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08/12/2022 | FRANCE | N°21/003961

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 08 décembre 2022, 21/003961


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/12/2022
la SELARL ETHIS AVOCATS
la SELARL WALTER et GARANCE AVOCATS
ARRÊT du : 08 DECEMBRE 2022

No : 190 - 22
No RG 21/00396
No Portalis DBVN-V-B7F-GJLC

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BLOIS en date du 17 Décembre 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2633 9837 1314

Monsieur [W] [T]
Né le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 13]
[Adresse

14]
[Localité 10]

Ayant pour avocat Me Laurent SUZANNE, membre de la SELARL ETHIS AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

Ma...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/12/2022
la SELARL ETHIS AVOCATS
la SELARL WALTER et GARANCE AVOCATS
ARRÊT du : 08 DECEMBRE 2022

No : 190 - 22
No RG 21/00396
No Portalis DBVN-V-B7F-GJLC

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BLOIS en date du 17 Décembre 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2633 9837 1314

Monsieur [W] [T]
Né le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 13]
[Adresse 14]
[Localité 10]

Ayant pour avocat Me Laurent SUZANNE, membre de la SELARL ETHIS AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

Madame [O] [T]
Née le [Date naissance 8] 1996 à [Localité 13]
[Adresse 1]
[Localité 12]

Ayant pour avocat Me Laurent SUZANNE, membre de la SELARL ETHIS AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

Madame [V] [T]
Née le [Date naissance 5] 1999 à [Localité 13]
[Adresse 2]
[Localité 9]

Ayant pour avocat Me Laurent SUZANNE, membre de la SELARL ETHIS AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2607 4054 1632

Société CREDIT AGRICOLE VAL DE FRANCE RCS CHARTRES
Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]

Ayant pour avocat Me Stéphanie BAUDRY, membre de la SELARL WALTER et GARANCE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 05 Février 2021
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 15 Septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du JEUDI 20 OCTOBRE 2022, à 9 heures 30, devant Madame Fanny CHENOT, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 805 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Ferréole DELONS, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 08 DECEMBRE 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte authentique du 16 février 2006, M. [W] [T], agriculteur, et Mme [B] [X], son épouse commune en biens à défaut de contrat de mariage préalable, conjointe collaboratrice, ont fait l'acquisition auprès des époux [P] et du GAEC du Clos Pignon d'un ensemble immobilier situé à [Localité 15] (41), composé des éléments suivants :

-une maison à usage d'habitation, au prix de 100 000 euros,
-un bâtiment ancien d'exploitation et un hangar d'exploitation, au prix de 30 000 euros,
-diverses parcelles de terre, au prix de 140 000 euros,
-un hangar à usage agricole, au prix de 109 000 euros

Par ce même acte, la caisse de crédit agricole mutuel Val de France (le Crédit agricole) a consenti à M. [W] [T] et son épouse trois prêts dits agricoles d'un montant total de 298 000 euros, dont le remboursement a été garanti par des inscriptions de privilège de prêteur de deniers et d'hypothèques conventionnelles:
-un prêt no 77893547389 d'un montant de 79 000 euros, remboursable en 180 mensualités avec intérêts au taux conventionnel de 3,35 %, l'an,
-un prêt no 77835447393 d'un montant de 79 000 euros, remboursable en 180 mensualités avec intérêts au taux conventionnel révisable de 2,96 % l'an,
-un prêt no 77893548942 d'un montant de 140 000 euros, remboursable en 20 annuités avec intérêts au taux conventionnel de 3,76% l'an,

Selon contrats sous signature privée du 24 février 2006, le Crédit agricole a également consenti à M. [W] [T], pour l'achat de cheptel, deux prêts professionnels :

-un prêt no77893558754 d'un montant de 20 000 euros, remboursable en 180 mensualités avec intérêts au taux conventionnel de 2,50 % l'an,
-un prêt no77893559197 d'un montant de 90 000 euros, remboursable en 144 mensualités avec intérêts au taux conventionnel de 2,50 % l'an,

Par contrats sous signature privée des 20 juillet 2006 et 5 octobre 2006, M. [W] [T] et son épouse [B] [X] ont par ailleurs souscrit auprès du Crédit agricole trois prêts destinés à financer l'acquisition de matériel agricole :

