France Air demande à la cour de :
Vu les articles 1134, 1147 anciens du code civil,
Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,
Vu le rapport d'expertise de M. [K] du 11 juin 2018 et ses annexes,
Vu le jugement rendu en date du 19 février 2021 par le tribunal de commerce de Tours,
Vu les pièces versées aux débats,
- déclarer la société Hervé Thermique mal fondée en son appel, l'en débouter,
- infirmer la décision de première instance en ce qu'elle a retenu, même partiellement, la responsabilité de France Air,
- juger que les désordres, objet de ce litige, ne sont pas imputables à la société France Air,
- juger que les délais de livraison de la CTA Cooler Play 95 sont des délais approximatifs et ne sont donnés qu'à titre indicatif,
- débouter la société Hervé Thermique et tous concluants de toutes demandes dirigées à l'encontre de la société France Air,
- condamner la société Hervé Thermique à régler à la société France AIR la somme de 7.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 14 juin 2023, la SARL JBBL Architecture demande à la cour de :
Vu l'article 1134 devenu 1103 du code civil,
Vu l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil,
Vu l'article 1156 devenu 1188 du code civil,
Vu l'article 1382 devenu 1240 du code civil,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tours le 19 février 2021 en toutes ses dispositions et plus précisément en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de la société JBBL Architecture,
Statuant à nouveau,
- prononcer la mise hors de cause de la société JBBL Architecture,
- débouter la société Hervé Thermique de son appel en garantie formé à l'encontre de la société JBBL Architecture,
- débouter la société Hervé Thermique de toute demande formée à l'encontre de la société JBBL Architecture,
- condamner la société Hervé Thermique à verser à la société JBBL Architecture la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 octobre 2023, pour l'affaire être plaidée le 12 octobre suivant.
MOTIFS :
Sur la responsabilité de la société Herve Thermique :
Les sociétés La Viadene et La Moder recherchent la responsabilité de la société Herve Thermique sur le fondement de l'article 1792 du code civil, subsidiairement la responsabilité contractuelle de cette dernière par application des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction applicable envers la société La Viadene et délictuelle en application de l'article 1240 du code civil envers la société La Moder.
Sur le fondement de la garantie décennale, elles se prévalent de l'existence d'un ouvrage, s'agissant d'une installation de chauffage complète, de l'existence d'un maître (la société La Viadene) ou d'un acquéreur (la société La Moder) de l'ouvrage, de l'existence de dommages rendant impropre l'installation à sa destination selon les constatations de l'expert, et de l'existence d'une réception tacite des travaux par prise de possession et utilisation de l'ouvrage dans la mesure où le restaurant a ouvert ses portes le 22 décembre 2014 ainsi que l'ont retenu les premiers juges.
Il est constant que la garantie décennale ne s'applique que s'il y a eu réception.
L'article 1792-6 du code civil dispose que 'la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement'.
L'article 1792-6 n'exclut pas la possibilité d'une réception tacite, même avec réserves.
En l'espèce, le seul fait que le maître d'ouvrage ait utilisé et utilise l'ouvrage installé par la société Herve Thermique ne saurait suffire à caractériser la réception tacite des travaux, dès lors d'une part que ni la société La Viadene ni la société La Moder n'a réglé l'intégralité des travaux -moins d'un tiers de ceux-ci ayant été payés-, d'autre part que celles-ci ont manifesté leur refus de réception de l'ouvrage en ignorant la mise en demeure à cet effet du 24 février 2015 de la société Herve Thermique et en sollicitant, dès le mois d'août 2015 reconventionnellement sur la demande de provision adverse, une procédure de référé expertise.
En l'absence de réception tacite de l'ouvrage, la garantie décennale n'est pas applicable.
Les dommages invoqués ne relevant pas de la garantie décennale de la société Herve Thermique en l'absence de réception, les intimées sont fondées subsidiairement à mettre en oeuvre la responsabilité contractuelle et/ou délictuelle de droit commun de l'entreprise, contrairement à ce que soutient à cet égard la société Herve Thermique.
La société Herve Thermique conteste que l'installation qui lui a été commandée par la société La Viadene aurait pour finalité le chauffage du restaurant, ne s'étant engagée contractuellement qu'à réaliser la remise à neuf d'un système de ventilation aux termes du devis accepté par la société La Viadene, conformément à ce qui lui a été demandé. Elle relève en outre qu'aucun défaut dans la fonctionnalité de ventilation de l'installation n'est allégué.
Les pièces produites font apparaître que la société Herve Thermique, préalablement à l'établissement de son devis, a procédé à une étude thermique (= relatif à la chaleur, à la température) de la surface commerciale suivie d'une analyse des consommations du restaurant dans la 'situation actuelle' et dans la 'situation future (Cooler Play 95)' faisant figurer 'la puissance de chauffage nécessaire', les 'besoins de chauffage', les 'consommations de chauffage'.
Elle a ensuite proposé un devis de 'remise à neuf de la ventilation' au moyen de la mise en place dans la salle de restaurant d'une centrale de traitement d'air dont elle a passé commande à la société France Air sous la désignation 'Cooler Play 95 T3000 PLF -12", correspondant au matériel de 'la situation future' à partir duquel elle avait fait son analyse des consommations de chauffage.
