COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/12/2022
la SCP REFERENS
Me Antoine PLESSIS
ARRÊT du : 15 DECEMBRE 2022
No : 196 - 22
No RG 21/00337
No Portalis DBVN-V-B7F-GJHE
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 01 Décembre 2020
PARTIES EN CAUSE
APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2620 8356 5705
Monsieur [U] [D]
né le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Ayant pour avocat Me Laurent LALOUM, membre de la SCP REFERENS, avocat au barreau de BLOIS
Madame [S] [M] épouse [D]
née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Ayant pour avocat Me Laurent LALOUM, membre de la SCP REFERENS, avocat au barreau de BLOIS
D'UNE PART
INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2616 4268 1790
S.A.R.L. CYA COIFFURE
[Adresse 5]
[Localité 7]
Ayant pour avocat Me Antoine PLESSIS, membre de la SCP OMNIA LEGIS, avocat au barreau de TOURS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 01 Février 2021
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 8 Septembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 13 OCTOBRE 2022, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en charge du rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 805 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Ferréole DELONS, Conseiller,
Greffier :
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 15 DECEMBRE 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
La SARL Cya Coiffure (la société Cya) exerce l'activité de salon de coiffure depuis 2015 et dispose d'un salon de coiffure à [Localité 7], [Adresse 5].
Par acte du 1er septembre 2016, M. [U] et Mme [S] [M] épouse [D] ont donné à bail commercial à la SARL Cya Coiffure un local sis [Adresse 2] à [Localité 4], afin d'y exploiter un second salon de coiffure. Le bail stipulait un loyer mensuel de 319 €.
A la demande de la locataire, le mandataire des bailleurs (la SARL Les Services Immobiliers) l'a autorisée le 13 octobre 2016 à réaliser à sa charge et dans les règles de l'art des travaux de reprise de revêtement du sol et des murs.
Après dépose du sol existant, il s'est avéré que le parquet en lambourdes était en mauvais état et qu'il ne permettait pas de poser un nouveau revêtement.
Par courriers recommandés avec avis de réception du 28 novembre 2016 et du 14 janvier 2017, la SARL Cya a informé le mandataire des bailleurs a été informé de la situation et lui a demandé de faire procéder aux travaux de reprise du sol.
Par courrier du 21 mars 2017, le mandataire des bailleurs a opposé un refus à cette demande en indiquant au preneur que les travaux ne relevaient pas du gros oeuvre mais du second oeuvre (lambourdes altérées).
En l'absence de réponse à la mise en demeure adressée le 7 juin 2017, la société Cya a saisi par acte du 21 juillet 2017 le juge des référés qui, par ordonnance du 28 juillet 2017, a ordonné une expertise confiée à M. [K].
L'expert a déposé son rapport le 1er décembre 2017.
Au vu des conclusions du rapport d'expertise, le conseil de la demanderesse a, par courriel du 16 janvier 2018, de nouveau demandé la prise en charge des travaux par le bailleur.
En l'absence de réponse et après en avoir avisé les bailleurs par courriels du 16 janvier 2018, la société Cya a fait réaliser les travaux de reprise du sol pour un montant de 5.237,64 €.
Les époux [D] ont remboursé cette somme à la société Cya le 26 février 2018.
Par acte d'huissiers de justice du 3 avril 2018, la société Cya a fait assigner les époux [D] devant le tribunal de grande instance de Tours aux fins d'obtenir réparation des préjudices subis, à savoir le paiement du loyer et les pertes d'exploitations.
