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17/11/2022 | FRANCE | N°22/001881

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 17 novembre 2022, 22/001881


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 17/11/2022
la SCP LAVAL-FIRKOWSKI
la SCP CORNU-SADANIA-PAILLOT
ARRÊT du : 17 NOVEMBRE 2022

No : 181 - 22
No RG 22/00188
No Portalis DBVN-V-B7G-GQHW

DÉCISION ENTREPRISE : Ordonnance de référé du Président du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 14 Décembre 2021

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265276770043541
S.A.S. TRAVAUX PUBLICS PAYS DE LOIRE
Prise en la personne de son

représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social
[Adresse 1]
[Localité 3]

Ayant pour avocat postulan...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 17/11/2022
la SCP LAVAL-FIRKOWSKI
la SCP CORNU-SADANIA-PAILLOT
ARRÊT du : 17 NOVEMBRE 2022

No : 181 - 22
No RG 22/00188
No Portalis DBVN-V-B7G-GQHW

DÉCISION ENTREPRISE : Ordonnance de référé du Président du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 14 Décembre 2021

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265276770043541
S.A.S. TRAVAUX PUBLICS PAYS DE LOIRE
Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social
[Adresse 1]
[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Laurent SUZANNE, membre de la SELARL ETHIS AVOCATS, avocat au barreau de TOURS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265273973538391
S.C.I. KING
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 2]

Ayant pour avocat Me Sabine PAILLOT, membre de la SCP CORNU-SADANIA-PAILLOT, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 19 Janvier 2022
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 01 Septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 15 SEPTEMBRE 2022, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en charge du rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 805 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Ferréole DELONS, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 17 NOVEMBRE 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

Par acte notarié du l7 juillet 2019, la SCI King a acquis un terrain à bâtir situé à [Adresse 5] (37) de 4700 m2. Elle a aussi souscrit un prêt en vue d'y faire édifier un ensemble immobilier à usage de concession automobile destiné à être loué à la société Even Parc automobiles.

Un contrat de maîtrise d'oeuvre d'exécution a été conclu le 28 mars 2019 entre la SCI King et la société Cofaco.

Par acte d'engagement mentionnant la société Cofaco en qualité de maître d'oeuvre et faisant suite à un devis approuvé le 29 juillet 2019, la SCI King en qualité de maître d'ouvrage a confié à la société (S.A.S.) Travaux publics des Pays de Loire (société TPPL) en qualité d'entrepreneur, le lot VRD relatif à la construction d'un bâtiment industriel R + 1, pour un prix de 250.800€ hors taxes, soit 300.960 € TTC.

La SCI King a consenti le 19 octobre 2020 à la société Even parc automobiles un bail commercial sur les lieux situés à [Adresse 5].

Un procès verbal de réception a été signé le 1er mars 2021 pour le lot VRD avec réserves, en retenant pour l'achèvement des travaux la date du 31 mars 2021.

Exposant qu'elle a émis diverses factures pour un total de 115.611,71€, contrôlées par le maître d'oeuvre, remises au maitre de l'ouvrage pour paiement et restées impayées, qu'elle a répondu au procès-verbal de réception en formulant diverses observations et en précisant qu'elle ne procèderait pas à la levée des réserves avant le paiement de ses factures, et qu'elle a fait signifier à la SCI King le 22 mars 2021 une mise en demeure restée infructueuse, la SAS Travaux publics des Pays de Loire a assigné la société King, par acte d'huissier du 4 mai 2021, devant le président du tribunal judiciaire de Tours statuant en référé, afin principalement, d'obtenir sa condamnation à lui verser la somme de 115.611,71 € à titre de provision, à valoir sur le paiement des factures de travaux, en visant les articles 873 alinéa 2 du code de procédure civile, 1103 du code civil et 1er de la loi no71-584 du 16 juillet 1971.

L'appelante a ensuite ramené sa demande de provision à la somme de 92.825.39 €. La société King a demandé au premier juge de constater l'existence de contestations sérieuses, de rejeter la demande de provision, et d'ordonner une expertise judiciaire.

Par ordonnance du 14 décembre 2021, le juge des référés du judiciaire de Tours, a principalement :
- Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande provisionnelle de la SAS Travaux publics des Pays de Loire,
- Ordonné une mesure d'expertise judiciaire aux frais avancés de la SCI King, concernant les désordres, non-conformités, malfaçons, non-façons, retard d'exécution dénoncés par la SCI King dans ses écritures et les pièces y annexées, et désigné pour y procéder M. [G] [X]
- Rejeté la demande de renvoi au tribunal judiciaire pour statuer au fond,
- Condamné la SAS Travaux publics des Pays de Loire aux entiers dépens,
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le premier juge a considéré, au visa de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, qu'il existait une contestation sérieuse quant à l'existence de l'obligation d'avoir à régler les factures impayées. Il a débouté la SAS Travaux Publics Pays de Loire de sa demande subsidiaire de voir renvoyer l'affaire au fond, faute pour la demanderesse d'avoir démontré l'urgence. Constatant un motif légitime de conserver ou établir la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige, il a fait droit à la mesure d'expertise sollicitée.

La SAS Travaux Publics Pays de Loire a formé appel de la décision par déclaration du 19 janvier 2022 en intimant la SCI King, et en critiquant l'ordonnance uniquement en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur sa demande en paiement provisionnelle, l'a condamnée aux entiers dépens et a rejeté sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 5 juillet 2022, elle demande à la cour, de :
Vu le marché du 29 juillet 2019 et ses avenants,
Vu les articles 1103 et 1792-6 du Code civil,
Vu la loi no71-584 du 16 juillet 1971,
Vu les articles 487, 700 et 835 du Code de procédure civile,
- Infirmer l'ordonnance rendue le 14 décembre 2021 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Tours en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de la société Travaux Publics des Pays de Loire tendant à la condamnation de la SCI King à lui verser une provision de 92.825.39 € et l'a déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile, tout en la condamnant aux dépens.
Statuant à nouveau,
- Condamner la société civile immobilière King à verser à la société Travaux Publics des Pays de Loire la somme de 92.825.39 € à titre de provision à valoir sur le paiement des factures de travaux,
Subsidiairement,
- Condamner la société civile immobilière King à verser à la société Travaux Publics des Pays de Loire une provision à valoir sur le paiement de ses travaux dont le montant sera souverainement apprécié par la cour,
En toute hypothèse,
- Condamner la société civile immobilière King à verser à la société Travaux Publics des Pays de Loire la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que les travaux ont été intégralement réalisés ainsi qu'en atteste le procès-verbal de réception signé du maître de l'ouvrage le 1er mars 2021 et que l'ouvrage est exploité, ce qui ressort du constat d'huissier réalisé le 4 mai 2021, de sorte qu'elle est bien fondée à solliciter la condamnation de la SCI King à lui verser une provision de 92.825,39 € à valoir sur le règlement définitif de ses prestations.

Elle indique ensuite que contrairement à ce qu'a retenu le premier juge les contestations formulées par la SCI King ne sont pas sérieuses, la preuve de l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible n'étant pas rapportée, pas plus qu'une compensation avec une prétendue créance de pénalités de retard, ou une indemnité au titre des pertes de loyers qu'elle aurait subi consécutivement à l'achèvement tardif des travaux.

Elle estime qu'en considérant qu'il résultait de l'absence de levée des réserves constatées sur le procès-verbal de réception, une contestation sérieuse à l'obligation de la SCI King de régler en totalité les factures impayées, le premier juge a violé l'article 1er de la loi no71-584 du 16 juillet 1971 qui fixe à 5 % le montant maximal pouvant être retenu par le maître de l'ouvrage au titre des réserves. Elle souligne qu'elle a remis au maître de l'ouvrage un engagement de caution de sa banque relativement à la retenue de garantie prévue par le contrat et que la SCI King ne peut donc pas retenir les 5 %.

Elle précise que la contestation relative à une prétendue erreur d'implantation du parking n'est pas sérieuse, faute pour la SCI King de rapporter la preuve de cette erreur, et compte tenu de la réception sans réserve sur ce désordre apparent par le maître de l'ouvrage.

La SCI King demande à la cour, par dernières conclusions du 31 août 2022 de :
Vu l'article 835 alinéa 2nd du Code de procédure civile,
Vu les articles 1101 et suivants du Code civil,
Vu les articles 1792 et suivants du Code civil,
Vu l'article 145 du Code de procédure civile,
- Confirmer l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Tours le 14 décembre 2021,
En conséquence,
- Débouter la Société TPPL de l'ensemble de ses demandes et prétentions,
- Condamner la Société TPPL au paiement de la somme de 3.500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens.

Elle soutient d'une part que l'expertise judiciaire ordonnée par le premier juge et portant sur l'intégralité des griefs fait obstacle à un quelconque paiement provisionnel, d'autre part que la réception de l'ouvrage est uniquement le point de départ des garanties dont les constructeurs sont débiteurs mais ne postule en rien que le maître de l'ouvrage doit de facto régler au locateur d'ouvrage le solde du marché, même à hauteur de 95 %.

Elle fait valoir que de nombreuses contestations sérieuses existent en l'espèce, à savoir des désordres survenus dans la période de parfait achèvement, des travaux de reprise à envisager, et un retard dans l'exécution des prestations engendrant des pertes d'exploitation. Elle ajoute que si les créances qu'elle invoque ne sont à ce jour pas des créances certaines, liquides et exigibles, elles n'en demeurent pas moins des contestations sérieuses de nature à mettre en échec la demande de provision de la société TPPL.

L'affaire a été fixée à l'audience du 15 septembre 2022 en application des dispositions de l'article 905 du Code de procédure civile.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 1er septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils (le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence) peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

La loi no71-584 du 16 juillet 1971 dans sa rédaction applicable au 29 juillet 2019 date du devis accepté entre les parties, dispose :
- en son article 1 :
"les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3o du code civil peuvent être amputés d'une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage.
Le maître de l'ouvrage doit consigner entre les mains d'un consignataire, accepté par les deux parties ou à défaut désigné par le président du tribunal de grande instance ou du tribunal de commerce, une somme égale à la retenue effectuée.
Dans le cas où les sommes ayant fait l'objet de la retenue de garantie dépassent la consignation visée à l'alinéa précédent, le maître de l'ouvrage devra compléter celle-ci jusqu'au montant des sommes ainsi retenues.
Toutefois, la retenue de garantie stipulée contractuellement n'est pas pratiquée si l'entrepreneur fournit pour un montant égal une caution personnelle et solidaire émanant d'un établissement financier figurant sur une liste fixée par décret."
- en son article 3 :
"Sont nuls et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements, qui auraient pour effet de faire échec aux dispositions des articles 1er et 2 de la présente loi."

L'acte d'engagement reprend ces dispositions légales en stipulant page 3 :
"La retenue de garantie, conformément à la loi 71-584 du 16 juillet 1971 est fixée à 5% du montant des travaux et sera déduite de la dernière situation de travaux. A la demande de l'entrepreneur, elle pourra être remplacée par une caution personnelle et solidaire d'un établissement financier. La retenue de garantie sera payée en totalité ou la caution libérée, un an après la réception des travaux, conformément aux dispositions légales."

Au cas présent, la société TPPL justifie avoir, par courrier du 23 septembre 2019, fourni au maître de l'ouvrage avec information du maître d'oeuvre, un engagement de caution établi auprès de la banque CIC Ouest en faveur de la SCI King pour un montant de 15.048€ soit 5 % du montant du marché, afin de garantir l'exécution par la société TPPL des travaux relevant de la retenue de garantie dans les conditions prévues par les articles 1 et 2 de la loi du 16 juillet 1971.

Par ailleurs, l'acte d'engagement signé des parties prévoit une procédure relative au paiement des situations, après vérification par le maître d'oeuvre. Le contrat stipule en effet en page 2 :
"Les règlements des travaux seront effectués sur situation mensuelle et décompte définitif, établis sous forme cumulative et datées du 10 du mois suivant de la facturation.
Ces pièces seront transmises au maître d'oeuvre par courrier en 3 exemplaires entre le 25 et le 30 de chaque mois. Après contrôle, le maître d'oeuvre les transmet au plus tard le 30 du mois au maître d'ouvrage pour bon à payer.
Les règlements seront effectués au cours du mois de facturation."

La société TPPL verse aux débats en pièce 10 les factures qu'elle a émises au titre des situations de travaux no 1 à 7 ainsi que certains certificats de paiement établis par le maître d'oeuvre.

Elle ne prétend pas ne pas avoir été réglée au titre des factures correspondant aux situations de travaux no 1à 3 et elle a agi devant le juge des référés pour obtenir une provision de 115.611,71€ TTC correspondant aux situations no 4, 5, 6, et 7 qui n'ont pas été honorées, malgré une mise en demeure du 22 mars 2021.

Elle a ensuite ramené sa demande de provision devant le premier juge, comme devant la cour, à la somme de 92.825,39€ au titre des factures relatives aux situations 4 à 7 restées impayées, en expliquant que pour les situations no 6 et 7, elle limite ses demandes aux montants de 8817,94€ et de 0,35€, retenus par le maître d'oeuvre dans le cadre des certificats de paiement no 6 et 7.

Elle produit les certificats de paiement no 1 (établi par la société Cofaco pour le mois d'août 2019), no 2 (établi pour le mois de septembre 2019), no 3 (établi pour le mois de juin 2020), no 4 (établi pour le mois d'août 2020 en retenant au vu des factures TPPL produites, un total à régler de 4432,42€, sans retenir de pénalités) et no 5 (établi pour le mois de septembre 2020 en retenant au vu des factures TPPL produites, un total à régler de 77.964,90€, sans retenir de pénalités). Pour les situations no 6 et 7, la société TPPL produit uniquement ses factures relatives à la situation no 6 (pour 23.551,44€) et à la situation no 7 (pour 9662,95€).

La SCI King vers aux débats (pièces 11 et 12) les certificats de paiement no 6 et 7 délivrés par le maître d'oeuvre et retenant un montant à payer au titre des situations de travaux no 6 et 7, à hauteur de 8817,94€ et 0,35€.

S'agissant des situations de travaux no 4 à 7, la procédure relative au paiement des situations a ainsi été respectée pour un montant total de 91.215,61€ (4432,42 + 77.964,90 + 8817,94 + 0,35).

La SCI King ne prétend pas que les travaux pour lesquels le maître d'oeuvre a établi les certificats de paiement no 4, 5, 6 et 7 n'ont pas été commandés par elle et réalisés par la société TPPL. Elle n'indique pas avoir contesté en leur temps ces certificats de paiement no 4 à 7.

Elle prétend cependant que la demande en paiement de la société TPPL se heurte à des contestations sérieuses tenant en premier lieu à l'existence de réserves lors du procès-verbal de réception, en second lieu à l'existence de malfaçons ou désordres apparus postérieurement au procès-verbal de réception et tenant à une erreur d'implantation du parking et à un affaissement de l'enrobé sur les places de parking, en troisième lieu à des pénalités de retard dues par l'entrepreneur, le planning prévisionnel contractuel n'ayant pas été respecté, la date d'achèvement des travaux étant prévu au 12 juin 2020, ce qui a entraîné une perte de loyers. Elle ne sollicite reconventionnellement aucune somme à titre provisionnel à ces différents titres mais soutient que ces contestations, qui ont donné lieu à une mesure d'expertise judiciaire, sont nécessairement des contestations sérieuses faisant obstacle au paiement de la provision sollicitée.

Sur le premier point, il est établi que les travaux correspondant au marché confié à la société TPPL ont donné lieu à un procès-verbal de réception avec réserves signé le 1er mars 2021 par le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre, avec la précision que la date retenue pour l'achèvement des travaux est le 31 mars 2021.

La société TPPL ne conteste pas, dans ses dernières écritures du 5 juillet 2022, que les réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception n'ont pas été levées, expliquant seulement avoir demandé à être payée au préalable de ses factures.

Elle a toutefois fourni, ainsi qu'il a été dit, un cautionnement bancaire pour un montant égal à 5 % du montant du marché en faveur de la SCI King, ce en application de l'article 1 de la loi du 16 juillet 1971, ce qui dispense le maître de l'ouvrage de procéder lui-même à la retenue de garantie. La SCI King ne conteste pas avoir été informée de ce cautionnement et peut dès lors le mettre en oeuvre conformément aux dispositions légales susvisées.

En outre, il ressort du constat d'huissier du 4 mai 2021 que l'ouvrage est exploité.

Par suite, au regard des dispositions de la loi du 16 juillet 1971 ci-dessus rappelées, l'existence de réserves non levées ne constitue pas une contestation sérieuse de nature à faire obstacle au paiement à titre provisionnel des factures ayant donné lieu à la délivrance de certificats de paiement par le maître d'oeuvre.

S'agissant des autres contestations soulevées, la société TPPL les conteste, expliquant au sujet de la prétendue erreur d'implantation du parking, qu'un second plan a été produit que le maître d'oeuvre aurait validé et concernant l'affaissement allégué, que la preuve de sa réalité et surtout de son ampleur n'est pas suffisamment rapportée. Elle conteste aussi que des pénalités de retard aient été convenues en cas de non respect du planning produit par la SCI King, en soulignant le fait que le planning a été établi uniquement à titre provisoire et que le délai d'exécution de l'ensemble du projet a été prolongé du fait du maître d'oeuvre, dont le salarié en charge du projet a suspendu son activité à compter du 18 mars 2020 pour cause de chômage partiel consécutif à la crise sanitaire.

Il n'appartient pas à la cour statuant en qualité de juge de référé de trancher ces différentes questions qui relèveront d'un examen au fond.

La cour observe seulement que ces désordres ou malfaçons et pénalités de retard sont contestés par l'entrepreneur et ne sont pas encore établis à ce jour puisque le premier juge, tout en retenant qu'ils constituaient une contestation sérieuse, a ordonné sur ces points une expertise en application de l'article 145 du code de procédure civile avec mission, notamment, de "vérifier l'existence des désordres, non conformités, malfaçons, non façons, retard d'exécution" dénoncés par la SCI King dans ses écritures et ses pièces, de donner un avis sur les causes des désordres, ainsi que sur le caractère caché ou apparent des désordres au jour de la réception et de proposer un compte entre les parties.

Certes, l'ordonnance n'est pas contestée en ce qu'elle a ordonné l'expertise et par suite, l'existence de motifs légitimes retenus par le premier juge pour l'ordonner, au sens de l'article 145 du code de procédure civile, ne l'est pas non plus.

Néanmoins, cette expertise a démarré récemment. Il ressort d'une note dressée par l'expert judiciaire le 30 juin 2022 qu'au cours de la première réunion d'expertise, ce dernier a reçu les observations des parties et qu'il a été contradictoirement constaté diverses réserves non levées, des désordres apparus postérieurement à la réception des travaux (affaissement ponctuel de l'enrobé) et une mauvaise implantation des places de parking. L'expert a sollicité divers documents et notamment un relevé géomètre pour poursuivre sa mission.

S'il ne peut être exclu au vu de cette note que des désordres ou un retard dans l'exécution des travaux puissent être ultérieurement retenus et donner lieu, le cas échéant, à des créances indemnitaires en faveur du maître de l'ouvrage et à une compensation, la cour constate qu'à ce stade, et nonobstant le fait qu'une expertise judiciaire a été ordonnée, les désordres allégués (autres que les réserves à la réception), ainsi que la réalité de pénalités de retard dues par l'entrepreneur ne sont pas établies de manière suffisante, ni dans leur principe ni a fortiori dans leur quantum, pour constituer une contestation sérieuse justifiant de rejeter la demande de provision, alors qu'ainsi qu'il a été dit, l'ouvrage est actuellement exploité, que le procès verbal de réception a été signé et que les factures dont le paiement est sollicité à titre provisionnel ont donné lieu à des certificats de paiement établis par le maître d'oeuvre.

Il appartiendra au juge du fond de faire les comptes éventuels mais en l'état, en application des dispositions légales susvisées, la demande formée par la société TPPL n'apparaît pas sérieusement contestable, pour le montant de 91.215,61€ correspondant aux certificats de paiement no 4 à 7 établis par le maître d'oeuvre.

La SCI King doit dès lors, par infirmation de l'ordonnance, être condamnée à régler cette somme à la société TTPL, étant rappelé, ainsi qu'il a été dit, que la retenue de 5 % prévue par la loi du 16 juillet 1971 n'a pas à être pratiquée dès lors que l'entrepreneur a fourni pour un montant égal une caution personnelle et solidaire émanant d'un établissement financier.

L'ordonnance sera aussi infirmée en ce qu'elle a condamné la société TPPL aux dépens et a rejeté la demande formée par cette dernière au titre des frais irrépétibles. En effet, cette dernière obtient en grande partie gain de cause et il convient par suite de mettre les dépens à la charge de la SCI King et de la condamner à régler à la société TPPL la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Infirme l'ordonnance déférée en ses dispositions critiquées,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

- Condamne la SCI King à verser à la société Travaux publics des Pays de Loire la somme de 91.215,61 euros à titre de provision à valoir sur le paiemtne des factures de travaux ;

- Condamne la SCI King à verser à la société Travaux publics des Pays de Loire une indemnité de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la SCI King aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 22/001881
Date de la décision : 17/11/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Tours, 14 décembre 2021


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2022-11-17;22.001881 ?
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