Il en résulte que la société Herve Thermique via son système de ventilation a proposé à la société La Viadene une solution de chauffage, étant précisé que le compte rendu d'intervention du 2 février 2015 de la société France Air note que ' la cooler play est l'unique moyen de chauffage du restaurant' et que la société Herve Thermique admet que 'l'installation qu'elle a vendue est effectivement capable de fournir de l'air chaud' (page 11 de ses conclusions).
L'expert a mis en exergue que le bilan thermique réalisé par la société Herve Thermique était erroné pour ne pas avoir suffisamment pris en compte des déperditions tenant aux imperfections de réalisation de la façade, aux ouvertures fréquentes de porte et à la mise en dépression de la cuisine par rapport au restaurant, et que le matériel choisi (CTA avec PAC) était inadapté pour souffler de l'air suffisamment chaud. Il a également relevé que si le plan d'exécution mentionne 8 bouches de soufflage pour un débit total de 8 000 m3/h, seules 5 bouches sont existantes avec un débit de 6 353 m3/h à la mise en service.
En plus de l'exécution défectueuse concernant le manque de bouches de soufflage, il s'avère surtout que la société Herve Thermique, entreprise spécialisée dans l'installation d'équipements thermiques et de climatisation, particulièrement qualifiée dans son domaine, qui connaissait les besoins de chauffe du maître d'ouvrage pour avoir établi une étude thermique et une analyse comparative des consommations de chauffage de l'établissement, a manqué à son obligation de conseil en proposant à celui-ci un système de centrale de traitement de l'air qui ne pouvait atteindre l'objectif recherché, à savoir remettre en état la ventilation tout en assurant le chauffage nécessaire à l'exploitation dudit restaurant, l'expert notant que depuis la fin des travaux le restaurant rencontre des problèmes importants de manque de chauffage et qu'il a constaté que, malgré des températures extérieures clémentes, la température ambiante n'est atteinte que grâce aux ajouts de rideaux d'air chaud et de radiants, et ce à titre de mesures conservatoires.
La société Herve Thermique engage ainsi sa responsabilité contractuelle de droit commun envers son cocontractant, la société La Viadene.
Il est constant que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (Cass. Plen., 13 janvier 2020, n° 17-19.963).
En l'espèce, en raison de l'inadaptation de l'installation aux besoins du restaurant exploité par la société La Moder, la société Herve Thermique engage sa responsabilité envers cette dernière sur le fondement de l'article 1382 du code civil devenu 1240 pour les dommages subis.
Sur la réparation des préjudices subis par la société La Viadene :
* facture de la société Climatis pour le raccordement des bouches non raccordées dans la cuisine (2 421,60 euros TTC)s
Ce défaut de raccordement a été constaté au cours des opérations d'expertise, soit plusieurs années après l'intervention de la société Herve Thermique, alors que d'autres entreprises sont intervenues pour l'entretien.
En l'absence de preuve rapportée par la société La Viadene de l'imputabilité de ce désordre à la société Herve Thermique, il n'y a pas lieu de prendre en compte ce poste de préjudice, à l'instar de ce qui a été jugé en première instance.
* travaux réparatoires
L'expert a estimé le montant total des travaux réparatoires (sous-sol et salle de restaurant) à 77.100 euros TTC, selon devis de l'entreprise Bonnet, duquel il retire un montant de 3 325,99 euros concernant des améliorations (thermostat d'ambiance, déplacement de l'éclairage, convecteur électrique) à la charge de la société La Viadene.
Il ressort du devis de la société Herve Thermique qu'aucun travaux n'était prévu au sous-sol, lequel ne faisait pas partie de son marché, ainsi que l'a lui même noté l'expert : 'concernant le sous-sol, le client n'a pas demandé à Herve Thermique de traiter cette partie, les imputabilités reviennent donc au maître d'ouvrage pour les travaux d'amélioration'. Les travaux réparatoires devisés dans le rapport d'expertise portant sur un système d'installation de chauffage du sous-sol seront donc exclus du montant des réparations, soit TTC 15 196,54 euros.
Concernant la salle de restaurant, l'expert, homme de l'art, a estimé que la proposition de la société Herve Thermique comprenant des petits aérothermes de marque Noirot n'était pas adaptée au restaurant ni au design existant. Quant au manque de puissance de chauffe de l'installation auquel les travaux préconisés par l'expert doivent permettre de remédier, la société Herve Thermique ne saurait soutenir que si la société La Viadene avait bénéficié dès l'origine d'une installation plus puissante, elle aurait payé un prix plus élevé, dès lors qu'il s'agit de réparer le préjudice subi par la société La Viadene du fait d'un défaut de conseil lors du choix de l'installation à l'origine, les ajouts de puissance étant précisément destinés à mettre fin au désordre et ne pouvant dès lors être considérés comme un avantage pour le maître d'ouvrage.
L'expert a estimé qu'il était nécessaire de recourir à un maître d'oeuvre pour la réalisation des travaux réparatoires quand bien même la société Herve Thermique n'avait pas fait ce choix lors de la mise en place de l'installation. Le coût des travaux sera donc augmenté d'un pourcentage de 10 % à cet effet, comme il est d'usage, le montant préconisé par l'expert à ce titre apparaissant excessif au regard de la nature et du montant des travaux réparatoires.
Soit un montant TTC de travaux réparatoires, maîtrise d'oeuve incluse, de 64 435,22 euros.
Les conséquences d'un manquement à un devoir d'information et de conseil ne peuvent s'analyser qu'en une perte de chance (Civ. 1ère, 10 décembre 2014, n° 13-22.114).
En l'espèce, la responsabilité de la société Herve Thermique est essentiellement retenue pour avoir méconnu son devoir de conseil.
Il est manifeste que mieux informée, la société La Viadene n'aurait pas choisi le système de centrale de traitement d'air proposé par la société Herve Thermique et aurait certainement préféré un système de chauffe plus performant, eu égard notamment au coût total de l'opération (montant initial facturé augmenté des travaux réparatoires nécessaires pour un bon fonctionnement de l'installation), de sorte que le dommage résultant de la perte de chance ne saurait être inférieur à 90 % du montant de la réparation.
* frais d'expertise judiciaire : 35 767,56 euros
Les frais d'expertise ont été mis à la charge de la société La Viadene, demanderesse à l'expertise, par le juge des référés à titre d'avance et non pas pour pallier sa carence dans la preuve, comme le soutient à tort la société Herve Thermique.
L'expertise ayant établi la responsabilité de cette dernière dans les désordres subis par les intimées, la société Herve Thermique en supportera la charge financière.
* factures d'expert-conseil de 1 800 euros
La société La Viadene a fait le choix de prendre conseil sur un plan technique auprès de M. [Y] [N], expert, dans le cadre du déroulement des opérations d'expertise. Il lui appartient d'en assumer la charge.
* frais de constat d'huissier de 245,08 euros
La société La Viadene fait valoir qu'elle a été contrainte de faire intervenir un huissier aux fins de constat de température avant l'intervention de la société France Air le 2 février 2015. Comme l'ont justement retenu les premiers juges, ces frais font partie des frais irrépétibles et ne sauraient être indemnisés distinctement.
* frais de cautionnement bancaire de 5.059,04 euros
La cour d'appel a ordonné la constitution de ce cautionnement au visa de l'article 1799-1 du code civil, d'ordre public, rappelant que la fourniture de cette garantie est impérative, doit être donnée dès la conclusion du marché et qu'elle peut être demandée à tout moment tant que le marché n'a pas été entièrement soldé.
Rien ne permet de considérer qu'il s'agit d'un préjudice réparable et le coût doit indéniablement en être supporté par la société La Viadene.
En définitive, la société Herve Thermique sera condamnée à payer à la société La Viadene la somme de 57.991,70 euros à titre de dommages-intérêts, outre les frais d'expertise judiciaire.
Sur la réparation des préjudices subis par la société La Moder :
A titre liminaire, la société Herve Thermique oppose une limitation de responsabilité tirée de l'article 12 de ses conditions générales d'intervention aux termes desquelles :
' Les travaux réalisés à la demande du client par dérogation aux spécifications des normes et DTU en vigueur au jour de l'offre ne sont pas garantis.
Tout dommage indirect et/ou tout dommage immatériel tels que notamment les pertes de revenus, de gains d'exploitation, de marchandise, de clientèle, le coût d'une interruption de fonctionnement...(cette liste n'étant pas exaustive) n'est pas garanti, le client renonçant tant en son nom personnel qu'aux noms de ses assureurs éventuels à tout recours contre Herve Thermique. A ce titre, le client garantit Herve Thermiquede toute réclamation qui pourrait être faite par les tiers et ce compris le maître de l'ouvrage, le ou les locataires et le ou les exploitants'.
Elle ajoute que cette clause limitative de responsabilité contenue sans ses conditions générales de vente est opposable à la société La Moder qui se fonde sur une faute contractuelle envers la société La Viadene pour rechercher sa responsabilité.
L'article 13 est intitulé 'Limites de responsabilité' au pluriel et comprend deux alinéas. Il ne peut être considéré que les deux alinéas ne recoupent qu'une seule limitation de responsabilité en cas de demande de dérogation aux normes, puisque l'alinéa 2 prévoit une exclusion de responsabilité relative aux dommages indirects et / ou immatériels, quand le premier alinéa porte sur l'exclusion de toute garantie concernant des travaux réalisés à la demande du client hors les normes en vigueur.
L'application de l'alinéa 2 dont la société Herve Thermique revendique l'application priverait la société La Moder de toute indemnisation de ses dommages immatériels. Seul subsisterait l'indemnisation du préjudice matériel comprenant notamment les travaux réparatoires.
Les sociétés La Viadene et La Moder répliquent que cette clause crée un déséquilible significatif entre les parties et doit être réputée non écrite, tant sur le fondement de l'ancien article L.132-1 du code de la consommation que sur une jurisprudence développée par la cour de cassation prévoyant que toute clause qui prive de sa substance l'obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite.