Par jugement du 1er décembre 2020, le tribunal judiciaire de Tours, a :
- dit que la réfection des deux planchers en bois superposés constitue des réparations relatives au gros oeuvre à la charge du bailleur,
- constaté que les époux [D] ont versé le 21 février 2018, la somme de 5.237,64 € au titre de la réparation des deux planchers,
- condamné les époux [D] à verser à la SARL Cya Coiffure la somme de 27.285€ à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis par le retard apporté par le bailleur à s'acquitter du coût des réparations,
- débouté les époux [D] de l'ensemble de leur demande reconventionnelle,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné les époux [D] à verser à la SARL Cya Coiffure une indemnité de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré qu'au vu du bail et des constatations de l'expert judiciaire, la reprise des deux planchers en bois superposés, qui sont une partie privative, constituait une grosse réparation incombant aux bailleurs, ce que ces derniers ont finalement admis en remboursant le 21 février 2018 les travaux de
reprise. Il a aussi retenu que dès le mois de juin 2017, les bailleurs savaient qu'ils devaient procéder à la reprise du sol, que leur refus de prendre en charge les travaux était à l'origine de l'interruption des travaux de réaménagement et du retard de l'ouverture du salon initialement prévue début novembre 2016, que dès lors, il y avait lieu d'indemniser la SARL Cya Coiffure des 15 mois de loyers payés entre novembre 2016 et le 26 février 2018, et des pertes d'exploitation subies au cours de la même période à hauteur d'un montant évalué par comparaison avec les données comptables versées aux débats à une somme de 1.500 € par mois.
Les époux [D] ont formé appel de la décision par déclaration du 1er février 2021 en intimant la SARL Cya Coiffure, et en critiquant le jugement en ce qu'il les a condamnés à verser à la SARL Cya Coiffure la somme de 27.285 € à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis par le retard apporté par le bailleur à s'acquitter du coût des réparations et 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
Dans ses dernières conclusions du 28 octobre 2021, ils demandent à la cour de :
Vu les articles 1720 et 1721 du Code civil,
Vu les pièces annexées aux débats,
Vu la sommation de communiquer,
- infirmer le jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Tours en ce qu'il a :
condamné les époux [D] à verser à la SARL Cya Coiffure la somme de 27.285 € à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis par le retard apporté par le bailleur à s'acquitter du coût des réparations,
condamné les époux [D] à verser à la SARL Cya Coiffure une indemnité de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
En conséquence,
- dire et juger que le préjudice lié au paiement des loyers se limite à la somme de 4.466 €,
- ramener à de plus justes proportions le montant de l'indemnité due au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouter la société Cya Coiffure de ses plus amples demandes, fins et conclusions,
- statuer sur ce que de droit sur les dépens.
Ils font en premier lieu valoir que les premiers juges ont retenu, pour calculer les préjudices, une période courant de novembre 2016 au 28 février 2018, alors que compte tenu du délai de travaux envisageable selon l'expert judiciaire sans la problématique de support, soit deux mois et des courriers de la société Cya elle-même, l'ouverture du salon n'était pas prévue au 1er novembre 2016, mais début janvier 2017, soit une période de quatorze mois et non seize mois.
Ils soutiennent ensuite que c'est à tort que le tribunal s'est appuyé pour chiffrer la perte d'exploitation, sur les chiffres prévisionnels établis le 18 octobre 2017 pour le salon de Tours et sur le chiffre d'affaire du salon de Saint Pierre des Corps alors que les deux salons, qui ne sont pas situés dans le même secteur géographique, n'en
sont pas au même stade dans le développement de leur activité,et que compte tenu de la durée de la procédure judiciaire, la société Cya était en mesure de produire, lors de l'audience du 6 octobre 2020, sa comptabilité réelle de l'année 2018 pour le salon de [Localité 4].
Ils ajoutent que la société Cya continue, en cause d'appel, à se fonder sur les chiffres prévisionnels, qu'il résulte cependant de son bilan au 31 mars 2020, que le chiffre d'affaires réalisé par le salon de [Localité 4] sur la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2019 est de 6.687,42 €, que dès lors, compte tenu des charges de loyers qui s'établissent à la somme de 3.828 € et des salaires et charges sociales, dont le montant demeure inconnu, tout laisse à penser que le résultat du salon de [Localité 4] sur cette période est nul, voir négatif. Ils précisent en conséquence faire sommation à la société Cya de communiquer les justificatifs de charges pour la période du 1er avril 2018 au 31 mars 2019 et à défaut, sollicitent qu'elle soit déboutée de sa demande au titre de la perte d'exploitation. Ils ajoutent que les chiffres d'affaires et les résultats d'exploitation mentionnés sur l'acte de cession du fonds de commerce intervenu le 16 octobre 2021 n'étant pas certifiés par un expert-comptable et ne distinguant pas les charges du salon de [Localité 7] et de [Localité 4], ils ne peuvent pas plus permettre de chiffrer une éventuelle perte d'exploitation.
La SARL Cya Coiffure demande à la cour, par dernières conclusions du 9 juin 2021, de :
Vu les pièces versées aux débats,
Vu la jurisprudence précitée,
Vu les articles 606, 1720 et 1721 du Code civil,
- débouter les époux [D] de l'ensemble de leurs prétentions contraires aux présentes écritures,
- confirmer la décision du tribunal judiciaire de Tours du 1er décembre 2020 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a limité les condamnations prononcées à l'encontre des époux [D] à la somme de 4.785 € au titre du remboursement des loyers, et 22.500 € au titre de la perte d'exploitation,
- et infirmer la décision sur le montant des condamnations allouées,
Statuant à nouveau,
- condamner solidairement les époux [D] à payer à la SARL Cya Coiffure les sommes de :
5.104 € en remboursement des loyers pour la période de novembre 2016 à février 2018 inclus,
40.400 € au titre de la perte d'exploitation,
- condamner solidairement les époux [D] à payer à la SARL Cya Coiffure la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner M. et Mme [D] aux entiers dépens.
Elle fait valoir que conformément au rapport d'expertise judiciaire, la période de préjudice à prendre en compte est celle de novembre 2016 à février 2018 inclus, soit seize mois et non quinze ainsi que l'a retenu le tribunal.
Elle expose ensuite que le compte de résultat prévisionnel dressé par son expert-comptable le 18 octobre 2017 mentionne un résultat annuel de 30.302 € pour le salon de [Localité 4], soit des bénéfices attendus de 2.525 € par mois, que ce prévisionnel
est confirmé par son bilan de l'année 2018 et les attestations de chiffre d'affaires pour l'exercice 2019, que la différence de marge entre les deux salons s'explique par la différence de prix pratiqués, qu'elle doit en conséquence être indemnisée au titre des pertes d'exploitation à hauteur de la somme de 40.400 €.
Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 8 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour est uniquement saisie des chefs de jugement relatifs, d'une part à la condamnation des époux [D] au versement de dommages et intérêts à hauteur de 27.285€, chef contesté par les deux parties, d'autre part aux frais irrépétibles et dépens.
Il ressort des pièces produites et notamment du rapport d'expertise que la société Cya, après signature du bail le 1er septembre 2016 et autorisation donnée par les bailleurs le 13 octobre 2016, a commencé à procéder à des travaux de changement de revêtement du sol et des murs mais a dû les interrompre après la dépose du sol existant, en raison de la nécessité de procéder au préalable au remplacement des deux planchers en bois superposés.
Le chef du jugement ayant dit que la réfection des deux planchers en bois superposés constituait des réparations relatives au gros oeuvre à la charge du bailleur n'est critiqué par aucune des parties.
Ainsi que l'a retenu l'expert, le refus des bailleurs de prendre en charge la réfection du support de revêtement de sol est à l'origine de l'interruption des travaux de réaménagement.
En application de l'article 1721 du Code civil, les bailleurs doivent dès lors indemniser la société Cya du préjudice subi du fait de l'interruption des travaux de réaménagement qui l'ont empêché d'exploiter le local jusqu'à ce que les travaux de gros oeuvre incombant aux bailleurs soient réalisés.
S'agissant de la période d'indemnisation, les parties s'accordent pour considérer que les travaux ont été achevés le 28 février 2018, date qui marque l'arrêt du préjudice subi par la société Cya qui pouvait à cette date exercer son activité.
S'agissant du point de départ, l'expert a estimé qu'une ouverture du salon début novembre 2016 n'était pas matériellement impossible, précisant que si le support de revêtement de sol avait été en bon état, un délai de chantier de deux mois aurait pu suffire.
Il ressort toutefois du courrier recommandé adressé par la gérante de la société Cya aux bailleurs le 23 novembre 2016 qu'elle avait prévu d'ouvrir son salon de coiffure en décembre 2016, avant les fêtes de Noël, et non en novembre.
Si le conseil de la société Cya a ensuite indiqué dans un courrier du 7 juin 2017, que cette dernière "n'a pu ouvrir son salon de coiffure au mois de janvier 2017 comme prévu", il convient de retenir la date d'ouverture donnée par la gérante de la société elle-même dans son courrier du 23 novembre 2016, au plus près du projet d'ouverture, c'est à dire le mois de décembre 2016.
C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu une période d'indemisation de 15 mois, de décembre 2016 (inclus) au mois de février 2018 (inclus).
La société Cya réclame d'une part le remboursement des loyers qu'elle a réglé pendant la période d'indemnisation sans pouvoir exploiter son activité, d'autre part la perte d'exploitation qu'elle a subie pour cette même raison.
Il n'est pas contesté, ainsi que l'a relevé l'expert judiciaire, que le loyer d'un montant de 319€ a été constamment réglé depuis la signature du bail. Il a donc été payé de décembre 2016 à février 2018 sans que la locataire ait pu occuper le local et y travailler, du fait du refus des bailleurs de procéder aux travaux de gros oeuvre indispensables. Il existe donc un lien de causalité direct entre le fait d'avoir réglé ces loyers en pure perte et le refus fautif des bailleurs, qui doivent être condamnés à leur rembourser la somme de 4785€, ainsi que l'a retenu à juste titre le tribunal.
Par ailleurs, la société Cya qui n'a pu exercer son activité pendant 15 mois n'a pu réaliser de chiffre d'affaires permettant après déduction des charges, de dégager un résultat d'exploitation et des revenus.
Il incombe à la société Cya de rapporter la preuve de l'existence du préjudice de perte d'exploitation qu'elle allègue et qui doit être réparé sur la base, non du chiffre d'affaires qui n'a pu être réalisé mais du résultat d'exploitation qui n'a pu être dégagé.
Elle demande à être indemnisée à partir du résultat net de 30.302€ (soit 2525€ par mois) mentionnée dans le compte de résultat prévisionnel dressé par son expert comptable le 18 octobre 2017 qui prévoit pour les douze premiers mois d'activité, un chiffre d'affaires de 122.000€, un total de charges d'exploitation de 85.850€ et un résultat de 30.302€.
Ainsi que l'indique à juste titre l'expert, la réalité chiffrable de ce compte de résultat n'est pas démontrable. Il résulte d'ailleurs des comptes annuels arrêtés au 31 mars 2020 produits par l'intimée dans lesquels les données comptables pour l'exercice du 1er avril 2018 au 31 mars 2019 sont également données que, s'agissant du salon situé à [Localité 4], le chiffre d'affaires réalisé a été très inférieur aux prévisions puisqu'il a été de 6687€ (559 + 6128) durant l'exercice du 1er avril 2018 au 31 mars 2019 et de 77.258€ (8771 + 68.487) pour l'exercice du 1er avril 2019 au 31 mars 2020.
Bien que l'expert comptable qui a établi ces comptes indique, dans une attestation du 13 octobre 2021 annexée à l'acte de cession du du 16 octobre 2021 par lequel la société Cya a cédé son fonds de commerce exploité à [Localité 4], que le chiffre d'affaires communiqué n'a pas fait l'objet d'un contrôle de la part de son cabinet, cet élément est insuffisant pour remettre en cause ces données qui résultent de comptes annuels qu'il a accepté d'établir.
Ainsi que l'indiquent les appelants, ces comptes annuels, s'ils différencient le chiffre d'affaires réalisé par le salon de coiffure de [Localité 4] et celui réalisé par le salon de [Localité 7], ne distinguent pas les dépenses exposées par chacun des deux salons, ni par suite, les résultats effectués sur chacun d'eux, ce qui ressort aussi de l'acte de cession du 16 octobre 2021 dans lequel il est mentionné que les résultats d'exploitation afférents au fonds cédé (le salon de coiffure de [Localité 4]) n'ont pu être communiqués, "la société Cya ne différenciant pas les charges entre les deux salons de [Localité 4] et de [Localité 7]".
En conséquence, s'agissant particulièrement de la première année d'exercice pour le salon de [Localité 4] (avril 2018-mars 2019), le résultat de la société Cya (23.411€) ne rend pas compte du résultat dégagé par l'activité du seul salon de [Localité 4] qui suppose de déduire du chiffre d'affaires réalisé par ce salon (6687€), non seulement le loyer annuel à hauteur de 3828€ mais aussi les autres charges afférentes au local de [Localité 4] (électricité, eau, téléphone...) et les charges de salaires et cotisations sociales. Compte tenu du faible chiffre d'affaires réalisé sur l'exercice 2018-2019, c'est à juste titre que les appelants soutiennent que tout laisse à penser que le résultat 2019 du salon de [Localité 4] a été nul voire négatif.
Alors que les appelants soulèvent expressément ce point dans leurs écritures et ont adressé à l'intimée le 22 juin 2021 une sommation de communiquer notamment, le registre du personnel, les DADS pour 2019 et les bulletins de paye 2019 du ou des salariés travaillant au salon de coiffure de Tours, l'intimée ne produit strictement aucun élément permettant d'évaluer, ne serait-ce que pour les postes principaux, les dépenses afférentes au seul salon de Tours et par suite de connaître le résultat réel qu'elle a dégagé durant les 12 premiers mois d'activité. Elle ne fait pas non plus valoir de motif légitime d'avoir été dans l'impossibilité de produire les factures afférentes aux charges exposées sur le salon de [Localité 4].
Ce faisant, elle ne met pas en mesure la cour de déterminer si elle a bien subi une perte d'exploitation durant la période indemnisable retenue.
Le préjudice de perte d'exploitation ne peut pas non plus être calculé sur la base du résultat dégagé par la société Cya sur le salon de [Localité 7] durant l'exercice du 1er avril 2017 au 31 mars 2018, les appelants le contestant expressément, et ces deux salons ayant des lieux d'implantation et des caractéristiques distinctes et n'ayant pas commencé à développer leur activité au même moment.
Force est donc de constater que la société Cya ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence de la perte d'exploitation qu'elle prétend avoir subi durant les 15 mois durant lesquels elle n'a pu ouvrir son local du fait du refus des bailleurs de procéder aux travaux de gros oeuvre.
Les époux [D] doivent dès lors être condamnés à payer à la société Cya, uniquement la somme de 4785€, par infirmation du jugement quant au quantum retenu.
Si les appelants obtiennent pour partie gain de cause en appel, l'action engagée par la société Cya Coiffure était néanmoins fondée en son principe et pour partie en son quantum.
Il convient dès lors de confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles et de condamner la société Cya aux entiers dépens exposés en appel. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 devant la cour et l'unique demande formée par la société Cya à ce titre sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné les époux [D] à verser à la SARL Cya Coiffure la somme de 27.285 € à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis par le retard apporté par le bailleur à s'acquitter du coût des réparations ;
Statuant à nouveau sur le seul chef infirmé,
- Condamne M. [U] et Mme [S] [M] épouse [D] à verser à la SARL Cya Coiffure la somme de 4785 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi par le retard apporté par le bailleur à s'acquitter du coût des réparations,
- Rejette le surplus de la demande formée par la société Cya Coiffure ;
- Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions critiquées,
Y ajoutant,
- Rejette la demande formée par la société Cya Coiffure au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. [U] et Mme [S] [M] épouse [D] [W] aux dépens exposés en appel.
Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT