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04/05/2023 | FRANCE | N°21/01774

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre commerciale, 04 mai 2023, 21/01774


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE







GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/05/2023

Me Estelle GARNIER

la SELARL ECS AVOCATS

ARRÊT du : 04 MAI 2023



N° : - 23

N° RG 21/01774

N° Portalis DBVN-V-B7F-GMO5



DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 29 Avril 2021



PARTIES EN CAUSE



APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265269057587509

La S.A.R.L. ASEG

Agissant poursuite

s et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège,

[Adresse 1]

[Localité 3]





Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORL...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/05/2023

Me Estelle GARNIER

la SELARL ECS AVOCATS

ARRÊT du : 04 MAI 2023

N° : - 23

N° RG 21/01774

N° Portalis DBVN-V-B7F-GMO5

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 29 Avril 2021

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265269057587509

La S.A.R.L. ASEG

Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège,

[Adresse 1]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS

et pour avocat plaidant Me Charles-François DUBOSC, membre de la SCP DUBOSC-SAUTROT, avocat au barreau de MONTARGIS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: -/-

La S.A.S. LEUL MENUISERIES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Ayant pour avocat Me Louis BODET, membre de la SELARL ECS AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 28 Juin 2021

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 02 Mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 09 MARS 2023, à 14 heures, Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, et Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller, en charge du rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 805 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, et Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,

Madame Fanny CHENOT, Conseiller,

Monsieur Damien DESFORGES, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 04 MAI 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

 

Suivant devis en date du 14 novembre 2018, la société Aseg a passé commande de plusieurs menuiseries auprès de la société Leul Menuiseries pour un montant de 34 768,45 € TTC. 

Courant janvier 2019, la société Aseg a fait part de son mécontentement à la société Leul Menuiseries en lui reprochant de ne pas avoir respecté les normes « PMR ».

Par acte d'huissier du 15 octobre 2019, la société Leul Menuiseries a fait assigner la société Aseg devant le tribunal de commerce d'Orléans afin de la voir condamner au paiement d'un solde de factures impayées de 24'378,06 €.

 

Par jugement du 29 avril 2021, le tribunal de commerce d'Orléans a :

- débouté la SARL Aseg de l'ensemble de ses demandes,

- dit la commande, par devis signé du 14 novembre 2018, conforme et la vente valide,

- condamné la SARL Aseg à payer à la SAS Leul Menuiseries le solde des sommes dues, soit 24 378,06 €, avec intérêt au taux légal à compter de la date de la première mise en demeure du 4 mars 2019,

- débouté la SAS Leul Menuiseries de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la SARL Aseg à verser la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL Aseg aux dépens, y compris les frais de greffe liquidés à la somme de 64,68 €.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont considéré, au visa de l'article L 111-1 du code de la consommation, que la société Leul Menuiseries n'avait pas manqué à son devoir de conseil -la demande de la société Aseg sur la mise en place de portes aux normes PMR n'étant intervenue que le 8 janvier 2019- et qu'elle était bien fondée à solliciter le solde de sa facture pour un montant total de 24'378,06 € dès lors que ni la livraison, ni la pose de l'intégralité de la commande ni la part de règlement déjà effectuée n'étaient contestés par la société Aseg.

 

Suivant déclaration du 28 juin 2021, la SARL Aseg a relevé appel de l'ensemble des chefs expressément énoncés de ce jugement, à l'exception de la disposition relative au rejet de la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la société Leul Menuiseries.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 août 2021, la SARL Aseg demande à la cour de : 

- recevoir la SARL Aseg en son appel,

- infirmer la décision rendue dans sa totalité,

- déclarer la SAS Leul Menuiseries tenue à une obligation de conseil dès lors qu'elle avait entendu contrôler et proposer des modifications à la demande du devis d'origine, ce qui comprenait nécessairement l'exacte appréciation des dimensions du matériel fourni et sa conformité avec la réglementation, et qu'elle a manqué à celle-ci,

- déclarer les marchandises livrées non conformes aux commandes passées,

En conséquence,

- déclarer mal fondées les réclamations de la SAS Leul Menuiseries et l'en débouter,

- subsidiairement, désigner un expert avec mission de contrôler la conformité des commandes passées avec leur objet et leur conformité avec la législation applicable, notamment concernant l'accessibilité et l'adaptabilité aux personnes handicapées et surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise, tous droits et dépens étant réservés,

- en toute hypothèse, condamner la société Leul Menuiseries à lui verser la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, et accorder à Me Garnier le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelante met en avant le fait que le devis du 14 novembre 2018 mentionne bien une 'porte passage PMR' en page 11, que dès lors c'est à tort que le tribunal a considéré que la mise en place de portes aux normes PMR n'avait jamais été évoquée entre les parties. Elle fait surtout valoir que le second devis a été établi après la visite d'un technico-commercial de la société Leul Menuiseries, lequel a selon elle manqué à son obligation de conseil dès lors que ce second devis s'avère non-conforme aux obligations découlant des règles de construction relatives à l'accessibilité et à l'adaptabilité aux personnes handicapées des bâtiments soumis au permis de construire.

Elle observe par ailleurs que plusieurs des fenêtres livrées ne sont pas conformes à la commande passée au regard d'un écart de plusieurs centimètres constaté par huissier.

La société Aseg estime qu'elle était dans ces conditions fondée à opposer à la société Leul Menuiseries l'exception d'inexécution.

 

La SAS Leul Menuiseries, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante ont été signifiées par acte du 5 août 2021 délivré à personne morale, a constitué avocat le 11 novembre 2021, les conclusions de l'appelante étant alors re-notifiées par voie électronique le 15 novembre 2021 du fait de cette constitution. L'intimée n'a pas conclu. En application de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, elle est réputée s'approprier les motifs du jugement entrepris.

 

Il est expressément référé aux écritures de l'appelante pour un plus ample exposé des faits ainsi que de ses moyens et prétentions.

 

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 2 mars 2023.      

 

MOTIFS :

Sur l'obligation de conseil de la société Leul Menuiseries :

Selon l'article 1112-1 du code civil, celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son concontractant (alinéa 1er ). Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie (alinéa 4).

S'il est constant que le vendeur professionnel est tenu à une obligation d'information et de conseil qui lui impose d'informer l'acheteur sur l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation qui en est prévue et à la réglementation, l'obligation d'information du fabricant ou du revendeur spécialisé n'existe que dans la mesure où la compétence de cet acheteur ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des biens qui lui sont livrés.

En l'espèce, il convient de relever le silence de la société Aseg aussi bien sur l'objet de son activité que sur son rôle dans la construction des logements concernés par sa commande litigieuse. Toutefois, la lecture du constat d'huissier qu'elle produit révèle, suivant l'exposé consigné par l'officier ministériel, qu'une SCI Arc en Ciel lui a confié la construction de quatre logements collectifs et que c'est dans ce cadre qu'elle a passé commande auprès de la société Leul Menuiseries de plusieurs portes et fenêtres.

Cette intervention de la société Aseg en qualité de constructeur ou à tout le moins de maître d''uvre lors de sa commande auprès de la société Leul Menuiseries est confortée par la lecture des échanges entre les deux entreprises :

- c'est la première qui a initialement indiqué à la seconde, de manière précise, les portes et fenêtres souhaitées pour chaque logement, donnant leurs spécificités ainsi que leurs cotes et usant au passage de sigles tendant à montrer sa connaissance du sujet (ainsi «VR » pour « volets roulants » ou « OF » pour « ouverture à la française » comme il est loisible de le comprendre à la lecture des autres pièces) ;

- la lecture du mail du 9 janvier 2019 postérieur à la livraison témoigne de ce que la société Aseg a réceptionné, déballé et contrôlé les huisseries livrées, pointant même à cette occasion des défauts de fabrication ;

- dans le dernier mail produit par l'appelante, daté du 18 janvier 2019, M. [J], gérant de la société Aseg, écrit à son interlocuteur au sein de la société Leul Menuiseries : « comme déjà expliqué et comme vous ne pouvez l'ignorer, au vu des dispositions applicables lors de la construction de logements neufs et au regard de la réglementation nous devons rendre accessibles aux personnes à mobilité réduite 20 % des logements neufs au minimum et 80 % doivent être évolutifs soit dans notre cas, 2 sur 4 », positionnant sa société comme constructeur de logements tenue à ce titre de respecter les normes d'accessibilité des personnes à mobilité réduite, ce dont elle avait parfaitement connaissance.

Il en résulte que la société Aseg avait manifestement les compétences techniques pour donner des indications éclairées à son fournisseur sur les portes et fenêtres nécessaires, notamment au regard des normes en vigueur. Elle ne saurait donc rechercher la responsabilité contractuelle de la société Leul Menuiseries au titre d'un manquement à son obligation d'information et de conseil.

Sur la conformité des marchandises livrées :

La piètre qualité et les angles de vue des photographies en noir et blanc annexées au constat d'huissier versé aux débats ne permettent pas d'observer la manière dont les cotes ont été mesurées et d'établir avec suffisamment de certitude le décalage allégué par l'appelante entre les hauteurs des fenêtres numérotées au devis 2, 7 et 14 et les fenêtres livrées. Au surplus l'huissier n'ayant mesuré que quelques huisseries parmi les 21 articles commandés, il n'est pas établi au-delà des seules déclarations de

la société Aseg que les mesures auxquelles elle a fait procéder correspondent bien aux trois fenêtres numérotées au devis 2, 7 et 14 et non à d'autres fenêtres de la commande litigieuse.

S'agissant des trois autres non-conformités invoquées par la société Aseg dans ses écritures concernant les fenêtres n° 13, 6 et 17, elles ne sont corroborées par aucun constat d'huissier et ne résultent donc que de ses seules allégations.

En l'état du seul constat produit, la société Aseg ne démontre pas que la société Leul Menuiseries aurait failli à son obligation de délivrance telle qu'elle résulte de l'article 1604 du code civil en lui adressant certaines huisseries aux dimensions non conformes à la commande.

L'article 146 du code de procédure civile rappelle en son alinéa 2 qu'en aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve. Au cas présent, il était loisible à la société Aseg de faire dresser un constat comparatif suffisamment exhaustif et précis de manière à mettre en exergue les défauts de dimension allégués. C'est donc à juste titre que les premiers juges n'ont pas fait droit à titre subsidiaire à la demande d'expertise judiciaire de la société Aseg.

Sur la demande principale en paiement :

Le rejet de la demande en paiement du solde de facture sollicité au terme de ses écritures par la société Aseg doit s'analyser en une demande de réduction du prix pour exécution imparfaite de la prestation en vertu de l'article 1223 du code civil.

L'appelante ne démontrant pas que la société Leul Menuiseries aurait failli à ses obligations contractuelles, elle ne pourra qu'être déboutée de cette demande.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Aseg à payer à la société Leul Menuiseries la somme de 24'378,06 € avec intérêts au taux légal à compter du 4 mars 2019.

Sur les autres demandes :

Le sort des dépens et de l'indemnité de procédure a été exactement réglé par les premier juges.

La société ASEG, qui succombe à hauteur de cour, supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du 29 avril 2021 du tribunal de commerce d'Orléans en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne la société Aseg aux dépens d'appel. 

Arrêt signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/01774
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;21.01774 ?
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