Aux termes de l'ancien article L132-1 du code de la consommation devenu les articles L. 212-1 et L.212-2 :
'Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
(...)
Les clauses abusives sont réputées non écrites'.
Contrairement à ce que soutient la société Herve Thermique, cet article a vocation à s'appliquer à la présente espèce dès lors que la société La Viadene, professionnel de la restauration et non de la construction, a conclu avec la société Herve Thermique un contrat hors de son domaine d'activité, si bien qu'elle doit être considérée comme un non-professionnel vis-à-vis de la société Herve Thermique en application de l'article susvisé.
La clause limitative de responsabilité critiquée est rédigée en petits caractères pas plus apparents que les autres caractères des conditions générales et n'a pas été librement négociée entre les parties. Ayant pour objet d'exclure toute réparation de dommages immatériels et/ ou indirects - sans même prévoir aucun plafond d'indemnisation à ce titre-, en cas de faute contractuelle établie de la société Herve Thermique et ce quelles que soient les incidences de cette faute, elle a pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties en privant par avance et de manière automatique le client de la réparation d'une partie qui peut-être conséquente du préjudice auquel il a droit, et contredit ainsi la portée de l'obligation essentielle du professionnel qui est de réparer les conséquences dommageables de la mauvaise exécution de sa prestation.
Elle constitue une clause abusive qui est réputée non écrite et qui ne peut donc être opposée à la société La Moder.
* perte de chiffre d'affaires et par voie de conséquence perte de marge sur coût variable du fait de l'insuffisance de chauffage
L'expert judiciaire a eu recours à un sapiteur financier, M. [R], pour l'évaluation du préjudice immatériel de la société La Moder résultant de la perte de marge subie en raison de l'insuffisance de chauffage du restaurant.
Il a déterminé deux périodes, l'une du 22 décembre 2014, ouverture du restaurant, au 2 février 2015, l'autre allant jusqu'au 30 avril 2015 fin de l'hiver. La date du 2 février 2015 correspond à l'intervention de la société France Air pour remédier au défaut de logiciel, les températures extérieures devenant par ailleurs à compter de cette date plus clémentes. L'expert indique que la période du 3 février au 30 avril 2015 n'a pas nécessairement à être prise en compte au regard de l'indemnisation de la société La Moder.
La société Herve Thermique ne saurait sérieusement soutenir que l'inconfort dû au froid n'est pas en lien avec le chiffre d'affaires réalisé. En effet, un client est peu disposé à fréquenter ou s'attarder en consommant dans un restaurant où il fait froid comme l'ont justement observé les premiers juges. Le sapiteur a par ailleurs retenu une forte corrélation entre le chiffre d'affaires et la température pendant la période du 22 décembre 2014 au 2 février 2015.
Il s'avère que le réglage de la centrale de traitement d'air par la société France Air le 2 février 2015 a amélioré de manière significative le niveau de chauffage et que les températures extérieures après cette date ne sont plus descendues en deçà d'un seuil critique faisant ressentir le manque de chauffage dans l'établissement malgré les mesures provisoires mises en place (rideau d'air chaud, radiants).
Il en résulte que seule la période du 22 décembre 2014 au 2 février 2015 sera indemnisée.
Le sapiteur a calculé pour 10 jours en décembre, 31 jours en janvier et 2 jours en février l'écart entre le chiffre d'affaires réel et un chiffre d'affaire journalier estimé à 4 349 euros en considération de la moyenne 2016 et 2017 euros/jour, soit 5 436 euros, à laquelle il a appliqué une décote de 20 % pour début d'activité.
Toutefois, il ressort des propres constatations du sapiteur selon lesquelles :
- le chiffre d'affaires indépendant de la température extérieure (1 983 euros ) avant l'intervention du 2 février est très bas par rapport à celui comparable en 2016 (5 652 euros) et en 2017 (5 883 euros), soit en retrait de 65 %
- après l'intervention du 2 février, le chiffre d'affaires est moins dépendant de la température extérieure mais reste en retrait d'environ 33 % par rapport au chiffre d'affaire comparable en 2016 et 2017,
que la décote pour démarrage d'activité est manifestement plus importante que 20 %, se rapprochant davantage de 30 %, si l'on s'en tient à la comparaison du chiffre d'affaires après l'intervention du 2 février 2015 avec les années suivantes, alors que la dépendance à la température extérieure n'est plus avérée.
Dès lors, le calcul doit être rectifié selon un chiffre d'affaire journalier de 3 805 euros comme suit :
décembre 2014 : écart entre 10 417 euros et 38 050 euros = 27 633 euros
janvier 2015 : écart entre 76 828 euros et 117 955 euros = 41 127 euros
février 2015 : écart entre 3 646 euros et 7 610 euros = 3964 euros
Total : 72 724 euros
Soit un préjudice au niveau marge de : 72 724 x taux de marge brute de 73 % non discuté = 53.088,52 euros.
* surconsommation d'énergie
L'expert a évalué le surcoût lié à la consommation d'énergie à la somme de 3 937 euros.
Toutefois, si la société Herve Thermique a procédé à une analyse des consommations de chauffage du restaurant avant l'établissement de son devis faisant ressortir une économie d'énergie, celle-ci ne s'est pas engagée contractuellement sur ce point, de sorte que les dépenses d'énergie plus importantes que prévues ne constituent pas un préjudice réparable.
* remboursement des mesures complémentaires de chauffage :
L'expert a noté dans son rapport l'installation d'un rideau d'air chaud, de radiants et d'aérotherme gaz sur la façade, et ce dès le 22 décembre 2014, ayant permis d'améliorer le chauffage de l'établissement, dans l'attente des travaux réparatoires, et ce à titre conservatoire.
Ces frais engagés par la société La Moder sont en lien avec les manquements de la société Herve Thermique et constitue un préjudice réparable. Il convient donc de faire droit à cette demande de remboursement à hauteur de 12 765,04 euros TTC.
* retard de livraison de l'installation et de sa mise en service
L'expert n'a pas retenu de période de retard de livraison de la centrale de traitement d'air de France Air, aucune clause de délai n'engageant les parties, mais a retenu 5 jours de retard sur le poste planning des travaux, soit du 16 au 20 décembre 2014, proposant à ce titre une indemnisation à hauteur de 15 874 euros.
Comme l'ont justement relevé les premiers juges, il n'a pas été contractuellement convenu d'un délai de livraion fixe au terme du devis du 1er octobre 2014 liant les parties, contrairement au précédent devis. De surcroît, l'article 4 des conditions générales d'intervention de la société Herve Thermique stipule que 'sauf engagement ferme donnant lieu à planning contractuel accepté par Herve Thermique, les délais d'exécution
sont donnés à titre purement indicatif'.
En conséquence, l'exécution des travaux de la société Herve Thermique réalisés au-delà du planning prévisionnel donné à titre purement indicatif, dans le respect toutefois d'un délai raisonnable, ne saurait donner lieu à indemnisation. Le fait que la société Herve Thermique ait accepté d'établir un avoir à ce titre dans un souci de préserver ses relations commerciales avec les intimées n'y change rien.
* facture de la société Luso Rénovation de 3 447,60 euros
Cette facture réglée par la société La Moder porte sur différentes adaptations des lieux pour pouvoir faire passer le moteur et les gaines de l'installation de la société Herve Thermique dans ces derniers ainsi que sur des reprises de maçonnerie et faïences s'ensuivant.
Ces travaux s'inscrivent dans le cadre général de l'aménagement de la brasserie et relèvent de la bonne coordination des travaux confiée au maître d'oeuvre : 'l'architecte coordonnera l'intervention des différents intervenants'.
Il ne sera donc pas fait droit à ce chef de demande.
* honoraires de la société Cogeed, expert financier de 18 000 euros
La société La Moder a fait le choix de prendre conseil sur un plan technique dans le cadre du déroulement des opérations d'expertise et de la désignation d'un sapiteur financier. Il lui appartient d'en assumer la charge.
* factures des sociétés Clim Denfert et Dekostaff pour un montant total de 10 902,96 euros
Selon la société La Moder, au mois de février et mars 2022, la société Clim Denfert a dû intervenir pour remédier à une malfaçon tenant au placement de la centrale de traitement d'air trop près du mur, rendant son accès difficile pour l'entretien du moteur et le changement des filtres, et la société Dekostaff a été mandatée pour refaire un faux plafond à la suite des travaux de la première société.
La société Herve Thermique fait observer à juste titre que cette demande de condamnation est apparue pour la première fois dans les conclusions n° 3 du mois de juillet 2022 de la société Moder devant la cour. Il s'agit d'un désordre nouveau qui n'a pas été soumis à l'examen de l'expert et d'une demande nouvelle qui n'a pas été portée devant les premiers juges. Par ailleurs, cette demande manifestement fondée sur la responsabilité délictuelle de la société Herve Thermique se prescrit par cinq ans à compter de l'intervention de la société Herve Thermique en 2014, la découverte du désordre en 2022 -comme le prétend la société La Moder- n'étant pas justifiée au regard d'un entretien régulier qui ne peut avoir eu lieu la première fois à cette date.
Cette demande apparaît donc irrecevable à différents titres.
Sur le paiement des factures de la société Herve Thermique :
La société Herve Thermique sollicite le paiement de ses deux dernières factures :
- facture 827199 du 24 novembre 2014 d'un montant TTC de 58 201,44 euros
- facture 844729 du 20 janvier 2015 d'un montant TTC de 15 873,36 euros
soit un montant total, diminué de l'avoir, de 72 275,84 euros,
étant souligné que la société La Viadene n'a réglé sur un marché TTC de 105.821,18 euros que la somme de 31 746 euros.
Les manquements de la société Herve Thermique ne sauraient exonérer la société La Viadene du paiement des travaux exécutés ni même conduire à une rédcution du prix de moitié, dès lors que celle-ci est entièrement indemnisée des conséquences dommageables de ces manquements, sauf à procéder à une double indemnisation -prohibée.
