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30/04/2020 | FRANCE | N°19/009871

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 30 avril 2020, 19/009871


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 30/04/2020
Me Jean-philippe VASLIN
la SCP CEBRON DE LISLE, BENZEKRI
ARRÊT du : 30 AVRIL 2020

No : 69 - 20
No RG 19/00987 - No Portalis
DBVN-V-B7D-F4SF

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 18 Janvier 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265233404756486

Monsieur B... V...
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Jean-Philippe VASLIN, avocat au barreau de TOU

RS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265249488114929

SA BANQUE C...
Prise en la personne de ses repr...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 30/04/2020
Me Jean-philippe VASLIN
la SCP CEBRON DE LISLE, BENZEKRI
ARRÊT du : 30 AVRIL 2020

No : 69 - 20
No RG 19/00987 - No Portalis
DBVN-V-B7D-F4SF

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 18 Janvier 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265233404756486

Monsieur B... V...
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Jean-Philippe VASLIN, avocat au barreau de TOURS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265249488114929

SA BANQUE C...
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège social [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Gérard CEBRON DE LISLE, membre de la SCP CEBRON DE LISLE-BENZEKRI, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 22 Mars 2019
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 09 janvier 2020 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 27 FEVRIER 2020, à 9 heures 30, devant Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Nathalie MICHEL, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le 30 AVRIL 2020 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE :

Le 31 janvier 2014, la SARL Amace, représentée par son gérant M. B... V..., a ouvert en les livres de la SA Banque C... (la banque) un compte courant professionnel.

Suivant acte du 19 février 2014, M. B... V... s'est porté caution solidaire des sommes pouvant être dues à la banque par la société Amace, dans la limite de 32500euros en principal, intérêts et pénalités de retard, et ce pour une durée de dix ans.

Selon acte sous seing privé du 26 février 2014, la banque a consenti à la société Amace un prêt destiné à financer l'acquisition d'un véhicule utilitaire d'un montant de 16500euros, remboursable en 24 mensualités avec intérêts au taux nominal de 2,05 % l'an.

Les 29 décembre 2014 et 1er février 2015, la société Amace a par ailleurs successivement souscrit deux billets à ordre d'un montant respectif de 40000et 10000euros.

Selon jugement du 13 octobre 2015, le tribunal de commerce de Tours a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Amace.

La banque a déclaré une créance de 65771,99euros au passif de ladite liquidation judiciaire.

Après avoir vainement mis en demeure M. V..., par courrier recommandé du 10 novembre 2015 réceptionné le 16 novembre suivant, de lui régler, dans la limite de son engagement de caution, la somme de 32500euros, la banque l'a fait assigner devant le tribunal de commerce de Tours à fin de l'entendre condamner, au principal, à lui régler ladite somme de 32500euros.

Par jugement du 18 janvier 2019, le tribunal a :

-débouté Monsieur B... V... de l'ensemble de ses demandes ;
-dit que le cautionnement du 19 février 2014 de 32500 ? n'est pas disproportionné ;
-condamné Monsieur B... V... à régler la somme de 32500 ? à la Banque C... ;
-condamné Monsieur B... V... à payer à la Banque C... la somme de 1000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-condamné Monsieur B... V... aux dépens de l'instance.

M. V... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 22 mars 2019, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 21 juin 2019, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens, M. V... demande à la cour, au visa l'article L.341-4 du code de la consommation pris dans sa rédaction antérieure au 1er juillet 2016, remplacé par l'article L.332-1, de :

-le dire bien fondé en son appel ;
-réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tours le 18 janvier 2019 ;
En conséquence, et statuant de nouveau,
A titre principal,
-constater que l'acte de cautionnement souscrit par Monsieur B... V... en date du 19 février 2014 à hauteur de 32500 euros était manifestement disproportionné à ses revenus et biens immobiliers, au moment de sa conclusion ;
-constater que la Banque C... ne démontre pas la capacité actuelle de Monsieur B... V... à faire face à son engagement ;
-dire et juger que la Banque C... ne peut se prévaloir des engagements de caution de Monsieur B... V..., cette dernière étant déchue de son droit de poursuite ;
En tout état de cause,
-condamner la Banque C... aux entiers dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 5000 euros conformément à l'article 700 du code de procédure civile

Dans ses dernières conclusions notifiées le 21 août 2019, auxquelles il est pareillement renvoyé pour l'exposé de ses moyens, la SA Banque C... demande à la cour, au visa des articles 2288, 2292, 2293 et 2298 du code civil, L. 332 1 du code de la consommation, de :

-dire que Monsieur B... V... est mal fondé en son appel et en conséquence, le débouter de l'ensemb1e de ses demandes
-confirmer le jugement entrepris et confirmer le fait que le cautionnement du 19 février 2014
de 32 500 euros n'est pas disproportionné
En conséquence :
-condamner Monsieur B... V... à lui régler la somme de 32 500 euros
-condamner Monsieur V... aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à lui verser la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 8 janvier 2020.

SUR CE, LA COUR :

Sur la disproportion manifeste de l'engagement de caution

Selon l'article L. 341-4 du code de la consommation, devenu l'article L. 332-1 du même code, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Au sens de ces dispositions, qui bénéficient tant aux cautions profanes qu'aux cautions averties, la disproportion s'apprécie à la date de conclusion du contrat de cautionnement au regard du montant de l'engagement ainsi souscrit et des biens et revenus de la caution, en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d'autres engagements de caution, dès lors que le créancier avait ou pouvait avoir connaissance de cet endettement.

C'est à la caution qui se prévaut des dispositions de l'article L. 332-1 de rapporter la preuve de la disproportion qu'elle invoque.

Le code de la consommation n'impose pas au créancier professionnel de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, mais s'il le fait, il est en droit de se fier aux renseignements communiqués par la caution, sauf existence d'anomalies apparentes.

Le créancier peut en outre démontrer que le patrimoine de la caution lui permettait de faire face à son obligation au moment où il l'a appelée en paiement.

En l'espèce, M. V... s'est porté caution solidaire le 19 février 2014 des engagements souscrits par la société dont il était le gérant, dans la limite de 32500 euros et pour une durée de dix ans, en signant le 15 février précédent une fiche de renseignements de solvabilité.

Sur cette fiche qu'il a certifiée exacte et sincère, M. V... a indiqué être marié sous le régime de la séparation de biens et avoir deux enfants à charge.

Concernant ses revenus, M. V... a indiqué percevoir un salaire annuel de 32000 euros, des allocations familiales d'un montant annuel de 2000euros, outre des revenus locatifs de 5184 euros par an.

A la rubrique «encours de crédit», M. V... a indiqué avoir souscrit deux prêts immobiliers : un prêt destiné à financer l'acquisition d'un appartement à [...], remboursable jusqu'en 2027 par mensualités de 600euros, dont l'encours au jour du cautionnement était de 92000euros ; un prêt destiné à financer l'acquisition de sa résidence principale de [...], remboursable jusqu'en 2033 par mensualités de 1000 euros, dont l'encours au jour de la souscription de l'engagement de caution était de 170000euros.

La rubrique «autres dettes» a été laissée vierge et à la rubrique «cautions données», M. V... a déclaré un encours de cautionnement de 30000euros, donné à la Banque populaire.

Concernant son patrimoine enfin, M. V... a déclaré un patrimoine exclusivement immobilier, composé d'une maison d'habitation située à [...], estimée à 190000 euros, et d'un appartement situé à [...] (à proximité de Rochefort) estimé quant à lui à 150000 euros.

S'agissant des engagements antérieurement conclus, il convient de rappeler que M. V..., tenu d'un devoir de loyauté à l'égard du créancier, ne peut se prévaloir d'engagements qu'il a omis de déclarer à la banque C... lorsqu'il a lui-même valorisé son patrimoine dans la fiche de renseignements, sauf à ce que ces engagements n'aient pu être ignorés par la banque.

Dans la rubrique consacrée aux cautionnements antérieurs, on l'a dit, M. V... a simplement mentionné l'existence d'un encours de cautionnement de 30000euros donné à la Banque populaire, qui correspond à l'engagement qu'il avait donné le 26 décembre 2013 à cette banque, en garantie de tous les engagements contractés par la société Amace dont il était le gérant.

Le silence de M. V... sur le cautionnement précédemment donné à la Banque populaire le 4 janvier 2013 à hauteur de 39000euros, comme sur celui consenti à la Société générale le 27 mars 2012 à hauteur de 9750euros, lui interdit d'opposer ces engagements à la Banque C..., dès lors qu'ils ne figurent pas sur la fiche de renseignement qu'il a certifiée exacte et que rien n'établit que l'intimée aurait pu en avoir connaissance.

Sur la valeur de son patrimoine immobilier, M. V... ne peut soutenir, pour cela seul qu'il était marié sous le régime de la séparation de biens, que la banque aurait dû s'assurer que la valeur des immeubles qu'il avait déclarée correspondait bien à ses droits «propres» dans les deux immeubles acquis en indivision avec son épouse, alors qu'il n'avait pas indiqué que les immeubles en cause appartenaient pour moitié à son épouse, que la fiche qu'il a renseignée seul, sans l'intervention de son épouse séparée de biens, ne concernait que sa situation personnelle et que, dans ces circonstances, la valeur du patrimoine qu'il a déclaré ne pouvait s'entendre que comme la valeur de son propre patrimoine et, partant, comme la valeur de ses droits indivis dans les immeubles en cause.

Etant rappelé que les revenus mensuels de M. V... étaient de l'ordre de 3265euros, qu'il remboursait des mensualités d'emprunt de 1600euros, qu'il partageait les charges de la vie courante avec son épouse à l'époque agent commercial, que le couple avait deux enfants à charge et que son patrimoine immobilier (actif net) au jour du cautionnement pouvait être évalué, comme l'ont retenu les premiers juges, à 78000euros (190000 + 150000 - 92000 – 170000), il n'apparaît pas que l'appelant, dont les encours antérieurs de cautionnement étaient de 30000euros, se trouvait, au moment où il a souscrit l'engagement litigieux à hauteur de 32500euros, dans l'impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et revenus.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions critiquées.

M. V..., qui succombe au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devra supporter les dépens de l'instance et régler à la banque, à qui il serait inéquitable de laisser la charge de la totalité de ses frais irrépétibles, une indemnité de 2500euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME en tous ses chefs critiqués la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE M. B... V... à payer à la SA Banque C... la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. B... V... aux dépens.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 19/009871
Date de la décision : 30/04/2020
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2020-04-30;19.009871 ?
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