-un prêt no77895000671 d'un montant de 8 500 euros remboursable sur 7 ans avec intérêts au taux de 4,89 % l'an,
-un prêt no77895980981 d'un montant de 6 000 euros remboursable sur 12 ans avec intérêts au taux de 5,12 % l'an,
-un prêt no77895980992 d'un montant de 4 000 euros remboursable sur 12 ans avec intérêts au taux de 4,42 % l'an, réalisé le 5 octobre 2006,

Le divorce de M. [W] [T] et de Mme [B] [X] a été prononcé par jugement du 24 janvier 2012.

Par acte sous signature privée du 19 décembre 2013, M. [T] a constitué une société civile d'exploitation agricole à responsabilité limitée, dénommée de La Chanterie, à laquelle il a délégué de manière imparfaite les prêts suivants :

-le prêt no77893559197 de 90 000 euros,
-le prêt no77895900671 de 8 500 euros,
-le prêt no7789598098l de 6 000 euros,
-lee prêt no77895980992 de 4 000 euros

Mme [B] [X] est décédée le [Date décès 4] 2014, en laissant pour héritières [V] et [O] [T], ses deux filles nées de son union avec M. [W] [T].

Par courrier du 9 juillet 2015, adressé sous pli recommandée réceptionné le 11 juillet suivant, le Crédit agricole a mis en demeure la société civile de La Chanterie de procéder au paiement des mensualités impayées des prêts qui lui avaient été délégués, sous peine de déchéance du terme de ses concours.

Par courrier daté du 5 octobre 2015, le Crédit agricole a par ailleurs mis en demeure M. [W] [T] de procéder au paiement des échéances impayées du prêt no 77893558754 de 20 000 euros, des prêts no77893547389 et no77835447393 de 79 000 euros, et du prêt no77893548942 de 140 000 euros.

Par ordonnance du 8 novembre 2016, le juge des tutelles des mineurs a désigné le Président du Conseil départemental du Loir-et-Cher en tant qu'administrateur ad hoc en charge de représenter Mme [V] [T], à l'époque encore mineure, dans l'instance en paiement engagée par le Crédit Agricole.

Par acte du 24 avril 2017, le Crédit agricole a fait assigner M. [T] et Mme [O] [T] en paiement devant le tribunal de grande instance de Blois.

Par acte du 26 février 2017, le Crédit agricole a fait assigner aux mêmes fins le président du Conseil départemental du Loir-et-Cher en sa qualité d'administrateur ad hoc de [V] [T].

Le 26 novembre 2017, Mme [V] [T] est devenue majeure et la mission du président du Conseil départemental du Loir-et-Cher a pris fin.

Mme [V] [T] est intervenue volontairement à l'instance le 2 février 2018 et, par jugement du 17 décembre 2020 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Blois a :

-rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription,
-condamné solidairement M. [W] [T] et la succession de Mme [B] [T], prise en la personne de Mme [O] [T] et de Mme [V] [T], à payer à la Caisse régional de crédit agricole mutuel Val de France les sommes de :
etgt;58 077,48 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,35% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77893547389,
etgt;66 388,83 euros avec intérêts au taux conventionnel de 0,75% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77835447393,
etgt;133 417,98 euros avec intérêts au taux conventionnel de 0,75% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du no 77893548942,
etgt;177,64 euros avec intérêts au taux conventionnel de 4,89 % l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, an titre du prêt no 7789S900671,
etgt;4 244,43 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5,12% Pan, majore du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 7785980981,
etgt;2 392,85 euros avec intérêts au taux conventionnel de 1,40% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77895980992,
-condamne M. [W] [T] à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France les sommes de :
etgt;12 918,92 euros avec intérêts au taux conventionnel de 2,50 % l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no [77893554754],
etgt;48 067,40 euros avec intérêts au taux conventionnel de 2,50 % l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77893559197,
-dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêts,
-autorisé M. [W] [T] à [régler] la dette précédemment fixée selon les modalités suivantes:
- 23 mensualités de 13 500 euros chacune payable le 10 de chaque mois,
- le solde à la 24ème mensualité,
-dit qu'à défaut de paiement d'une mensualité, l'intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible quinze jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accuse de réception demeurée infructueuse,
-débouté M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] de leur demande reconventionnelle,
-débouté la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France ainsi que M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] de leur demande respective sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
-condamné M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] aux dépens,

Pour statuer comme il l'a fait, le premier juge a d'abord retenu, pour écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement du prêt immobilier numéro 77893547389, que ce prêt avait été souscrit pour financer l'activité professionnelle des emprunteurs, de sorte que même s'il avait permis de financer l'acquisition d'un ensemble agricole comprenant un bâtiment à usage d'habitation, les emprunteurs ne pouvaient être considérés comme des consommateurs au sens de l'article L. 137-2, devenu L. 218-2, du code de la consommation. Il en a déduit que l'action en paiement du Crédit agricole était soumise à la prescription quinquennale de droit commun et que, engagée le 24 avril 2017, moins de cinq ans après l'échéance du 5 juillet 2013 restée impayée, cette action était recevable.

Le premier juge a ensuite expliqué que le Crédit agricole, qui n'établissait pas avoir éclairé les emprunteurs sur l'adéquation à leur situation personnelle des risques couverts par le contrat d'assurance de groupe auquel M. [T], seul, a adhéré, avait failli à son obligation de conseil envers [B] [X], mais que les consorts [T], dont le préjudice ne pouvait consister qu'en une perte de chance, non alléguée, d'avoir souscrit une assurance adaptée, et par voie de conséquence d'avoir pu être exonérés, partiellement ou en totalité, de la charge des emprunts en cause, ne pouvaient qu'être déboutés de leur demande tendant exclusivement à la condamnation de la banque à leur régler une indemnité égale à celle que l'assureur aurait dû verser consécutivement au décès de Mme [T].

Le premier juge a ensuite procédé au décompte des sommes dues au titre de chaque prêt, après avoir rappelé que la délégation imparfaite, qui n'avait eu pour effet que d'ajouter un débiteur au débiteur principal, ne privait pas le Crédit agricole de son action en paiement contre M. [T], emprunteur initial.

M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] (ci-après les consorts [T]) ont relevé appel de cette décision par déclaration du 5 février 2021, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 29 avril 2021, les consorts [T] demandent à la cour, au visa des articles 1244-1 et 1382, dans sa version applicable au litige, du code civil, L.137-2 du code de la consommation, 12 du code de procédure civile, de :

-infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [O] [T] et Mme [V] [T] à verser à la caisse régionale crédit agricole mutuel Val de France les sommes suivantes :
etgt;58 077,48 € avec intérêts au taux conventionnel de 3,35% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no778 935 47 389,
etgt;66 388,83 € avec intérêts au taux conventionnel de 0,75% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no77835447393,
etgt;133 417,98 € avec intérêts au taux conventionnel de 0,75% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, a compter du 21 décembre 2016, au titre du no77893548942,
etgt;177,64 € avec intérêts au taux conventionne1de4,89 % ‘an, majore du taux d'intérêts de retard de 5%, a compter du 21 décembre 2016, an titre du prêt no7789S900671,
etgt;4 244,43 6 avec intérêts au taux conventionnel de 5,12% l'an, majore du taux d'intérêts de retard de 5%, a compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 7785980981,
etgt;2 392,85 € avec intérêts au taux conventionnel de 1,40% l'an, majore du taux d'intérêts de retard de 5%, a compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no77895980992,
Statuant à nouveau, la déclarer irrecevable en toutes ses demandes dirigées contre [O] [T] et [V] [T],
-infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable la caisse régionale crédit agricole mutuel Val de France en sa demande tendant à la condamnation de M. [T] d'avoir à lui régler la somme de 58,077,48 € au titre des échéances impayées du prêt no77893547389 depuis juillet 2013,
Statuant à nouveau, la déclarer irrecevable en cette demande,
-infirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts [T] de leur demande reconventionnelle,
-Statuant à nouveau, premièrement, condamner la caisse régionale crédit agricole mutuel Val de France à verser à M. [T] une indemnité égale aux sommes réclamées dans la présente instance en exécution des prêts no 77893547389, no 77835447393, no 77893548942, no 77895000671, no77895980981, no 77895980992 et deuxièmement, ordonner la compensation des créances et constater leur extinction,
-subsidiairement, condamner la caisse régionale crédit agricole mutuel Val de France à verser à M. [T] une indemnité dont le montant est égal à 90 % des sommes réclamées en capital en exécution des prêts no 77893547389, no 77835447393, no 77893548942, no 77895000671, no 77895980981, no 77895980992, soit 238 225 € et 90 % des intérêts légaux ou conventionnels, ordonner la compensation des créances,
-confirmer le jugement en ce qu'il a accordé à M. [T] les délais de paiement s'agissant des sommes sollicitées pour les prêts no77893558754 et no77893559197,
-confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la caisse régionale crédit agricole mutuel Val de France de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

Dans ses dernières écritures notifiées le 27 mai 2021, le Crédit agricole demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1244-1 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, de :
-déclarer M. [W] [T] et la succession de Mme [B] [T] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions,
-juger la caisse régionale de crédit agricole Mutuel Val de France recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes,
Y faisant droit,
-confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Blois rendu le 17 décembre 2020 en ce qu'il a :
etgt;rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription
etgt;condamné solidairement M. [W] [T] et la succession de Mme [B] [T] prise en la personne de Mme [O] [T] et de Mme [V] [T] à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France les sommes de :
- 58 077,48 € avec intérêts au taux conventionnel de 3,35% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 778 935 47 389,
- 66 388,83 € avec intérêts au taux conventionnel de 0,75% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77835447393,
- 133 417,98 € avec intérêts au taux conventionnel de 0,75% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du no 77893548942,
- 177,64 € avec intérêts au taux conventionne1de4,89 % l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, an titre du prêt no7789S900671,
- 4 244,43 6 avec intérêts au taux conventionnel de 5,12% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 7785980981,
- 2 392,85 € avec intérêts au taux conventionnel de 1,40% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77895980992,
etgt;condamné M. [W] [T] à payer la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France les sommes de :
- 12 918,92 € avec intérêts au taux conventionnel de 2,50% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no,
- 48 067,40 € avec intérêts au taux conventionnel de 2,50% l'an, majoré du taux d'intérêts de retard de 5%, à compter du 21 décembre 2016, au titre du prêt no 77893559197,
etgt;dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêts,
etgt;autorisé M. [W] [T] à payer la dette précédemment fixée selon les modalités suivantes :
23 mensualités de 13 500 € chacun payable le 10 de chaque mois,
le solde à la 24ème mensualité,
etgt;dit qu'à défaut de paiement d'une mensualité, l'intégralité des sommes dues deviendra immédiatement exigible quinze jours après une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé réception demeurée infructueuse,
etgt;débouté M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] de leur demande reconventionnelle,
etgt;condamné M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] aux entiers dépens,
En tout état de cause,
-condamner solidairement M. [W] [T] et la succession de Mme [B] [T] au paiement d'une somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner solidairement M. [W] [T] et la succession de Mme [B] [T] au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 15 septembre 2022, pour l'affaire être plaidée le 20 octobre suivant, et mise en délibéré à ce jour.

SUR CE, LA COUR :

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'acceptation de la succession d'[B] [X]

Mesdames [O] et [V] [T] soulèvent en cause d'appel une nouvelle fin de non-recevoir, tirée de ce qu'elles n'ont pas accepté la succession de leur mère.

En faisant valoir que par application de l'article 768 du code civil, elles ne peuvent être tenues au paiement des dettes de leur mère qu'à la condition d'avoir accepté la succession de celle-ci, les appelantes soutiennent que le premier juge ne pouvait les condamner à paiement, et que le Crédit agricole est irrecevable en ses demandes à leur encontre, dans la mesure où, par un courrier du 21 mars 2021, le notaire en charge du règlement de la succession de leur mère a attesté qu'à cette date, elles n'avaient pas accepté ladite succession.

Pour s'opposer à cette nouvelle fin de non-recevoir, le Crédit agricole rétorque que le décès d'[B] [X] est intervenu le [Date décès 4] 2014, et que Mesdames [O] et [V] [T] n'établissent pas avoir renoncé à la succession de leur mère.

Mesdames [O] et [V] [T], que le Crédit agricole n'a pas sommé d'opter, ne justifient ni même n'allèguent avoir renoncé à la succession de leur mère [B] [X].

Dès lors que le Crédit agricole ne sollicite pas la condamnation à paiement de Mesdames [V] et [O] [T], mais la confirmation du jugement ayant condamné à paiement « la succession » d'[B] [X] épouse [T], « en la personne de Mme [V] [T] et de Mme [O] [T] », ces dernières ne seront le cas échéant tenues qu'autant que, dans le délai dont elles disposent éventuellement encore pour opter, elles n'auront pas renoncé à la succession de leur mère.

La fin de non-recevoir tirée de ce Mesdames [O] et [V] [T] n'ont pas encore exercé leur option successorale ne peut dès lors qu'être écartée.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action engagée à l'encontre de M. [W] [T] en paiement du solde du prêt numéro 77893547389

Au soutien de cette fin de non-recevoir qu'il réitère à hauteur d'appel, M. [T] fait valoir que la cour devra redonner au prêt numéro 77893547389, qualifié par erreur selon lui, de « prêt agricole », son exacte qualification -qualification qu'il ne propose pas, sauf à suggérer qu'il s'agirait d'un prêt destiné à financer l'acquisition d'un immeuble d'habitation, en tant que tel soumis à la prescription biennale du code de la consommation.

Le Crédit agricole rétorque que les prêts destinés à financer une activité professionnelle sont exclus du domaine d'application du code de la consommation et qu'en l'espèce, dès lors que l'immeuble à usage d'habitation n'est que l'accessoire de l'exploitation agricole acquise par M. et Mme [T], le prêt litigieux n'est pas soumis aux dispositions du code de la consommation relatives aux prêts immobiliers, ni à l'article L. 137-2 instituant un délai biennal de prescription, mais à la prescription quinquennale de droit commun applicable aux prêts professionnels.

Le Crédit agricole ajoute que pour financer l'acquisition de l'immeuble d'habitation qui était l'accessoire de la propriété agricole en cause, et qui devait constituer la résidence principale des emprunteurs, il a consenti à M. et Mme [T] un prêt immobilier numéro 77893552514 d'un montant de 100 000 euros, qui a été réglé par l'assurance ensuite du décès de Mme [X].

Il en déduit, derechef, que le prêt numéro 77893547389 de 79 000 euros ne pouvait avoir pour destination le financement de la résidence principale des emprunteurs, mais uniquement le financement de l'acquisition des immeubles à usage professionnel.

L'article L. 312-3, 2o du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à l'époque de la souscription du prêt numéro 77893547389 en cause, énonce que sont exclus du champ d'application du [chapitre du code de la consommation relative au crédit immobilier] les prêts destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité professionnelle.

Les trois prêts litigieux, notamment le prêt discuté numéro 77893547389, ont été souscrits par M. et Mme [T] pour financier l'acquisition d'une propriété agricole comprenant à la fois des bâtiments d'habitation, des bâtiments d'exploitation et des terres.

Il résulte en effet de l'acte notarié du 16 février 2006 contenant à la fois vente et prêts que les vendeurs avaient consenti un bail à ferme sur l'ensemble de la propriété cédée à M. et Mme [T], et que pour parvenir à cette vente, les vendeurs ont dû « purger » le droit de préemption dont l'ancien preneur et la SAFER disposaient sur l'ensemble des parcelles cédées, notamment sur la parcelle cadastrée ZB no [Cadastre 11] composée à la fois d'un immeuble à usage d'habitation et de bâtiments d'exploitation.

Ces éléments suffisent à établir, comme l'a retenu le premier juge, que le bâtiment d'habitation constituait l'accessoire de la propriété agricole cédée, de sorte que les prêts destinés à financer l'ensemble de ces immeubles à destination professionnelle ne relevaient pas des dispositions du code de la consommation.

M. [T] ne peut de toute façon sérieusement soutenir que le prêt numéro 77893547389 d'un montant de 79 000 euros était destiné à financer l'acquisition de la maison d'habitation qui dépendait de l'ensemble immobilier acquis le 16 février février 2006, dont le prix de vente est fixé en page 8 de l'acte à 100 000 euros, alors que les trois prêts souscrits par acte notarié, d'un montant global de 298 000 euros, ne permettaient pas de financer l'acquisition de l'ensemble de la propriété acquise pour un prix total de 379 000 euros, et que le Crédit agricole démontre avoir accordé à M. [T] et son épouse, selon offre préalable acceptée le 7 février 2006, un prêt immobilier distinct d'un montant de 100 000 euros, qui était destiné, précisément, à financer l'acquisition de l'immeuble d'habitation, et qui a bien été soumis aux prescriptions du code de la consommation.

L'action en paiement du prêt numéro 77893547389, qui est assurément un prêt professionnel, n'est donc pas soumise à la prescription biennale du code de la consommation, mais à la prescription quinquennale de droit commun de l'article 2224 du code civil.

Par des motifs non critiqués que la cour adopte, le premier juge a retenu à raison que l'action en paiement du Crédit agricole, introduite dans le délai de cinq ans de l'article 2224, n'était pas atteinte par la prescription.

Par confirmation du jugement entrepris, la fin de non-recevoir tirée de la prescription sera dès lors écartée.

Dans leurs dernières écritures, les appelants ne développent aucune critique contre les motifs du jugement les ayant ayant condamnés, au fond, à payer diverses sommes au Crédit agricole au titre des prêts litigieux. Ils ne soutiennent en effet pas que les demandes de l'intimé devraient être rejetées comme infondées, mais seulement qu'elles seraient irrecevables.

Dans ces circonstances, dès lors que les fins de non-recevoir soulevées par les appelants viennent d'être écartées, le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en toutes ses dispositions portant condamnation à paiement relativement aux prêts litigieux.

Sur la demande reconventionnelle tirée d'un manquement de l'intimé à son devoir de conseil

La cour observe que M. [T] et ses filles, [V] et [O], reprochent au premier juge d'avoir rejeté la demande reconventionnelle qu'ils avaient tous les trois formée en première instance, mais que, en cause d'appel, les demandes indemnitaires tirées d'un manquement du Crédit agricole à son devoir de conseil ne sont plus formées reconventionnellement qu'au seul profit de M. [T].

Au soutien de ses demandes indemnitaires, qu'il fonde sur l'article 1382 [ancien] du code civil, M. [T] fait valoir que le Crédit agricole, qui lui a proposé d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il avait lui-même souscrit, a failli à ses obligations en ne recommandant pas également à son épouse co-emprunteuse qui, comme lui, était exploitante agricole, la conclusion d'un contrat d'assurance la garantissant contre les risques décès et invalidité.

En soutenant qu'il est quasiment certain que, bien conseillée, son épouse, qui présentait les mêmes risques et avait les mêmes intérêts que lui, aurait choisi elle aussi d'adhérer au contrat d'assurance de groupe garantissant les risques décès et invalidité, puis en se prévalant de décisions ayant condamné l'assureur ou le distributeur du contrat d'assurance ayant manqué à son devoir de conseil envers son client à verser à l'assuré une indemnité égale à celle qui aurait bénéficié à ce dernier si la garantie avait été souscrite, M. [T] en déduit que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, le préjudice né du manquement du Crédit agricole ne s'analyse pas en une perte de chance. Il conclut, sans davantage de précisions, que le prêteur doit être condamné à lui verser à titre de dommages et intérêts une indemnité égale aux sommes réclamées en exécution des prêts litigieux.

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour retiendrait que son préjudice est constitutif d'une perte de chance, M. [T] demande que cette perte de chance soit évaluée à 90 % des sommes réclamées en capital en exécution des prêts litigieux, en assurant de nouveau qu'il est hautement probable que son épouse eut accepté l'assurance si celle-ci lui avait été conseillée, d'autant que le coût modeste de cette assurance pouvait être supporté par eux sans difficulté.

En réponse, le Crédit agricole fait valoir que Mme [T] n'était pas elle-même agricultrice, mais seulement conjointe collaboratrice, et assure que ce sont les époux [T] eux-mêmes qui ont fait le choix de n'assurer que M. [T] contre les risques décès et invalidité.

En soulignant que chacun des époux [T] a choisi de bénéficier d'une assurance sur le prêt destiné à financer l'acquisition de leur résidence principale, et que le crédit qu'ils avaient souscrit à cet effet a été contracté concomitamment aux prêts professionnels litigieux, le Crédit agricole réitère en cause d'appel que cette situation rend vraisemblable le fait qu'il avait proposé, pour les prêts professionnels, une garantie aux deux époux, mais que ceux-ci ne l'ont acceptée que pour Monsieur, en sa qualité d'exploitant agricole. L'intimé en déduit que le défaut d'assurance de Madame résulte d'un choix volontaire des époux [T], et qu'aucune faute ne peut donc lui être reprochée.

Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour retiendrait qu'il a failli à son devoir de conseil, le Crédit agricole souligne qu'il est peu probable que Mme [T] ait choisi de bénéficier d'une assurance pour elle-même, et en déduit que la chance perdue ne pourrait être évaluée qu'à moins de 10%.

En application de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, le prêteur de deniers est tenu, lorsqu'il propose à l'emprunteur d'adhérer au contrat d'assurance de groupe auquel il a lui-même souscrit, d'une obligation prétorienne d'information et de conseil, qui s'ajoute à l'obligation légale consistant en la remise d'une notice détaillée définissant les garanties prévues par la convention et leurs modalités d'application.

Depuis un arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation du 2 mars 2007 (no 06-15.267), il est en effet acquis que le banquier qui propose à son client auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a lui-même souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur, la remise d'une notice d'information claire et dépourvue d'ambiguïté ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation ( v. par ex. Civ. 2, 6 octobre 2022, no 21-10.896 ; Civ. 1, 17 juin 2015, no 14-20.257 ; 30 octobre 2013, no 12-22.731).

En application de l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, celui qui est tenu d'une telle obligation de conseil doit rapporter la preuve de son exécution (v. par ex. Civ. 1, 12 novembre 2015, no 14-26.218).

En l'espèce, le Crédit agricole ne démontre d'aucune manière avoir informé ses clients sur tous les risques susceptibles d'être garantis, ni sur l'existence de garanties susceptibles de couvrir chacun des co-emprunteurs contre le risque de décès, et ne peut soutenir que le défaut d'assurance de Mme [X] proviendrait d'un libre choix, alors que rien ne permet d'établir que la situation de non-assurance de Mme [X] résulterait d'un refus éclairé, plutôt que d'un éventuel manque d'information.

En application de l'article 1382 ancien du code civil, devenu l'article 1240 du même code, le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage, et ce sans avoir à établir une faute délictuelle ou quasi délictuelle distincte de ce manquement (v. par ex. Ass. Plén. 13 janvier 2020, no 17-19.963 ; 6 octobre 2006, no 05-13-25513).

Si pour Mme [X], comme l'a indiqué le premier juge, le préjudice né du manquement du prêteur à son devoir de conseil et de mise en garde ne peut s'analyser qu'en une perte de chance d'avoir souscrit une assurance adaptée, le préjudice résultant, pour M. [T], co-emprunteur solidaire, de ce manquement constitutif d'une faute de la banque à son égard, doit s'analyser, par voie de conséquence, en la perte de chance d'avoir pu être exonéré, partiellement ou en totalité, de la charge des emprunts en cause.

Mme [X] n'était pas exploitante agricole, mais conjointe collaboratrice, ainsi qu'elle l'avait déclaré, avec son époux, devant le notaire ayant reçu les actes de prêts.

Lorsqu'il leur a été proposé, à l'occasion de la souscription concomittente du prêt immobilier destiné à financer l'acquisition de leur résidence principale, d'adhérer à une assurance couvrant les risques décès et invalidité, M. et Mme [T] ont fait le choix, l'un et l'autre, de bénéficier d'une telle garantie, ce qui révèle chez les emprunteurs un souci de prudence.

En considération du coût modéré de l'assurance en cause pour ces co-emprunteurs qui, l'un et l'autre, étaient jeunes lors de la souscription des prêts litigieux (35 et 37 ans), puis de ce que l'assurance contre les risques décès et invalidité revêt une utilité d'autant plus importante que les prêts garantis sont souscrits sur une longue période, la probabilité que Mme [X] ait souscrit une assurance de ce type si elle avait été correctement conseillée par le Crédit agricole, sera évaluée à 50 % pour les trois prêts qu'elle a souscrits avec son époux sur une durée d'au moins quinze ans, à 25 % pour les deux prêts conclus sur une durée de douze ans, et à 15 % pour le prêt remboursable sur sept ans.

Pour les prêts numéros numéros 77893558754 et 77893559197 qu'il a souscrits seul, M. [T] ne peut se prévaloir d'aucun préjudice en lien avec la non-assurance de son ancienne épouse qui n'était pas co-empruntrice et ne pouvait donc adhérer au contrat d'assurance de groupe en cause.

Dès lors qu'il n'est pas soutenu que, mieux conseillée, Mme [X] aurait pu bénéficier d'une assurance décès distincte de celle dont bénéficie son ancien époux, et qui, en cas de survenance du risque, prévoit un règlement à la banque souscriptrice égal au capital restant dû au jour du décès de l'assuré, la charge d'emprunt dont M. [T] aurait pu être libéré sera évaluée, en considération de la date de décès de Mme [X] ([Date décès 4] 2014) et, faute pour M. [T] d'avoir produit les tableaux d'amortissement des prêts en cause, sur la base des seuls décomptes communiqués par le Crédit agricole, qui ne font ressortir le capital restant dû sur ces prêts qu'au 31 juillet ou au 31 octobre 2015, ainsi qu'il suit :

-prêt no 77893547389 remboursable sur 15 ans : 32 717,29 euros
-prêt no 77835447393 remboursable sur 15 ans : 43 697,26 euros
-prêt no 77893548942 remboursable sur 20 ans : 89 492,75 euros
-prêt no77895000671 sur 7 ans : néant (prêt arrivé à son terme à la date de décès de Mme [X])
-prêt no77895980981 remboursable sur 12 ans : 2 002,21 euros
-prêt no77895980992 remboursable sur 12 ans : 1 238,89 euros

Compte tenu des pourcentages de perte de chance précédemment retenus, le Crédit agricole sera reconventionnellement condamné à payer à M. [T], en réparation du préjudice qu'il lui a causé, la somme totale de 83 763,92 euros à titre de dommages et intérêts (32 717,29 + 43 697,26 + 89 492,75) x 50 % + ( 2 002,21 + 1 238,89) x 25 %.

En application de l'article 1347 du code civil qui énonce que la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes et qu'elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies, les créances réciproques du Crédit agricole et de M. [T] se compenseront, à due concurrence, à compter de ce jour.

Sur la demande de délais de paiement

En application de l'article 1244-1 du code civil, le juge peut, en considération des besoins du créancier, accorder au débiteur impécunieux un délai de grâce ou des délais de paiement qui, sans pouvoir excéder deux années, empruntent leurs mesures aux circonstances.

Le Crédit agricole ne sollicitant pas l'infirmation des chefs du jugement déféré ayant accordé à M. [T] des délais pour s'acquitter de sa dette, les dispositions en cause ne peuvent qu'être confirmées

Sur les demandes accessoires

Les consorts [T], qui succombent au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devront supporter les dépens de l'instance.

Il n'apparaît cependant pas inéquitable, compte tenu des circonstances du litige, de laisser au Crédit agricole la charge des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

L'intimé sera en conséquence débouté de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME la décision entreprise, mais seulement en ce qu'elle a débouté M. [W] [T] de sa demande reconventionnelle,

STATUANT À NOUVEAU sur le seul chef infirmé et y ajoutant :

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'acceptation de la succession d'[B] [X],

CONDAMNE reconventionnellement la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France à payer à M. [W] [T], à titre de dommages et intérêts, la somme de 83 763,92 euros,

DIT que cette créance se compensera à compter de la présente décision, à due concurrence, avec les créances réciproques de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France à l'égard de M. [W] [T],

CONFIRME la décision pour le surplus de ses dispositions critiquées,

REJETTE la demande de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Val de France formée en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum M. [W] [T], Mme [O] [T] et Mme [V] [T] aux dépens.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 21/003961
Date de la décision : 08/12/2022
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Blois, 17 décembre 2020


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2022-12-08;21.003961 ?
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