En conséquence, il convient de condamner la société La Viadene au paiement de la somme de 72 275,84 euros augmentée des intérêts de retard au taux contractuel, à savoir le taux appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points, et d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvement de 80 euros (40 euros x 2 factures), conformément aux dispositions de l'article L.441-6 du code de commerce devenu l'article L.441-10 rappelées dans les conditions générales de la société Herve Thermique.
Il est constant que ces pénalités de retard pour non paiement des factures sont dues de plein droit, sans rappel, et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats. S'agissant de dispositions légales supplétives, elles ne constituent pas une clause pénale susceptible d'être réduite en raison de son caractère abusif.
En revanche, la clause pénale contractuelle selon laquelle 'sans préjudice des dispositions qui précèdent, les sommes non réglées à l'échéance sont de plein droit majorées de 20 % à titre de dommages-intérêts et sans que cette indemnité ne soit inférieure à 150 euros' revêt un caractère manifestement abusif eu égard à son fort pourcentage et aux pénalités de retard précédemment appliquées conformément à l'article L.441-6 du code de commerce. Elle sera limitée à 1 % des sommes impayées, soit un montant de 722,75 euros.
La demande de remboursement formée par la société La Moder des frais de l'étude thermique réalisée par la société Herve Thermique ne saurait être accueillie pour la même raison que précédemment exposée d'une interdiction de double indemnisation, cette étude qui a concouru à l'établissement du devis d'installation d'un système de chauffe insuffisant faisant partie intégrante de la prestation de la société Herve Thermique dont la mauvaise exécution a été indemnisée plus haut.
Sur la mainlevée de la garantie de paiement :
La société La Viadene fait valoir que la constitution de garantie n'a plus d'utilité depuis que le jugement de première instance assorti de l'exécution provisoire est intervenu ; que la société Herve Thermique refusant d'exécuter les condamnations prononcées à son encontre, elle a été contrainte de faire appel à un commissaire de justice ; que l'exécution forcée du jugement entrepris justifie la mainlevée de ce cautionnemment puisque les factures de la société Herve Thermique ont été réglées par compensation ; que la société Herve Thermique ayant refusé de donner son accord pour la mainlevée, une décision de justice en ce sens est nécessaire.
Cette demande de mainlevée du cautionnement apparaît comme l'accessoire de la demande en paiement des factures de la société Herve Thermique que ce cautionnement garantit. Elle sera déclarée recevable.
Le cautionnement est dû jusqu'au complet paiement des sommes dues à l'entrepreneur.
Si le paiement peut intervenir par compensation avec la créance de dommages-intérêts que la société La Viadene détient sur la société Herve Thermique en sa qualité de maître d'ouvrage, il apparaît que la mainlevée apparaît prématurée tant qu'une décision judiciaire définitive n'est pas intervenue pour arrêter définitivement les comptes entre les parties et pérenniser la compensation, sans risque de restitution en cas de réfomation.
La société La Viadene sera donc déboutée de ses demandes de mainlevée du cautionnement et de libération des fonds y afférant.
Sur la remise du carnet d'entretien sous astreinte :
Les sociétés intimées demandent à la cour, dans le dispositif de leurs écritures, d'ordonner à la société Herve Thermique de leur transmettre le carnet d'entretien de la centrale de traitement d'air sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Elles n'ont pas développé cette demande dans le corps de leurs conclusions, laquelle n'est donc pas motivée, sachant qu'il ressort du dossier que la centrale est entretenue sans difficulté apparente. Dans ces conditions, cette demande ne saurait être accueillie.
Sur le préjudice moral :
Les sociétés La Viadene et La Moder sollicitent la réparation de leur préjudice moral qu'elles caractérisent essentiellement par la perte d'énergie de leurs gérants et le temps passé par ceux-ci à vainement tenter de résoudre le problème de chauffage, à suivre la procédure et l'expertise judiciaire, autant de temps et d'énergie qu'ils n'ont pas investis dans le fonctionnement de leurs sociétés. Elles ajoutent qu'elles ont subi un préjudice supplémentaire du fait de l'atteinte à leur réputation, particulièrement importante pour un restaurant du fait des problèmes de chauffage.
Ainsi que l'a justement relevé la société Herve Thermique, le préjudice moral allégué des sociétés intimées ne peut être constitué par le temps passé par leurs gérants à traiter le litige, le préjudice décrit n'étant pas subi par les sociétés elles-mêmes ni ne revêtant un caractère moral, et relevant davantage du cadre des frais irrépétibles.
Quant à l'atteinte à la réputation du fait des problèmes de chauffage, aucune pièce ne vient la caractériser.
Il n'y a pas lieu de faire droit à ce chef de demande de dommages-intérêts.
Sur la garantie de la société France Air :
La société Herve Thermique fait valoir qu'en sa qualité de fournisseur, la société France Air engage à son égard sa responsabilité contractuelle sur le fondement des dispositions des articles 1147 et suivants (anciens) du code civil ; que la société France Air qui a fourni la machine, effectué la mise en service de l'installation et qui est intervenue sur place le 2 février 2015 pour effectuer des réglages sur ladite machine, est tenue d'une obligation de résultat quant à la conformité de la livraison ; qu'il a été relevé que la machine avait été livrée par la société France Air avec un logiciel non conforme et comportait une incohérence dans la programmation horaire de l'installation, autant d'élements à l'origine du mauvais fonctionnement du système de chauffage ; que si un préjudice devait être retenu pour la période antérieure au 2 février 2015, date à laquelle la société France Air a changé de logiciel, il sera intégralement imputable à cette dernière.
La société France Air réplique qu'en sa qualité de fournisseur, sa responsabilité ne peut être recherchée que si la démonstration d'un vice caché dans un des matériels vendus par ses soins, ou d'un manquement à son obligation de renseignement, est rapportée.
Elle ajoute que n'ayant eu connaissance ni des conditions dans lesquelles le cahier des charges a été dressé par le bureau d'études et/ou le maître d'oeuvre, ni des conditions de dimensionnement de l'appareil, sa responsabilité ne saurait être engagée quant au choix du matériel ; qu'en l'espèce, elle s'est contentée d'établir un devis pour la fourniture de matériel de ventilation à la demande de la société Hervé Thermique, hautement qualifiée dans son domaine d'activité, sans qu'il n'ait jamais été fait état, lors du devis ou de la commande, que le matériel recherché avait pour vocation à être l'unique système de chauffage du restaurant.
Elle ajoute qu'il résulte expressément du rapport de M. [K] que la nature des désordres et leur imputabilité relèvent de la seule responsabilité de la société Hervé Thermique qui n'a pas correctement estimé les besoins et a vendu une CTA avec PAC comme moyen de chauffage, alors qu'il résulte de la notice même du produit que la centrale de traitement d'air est complémentaire à un système de chauffage mais ne peut s'y substituer.
Il convient de préciser que la responsabilité de la société France Air n'est pas recherchée au regard d'un quelconque retard de livraison, aucun manquement n'ayant été retenu à ce titre à l'encontre de la société Herve Thermique.
La qualité du matériel vendu à la société Herve Thermique n'est pas non plus en cause, pas plus que la conception même du projet relevant de la société Herve Thermique hautement qualifiée dans ce secteur d'activité.
Il peut en revanche être reproché à la société France Air un mauvais fonctionnement de la centrale de traitement d'air, en mode inversé (mode chaud sélectionné : production de froid et vice-versa), jusqu'au réglage auquel elle a dû procéder le 2 février 2015, à savoir 'modification du paramètre C39 en C8 pour inverser la polarité de la vanne 4 voies. Après changement de ce paramètre, fonctionnement correcte du groupe', quand bien même le compte-rendu d'intervention mentionne que 'le client se plaint toujours du fonctionnemment de la machine, montée en témpérature pas assez rapide à son goût (la cooler play est l'unique moyen de chauffage du restaurant)'.
Si l'insuffisance de chauffage jusqu'au 2 février 2015 n'est pas intégralement imputable à la société France Air, il apparaît que celle-ci y a contribué puisqu'il a été relevé par l'expert que son intervention du 2 février 2015 avait amélioré le niveau de chauffage. La société France Air engage donc sa responsabilité envers la société Herve Thermique au titre de la mise en service du matériel fourni.
C'est par une juste appréciation des circonstances de l'espèce que les premiers juges ont retenu au titre de la demande de garantie de la société Herve Thermique une quote-part de 20 % à la charge de la société France Air, soit la somme de 10 617,70 euros (53.088,52 euros x 20 %).
Sur la garantie de la société JBBL Architecture :
La société Herve Thermique fait valoir que l'architecte est débiteur d'une obligation de conseil à l'égard de ses clients. Elle indique qu'elle ne recherche pas la garantie de la société JBBL Architecture quant à un manquement dans la conception du projet mais au titre d'un manquement à son obligation générale de conseil et de mise en garde. Elle affirme que la société JBBL Architecture devait conseiller sa cliente sur la proposition faite par la société Herve Thermique, donner ses préconisations, observations, remarques ou conseils et que celle-ci n'a formulé aucune réserve.
La société JBBL Architecture réplique que contrairement aux allégations de la société Hervé Thermique, son client était la SARL La Moder et non la SNC La Viadène ; que ces deux sociétés sont deux personnes morales distinctes, quand bien même elles ont les mêmes gérants ; que dès lors, il ne lui appartenait pas de conseiller la société La Viadène sur l'adaptation de la machine installée dans les locaux du restaurant.
Elle ajoute que l'étude thermique du restaurant était expressément exclue de sa mission; que la société Hervé Thermique était pour sa part tenue d'une obligation de conseil à l'égard du maître de l'ouvrage sur tous les aspects de l'opération et ses conséquences ; que s'il appartient à l'architecte d'assurer la conception et le suivi des travaux, la connaissance technique d'une installation de ventilation et de chauffage revient entièrement à l'entreprise spécialisée dans ce domaine ; qu'il ressort du rapport
d'expertise que la cause des désordres ne réside pas dans la conception globale du projet d'aménagement mais bien dans la conception du système de ventilation par la société Herve Thermique, laquelle devait tenir compte de la configuration spécifique des lieux et des besoins au regard de l'usage auquel l'installation était destinée.
Le contrat de maîtrise d'oeuvre mission normale conclu avec la société La Moder stipule expressément au titre des missions n'incombant pas au maître d'oeuvre : 'Ne sont pas compris dans la mission de l'architecte les missions de géomètre, d'huissier (constat des existants si nécessaire), de bureaux d'étude, d'ingénierie (calculs de structure, études thermiques...).
Le maître d'ouvrage missionnera indépendamment les différents intervenants.
L'architecte coordonnera l'intervention de ces différents intervenants'.
Les sociétés La Viadene et La Moder reconnaissent d'ailleurs dans leurs écritures (page 19) que la société JBBL Architecture n'a jamais été chargée du poste de travaux chauffage comme cela résulte très clairement du contrat signé avec cette dernière.
Indépendamment de l'absence de lien contractuel entre la société La Viadene et la société JBBL Architecture, il reste que cette dernière, qui avait seulement pour mission de coordonner les travaux de la société Herve Thermique avec les autres intervenants, n'est débitrice d'aucune obligation de conseil et de mise en garde, pour n'être ni le concepteur ni l'installateur du système de chauffage litigieux, et ce d'autant qu'il a été fait appel par le maître d'ouvrage à une entreprise hautement qualifiée et spécialisée dans le domaine du chauffage et de la ventilation à qui incombait, en cette qualité, une obligation de conseil relative notamment à l'adaptation du système de chauffage aux besoins du client.
En conséquence, aucun manquement ne peut être imputé à la société JBBL Architecture et la société Herve Thermique, par confirmation du jugement entrepris de ce chef, sera déboutée de sa demande de garantie formée à l'encontre du maître d'oeuvre.
Sur les demandes accessoires :
Le sort des dépens et de l'indemnité de procédure a été exactement réglé par les premiers juges.
Il apparaît équitable à hauteur de cour de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile au regard des circonstances de l'espèce et des sommes conséquentes allouées en première instance à ce titre.
Les dépens d'appel seront mis à la charge de la société Herve Thermique qui succombe in fine en son appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Tours du 19 février 2021 rectifié le 18 juin 2021 en ce qu'il a :
* condamné la société Herve Thermique à payer à la société La Viadene la somme de 35.767,56 euros au titre des frais d'expertise judiciaire,
* condamné la société La Viadene à payer à la société Herve Thermique les sommes de 72.275,84 euros outre les intérêts au taux appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points à compter du 20 août 2015, date d'assignation en référé, outre la somme de 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,
* ordonné la compensation des sommes dues entre la société La Viadene et la société Herve Thermique,
* débouté la société La Viadene de ses demandes relatives aux frais d'expertise conseil et aux frais de cautionnement bancaire,
* débouté la société La Moder de ses demandes relatives au retard de livraison et d'installation, à la facture Luso Renovation et aux frais d'expert financier Cogeed,
* débouté les sociétés La Viadene et la Modene de leurs demandes au titre du préjudice moral,
* débouté la société Herve Thermique de sa demande de garantie dirigée à l'encontre de la société JBBL Architecture,
* condamné la société Herve Thermique à payer à la société La Viadene la somme de 35.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la société Herve Thermique à payer à la société JBBL Architecture la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* débouté les sociétés Herve Thermique et France Air de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné les sociétés Herve Thermique et France Air à supporter les dépens de première instance (hors frais d'expertise judiaire) à raison respectivement de 80 % et 20 %,
Infirme le jugement entrepris pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés :
Condamne la société Herve Thermique à payer à la société La Viadene la somme de 57.991,70 euros à titre de dommages-intérêts correspondant aux travaux réparatoires, coût de la maîtrise d'oeuvre inclus,
Condamne la société Herve Thermique à payer à la société La Moder la somme de 53.088,52 euros à titre de dommages-intérêts pour insuffisance de chauffage,
Déboute la société La Moder de sa demande formée au titre de la surconsommation d'énergie,
Condamne la société Herve Thermique à payer à la société La Moder la somme de 12.765,04 euros au titre des frais d'appareils complémentaires de chauffage engagés à titre conservatoire,
Condamne la société La Viadene à payer à la société Herve Thermique la somme de 722,75 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat,
Condamne la société France Air à garantir la société Herve Thermique de la condamnation prononcée à son encontre au titre du préjudice subi par la société La Moder du fait de l'insuffisance de chauffage à hauteur de la somme de 10.617,70 euros,
Y ajoutant,
Dit que les sommes dues par la société Herve Thermique porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, lesquels porteront eux-mêmes intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du même code,
Déclare irrecevables les demandes de la société La Moder relatives aux factures Clim Denfert et Dekostaff,
Déclare recevable la demande de mainlevée du cautionnement bancaire de la société La Viadene,
Déboute la société La Viadene de cette demande de mainlevée et des demandes afférentes à la libération des fonds,
Rejette la demande de remise du carnet d'entretien sous astreinte,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour,
Condamne la société Herve Thermique aux dépens d'appel.
Arrêt signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT