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24/06/2021 | FRANCE | N°19/037961

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 24 juin 2021, 19/037961


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 24/06/2021
la SCP PACREAU COURCELLES
la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS
ARRÊT du : 24 JUIN 2021

No : 133 - 21
No RG 19/03796
No Portalis DBVN-V-B7D-GCGQ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 07 Novembre 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265249982925024

SA OBM CONSTRUCTION
Prise en la personne de son Président domicilié es-qualité audit sièger>[Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 1]

Ayant pour avocat Me Michel - Louis COURCELLES, membre de la SCP PACREAU COURCELLES...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 24/06/2021
la SCP PACREAU COURCELLES
la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS
ARRÊT du : 24 JUIN 2021

No : 133 - 21
No RG 19/03796
No Portalis DBVN-V-B7D-GCGQ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 07 Novembre 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265249982925024

SA OBM CONSTRUCTION
Prise en la personne de son Président domicilié es-qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 1]

Ayant pour avocat Me Michel - Louis COURCELLES, membre de la SCP PACREAU COURCELLES, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265252279193608

La SAS TECHNOLOGIE DU BATIMENT ET SERVICES (TBS),
Prise en la personne de son Président, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]

Ayant pour avocat postulant Me Isabelle TURBAT, membre de SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS , avocat au barreau D'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Frédéric NAIM, membre de la SELARL CABINET F.NAIM, avocat au barreau de PARIS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 06 Décembre 2019
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 04 Mars 2021

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du jeudi 08 AVRIL 2021, à 14 heures, devant Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Nathalie MICHEL, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 24 JUIN 2021 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

La S.A. OBM Construction (société OBM) exerce une activité de construction industrialisée et entreprise générale de travaux de terrassement, plus particulièrement dans le domaine de la construction bois et industrialisée dans le secteur hospitalier et scolaire.

Elle a répondu à un appel d'offre passé en la forme de marché de conception-réalisation au profit du Groupe scolaire élémentaire et maternelle [Établissement 1], située au [Localité 3], avec déconstruction de la maternelle [Établissement 1] existante, d'un montant d'environ 14 millions d'euros.

Dans ce cadre, elle a signé le 12 septembre 2018 un devis émis le 10 septembre 2018 par la S.A.S. Technologie du Bâtiment et Services (société TBS) portant sur le traitement technico commercial du dossier Ecole [Établissement 1] au [Localité 3], la préparation technique du dossier, la recherche de prix et finalisations, pour un montant total de 160 000 ? HT, soit 192 000.00 ? TTC. Ce devis mentionnait à titre de condition suspensive, l'obtention du marché susvisé par la société OBM et prévoyait comme conditions de règlement, 25% par traite à 30 jours au 15 janvier 2019, 25% par traite à 30 jours à fin février 2019, 50 % par traite à 30 jours à fin mars 2019.

La Société OBM a été entendue par le jury de l'appel d'offres puis a reçu le 14 novembre 2018 un courrier de la ville du [Localité 3] l'informant qu'elle était pressentie sur ce marché, sous réserve de quelques clarifications et précisions qui lui étaient demandées.

Le 20 décembre 2018, la société OBM a adressé à la société TBS les trois lettres de change acceptées et sans frais d'un montant total de 192.000?.

La société OBM a été déclarée officiellement attributaire du marché par décision publiée le 24 janvier 2019.

La première traite de 48.000? TTC présentée le 15 janvier 2019 a été honorée.

Par courrier recommandé du 21 février 2019 adressé à la société TBS, la société OBM a indiqué que les prestations lui incombant n'avaient été réalisées que très partiellement, que ses services avaient été amenés à pallier les carences de TBS pour réaliser le dossier technico financier et que par conséquent, elle était dans l'obligation de dénoncer son accord sur le devis et l'informait faire opposition auprès de sa banque pour les deux traites à échéance du 28 février 2019 et 31 mars 2019.

Par acte d'huissier du 22 mai 2019, la Société TBS a fait assigner la société OBM en référé devant le Président du tribunal de commerce d'Orléans en paiement des sommes de 48 000 ? et 96 000 ? avec intérêts au taux légal résultant des traites acceptées, outre la somme de 5 000 ? au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux dépens.

La société TBS a procédé à une saisie conservatoire à hauteur des sommes réclamées, dénoncée à la société OBM par acte d'huissier du 22 mai 2019.

A la demande de la société OBM, le juge des référés, par ordonnance du 25 juillet 2019, a ordonné le renvoi de l'affaire à l'audience de fond du Tribunal de Commerce d'Orléans.

Par jugement du 7 novembre 2019, le tribunal de commerce d'Orléans a :
- Condamné la SAS OBM Construction à payer à la société Technologie du Bâtiment et Services la somme de 48.000 ? avec intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019 au titre de la deuxième traite acceptée et la somme de 96.000 ? avec intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2019 au titre de la troisième traite accepté
- Débouté la SAS OBM Construction de sa demande de remboursement de la somme de 48.000 ? correspondant au paiement de la première lettre de change
- Débouté la SAS OBM Construction de sa demande de mainlevée de la saisie-conservatoire pratiquée le 22 mai 2019
- Débouté la SAS OBM Construction de ses demandes reconventionnelles et subsidiaires de répétition de l'indu et de compensation
- Condamné la SAS OBM Construction à payer à la SAS Technologie du Bâtiment et Services la somme de 3.000 ? eu titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné la SAS OBM Construction aux dépens

La société OBM Construction a formé appel de la décision par déclaration du 6 décembre 2019 en intimant la société TBS, et en critiquant tous les chefs du jugement. Dans ses dernières conclusions du 27 janvier 2021, elle demande à la cour, au visa des articles 1128 et suivants, 1217 et suivants, 1302, 1347 et suivants, 1353 du Code civil, de :

Dire et juger la Société OBM Construction recevable et bien fondée en son appel.
Infirmer le jugement prononcé par le Tribunal de commerce d'Orléans le 7 novembre 2019 en ce qu'il a débouté la Société OBM Construction de sa demande de remboursement de la somme de 48 000 ? correspondant au paiement d'une première lettre de change, de sa demande de mainlevée de saisie conservatoire pratiquée le 22 mai 2019, et de ses demandes reconventionnelles et subsidiaires de répétition de l'indu et de compensation, ainsi que sa condamnation à verser à la société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) une somme de 3 000.00 ? titre des frais irrépétibles, et aux dépens.
Statuant à nouveau,
Ordonner main levée de la saisie conservatoire pratiquée le 22 mai 2019 à la requête de la Société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) sur les comptes de la Société OBM Construction ouverts dans les livres de la CRCAM Centre Loire.
Condamner la société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) à verser à la Société OBM Construction la somme de 192 000 ? et Ordonner de plano compensation entre créances réciproques par application des articles 1347 et suivants du Code civil.
En tout état de cause,
Condamner la Société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) à verser à la Société OBM Construction la somme de 10 000.00 ? sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner la société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) aux dépens qui incluront les frais de mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée à la requête de cette dernière.

Elle fait valoir en substance que les premiers juges ont retenu l'obligation de payer de la société OBM en l'absence totale de contrepartie et d'exécution du contrat sur lequel reposait l'obligation, au seul motif qu'elle aurait été déclarée adjudicataire d'un appel d'offres, et en l'absence de tout justificatif produit par la société TBS de l'exécution de son contrat.

Elle explique que ce n'est pas du "lobbying", d'ailleurs illégal, qui a été demandé à la société TBS, mais des études, notamment l'élaboration du dossier de consultation des entreprises, et que TBS est bien incapable de justifier l'exécution des prestations contenues au devis, puisqu'elle n'a notamment établi aucun dossier technique ni plan alors que sa mission comportait un "traitement technico-commercial du dossier". Elle indique justifier avoir réalisé en interne le traitement technique de l'appel d'offres, les plans d'étude, a dû elle-même rechercher des offres de sous traitants et de fournisseurs, et précise que si la société TBS s'est prévalue d'une prétendue action de lobbying auprès du Maire du [Localité 3], ce qui semble avoir emporté la conviction du tribunal, ce dernier a omis de vérifier si ce lobbying affirmé mais non établi et qui n'a jamais été contractualisé, était de nature à justifier l'exigibilité de la créance alléguée.

Elle souligne que la contestation ne porte pas sur le recours cambiaire mais sur la cause de l'obligation et que même dans le cadre d'un recours cambiaire, nul ne peut être équitablement condamné à régler une prestation qui n'aurait point été exécutée si elle ne constitue pas l'exacte
contrepartie de ce paiement, et par suite, dès lors que le recours cambiaire est accueilli, il y a matière à répétition de l'indu avec, au cas d'espèce, compensation entre créances réciproques.

La société Technologie du bâtiment et services (TBS) demande à la cour, par dernières conclusions du 26 mai 2020 de:
Vu L. 511-19 du Code de commerce
Vu l'article 1104 du Code civil,
Vu l'article 700 du Code de procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,
Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce d'Orléans le 7 novembre 2019.
Déclarer la société OBM Construction mal fondée en son appel ;
Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société OBM Construction à payer à la société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) une somme de :
- 48.000 ? avec intérêts au taux légal à compter du 28/02/2019 au titre de la deuxième traite acceptée
- 96.000 ? avec intérêts au taux légal à compter du 31/03/2019 au titre de la troisième traite acceptée
Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société OBM Construction de l'intégralité de ses demandes,
Débouter la société OBM Construction de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner la société OBM Construction à verser à la société Technologie du Bâtiment et Services (TBS) la somme de 5.000 ? au titre des dispositions de l'article 700
du code de procédure civile ;
Condamner la société OBM Construction aux entiers dépens.

Elle soutient qu'elle agit sur le fondement de l'action cambiaire, que la lettre de change acceptée fait naître des obligations cambiaires indépendantes du rapport d'obligation fondamentale et que la société OBM ne pouvait faire opposition au paiement au motif que la prestation n'avait pas été exécutée. Elle insiste sur le fait que les trois lettres de change ont été acceptées après service rendu et obtention du résultat à savoir l'obtention du marché du [Localité 3] et souligne que la société OBM n'a émis aucune réclamation ou mise en demeure sur l'absence de réalisation de la prestation.

Elle fait valoir que le dossier de conception réalisation s'articulait en deux phases : la première phase consistant à remporter l'appel d'offres pour le groupement, mission pour laquelle est intervenue la société TBS, sa rémunération étant conditionnée à l'attribution du marché, la second phase intervenant après l'acceptation du permis de construire et consistant à établir les dossiers techniques CCTP des différents lots notamment ceux attribués aux différents sous traitants, seconde phase dans laquelle elle n'intervenait pas.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 4 mars 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le marché attribué à la société OBM à été chiffré à hauteur de la somme totale de 14.564.781? HT.

Le devis établi par la société TBS le 10 septembre 2018 signé le 12 septembre suivant par la société OBM pour un montant total de 160.000 ? HT, soit 192.000.00 ? TTC mentionne les prestations suivantes :
- le traitement technico commercial du dossier Ecole [Établissement 1] au [Localité 3] pour 16.600? HT,
- la préparation technique du dossier pour 124.000? HT,
- la recherche de prix et finalisations pour un montant de 19.400? HT
et prévoit, à titre de condition suspensive la non-notification du marché et à titre de conditions de règlement : 25% par traite à 30 jours au 15 janvier 2019, 25% par traite à 30 jours à fin février 2019, 50 % par traite à 30 jours à fin mars 2019.

Il est constant que la condition suspensive a été levée puisqu'après avoir reçu un courriel le 14 novembre 2018 lui indiquant qu'à la suite de son entretien avec le jury du marché pour la construction du groupe scolaire [Établissement 1], elle était "pressentie, sous réserve de la qualité des réponses programmatiques à apporter dans le délai imparti", la société OBM a été déclarée officiellement attributaire du marché selon décision publiée au JO de l'union euroépenne le 24 janvier 2019 (pièces 11 et 16 produites par l'intimée).

Il est également établi que le 20 décembre 2018, la société OBM a adressé les trois lettres de change acceptées et sans frais d'un montant total de 192.000? visant chacune respectivement les factures adressées par la société TBS le 4 octobre 2018, le 26 octobre 2018 et le 6 novembre 2018 et que seule la première traite de 48.000? TTC à échéance du 15 janvier 2019 a été honorée, la société OBM ayant formé opposition aux deux autres lettres de change après avoir dénoncé son accord sur le devis par courrier recommandé daté du 21 février 2019, motif pris la société TBS n'avait réalisé que "très partiellement" ses prestations et que ses propres services avaient dû pallier les "carences" de TBS "pour réaliser le dossier technico financier.

Bien que la société OBM ait critiqué dans sa déclaration d'appel tous les chefs du jugement entrepris, il ressort du dispositif de ses écritures qu'elle ne sollicite pas l'infirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société OBM à payer à la société Technologie du Bâtiment et Services la somme de 48.000 ? avec intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019 au titre de la deuxième traite acceptée et la somme de 96.000 ? avec intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2019 au titre de la troisième traite accepté".

La cour statuant uniquement sur les prétentions mentionnées au dispositif des conclusions en application de l'article 954 alinéa 3, ce chef du jugement doit être confirmé, étant au surplus rappelé que les trois lettres de change ont été acceptées par la société OBM, qu'en application de l'article L511-19 du Code de commerce, le tiré s'oblige, par l'acceptation, à payer la lettre de change à l'échéance, et que, sauf convention contraire, le tireur d'une lettre de change acceptée, tenu par sa signature d'une obligation indépendante, ne peut opposer au porteur la non exécution du titre obtenu par ce dernier contre le tiré (C. Cass Com 20 février 2007, pourvoi no 05-21264).

La société OBM demande uniquement l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de remboursement de la somme de 48.000 ? correspondant au paiement de la première lettre de change, de mainlevée de la saisie-conservatoire pratiquée le 22 mai 2019 et de ses demandes reconventionnelles et subsidiaires de répétition de l'indu et de compensation et sollicite "la condamnation de la société TBS à lui verser la somme de 192.000?", ainsi que la compensation entre les créances réciproques.

Sur la demande de condamnation à hauteur de 192.000? formée par la société OBM

A l'appui de cette demande, la société OBM invoque dans le dispositif de ses écritures trois séries de dispositions du code civil : les articles 1128 et suivants, les articles 1217 et suivants et l'article 1302.

Les articles 1128 et suivants du Code civil concernent la validité du contrat. L'article 1128 énonce que sont nécessaires à la validité d'un contrat le consentement des parties, leur capacité de contracter et un contenu licite et certain. L'article 1178 dispose que le contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul.

En l'espèce, la société OBM ne sollicite pas la nullité du contrat et n'articule aucun moyen à ce titre puisqu'en réalité elle invoque l'inexécution du contrat par la société TBS et non son absence de validité. Ces dispositions ne sont donc pas applicables.

Au terme de l'article 1302 du Code civil, "tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées".

L'article 1217 du Code civil dispose : "La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation,
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation,
- obtenir une réduction du prix,
- provoquer la résolution du contrat,
- demander réparation des conséquences de l'inexécution."

Dans les motifs de ses écritures, l'appelante se prévaut essentiellement des règles de la répétition de l'indu (pages 14 et 16 de ses conclusions), en indiquant que même dans le cadre d'un recours cambiaire, nul ne peut être équitablement condamné à régler une prestation qui n'aurait pas été exécutée alors qu'elle constitue l'exacte contrepartie de ce paiement, autrement dit sa cause, et qu'il y a dès lors matière à répétition de l'indu.

Néanmoins, les règles de l'application de l'indu s'appliquent lorsqu'une personne a payé une dette qui n'existe pas ou a payé une dette qui existe mais alors qu'il n'était pas débiteur ou bien que celui ayant reçu paiement n'était pas créancier. Elles ne s'appliquent donc en principe pas quand ce qui a été reçu était dû en application d'un contrat, sauf annulation ou résolution ultérieure du contrat.

Au cas particulier, la société OBM ne conteste pas avoir signé le devis du 10 septembre 2018 et il ressort des échanges de SMS entre les parties retranscrits dans le procès-verbal du 3 juillet 2019 par Maître [B] huissier de justice à Paris (pièce 30, page 36 SMS du 27 décembre 2018 adressé par OBM : "tu as des news pour [Localité 3] ?" ; TBS : "oui c'est signé"), ainsi que des courriels adressés par M. [X], économiste de la construction au sein d'OBM à M. [G], salarié technico commercial au sein de TBS (pièces 21 à 25) qu'il y a bien eu des relations entre les parties s'inscrivant dans la suite de ce devis signé, c'est à dire des relations contractuelles.

Elle ne conteste pas non plus avoir accepté le 20 décembre 2018 les trois lettres de change au titre de son obligation à paiement des prestations incombant à la société TBS et elle ne sollicite ni la résolution du contrat, ni son annulation.

Les règles de la répétition de l'indu n'ont donc pas vocation à s'appliquer.

Par ailleurs, l'appelante ne soutient pas clairement que la somme de 192.000? dont elle demande reconventionnellement le paiement correspondrait à des dommages et intérêts dus en raison de l'inexécution par la société TBS de ses obligations.

A titre surabondant, la cour relève que l'inexécution de ses obligations par la société TBS, telle qu'alléguée par la société OBM n'apparaît pas établie pour les raisons suivantes.

L'appelante produit de nombreuses pièces pour établir qu'elle a par elle-même recueilli les offres des sous traitants (ses pièces 71à 74), dressé les plans d'étude (ses pièces 55 à 64), rédigé les cahiers des clauses techniques particulières (ses pièces 11, 42, 46), établi la décomposition du prix global (sa pièce 35) et sollicité les pièces à fournir pour la phase d'avant projet définitif.

Néanmoins, ainsi que l'a retenu à juste titre le tribunal, le contenu précis des prestations incombant à la société TBS n'est pas clairement établi, de même que la période au cours de laquelle elles devaient être effectuées.

En premier lieu, même si le devis confie à la société TBS "le traitement technico commercial du dossier Ecole [Établissement 1] au [Localité 3], la préparation technique du dossier et la recherche de prix et finalisations", il ressort des conclusions des parties et de l'attestation établi par M. [X], économiste de la construction au sein de la société OBM, que la société TBS était uniquement chargée d'une mission "d'aide" ou "d'assistance" sur ces trois points.

Les contours exacts de cette mission d'aide ne sont pas précisés et notamment, il ne ressort d'aucune pièce que la société TBS était chargée de recueillir les offres des sous- traitants, dresser les plans d'étude, rédiger les cahiers des clauses techniques particulières (ses pièces 11, 42, 46) établir la décomposition du prix global et obtenir les pièce à fournier pour l'avant projet définitif. Le fait que la société OBM ait réalisées ces démarches n'établit donc pas que TBS n'a pas exécuté ses obligations.

Une partie importante de ces démarches a d'ailleurs été réalisée par la société OBM en janvier, février et mars 2019, c'est à dire après avoir été officiellement déclarée attributaire du marché et pour partie, après qu'elle ait dénoncé le contrat par courrier du 21 février 2021, de sorte que la société TBS ne pouvait de toute façon plus intervenir (ses pièces 19 à 32, 41 à 50, 52 à 54).

Or, il ressort du propre planning relatif au chantier litigieux produit par l'appelante en pièce 87 que la "période supposée d'intervention de TBS" se situait de septembre à novembre 2018 uniquement. Elle ne peut donc lui reprocher de ne pas avoir accompli de diligences postérieurement à cette période, ni affirmer sans en justifier, qu'elle aurait été contrainte d'accepter à l'avance dès le 20 décembre 2018, un paiement par lettres de change.

En second lieu, ainsi que l'a retenu à juste titre le premier juge, il ne peut être affirmé que la société TBS n'a accompli aucune des prestations portées à son devis au regard des échanges de courriels et de SMS intervenus entre les parties. Ainsi, il ressort des pièces 21 à 25 produites par l'intimée que M. [X], salarié d'OBM a adressé divers éléments à la société TBS (M. [G]) pour connaître les prix et il n'est pas allégué par la société OBM que la société TBS n'aurait pas répondu à ces demandes précises. De même, il ressort du constat d'huissier produit en pièce 30 (page 24) que M. [V] [G] adresse le 13 mai 2018, soit la veille du jour de l'envoi du courrier par la ville à la société OBM lui indiquant qu'elle est pressentie pour recevoir le marché, le SMS : "c'est gagné", auquel M. [Z] (directeur commercial au sein de la société OBM) répond : "oui visiblement bravo et merci [V]", message de remerciement que la société OBM n'aurait sans doute pas adressé si la société TBS n'avait rien fait ainsi qu'elle l'indique aujourd'hui.

En trosième lieu, la cour s'étonne, comme les premiers juges avant elle, qu'alors même que la société OBM évoque dans son courrier du 21 février 2019 les "carences" de la société TBS qui n'a exécuté que "très partiellement" ses prestations, elle n'a jamais adressé à la société TBS avant cette lettre, le moindre courrier ou courriel de relance, de réclamation ou de mise en demeure d'exécution de ses obligations contractuelles et a honoré sans difficulté la première lettre de change, faisant opposition aux deux autres traites le 21 février 2019 seulement.

Pour ces motifs ajoutés à ceux des premiers juges, que la cour adopte, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société OBM de ses demandes de remboursement de la somme de 48.000? et de ses demandes reconventionnelles et subsidiaires, et de débouter l'appelante de sa demande en paiement de la somme de 192.000?.

Sur les autres demandes

La condamnation de la société OBM au paiement des sommes de 48.000 ? et 96.000? outre les intérêts au taux légal au titre des deuxième et troisième lettres de change étant confirmée et la demande de condamnation à hauteur de 192.000? formée par la société OBM contre la société TBS étant rejetée, les demandes de mainlevée de la saisie conservatoire et de compensation formées par l'appelante seront aussi rejetées.

Cette dernière succombant en son appel, elle doit être condamnée aux entiers dépens d'appel et au versement à l'intimée d'une somme de 3500? sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions critiquées ;

Y ajoutant,

- Déboute la société OBM Construction de toutes ses demandes ;

- Condamne la société OBM Construction à verser à la société Technologie du bâtiment et services (TBS) une indemnité de 3500 ? au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société OBM Construction aux dépens.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 19/037961
Date de la décision : 24/06/2021
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2021-06-24;19.037961 ?
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